1
M. de Montherlant,
le
sport et les jésuites (9 février 1924)a M. de Montherlant est cons
2
M. de Montherlant, le sport et
les
jésuites (9 février 1924)a M. de Montherlant est considéré par plu
3
par plusieurs comme l’un des héritiers de Barrès.
Le
rapprochement est peut-être prématuré, tout au plus peut-on dire qu’à
4
ut-être prématuré, tout au plus peut-on dire qu’à
l’
heure présente déjà, son œuvre, comme celle de Barrès, nous offre plus
5
u moins, cette inquiétude libératrice que produit
la
recherche de la vérité. Dès son premier livre, il s’est montré tout e
6
nquiétude libératrice que produit la recherche de
la
vérité. Dès son premier livre, il s’est montré tout entier, il a brav
7
out entier, il a bravement affirmé son unité. Car
le
temps n’est plus, où les jeunes gens se faisaient, avec sérieux, des
8
nt affirmé son unité. Car le temps n’est plus, où
les
jeunes gens se faisaient, avec sérieux, des âmes exceptionnellement c
9
langue plus compliquée encore et nuancée jusqu’à
l’
ennui. La guerre a donné le coup de grâce à cet esthétisme énervant qu
10
lus compliquée encore et nuancée jusqu’à l’ennui.
La
guerre a donné le coup de grâce à cet esthétisme énervant qu’on appel
11
ore et nuancée jusqu’à l’ennui. La guerre a donné
le
coup de grâce à cet esthétisme énervant qu’on appelle symbolisme ; et
12
appelle symbolisme ; et elle a donné naissance à
la
doctrine de M. de Montherlant, qui en est sortie toute formée et casq
13
t, qui en est sortie toute formée et casquée pour
la
lutte de l’après-guerre. ⁂ Deux philosophies, affirme-t-il, se disput
14
t sortie toute formée et casquée pour la lutte de
l’
après-guerre. ⁂ Deux philosophies, affirme-t-il, se disputent le monde
15
. ⁂ Deux philosophies, affirme-t-il, se disputent
le
monde. L’une vient de l’Orient, et insinue dans le monde romain les v
16
firme-t-il, se disputent le monde. L’une vient de
l’
Orient, et insinue dans le monde romain les virus du christianisme, de
17
e monde. L’une vient de l’Orient, et insinue dans
le
monde romain les virus du christianisme, de la Réforme, de la Révolut
18
ient de l’Orient, et insinue dans le monde romain
les
virus du christianisme, de la Réforme, de la Révolution et du romanti
19
ns le monde romain les virus du christianisme, de
la
Réforme, de la Révolution et du romantisme, les concepts de liberté e
20
ain les virus du christianisme, de la Réforme, de
la
Révolution et du romantisme, les concepts de liberté et de progrès, l
21
de la Réforme, de la Révolution et du romantisme,
les
concepts de liberté et de progrès, l’humanitarisme, le bolchévisme. L
22
omantisme, les concepts de liberté et de progrès,
l’
humanitarisme, le bolchévisme. L’autre philosophie est celle de l’anti
23
ncepts de liberté et de progrès, l’humanitarisme,
le
bolchévisme. L’autre philosophie est celle de l’antique Rome, qui a i
24
le bolchévisme. L’autre philosophie est celle de
l’
antique Rome, qui a inspiré le catholicisme, la Renaissance, le tradit
25
sophie est celle de l’antique Rome, qui a inspiré
le
catholicisme, la Renaissance, le traditionnisme et le nationalisme. L
26
de l’antique Rome, qui a inspiré le catholicisme,
la
Renaissance, le traditionnisme et le nationalisme. L’Orient efféminé
27
e, qui a inspiré le catholicisme, la Renaissance,
le
traditionnisme et le nationalisme. L’Orient efféminé ; — en face : l’
28
atholicisme, la Renaissance, le traditionnisme et
le
nationalisme. L’Orient efféminé ; — en face : l’Ordre romain. Or l’or
29
enaissance, le traditionnisme et le nationalisme.
L’
Orient efféminé ; — en face : l’Ordre romain. Or l’ordre, pour M. de M
30
le nationalisme. L’Orient efféminé ; — en face :
l’
Ordre romain. Or l’ordre, pour M. de Montherlant comme pour Maurras, e
31
’Orient efféminé ; — en face : l’Ordre romain. Or
l’
ordre, pour M. de Montherlant comme pour Maurras, est ce qu’il importe
32
u monde, qui n’est en rien différente de celle de
l’
Action française ; remarquons toutefois cette séparation, que Maurras
33
franchement, du catholicisme et du christianisme,
le
christianisme étant dans le même camp que la Réforme. M. de Montherla
34
et du christianisme, le christianisme étant dans
le
même camp que la Réforme. M. de Montherlant n’est décidément pas phil
35
sme, le christianisme étant dans le même camp que
la
Réforme. M. de Montherlant n’est décidément pas philosophe. Peut-être
36
s philosophe. Peut-être ne lui a-t-il manqué pour
le
devenir que le temps de méditer : il a quitté le collège jésuite pour
37
eut-être ne lui a-t-il manqué pour le devenir que
le
temps de méditer : il a quitté le collège jésuite pour la tranchée, p
38
le devenir que le temps de méditer : il a quitté
le
collège jésuite pour la tranchée, puis « le sport l’a saisi aux patte
39
de méditer : il a quitté le collège jésuite pour
la
tranchée, puis « le sport l’a saisi aux pattes de la guerre encore co
40
uitté le collège jésuite pour la tranchée, puis «
le
sport l’a saisi aux pattes de la guerre encore contus de huit coups d
41
collège jésuite pour la tranchée, puis « le sport
l’
a saisi aux pattes de la guerre encore contus de huit coups de griffes
42
tranchée, puis « le sport l’a saisi aux pattes de
la
guerre encore contus de huit coups de griffes et chaud de l’étreinte
43
ncore contus de huit coups de griffes et chaud de
l’
étreinte du fauve merveilleux ». Il n’a pas eu le temps de se ressaisi
44
l’étreinte du fauve merveilleux ». Il n’a pas eu
le
temps de se ressaisir, le sport prolongeant pour lui, d’une façon obs
45
illeux ». Il n’a pas eu le temps de se ressaisir,
le
sport prolongeant pour lui, d’une façon obsédante, le rythme de la gu
46
port prolongeant pour lui, d’une façon obsédante,
le
rythme de la guerre. Du moins a-t-il ainsi évité le choc fatal pour t
47
ant pour lui, d’une façon obsédante, le rythme de
la
guerre. Du moins a-t-il ainsi évité le choc fatal pour tant d’autres
48
rythme de la guerre. Du moins a-t-il ainsi évité
le
choc fatal pour tant d’autres du guerrier et du bourgeois. Dernièreme
49
rrier et du bourgeois. Dernièrement, il abandonna
le
stade et rentra dans le monde où nous vivons tous. Écœuré du désordre
50
ernièrement, il abandonna le stade et rentra dans
le
monde où nous vivons tous. Écœuré du désordre général, il cherche des
51
s, et nous tend les premiers qui lui tombent sous
la
main : le sport et la morale romaine. Dans sa hâte salvatrice, M. de
52
tend les premiers qui lui tombent sous la main :
le
sport et la morale romaine. Dans sa hâte salvatrice, M. de Montherlan
53
emiers qui lui tombent sous la main : le sport et
la
morale romaine. Dans sa hâte salvatrice, M. de Montherlant ne s’est m
54
ontrepoisons pouvaient être administrés ensemble.
L’
opération faite, il a pourtant fallu la justifier, ce qui n’a pas été
55
ensemble. L’opération faite, il a pourtant fallu
la
justifier, ce qui n’a pas été sans quelques tours de passe-passe de l
56
n peu intimidantes. Toute une partie du Paradis à
l’
ombre des épées 1, son dernier livre, est consacrée à « fondre dans un
57
consacrée à « fondre dans une unité supérieure »
l’
antinomie de l’esprit catholique et de l’esprit sportif. « On se fait
58
fondre dans une unité supérieure » l’antinomie de
l’
esprit catholique et de l’esprit sportif. « On se fait son unité comme
59
rieure » l’antinomie de l’esprit catholique et de
l’
esprit sportif. « On se fait son unité comme on peut », avoue-t-il fra
60
radoxal de vouloir unir dans une même philosophie
la
morale jésuite, faite de règles et de contraintes imposées dans le bu
61
, faite de règles et de contraintes imposées dans
le
but de restreindre la liberté et l’initiative individuelles, et la mo
62
e contraintes imposées dans le but de restreindre
la
liberté et l’initiative individuelles, et la morale des sports anglai
63
imposées dans le but de restreindre la liberté et
l’
initiative individuelles, et la morale des sports anglais, morale qui
64
ndre la liberté et l’initiative individuelles, et
la
morale des sports anglais, morale qui veut former des hommes maîtres
65
ment un des premiers Français qui ait compris que
le
but du sport n’est pas la performance, mais le style et la méthode, c
66
ais qui ait compris que le but du sport n’est pas
la
performance, mais le style et la méthode, c’est-à-dire la formation d
67
ue le but du sport n’est pas la performance, mais
le
style et la méthode, c’est-à-dire la formation du caractère, en défin
68
sport n’est pas la performance, mais le style et
la
méthode, c’est-à-dire la formation du caractère, en définitive. Mais
69
rmance, mais le style et la méthode, c’est-à-dire
la
formation du caractère, en définitive. Mais on peut oublier la partie
70
du caractère, en définitive. Mais on peut oublier
la
partie doctrinaire de cette œuvre, elle ne lui est pas indispensable
71
« Ces simplifications valent ce que valent toutes
les
simplifications, qu’on les appelle ou non idées générales, et j’avoue
72
t ce que valent toutes les simplifications, qu’on
les
appelle ou non idées générales, et j’avoue bien volontiers qu’il n’es
73
e bien volontiers qu’il n’est pas une opinion sur
le
monde à laquelle je ne préfère le monde ». Je préfère à la dogmatique
74
une opinion sur le monde à laquelle je ne préfère
le
monde ». Je préfère à la dogmatique de M. de Montherlant son admirabl
75
à laquelle je ne préfère le monde ». Je préfère à
la
dogmatique de M. de Montherlant son admirable lyrisme de poète du sta
76
préfère à la dogmatique de M. de Montherlant son
admirable
lyrisme de poète du stade. En un style d’une fermeté presque brutale
77
et calme » des « grands corps athlétiques ». Sur
le
stade au soleil se déploient les équipes, et l’équipier Montherlant l
78
thlétiques ». Sur le stade au soleil se déploient
les
équipes, et l’équipier Montherlant les contemple, ému de « cette ivre
79
r le stade au soleil se déploient les équipes, et
l’
équipier Montherlant les contemple, ému de « cette ivresse qui naît de
80
déploient les équipes, et l’équipier Montherlant
les
contemple, ému de « cette ivresse qui naît de l’ordre », et aussi par
81
les contemple, ému de « cette ivresse qui naît de
l’
ordre », et aussi parfois, de la pensée que « sur ces corps de l’entre
82
resse qui naît de l’ordre », et aussi parfois, de
la
pensée que « sur ces corps de l’entre-deux-guerres, … cinq sur dix so
83
ussi parfois, de la pensée que « sur ces corps de
l’
entre-deux-guerres, … cinq sur dix sont désignés… ». Voici passer un c
84
Voici passer un coureur : « À peine a-t-il touché
la
piste d’herbe, c’est une allégresse héroïque qu’infuse à son corps la
85
est une allégresse héroïque qu’infuse à son corps
la
douce matière. L’air et le sol, dieux rivaux, se le disputent, et il
86
héroïque qu’infuse à son corps la douce matière.
L’
air et le sol, dieux rivaux, se le disputent, et il oscille entre l’un
87
qu’infuse à son corps la douce matière. L’air et
le
sol, dieux rivaux, se le disputent, et il oscille entre l’un et l’aut
88
douce matière. L’air et le sol, dieux rivaux, se
le
disputent, et il oscille entre l’un et l’autre. Ainsi mon art, entre
89
lée, bondissante et posée, est pleine du désir de
l’
air. Danse-t-il sur une musique que je n’entends pas ? » — Mais plus q
90
musique que je n’entends pas ? » — Mais plus que
le
corps en mouvement, c’est la domination de la raison sur ce corps qui
91
? » — Mais plus que le corps en mouvement, c’est
la
domination de la raison sur ce corps qui est exaltante, et c’est cett
92
que le corps en mouvement, c’est la domination de
la
raison sur ce corps qui est exaltante, et c’est cette domination qui
93
est exaltante, et c’est cette domination qui est
le
but véritable du sport. On accepte une règle ; on l’assimile, à tel p
94
but véritable du sport. On accepte une règle ; on
l’
assimile, à tel point qu’elle n’est plus une entrave à la violence ani
95
ile, à tel point qu’elle n’est plus une entrave à
la
violence animale déchaînée dans le corps du joueur à la vue de la pra
96
une entrave à la violence animale déchaînée dans
le
corps du joueur à la vue de la prairie rase où rebondit un ballon. Si
97
ale déchaînée dans le corps du joueur à la vue de
la
prairie rase où rebondit un ballon. Si l’on considère la vie sociale
98
vue de la prairie rase où rebondit un ballon. Si
l’
on considère la vie sociale comme un jeu sérieux dont on respecte les
99
rie rase où rebondit un ballon. Si l’on considère
la
vie sociale comme un jeu sérieux dont on respecte les règles, non plu
100
vie sociale comme un jeu sérieux dont on respecte
les
règles, non plus comme une lutte sauvage et déloyale, la morale d’équ
101
es, non plus comme une lutte sauvage et déloyale,
la
morale d’équipe devient toute la morale, et les qualités indispensabl
102
age et déloyale, la morale d’équipe devient toute
la
morale, et les qualités indispensables au bon équipier deviennent les
103
e, la morale d’équipe devient toute la morale, et
les
qualités indispensables au bon équipier deviennent les qualités du pa
104
ualités indispensables au bon équipier deviennent
les
qualités du parfait citoyen : juste vision de la réalité, abnégation,
105
les qualités du parfait citoyen : juste vision de
la
réalité, abnégation, sentiment du devoir de chacun envers l’ensemble
106
abnégation, sentiment du devoir de chacun envers
l’
ensemble (Montherlant insiste plutôt sur le sentiment des hiérarchies
107
envers l’ensemble (Montherlant insiste plutôt sur
le
sentiment des hiérarchies que sur celui de la solidarité, comme bien
108
sur le sentiment des hiérarchies que sur celui de
la
solidarité, comme bien l’on pense). Enfin, enseignement plus général
109
rchies que sur celui de la solidarité, comme bien
l’
on pense). Enfin, enseignement plus général de la morale sportive : «
110
l’on pense). Enfin, enseignement plus général de
la
morale sportive : « la règle de rester en dedans de son action, appli
111
seignement plus général de la morale sportive : «
la
règle de rester en dedans de son action, application de l’immense axi
112
de rester en dedans de son action, application de
l’
immense axiome formulé par Hésiode et qui gouverna le monde ancien : L
113
mmense axiome formulé par Hésiode et qui gouverna
le
monde ancien : La moitié est plus grande que le tout ». Le sport comm
114
ulé par Hésiode et qui gouverna le monde ancien :
La
moitié est plus grande que le tout ». Le sport comme un apprentissage
115
a le monde ancien : La moitié est plus grande que
le
tout ». Le sport comme un apprentissage de la vie : tout servira plus
116
ancien : La moitié est plus grande que le tout ».
Le
sport comme un apprentissage de la vie : tout servira plus tard : Ô
117
que le tout ». Le sport comme un apprentissage de
la
vie : tout servira plus tard : Ô garçons, il y a un brin du myrte ci
118
de laurier. Vous n’êtes pas couronnés d’olivier.
La
main connaît la main dans la prise du témoin. L’épaule connaît l’épau
119
s n’êtes pas couronnés d’olivier. La main connaît
la
main dans la prise du témoin. L’épaule connaît l’épaule dans le talon
120
couronnés d’olivier. La main connaît la main dans
la
prise du témoin. L’épaule connaît l’épaule dans le talonnage du ballo
121
La main connaît la main dans la prise du témoin.
L’
épaule connaît l’épaule dans le talonnage du ballon. Le regard connaît
122
la main dans la prise du témoin. L’épaule connaît
l’
épaule dans le talonnage du ballon. Le regard connaît le regard dans l
123
a prise du témoin. L’épaule connaît l’épaule dans
le
talonnage du ballon. Le regard connaît le regard dans la course d’équ
124
ule connaît l’épaule dans le talonnage du ballon.
Le
regard connaît le regard dans la course d’équipe. Le cœur connaît la
125
le dans le talonnage du ballon. Le regard connaît
le
regard dans la course d’équipe. Le cœur connaît la présence muette et
126
nnage du ballon. Le regard connaît le regard dans
la
course d’équipe. Le cœur connaît la présence muette et sûre. Toutes c
127
regard connaît le regard dans la course d’équipe.
Le
cœur connaît la présence muette et sûre. Toutes ces choses ne se font
128
e regard dans la course d’équipe. Le cœur connaît
la
présence muette et sûre. Toutes ces choses ne se font pas en vain. Le
129
t sûre. Toutes ces choses ne se font pas en vain.
Le
chef se dresse entre les dix qui sont à lui. Il dit : « Je ne demande
130
s ne se font pas en vain. Le chef se dresse entre
les
dix qui sont à lui. Il dit : « Je ne demande pas qu’on m’aime. Je dem
131
t purs courages, donnez-moi votre silence jusqu’à
l’
heure. Que je taise votre mot de ralliement, paradis à l’ombre des épé
132
. Que je taise votre mot de ralliement, paradis à
l’
ombre des épées. Rien de moins artificiellement moderne que ce lyrism
133
nt moderne que ce lyrisme sobre et prenant : « Si
l’
on s’échauffe, s’échauffer sur de la précision. » On évitera ainsi tou
134
renant : « Si l’on s’échauffe, s’échauffer sur de
la
précision. » On évitera ainsi tout niais romantisme. Je sais bien ce
135
ais romantisme. Je sais bien ce qu’on objectera :
le
sport ainsi compris, plus que l’apprentissage de la vie, est l’appren
136
u’on objectera : le sport ainsi compris, plus que
l’
apprentissage de la vie, est l’apprentissage de la guerre, dira-t-on.
137
sport ainsi compris, plus que l’apprentissage de
la
vie, est l’apprentissage de la guerre, dira-t-on. M. de Montherlant r
138
compris, plus que l’apprentissage de la vie, est
l’
apprentissage de la guerre, dira-t-on. M. de Montherlant répondra : no
139
l’apprentissage de la vie, est l’apprentissage de
la
guerre, dira-t-on. M. de Montherlant répondra : non, car la faiblesse
140
dira-t-on. M. de Montherlant répondra : non, car
la
faiblesse est le péché capital pour le sportif. Or c’est la faiblesse
141
Montherlant répondra : non, car la faiblesse est
le
péché capital pour le sportif. Or c’est la faiblesse « qui fait lever
142
: non, car la faiblesse est le péché capital pour
le
sportif. Or c’est la faiblesse « qui fait lever la haine ». « La faib
143
se est le péché capital pour le sportif. Or c’est
la
faiblesse « qui fait lever la haine ». « La faiblesse est mère du com
144
e sportif. Or c’est la faiblesse « qui fait lever
la
haine ». « La faiblesse est mère du combat. » C’est donc à un lacédém
145
c’est la faiblesse « qui fait lever la haine ». «
La
faiblesse est mère du combat. » C’est donc à un lacédémonisme renouve
146
mpérée de raison. Ce qu’on en peut retenir, c’est
la
méthode, car je crois qu’elle sert mieux la démocratie que l’Église r
147
c’est la méthode, car je crois qu’elle sert mieux
la
démocratie que l’Église romaine, quoi qu’en pense M. de Montherlant.
148
car je crois qu’elle sert mieux la démocratie que
l’
Église romaine, quoi qu’en pense M. de Montherlant. Et voici, ô parado
149
Kant qui écrit : « C’est sur des maximes, non sur
la
discipline, qu’il faut fonder la conduite des jeunes gens : celle-ci
150
maximes, non sur la discipline, qu’il faut fonder
la
conduite des jeunes gens : celle-ci empêche les abus, mais celles-là
151
er la conduite des jeunes gens : celle-ci empêche
les
abus, mais celles-là forment l’esprit. » M. de Montherlant illustre s
152
celle-ci empêche les abus, mais celles-là forment
l’
esprit. » M. de Montherlant illustre sa propre pensée de cette citatio
153
rait appeler une « morale constructive » : porter
l’
effort sur ce qui doit être, et ce qui ne doit pas être tombera de soi
154
e qui ne doit pas être tombera de soi-même. Ainsi
l’
athlète à l’entraînement ne s’épuise-t-il pas à combattre certaines fa
155
t pas être tombera de soi-même. Ainsi l’athlète à
l’
entraînement ne s’épuise-t-il pas à combattre certaines faiblesses : i
156
certaines faiblesses : il développe ses qualités,
le
reste s’arrange de soi-même. ⁂ M. de Montherlant, qui a quitté le sta
157
ge de soi-même. ⁂ M. de Montherlant, qui a quitté
le
stade, se rendra mieux compte à distance de la contradiction sur laqu
158
té le stade, se rendra mieux compte à distance de
la
contradiction sur laquelle est bâtie son œuvre. L’intéressant sera de
159
a contradiction sur laquelle est bâtie son œuvre.
L’
intéressant sera de voir ce qu’il sacrifiera, de la morale sportive ou
160
’intéressant sera de voir ce qu’il sacrifiera, de
la
morale sportive ou de la morale jésuite. Mais enfin, voici un homme,
161
ce qu’il sacrifiera, de la morale sportive ou de
la
morale jésuite. Mais enfin, voici un homme, et non plus seulement un
162
me de lettres. Un homme en qui s’équilibrent déjà
l’
enthousiasme d’une jeunesse saine et la retenue de l’âge mûr, cette «
163
brent déjà l’enthousiasme d’une jeunesse saine et
la
retenue de l’âge mûr, cette « limitation » que lui ont enseigné le sp
164
nthousiasme d’une jeunesse saine et la retenue de
l’
âge mûr, cette « limitation » que lui ont enseigné le sport et les anc
165
ge mûr, cette « limitation » que lui ont enseigné
le
sport et les anciens. J’admets que ses « idées générales » ne vaillen
166
e « limitation » que lui ont enseigné le sport et
les
anciens. J’admets que ses « idées générales » ne vaillent rien2 ; sa
167
morale virile nous est néanmoins plus proche que
la
sensualité vaguement chrétienne de tel autre écrivain catholique. Et
168
e. Et son lyrisme, encore un peu brutal, il saura
le
dompter, et atteindre au classicisme véritable. Voici un constructeur
169
ut lutter contre lui, nous savons qu’il observera
les
règles. Saluons-le donc du salut des équipes avant le match : « En l’
170
, nous savons qu’il observera les règles. Saluons-
le
donc du salut des équipes avant le match : « En l’honneur d’Henry de
171
ègles. Saluons-le donc du salut des équipes avant
le
match : « En l’honneur d’Henry de Montherlant, hip, hip, hurrah ! »
172
e donc du salut des équipes avant le match : « En
l’
honneur d’Henry de Montherlant, hip, hip, hurrah ! » 1. Éditions Gra
173
hip, hurrah ! » 1. Éditions Grasset, Paris. 2.
L’
attitude de M. de Montherlant légitime une telle « simplification ».
174
elle « simplification ». a. « M. de Montherlant,
le
sport et les jésuites », La Semaine littéraire, Genève, n° 1571, 9 fé
175
ification ». a. « M. de Montherlant, le sport et
les
jésuites », La Semaine littéraire, Genève, n° 1571, 9 février 1924, p
176
« M. de Montherlant, le sport et les jésuites »,
La
Semaine littéraire, Genève, n° 1571, 9 février 1924, p. 63-65.
177
Conférence de Conrad Meili sur «
Les
ismes dans la peinture moderne » (30 octobre 1924)b Lundi soir, da
178
Conférence de Conrad Meili sur « Les ismes dans
la
peinture moderne » (30 octobre 1924)b Lundi soir, dans la salle du
179
moderne » (30 octobre 1924)b Lundi soir, dans
la
salle du Lyceum, M. Conrad Meili parla des écoles qui représentent la
180
M. Conrad Meili parla des écoles qui représentent
la
peinture française, des débuts du xixe siècle à nos jours. Partis du
181
ours. Partis du classicisme de David et d’Ingres,
les
peintres français ont accompli, durant le xixe siècle, une explorati
182
ngres, les peintres français ont accompli, durant
le
xixe siècle, une exploration merveilleuse dans les domaines du roman
183
e xixe siècle, une exploration merveilleuse dans
les
domaines du romantisme, du naturalisme, de l’impressionnisme, pour ab
184
ns les domaines du romantisme, du naturalisme, de
l’
impressionnisme, pour aboutir enfin dans ces impasses : cubisme et fut
185
r enfin dans ces impasses : cubisme et futurisme.
Les
voici revenus, après cent-vingt-cinq ans, à peu près à leur point de
186
r technique (contrairement à ce que pense souvent
le
public), ils préparent l’avènement d’un classicisme nouveau. M. Meili
187
à ce que pense souvent le public), ils préparent
l’
avènement d’un classicisme nouveau. M. Meili a mis en évidence cette c
188
uveau. M. Meili a mis en évidence cette courbe de
la
peinture moderne avec une netteté et un relief remarquable. Les œuvre
189
oderne avec une netteté et un relief remarquable.
Les
œuvres de cet artiste, qu’on a pu voir à la Rose d’Or témoignaient de
190
ble. Les œuvres de cet artiste, qu’on a pu voir à
la
Rose d’Or témoignaient de ces mêmes qualités : car la façon de peindr
191
ose d’Or témoignaient de ces mêmes qualités : car
la
façon de peindre correspond à la façon de penser du peintre. Souhaito
192
s qualités : car la façon de peindre correspond à
la
façon de penser du peintre. Souhaitons d’entendre encore M. Meili. Es
193
endre encore M. Meili. Est-il besoin de souligner
l’
importance de telles prises de contact entre artiste et public ? b.
194
Henry de Montherlant, Chant funèbre pour
les
morts de Verdun (mars 1925)a Henry de Montherlant, héritier d’une
195
leresque, mène sa vie comme une ardente aventure.
Les
épisodes s’appellent : collège, guerre, sport… la Relève du Matin, le
196
es épisodes s’appellent : collège, guerre, sport…
la
Relève du Matin, le Songe, les Olympiques. Et voici le Chant funèbre,
197
ent : collège, guerre, sport… la Relève du Matin,
le
Songe, les Olympiques. Et voici le Chant funèbre, adieu à la guerre e
198
ège, guerre, sport… la Relève du Matin, le Songe,
les
Olympiques. Et voici le Chant funèbre, adieu à la guerre et aux jeux,
199
lève du Matin, le Songe, les Olympiques. Et voici
le
Chant funèbre, adieu à la guerre et aux jeux, avant de partir pour de
200
es Olympiques. Et voici le Chant funèbre, adieu à
la
guerre et aux jeux, avant de partir pour de nouvelles conquêtes. Terr
201
r pour ses erreurs plus encore que pour celles de
l’
adversaire, ce qui est beaucoup dire. Il y avait dans le Paradis je ne
202
rsaire, ce qui est beaucoup dire. Il y avait dans
le
Paradis je ne sais quel relent de barbarie, un assez malsain goût du
203
alsain goût du sang. Tout cela s’est purifié dans
le
Chant funèbre. Et une phrase telle que « … Nous sommes sûrs de ne pas
204
e, à notre place modeste, si peu que ce soit pour
la
paix », c’est une affirmation qui d’un coup condamne beaucoup d’antér
205
pour avoir contemplé Verdun, en tête à tête avec
le
génie de la mort. Mais alors, à quoi sert d’exalter, d’une si émouvan
206
contemplé Verdun, en tête à tête avec le génie de
la
mort. Mais alors, à quoi sert d’exalter, d’une si émouvante sorte, le
207
à quoi sert d’exalter, d’une si émouvante sorte,
les
soldats déjà légendaires de Verdun, et ce « haut ton de vie » qu’ils
208
justifie son livre : « Ranimons ces horreurs pour
les
vouloir éviter, et ces grandeurs pour n’en pas trop descendre ». N’es
209
ce pas une éclatante mise au point ? Et venant de
l’
auteur du Songe, d’un de ces hommes qui « descendirent » du front dans
210
cette absence de haine ; cette épouvante, devant
la
guerre… proviennent de plus d’humanité ou de moins de santé ». À main
211
et repart. Vers quels buts ? On verra plus tard.
L’
urgent c’est d’avancer. Et l’on atteindra peut-être ces régions élevée
212
On verra plus tard. L’urgent c’est d’avancer. Et
l’
on atteindra peut-être ces régions élevées où les éléments contraires
213
t l’on atteindra peut-être ces régions élevées où
les
éléments contraires s’unissent dans la grandeur. La paix qu’il appell
214
levées où les éléments contraires s’unissent dans
la
grandeur. La paix qu’il appelle, c’est autre chose que l’absence de g
215
éléments contraires s’unissent dans la grandeur.
La
paix qu’il appelle, c’est autre chose que l’absence de guerre, c’est
216
eur. La paix qu’il appelle, c’est autre chose que
l’
absence de guerre, c’est une paix que travaillerait le levain des vert
217
sence de guerre, c’est une paix que travaillerait
le
levain des vertus guerrières. « Il faut que la paix, ce soit vivre. »
218
it le levain des vertus guerrières. « Il faut que
la
paix, ce soit vivre. » Par tout un livre libéré de souvenirs héroïque
219
e souvenirs héroïques, peut-être trop grands pour
la
paix, c’est vers de plus sereines exaltations qu’il va porter son ard
220
ations qu’il va porter son ardeur. Il va chercher
le
souvenir de l’aventure antique, et dans ce qui fut Rome ou la Grèce,
221
porter son ardeur. Il va chercher le souvenir de
l’
aventure antique, et dans ce qui fut Rome ou la Grèce, revivre sa trad
222
de l’aventure antique, et dans ce qui fut Rome ou
la
Grèce, revivre sa tradition. Toute son œuvre pourrait se définir : la
223
tradition. Toute son œuvre pourrait se définir :
la
lutte d’un tempérament avec la réalité. Tantôt c’est l’un qui veut pl
224
rrait se définir : la lutte d’un tempérament avec
la
réalité. Tantôt c’est l’un qui veut plier l’autre à sa violence — le
225
c’est l’un qui veut plier l’autre à sa violence —
le
Paradis —, tantôt c’est l’autre qui impose son absolu. Une soumission
226
rement consentie, voilà ce que nous admirons dans
le
Chant funèbre. Ce mot de grandeur revient souvent lorsqu’on parle de
227
rle de cette œuvre : je ne sais s’il faut en voir
la
raison dans la force de la personnalité révélée ou dans la noblesse d
228
vre : je ne sais s’il faut en voir la raison dans
la
force de la personnalité révélée ou dans la noblesse de sa soumission
229
sais s’il faut en voir la raison dans la force de
la
personnalité révélée ou dans la noblesse de sa soumission. Périlleuse
230
dans la force de la personnalité révélée ou dans
la
noblesse de sa soumission. Périlleuse carrière de la grandeur où Mont
231
noblesse de sa soumission. Périlleuse carrière de
la
grandeur où Montherlant est entré de plain-pied, en même temps que da
232
t est entré de plain-pied, en même temps que dans
la
guerre. Que de sacrifices ne lui devra-t-il pas offrir ainsi les roma
233
de sacrifices ne lui devra-t-il pas offrir ainsi
les
romans « intéressants » ou « curieux » ; le « grand lyrisme » à la Ch
234
insi les romans « intéressants » ou « curieux » ;
le
« grand lyrisme » à la Chateaubriand, voire à la Barrès, dont il est
235
essants » ou « curieux » ; le « grand lyrisme » à
la
Chateaubriand, voire à la Barrès, dont il est capable et qu’il lui fa
236
le « grand lyrisme » à la Chateaubriand, voire à
la
Barrès, dont il est capable et qu’il lui faudra livrer au « feu de vé
237
r, s’il veut rester digne de son rôle et vraiment
le
coryphée d’une génération casquée. Feu consumateur de toute faiblesse
238
en notre siècle, qu’elle paraît parfois, lorsque
la
tourmente humaine ne la moleste ni ne l’avive plus, cruelle et désolé
239
e paraît parfois, lorsque la tourmente humaine ne
la
moleste ni ne l’avive plus, cruelle et désolée comme cette « flamme p
240
lorsque la tourmente humaine ne la moleste ni ne
l’
avive plus, cruelle et désolée comme cette « flamme pensante » dans l’
241
e et désolée comme cette « flamme pensante » dans
l’
ossuaire de Douaumont. Puis la vie l’exalte de nouveau d’un large vent
242
mme pensante » dans l’ossuaire de Douaumont. Puis
la
vie l’exalte de nouveau d’un large vent de joie. a. « Henry de Mont
243
sante » dans l’ossuaire de Douaumont. Puis la vie
l’
exalte de nouveau d’un large vent de joie. a. « Henry de Montherlant
244
a. « Henry de Montherlant : Chant funèbre pour
les
morts de Verdun (B. Grasset, Paris) », Bibliothèque universelle et Re
245
isme (juin 1925)b Sous une « vague de rêves »,
la
logique, dernier agent de liaison de nos esprits, va périr. C’est du
246
ns ce que proclame M. Breton en un manifeste dont
la
pseudo-nouveauté nous retiendra moins que la significative pauvreté i
247
dont la pseudo-nouveauté nous retiendra moins que
la
significative pauvreté idéologique et morale qu’il révèle. Le style b
248
tive pauvreté idéologique et morale qu’il révèle.
Le
style brillant et elliptique qui tend à devenir notre poncif moderne,
249
, — ne réussit pas toujours chez Breton à masquer
la
banalité de la pensée. D’autant plus que les rares passages où il exp
250
pas toujours chez Breton à masquer la banalité de
la
pensée. D’autant plus que les rares passages où il expose directement
251
squer la banalité de la pensée. D’autant plus que
les
rares passages où il expose directement les principes de sa « révolut
252
s que les rares passages où il expose directement
les
principes de sa « révolution » semblent au contraire tirés de quelque
253
ent, soit par écrit, soit de toute autre manière,
le
fonctionnement réel de la pensée. Dictée de la pensée en l’absence de
254
de toute autre manière, le fonctionnement réel de
la
pensée. Dictée de la pensée en l’absence de tout contrôle exercé par
255
e, le fonctionnement réel de la pensée. Dictée de
la
pensée en l’absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors
256
nnement réel de la pensée. Dictée de la pensée en
l’
absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors de toute préo
257
a pensée en l’absence de tout contrôle exercé par
la
raison, en dehors de toute préoccupation esthétique ou morale. » (p.
258
te préoccupation esthétique ou morale. » (p. 42).
Le
surréalisme ne serait-il donc qu’une sorte de méthode des textes géné
259
généralisée ? Point du tout ! Il paraît qu’il est
la
seule attitude littéraire aujourd’hui concevable. Mais par quelles tr
260
ou moins conscientes M. Breton peut-il préconiser
l’
existence d’une littérature fondée sur de tels principes ? Le Rêve est
261
d’une littérature fondée sur de tels principes ?
Le
Rêve est la seule matière poétique. Dans le monde du Rêve autant de c
262
rature fondée sur de tels principes ? Le Rêve est
la
seule matière poétique. Dans le monde du Rêve autant de cellules isol
263
pes ? Le Rêve est la seule matière poétique. Dans
le
monde du Rêve autant de cellules isolées que de rêveurs. Toute poésie
264
que de rêveurs. Toute poésie est incommunicable,
le
poète étant un simple sténographe de ses rêves. Soit. De ces faits, j
265
pratique : inutile de publier des poèmes. Éluard
le
comprenait, qui écrivit : « Quand les livres se liront-ils d’eux-même
266
èmes. Éluard le comprenait, qui écrivit : « Quand
les
livres se liront-ils d’eux-mêmes, sans le secours des lecteurs ? Quan
267
Quand les livres se liront-ils d’eux-mêmes, sans
le
secours des lecteurs ? Quand les hommes se comprendront-ils individue
268
d’eux-mêmes, sans le secours des lecteurs ? Quand
les
hommes se comprendront-ils individuellement ? » Que M. Breton donne d
269
our faire un poème » cette mystification est dans
la
logique de ses principes, mais je lui conteste le droit de faire suiv
270
la logique de ses principes, mais je lui conteste
le
droit de faire suivre son manifeste de proses — Poisson soluble — qui
271
uble — qui servent d’illustration à sa défense de
la
poésie pure. Les beautés que j’y vois ne me seraient-elles perceptibl
272
nt d’illustration à sa défense de la poésie pure.
Les
beautés que j’y vois ne me seraient-elles perceptibles que par le fai
273
’y vois ne me seraient-elles perceptibles que par
le
fait d’une fortuite coïncidence entre l’univers du poète et le mien ?
274
que par le fait d’une fortuite coïncidence entre
l’
univers du poète et le mien ? Je comprends trop de choses dans ces poè
275
e Rimbaud, entre encore pour une grande part dans
l’
« alchimie du verbe » ; et je ne puis m’empêcher d’accuser Breton de p
276
cet appareil psychologique si scolaire ? À donner
le
change sur la pauvreté d’un art purement formel. Car c’est ici le tra
277
sychologique si scolaire ? À donner le change sur
la
pauvreté d’un art purement formel. Car c’est ici le tragique de cette
278
pauvreté d’un art purement formel. Car c’est ici
le
tragique de cette mystification : la plupart des surréalistes n’ont r
279
e leur impuissance. « Il n’y a pas de pensée hors
les
mots » (Aragon). Aussi se paient-ils de métaphores comme d’autres de
280
éclament imprudemment, — on sait ce que c’est que
la
« liberté » d’un esprit pur de tout finalisme ! Surréalisme S.A., ent
281
out finalisme ! Surréalisme S.A., entreprise pour
l’
exploitation de matériaux de démolition abandonnés par Dada S.A. Ce n’
282
pas ainsi que nous sortirons d’une anarchie dont
les
causes semblent avant tout morales. Les tendances encore un peu vague
283
chie dont les causes semblent avant tout morales.
Les
tendances encore un peu vagues d’un groupe tel que Philosophies laiss
284
lus réelles. On souhaite qu’après faillite faite,
les
surréalistes trouvent à montrer leur talent en des jeux moins lassant
285
poir exaspéré, commandait une certaine sympathie.
L’
agaçant, avec les surréalistes, c’est que — pour reprendre un mot de C
286
ommandait une certaine sympathie. L’agaçant, avec
les
surréalistes, c’est que — pour reprendre un mot de Cocteau — ils « em
287
octeau — ils « embaument de vieilles anarchies ».
L’
ironie qui sauva Dada du ridicule le cède ici à un ton de mage qui ne
288
anarchies ». L’ironie qui sauva Dada du ridicule
le
cède ici à un ton de mage qui ne fera plus longtemps impression. C’es
289
us longtemps impression. C’est grand dommage pour
les
lettres françaises qui risquent d’y perdre au moins deux grands artis
290
ublier Breton, enchanteur des images qui peuplent
les
ténèbres. b. « André Breton : Manifeste du surréalisme (S. Kra, Édi
291
Paul Colin, Van Gogh (août 1925)c
Le
nouveau volume de la collection des « Maîtres de l’art moderne » est
292
in, Van Gogh (août 1925)c Le nouveau volume de
la
collection des « Maîtres de l’art moderne » est au moins le cinquième
293
nouveau volume de la collection des « Maîtres de
l’
art moderne » est au moins le cinquième ouvrage publié en France sur V
294
s assez neuves. M. Colin s’est contenté de narrer
les
faits de la vie de Vincent, mais d’une telle manière que des conclusi
295
s. M. Colin s’est contenté de narrer les faits de
la
vie de Vincent, mais d’une telle manière que des conclusions critique
296
t avec évidence. Van Gogh fut une proie du génie.
L’
homme tel que nous le peint Paul Colin, est peu intéressant. On en a c
297
Gogh fut une proie du génie. L’homme tel que nous
le
peint Paul Colin, est peu intéressant. On en a connu bien d’autres de
298
d’évangélisation, fondent des groupes dissidents.
Le
miracle, c’est que le plus sauvage génie ait choisi un être de cette
299
ent des groupes dissidents. Le miracle, c’est que
le
plus sauvage génie ait choisi un être de cette espèce pour le tourmen
300
age génie ait choisi un être de cette espèce pour
le
tourmenter et le transfigurer. Vincent s’en effraie lui-même : « Il y
301
isi un être de cette espèce pour le tourmenter et
le
transfigurer. Vincent s’en effraie lui-même : « Il y a quelque chose
302
es copies de Millet. Mais son manque de talent ne
le
rebute pas. Une divine violence le travaille. Elle jaillira enfin, da
303
e de talent ne le rebute pas. Une divine violence
le
travaille. Elle jaillira enfin, dans l’éblouissement d’Arles, jusqu’a
304
violence le travaille. Elle jaillira enfin, dans
l’
éblouissement d’Arles, jusqu’au jour où cette consomption frénétique t
305
rrassant un corps minable, il ne restera plus que
les
flammes, les soleils et aussi les grimaces de douleur de ses tableaux
306
orps minable, il ne restera plus que les flammes,
les
soleils et aussi les grimaces de douleur de ses tableaux. Il faut lou
307
estera plus que les flammes, les soleils et aussi
les
grimaces de douleur de ses tableaux. Il faut louer Paul Colin de n’av
308
n’avoir rien caché des médiocrités de cette vie :
les
reproductions qui suivent sa courte biographie fournissent un meilleu
309
courte biographie fournissent un meilleur motif à
l’
admiration que tout le lyrisme dont on a voulu charger la « vie héroïq
310
nissent un meilleur motif à l’admiration que tout
le
lyrisme dont on a voulu charger la « vie héroïque » de Vincent. M. Co
311
ation que tout le lyrisme dont on a voulu charger
la
« vie héroïque » de Vincent. M. Colin n’a pas cherché à expliquer ce
312
ce miracle. Il nous laisse à notre émotion devant
le
spectacle d’une œuvre qui ne dut rien à l’homme, d’une œuvre de pur g
313
devant le spectacle d’une œuvre qui ne dut rien à
l’
homme, d’une œuvre de pur génie. Vincent Van Gogh, génie sans talent.
314
Lucien Fabre,
Le
Tarramagnou (septembre 1925)d Lucien Fabre, ingénieur, poète, chro
315
stein, des articles sur Valéry, St John Perse. On
le
vit naguère en province liquider des stocks américains. Et ses romans
316
ins. Et ses romans, c’est aussi une liquidation :
les
faits s’y pressent et s’y bousculent ; de temps à autre une notation
317
ou de psychologue se glisse dans leur flot. Voilà
le
lecteur entraîné, ébahi, passionné, contraint de suivre jusqu’au bout
318
bout un roman de 500 pages comme Rabevel. Car si
la
liquidation des questions traitées est rapide, elle est complète auss
319
n’est pas lui qui se refuserait à écrire — comme
le
fait son maître : « La marquise sortit à cinq heures ». Une telle pla
320
efuserait à écrire — comme le fait son maître : «
La
marquise sortit à cinq heures ». Une telle platitude est presque indi
321
e indispensable, mais il s’en permet d’autres qui
le
sont moins. On n’écrit pas un roman en trois volumes sans y laisser d
322
on ne demande pas non plus au puissant boxeur sur
le
ring d’être bien peigné. Rabevel, c’était un portrait balzacien du b
323
ait un portrait balzacien du brasseur d’affaires.
Le
sujet du Tarramagnou, c’est « la nouvelle mise en servitude du peuple
324
seur d’affaires. Le sujet du Tarramagnou, c’est «
la
nouvelle mise en servitude du peuple rustique de France ». En effet —
325
vitude du peuple rustique de France ». En effet —
le
phénomène n’est pas particulier à la France — les paysans sont en tra
326
. En effet — le phénomène n’est pas particulier à
la
France — les paysans sont en train de redevenir serfs, serfs des synd
327
le phénomène n’est pas particulier à la France —
les
paysans sont en train de redevenir serfs, serfs des syndicats et des
328
villes. Mais dans une de ces provinces du Midi où
le
souvenir des luttes religieuses encore vivace fait que les paysans ga
329
nir des luttes religieuses encore vivace fait que
les
paysans gardent une méfiance frondeuse vis-à-vis du gouvernement, le
330
une méfiance frondeuse vis-à-vis du gouvernement,
le
libérateur va se lever. C’est un descendant de Roland le Camisard, ce
331
Camisard, ce « Tarramagnou », ce « petit homme de
la
terre », qui va susciter un formidable mouvement de protestation cont
332
er un formidable mouvement de protestation contre
les
lois tyranniques. Le succès grandit rapidement, le gouvernement cède.
333
ment de protestation contre les lois tyranniques.
Le
succès grandit rapidement, le gouvernement cède. Mais la même inertie
334
s lois tyranniques. Le succès grandit rapidement,
le
gouvernement cède. Mais la même inertie du peuple qui donnait tant de
335
ès grandit rapidement, le gouvernement cède. Mais
la
même inertie du peuple qui donnait tant de mal lorsqu’il fallait l’év
336
peuple qui donnait tant de mal lorsqu’il fallait
l’
éveiller, l’entraîne au-delà du but. Le Tarramagnou voit son œuvre sab
337
donnait tant de mal lorsqu’il fallait l’éveiller,
l’
entraîne au-delà du but. Le Tarramagnou voit son œuvre sabotée par des
338
il fallait l’éveiller, l’entraîne au-delà du but.
Le
Tarramagnou voit son œuvre sabotée par des meneurs ; il tente en vain
339
e par des meneurs ; il tente en vain de ressaisir
les
foules : déjà elles huent sa modération. Alors il va se jeter au-deva
340
devant des troupes accourues, il meurt en clamant
la
paix. M. Fabre avait là les éléments d’un grand roman : autour d’un s
341
s, il meurt en clamant la paix. M. Fabre avait là
les
éléments d’un grand roman : autour d’un sujet de vaste envergure, et
342
es d’une belle richesse psychologique. En fermant
le
livre on a presque l’impression qu’il a réussi ce grand roman… Qu’y m
343
e psychologique. En fermant le livre on a presque
l’
impression qu’il a réussi ce grand roman… Qu’y manque-t-il ? Un style
344
ssi ce grand roman… Qu’y manque-t-il ? Un style ?
L’
absence de style, n’est-ce pas le meilleur style pour un romancier ? C
345
-il ? Un style ? L’absence de style, n’est-ce pas
le
meilleur style pour un romancier ? C’est plutôt, je crois, une certai
346
ôt, je crois, une certaine harmonie générale dans
le
récit et le ton, surtout dans la première partie, qui est confuse. No
347
, une certaine harmonie générale dans le récit et
le
ton, surtout dans la première partie, qui est confuse. Non pas que le
348
la première partie, qui est confuse. Non pas que
le
roman soit mal construit, au contraire. Mais le tissu des faits se re
349
e le roman soit mal construit, au contraire. Mais
le
tissu des faits se relâche parfois, et les arêtes de la construction
350
e. Mais le tissu des faits se relâche parfois, et
les
arêtes de la construction apparaissent trop nues. Chef-d’œuvre ou pas
351
su des faits se relâche parfois, et les arêtes de
la
construction apparaissent trop nues. Chef-d’œuvre ou pas chef-d’œuvre
352
uvre ou pas chef-d’œuvre d’ailleurs, il reste que
le
Tarramagnou est un livre émouvant, d’une saine puissance. Il reste qu
353
ssi intelligent que vivant. d. « Lucien Fabre :
Le
Tarramagnou (NRF, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genè
354
Les
Appels de l’Orient (septembre 1925)e Le xxe siècle s’annonce comm
355
Les Appels de
l’
Orient (septembre 1925)e Le xxe siècle s’annonce comme le siècle d
356
Les Appels de l’Orient (septembre 1925)e
Le
xxe siècle s’annonce comme le siècle de la découverte du monde par l
357
eptembre 1925)e Le xxe siècle s’annonce comme
le
siècle de la découverte du monde par l’Europe intellectuelle. Grand s
358
)e Le xxe siècle s’annonce comme le siècle de
la
découverte du monde par l’Europe intellectuelle. Grand siècle de crit
359
nce comme le siècle de la découverte du monde par
l’
Europe intellectuelle. Grand siècle de critique pour lequel nos contem
360
critique pour lequel nos contemporains accumulent
les
documents. La littérature de ces dernières années n’est qu’une forme
361
equel nos contemporains accumulent les documents.
La
littérature de ces dernières années n’est qu’une forme de reportage i
362
es n’est qu’une forme de reportage international.
L’
Europe menant cette immense enquête manifeste son génie méthodique, so
363
selle et inépuisable curiosité. Mais, de même que
la
France interrogeant l’Europe du xviiie prenait surtout conscience de
364
riosité. Mais, de même que la France interrogeant
l’
Europe du xviiie prenait surtout conscience de son propre génie, l’Eu
365
prenait surtout conscience de son propre génie,
l’
Europe d’aujourd’hui semble chercher dans une confrontation avec l’Ori
366
d’hui semble chercher dans une confrontation avec
l’
Orient, plutôt qu’une réelle connaissance de l’Orient, une conscience
367
ec l’Orient, plutôt qu’une réelle connaissance de
l’
Orient, une conscience d’elle-même. C’est peut-être pour provoquer cet
368
né un péril oriental, car il semble bien que dans
le
domaine de la culture le péril n’existe que pour autant qu’on en parl
369
iental, car il semble bien que dans le domaine de
la
culture le péril n’existe que pour autant qu’on en parle, la vraie «
370
il semble bien que dans le domaine de la culture
le
péril n’existe que pour autant qu’on en parle, la vraie « question as
371
le péril n’existe que pour autant qu’on en parle,
la
vraie « question asiatique » étant une question politique. On peut pr
372
nt une question politique. On peut prévoir que si
le
bouddhisme jouit un jour d’un renouveau, c’est à quelques savants eur
373
nouveau, c’est à quelques savants européens qu’il
le
devra, tandis que d’un mouvement inverse, le christianisme débarrassé
374
u’il le devra, tandis que d’un mouvement inverse,
le
christianisme débarrassé de son déguisement gréco-latin retournera ve
375
n retournera vers ses sources pour s’y retremper.
Les
appels de l’Orient, ce sont les Keyserling, les Guénon, qui les font
376
ers ses sources pour s’y retremper. Les appels de
l’
Orient, ce sont les Keyserling, les Guénon, qui les font entendre, aut
377
ur s’y retremper. Les appels de l’Orient, ce sont
les
Keyserling, les Guénon, qui les font entendre, autant et plus que les
378
. Les appels de l’Orient, ce sont les Keyserling,
les
Guénon, qui les font entendre, autant et plus que les Tagore et les G
379
l’Orient, ce sont les Keyserling, les Guénon, qui
les
font entendre, autant et plus que les Tagore et les Gandhi, demi-euro
380
Guénon, qui les font entendre, autant et plus que
les
Tagore et les Gandhi, demi-européanisés. Ceci convenu, il faut reconn
381
s font entendre, autant et plus que les Tagore et
les
Gandhi, demi-européanisés. Ceci convenu, il faut reconnaître que l’en
382
ropéanisés. Ceci convenu, il faut reconnaître que
l’
enquête des Cahiers du Mois donne un fort intéressant tableau des mult
383
rt intéressant tableau des multiples réactions de
l’
Europe placée devant le dilemme Orient-Occident. Réactions qui, disons
384
des multiples réactions de l’Europe placée devant
le
dilemme Orient-Occident. Réactions qui, disons-le tout de suite, rens
385
le dilemme Orient-Occident. Réactions qui, disons-
le
tout de suite, renseignent mieux sur l’esprit occidental que sur l’or
386
i, disons-le tout de suite, renseignent mieux sur
l’
esprit occidental que sur l’oriental, en sorte que cette enquête rejoi
387
renseignent mieux sur l’esprit occidental que sur
l’
oriental, en sorte que cette enquête rejoint parfois celle qu’ouvrit l
388
que cette enquête rejoint parfois celle qu’ouvrit
la
Revue de Genève sur « l’Avenir de l’Europe. » (Cf. les deux réponse
389
arfois celle qu’ouvrit la Revue de Genève sur «
l’
Avenir de l’Europe. » (Cf. les deux réponses d’André Gide en particuli
390
qu’ouvrit la Revue de Genève sur « l’Avenir de
l’
Europe. » (Cf. les deux réponses d’André Gide en particulier). Car la
391
vue de Genève sur « l’Avenir de l’Europe. » (Cf.
les
deux réponses d’André Gide en particulier). Car la plupart des enquêt
392
ticulier). Car la plupart des enquêtés se font de
l’
Orient une représentation vague et poétique. « Orient…, toi qui n’as q
393
de cet Orient qu’il s’agit, et Jean Schlumberger
le
définit encore : « … tout ce qui est opposé à l’esprit occidental, to
394
le définit encore : « … tout ce qui est opposé à
l’
esprit occidental, tout ce qui peut servir d’antidote à sa fièvre et à
395
ne dénomination qui n’a de sens que par rapport à
l’
Europe. Il serait vain de tenter un classement parmi les réponses d’un
396
ope. Il serait vain de tenter un classement parmi
les
réponses d’une extraordinaire diversité — peut-être trop nombreuses —
397
e trop nombreuses — qui composent ce gros volume.
Les
points de vue sont si différents, si différentes même les conclusions
398
ts de vue sont si différents, si différentes même
les
conclusions tirées de points de vue semblables, qu’un esprit analytiq
399
t de jugements contradictoires, et de termes dont
le
sens change avec l’échelle de valeurs de l’écrivain. Énumérons pourta
400
adictoires, et de termes dont le sens change avec
l’
échelle de valeurs de l’écrivain. Énumérons pourtant quelques-uns des
401
dont le sens change avec l’échelle de valeurs de
l’
écrivain. Énumérons pourtant quelques-uns des points de vue les plus r
402
Énumérons pourtant quelques-uns des points de vue
les
plus riches ou les mieux définis. Pour Valéry, la supériorité de l’Eu
403
quelques-uns des points de vue les plus riches ou
les
mieux définis. Pour Valéry, la supériorité de l’Europe réside dans sa
404
es plus riches ou les mieux définis. Pour Valéry,
la
supériorité de l’Europe réside dans sa « puissance de choix », dans l
405
les mieux définis. Pour Valéry, la supériorité de
l’
Europe réside dans sa « puissance de choix », dans le génie d’abstract
406
urope réside dans sa « puissance de choix », dans
le
génie d’abstraction qui a produit la géométrie grecque. D’autres attr
407
hoix », dans le génie d’abstraction qui a produit
la
géométrie grecque. D’autres attribuent cette supériorité au machinism
408
es attribuent cette supériorité au machinisme, et
la
déplorent. Plusieurs jeunes songent que dans une Europe vieillie, les
409
eurs jeunes songent que dans une Europe vieillie,
les
parfums puissants de l’Asie sauront encore éveiller de beaux rêves. I
410
ans une Europe vieillie, les parfums puissants de
l’
Asie sauront encore éveiller de beaux rêves. Il y a ceux qui repoussen
411
orante du thomisme et ceux qui pensent inévitable
le
choc de deux mondes, et que seule une intime connaissance mutuelle l’
412
es, et que seule une intime connaissance mutuelle
l’
adoucira. Il y a ceux qui à la suite de Claudel estiment que la questi
413
l y a ceux qui à la suite de Claudel estiment que
la
question ne se pose pas, puisque nous sommes chrétiens. (Mais le chri
414
se pose pas, puisque nous sommes chrétiens. (Mais
le
christianisme, religion missionnaire, ne peut nous donner qu’une supé
415
périorité provisoire et qui porte en son principe
le
germe de sa destruction.) Il y a enfin ceux qui refondent et combinen
416
point avoir, sincérité trop rare… Presque toutes
les
réponses, conclusions ou interrogations, ont le défaut de n’être pas
417
les réponses, conclusions ou interrogations, ont
le
défaut de n’être pas suffisamment motivées par des faits et des docum
418
es par des faits et des documents. Pour beaucoup,
l’
Orient n’est qu’un prétexte à variations sur le thème favori. M. Massi
419
p, l’Orient n’est qu’un prétexte à variations sur
le
thème favori. M. Massis, par exemple, qui cependant produit un grand
420
livre pas moins à des déductions in abstracto qui
le
mènent à des conclusions de ce genre : si nous trouvons le moyen de «
421
à des conclusions de ce genre : si nous trouvons
le
moyen de « suppléer à l’éducation historique des peuples chrétiens qu
422
genre : si nous trouvons le moyen de « suppléer à
l’
éducation historique des peuples chrétiens qui n’ont pas eu de Moyen Â
423
n’ont pas eu de Moyen Âge », nous pourrons amener
l’
Asie à comprendre la religion romaine (ce christianisme méditerranéen
424
n Âge », nous pourrons amener l’Asie à comprendre
la
religion romaine (ce christianisme méditerranéen si étroitement parti
425
erranéen si étroitement particularisé pourtant, à
l’
usage des Latins…). Quant aux orientalistes, qui, eux, apportent des d
426
onclure. Un écrivain grec, M. Embiricos, a trouvé
la
formule qui définit ce que les autres entendent vaguement par Orient
427
Embiricos, a trouvé la formule qui définit ce que
les
autres entendent vaguement par Orient : l’Asie est le subconscient du
428
e que les autres entendent vaguement par Orient :
l’
Asie est le subconscient du monde, formule qui, je pense, réunira tous
429
utres entendent vaguement par Orient : l’Asie est
le
subconscient du monde, formule qui, je pense, réunira tous les suffra
430
ent du monde, formule qui, je pense, réunira tous
les
suffrages. Et chacun d’en tirer de nouvelles raisons de maudire l’Ori
431
chacun d’en tirer de nouvelles raisons de maudire
l’
Orient ou chercher la guérison de nos fièvres. Mais nous aurons entrev
432
nouvelles raisons de maudire l’Orient ou chercher
la
guérison de nos fièvres. Mais nous aurons entrevu peut-être pour la p
433
us aurons entrevu peut-être pour la première fois
le
rôle de l’Europe « conscience du monde », entre une Amérique affolée
434
ntrevu peut-être pour la première fois le rôle de
l’
Europe « conscience du monde », entre une Amérique affolée de vitesse,
435
sie immobile dans sa méditation éternelle. e. «
Les
Appels de l’Orient (n° 9-10 des Cahiers du Mois) », Bibliothèque univ
436
ans sa méditation éternelle. e. « Les Appels de
l’
Orient (n° 9-10 des Cahiers du Mois) », Bibliothèque universelle et Re
437
que nous sommes seuls, nous sommes des fous. Oui,
le
contrôle de nous-mêmes ne joue que soutenu par le contrôle que les au
438
le contrôle de nous-mêmes ne joue que soutenu par
le
contrôle que les autres nous imposent », dit un héros de Mauriac. C’e
439
ous-mêmes ne joue que soutenu par le contrôle que
les
autres nous imposent », dit un héros de Mauriac. C’est un « homme seu
440
Mauriac. C’est un « homme seul » qu’a peint « par
le
dedans » M. Jean Prévost, en un saisissant raccourci psychologique. «
441
eut éliminer de soi tout ce qui est déterminé par
l’
extérieur, — ce fou que nous portons tous en nous, — il l’a isolé, inc
442
eur, — ce fou que nous portons tous en nous, — il
l’
a isolé, incarné, nommé : Revert. Puis il l’a poussé impitoyablement d
443
— il l’a isolé, incarné, nommé : Revert. Puis il
l’
a poussé impitoyablement dans sa recherche d’un absolu qui se trouve ê
444
dans sa recherche d’un absolu qui se trouve être
le
néant. Pour finir il « l’écrabouille ». L’expérience est terminée. Ar
445
solu qui se trouve être le néant. Pour finir il «
l’
écrabouille ». L’expérience est terminée. Artificielle comme toute exp
446
e être le néant. Pour finir il « l’écrabouille ».
L’
expérience est terminée. Artificielle comme toute expérience, elle n’e
447
assive d’un théorème de Spinoza. Une ironie dure,
la
densité du style révèlent seules l’écrivain ; et aussi quelques sente
448
ironie dure, la densité du style révèlent seules
l’
écrivain ; et aussi quelques sentences : « C’est de la faiblesse de no
449
rivain ; et aussi quelques sentences : « C’est de
la
faiblesse de nos yeux que frissonnent les étoiles. » f. « Jean Prév
450
C’est de la faiblesse de nos yeux que frissonnent
les
étoiles. » f. « Jean Prévost : Tentative de solitude (NRF, Paris) »
451
eptembre 1925)g En 1886, lors de sa fondation,
la
nouvelle maison d’édition Fischer passait pour « la centrale où l’on
452
nouvelle maison d’édition Fischer passait pour «
la
centrale où l’on avait concentré la dynamite internationale qu’Ibsen
453
n d’édition Fischer passait pour « la centrale où
l’
on avait concentré la dynamite internationale qu’Ibsen voulait placer
454
assait pour « la centrale où l’on avait concentré
la
dynamite internationale qu’Ibsen voulait placer sous les arches de la
455
amite internationale qu’Ibsen voulait placer sous
les
arches de la vieille société », pour reprendre la pittoresque définit
456
ionale qu’Ibsen voulait placer sous les arches de
la
vieille société », pour reprendre la pittoresque définition de M. A.
457
es arches de la vieille société », pour reprendre
la
pittoresque définition de M. A. Eloesser dans l’Almanach du 25e anniv
458
la pittoresque définition de M. A. Eloesser dans
l’
Almanach du 25e anniversaire. Les révolutionnaires y faisaient pourtan
459
A. Eloesser dans l’Almanach du 25e anniversaire.
Les
révolutionnaires y faisaient pourtant bon ménage avec les derniers ch
460
lutionnaires y faisaient pourtant bon ménage avec
les
derniers champions du naturalisme puisqu’au début Fischer publia Zola
461
trouve au tableau des auteurs édités depuis lors
les
grands noms de la littérature européenne d’avant-guerre mêlés à ceux
462
des auteurs édités depuis lors les grands noms de
la
littérature européenne d’avant-guerre mêlés à ceux des maîtres du ren
463
aliste allemand et viennois, Hesse, Hofmannsthal…
Les
extraits de ces auteurs qui composent l’Almanach Fischer donnent une
464
nsthal… Les extraits de ces auteurs qui composent
l’
Almanach Fischer donnent une juste idée de ce que fut la littérature d
465
nach Fischer donnent une juste idée de ce que fut
la
littérature d’avant-garde entre 1900 et 1910. Depuis, la maison paraî
466
érature d’avant-garde entre 1900 et 1910. Depuis,
la
maison paraît s’être un peu embourgeoisée… Disons plutôt que voici ve
467
n peu embourgeoisée… Disons plutôt que voici venu
le
temps de la moisson, — le temps des éditions d’œuvres complètes. g.
468
geoisée… Disons plutôt que voici venu le temps de
la
moisson, — le temps des éditions d’œuvres complètes. g. « S. Fische
469
s plutôt que voici venu le temps de la moisson, —
le
temps des éditions d’œuvres complètes. g. « S. Fischer Verlag : Alm
470
tto Flake, Der Gute Weg (septembre 1925)h Dans
l’
atmosphère trouble où s’agite l’Allemagne nouvelle — et peut-être parc
471
re 1925)h Dans l’atmosphère trouble où s’agite
l’
Allemagne nouvelle — et peut-être parce qu’il sait en sortir parfois —
472
kei a gardé son bon sens et son sang-froid. Et si
l’
on a pu reprocher à ses tableaux de l’Europe qu’il vient de parcourir
473
roid. Et si l’on a pu reprocher à ses tableaux de
l’
Europe qu’il vient de parcourir quelque superficialité, du moins faut-
474
arcourir quelque superficialité, du moins faut-il
le
louer d’avoir conservé une vision générale de notre temps et un évide
475
bénéficie de cette vision. Je ne saurais résumer
les
nombreuses péripéties de son dernier roman sans exposer et discuter t
476
son dernier roman sans exposer et discuter toutes
les
idées qu’elles illustrent. Les personnages discutent certes, mais leu
477
et discuter toutes les idées qu’elles illustrent.
Les
personnages discutent certes, mais leurs actions sont les meilleurs a
478
onnages discutent certes, mais leurs actions sont
les
meilleurs arguments. Et peu à peu surgissent d’une accumulation de pe
479
près-guerre d’une étrange vérité. Aux prises avec
les
problèmes sociaux et le luxe le moins apaisant, tournés vers la Russi
480
vérité. Aux prises avec les problèmes sociaux et
le
luxe le moins apaisant, tournés vers la Russie, vers le passé, vers l
481
Aux prises avec les problèmes sociaux et le luxe
le
moins apaisant, tournés vers la Russie, vers le passé, vers l’Orient,
482
ociaux et le luxe le moins apaisant, tournés vers
la
Russie, vers le passé, vers l’Orient, tentant des amours nouvelles et
483
e le moins apaisant, tournés vers la Russie, vers
le
passé, vers l’Orient, tentant des amours nouvelles et les fuites les
484
sant, tournés vers la Russie, vers le passé, vers
l’
Orient, tentant des amours nouvelles et les fuites les plus folles hor
485
é, vers l’Orient, tentant des amours nouvelles et
les
fuites les plus folles hors de la réalité, ils forment un cortège pit
486
rient, tentant des amours nouvelles et les fuites
les
plus folles hors de la réalité, ils forment un cortège pittoresque et
487
s nouvelles et les fuites les plus folles hors de
la
réalité, ils forment un cortège pittoresque et désolant à celui qui,
488
ge pittoresque et désolant à celui qui, revenu de
l’
étranger dans le désordre de son pays, suivra obstinément le « bon che
489
t désolant à celui qui, revenu de l’étranger dans
le
désordre de son pays, suivra obstinément le « bon chemin » de la sant
490
dans le désordre de son pays, suivra obstinément
le
« bon chemin » de la santé et de la raison. C’est à lui que va la sym
491
son pays, suivra obstinément le « bon chemin » de
la
santé et de la raison. C’est à lui que va la sympathie de l’auteur et
492
a obstinément le « bon chemin » de la santé et de
la
raison. C’est à lui que va la sympathie de l’auteur et la nôtre. h.
493
» de la santé et de la raison. C’est à lui que va
la
sympathie de l’auteur et la nôtre. h. « Otto Flake : Der Gute Weg (
494
de la raison. C’est à lui que va la sympathie de
l’
auteur et la nôtre. h. « Otto Flake : Der Gute Weg (S. Fischer Verla
495
n. C’est à lui que va la sympathie de l’auteur et
la
nôtre. h. « Otto Flake : Der Gute Weg (S. Fischer Verlag, Berlin) »
496
1163. i. Orthographié « Flasce » par erreur dans
l’
original.
497
opéenne », croyez-vous qu’il aille s’abandonner à
l’
émotion communicative de qui découvre un sommet ? Point. Précision, mo
498
vre un sommet ? Point. Précision, modération dans
le
jugement, humour léger, notation suggestive, telles sont les vertus d
499
t, humour léger, notation suggestive, telles sont
les
vertus de sa critique. Ce n’est que dans sa discrétion à louer une gr
500
iscrétion à louer une grande œuvre qu’on trouvera
la
mesure de son admiration et le gage de sa légitimité. Nul doute que l
501
vre qu’on trouvera la mesure de son admiration et
le
gage de sa légitimité. Nul doute que les Trois nouvelles exemplaires
502
ration et le gage de sa légitimité. Nul doute que
les
Trois nouvelles exemplaires ne suscitent un intérêt très profond : el
503
de préoccupations des plus modernes, problème de
la
réalité littéraire, problème de la personnalité. Leur Prologue pourra
504
s, problème de la réalité littéraire, problème de
la
personnalité. Leur Prologue pourrait presque aussi bien être celui d’
505
d’une pièce de Pirandello. N’annonce-t-il pas que
les
personnages des trois nouvelles « sont réels, très réels, de la réali
506
des trois nouvelles « sont réels, très réels, de
la
réalité la plus intime, de celle qu’ils se donnent eux-mêmes dans leu
507
nouvelles « sont réels, très réels, de la réalité
la
plus intime, de celle qu’ils se donnent eux-mêmes dans leur pure volo
508
ur pure volonté d’être ou de ne pas être… ». Mais
les
héros de Pirandello, s’ils veulent être, subissent, une fois qu’ils s
509
ls veulent être, subissent, une fois qu’ils sont,
le
grand malentendu de la personnalité. Tandis que chez Unamuno une volo
510
ent, une fois qu’ils sont, le grand malentendu de
la
personnalité. Tandis que chez Unamuno une volonté d’action les possèd
511
ité. Tandis que chez Unamuno une volonté d’action
les
possède, les exalte, les affole. Les plus beaux types créés par Unamu
512
ue chez Unamuno une volonté d’action les possède,
les
exalte, les affole. Les plus beaux types créés par Unamuno sont ces f
513
uno une volonté d’action les possède, les exalte,
les
affole. Les plus beaux types créés par Unamuno sont ces femmes dures
514
nté d’action les possède, les exalte, les affole.
Les
plus beaux types créés par Unamuno sont ces femmes dures et passionné
515
us dépouillé de détail extérieur ou d’enjolivure.
La
lecture de ces trois tragédies, d’une classique sobriété mais d’une b
516
une brutalité et d’une ironie romantiques, laisse
la
même impression de grandeur désolée qu’un Greco. Mais il n’y a pas le
517
e grandeur désolée qu’un Greco. Mais il n’y a pas
les
couleurs, ni l’amère volupté des formes. Une sensation de barre d’aci
518
e qu’un Greco. Mais il n’y a pas les couleurs, ni
l’
amère volupté des formes. Une sensation de barre d’acier sur la nuque.
519
té des formes. Une sensation de barre d’acier sur
la
nuque. j. « Miguel de Unamuno : Trois nouvelles exemplaires et un p
520
Ernest Seillière, Alexandre Vinet, historien de
la
pensée française (octobre 1925)k Peut-être n’est-il pas trop tard
521
pitre qu’il vient d’ajouter à sa grande étude sur
les
rapports du christianisme et du romantisme. M. Seillière cherchait da
522
sme et du romantisme. M. Seillière cherchait dans
l’
époque romantique un témoin dont le jugement eut « l’autorité d’un ver
523
cherchait dans l’époque romantique un témoin dont
le
jugement eut « l’autorité d’un verdict essentiellement chrétien sur l
524
poque romantique un témoin dont le jugement eut «
l’
autorité d’un verdict essentiellement chrétien sur le mysticisme natur
525
utorité d’un verdict essentiellement chrétien sur
le
mysticisme naturiste ». Il ne pouvait trouver mieux que Vinet. Et j’i
526
net. Et j’imagine son étonnement à découvrir dans
l’
œuvre du penseur vaudois la substance originale de la plupart des idée
527
ement à découvrir dans l’œuvre du penseur vaudois
la
substance originale de la plupart des idées dont lui-même s’est fait
528
de la plupart des idées dont lui-même s’est fait
le
moderne champion. Pour ce qui concerne le Vinet juge des romantiques,
529
st fait le moderne champion. Pour ce qui concerne
le
Vinet juge des romantiques, il n’a pas eu trop de peine à l’annexer à
530
ge des romantiques, il n’a pas eu trop de peine à
l’
annexer à son propre corps de doctrines critiques. Dirai-je pourtant q
531
, et presque inconsciemment, à gauchir légèrement
la
pensée de Vinet pour lui ajuster sa terminologie particulière ? Mais
532
ie particulière ? Mais par ailleurs Vinet déborde
le
« sellièrisme » de tout son mysticisme protestant. Et cela n’est pas
533
eillière. C’est peut-être pourquoi il insiste sur
le
fait que Vinet se déclarait « un chrétien sans épithète ». Croit-il é
534
n chrétien sans épithète ». Croit-il éluder ainsi
le
protestantisme de Vinet ? Ne voit-il pas que rien n’est plus protesta
535
e ? Mais ces réserves sont de peu d’importance si
l’
on songe au service que M. Seillière nous rend en réintroduisant dans
536
que M. Seillière nous rend en réintroduisant dans
l’
actualité la plus brûlante les richesses intellectuelles et morales du
537
ière nous rend en réintroduisant dans l’actualité
la
plus brûlante les richesses intellectuelles et morales du grand vaudo
538
réintroduisant dans l’actualité la plus brûlante
les
richesses intellectuelles et morales du grand vaudois. Vraiment, tout
539
raiment, tout ce qui semble viable et humain dans
la
critique moderne du romantisme, Vinet l’avait trouvé. Mais sa positio
540
ain dans la critique moderne du romantisme, Vinet
l’
avait trouvé. Mais sa position purement chrétienne — un mysticisme de
541
Ernest Seillière : Alexandre Vinet, historien de
la
pensée française (Payot) », Bibliothèque universelle et Revue de Genè
542
st celui-là qui s’avance » avec ce visage d’entre
la
vie et la mort « où se reflète le passage incessant d’oiseaux de la m
543
à qui s’avance » avec ce visage d’entre la vie et
la
mort « où se reflète le passage incessant d’oiseaux de la mer ? » « Q
544
visage d’entre la vie et la mort « où se reflète
le
passage incessant d’oiseaux de la mer ? » « Quel est cet homme dont l
545
« où se reflète le passage incessant d’oiseaux de
la
mer ? » « Quel est cet homme dont l’âme fait des signes solennels ? »
546
d’oiseaux de la mer ? » « Quel est cet homme dont
l’
âme fait des signes solennels ? » Une voix lente aux méandres songeurs
547
ne simplicité qui n’est pas familière. C’est bien
la
poésie d’une époque tourmentée dans sa profondeur, mais qui se penche
548
abîmes. Simplicité de notre temps ! Au-dessus de
la
trépidation immense des machines, un Saint-John-Perse, un Supervielle
549
rse, un Supervielle parlent avec des mots de tous
les
jours aux vivants et aux morts : Mère, je sais très mal comme l’on ch
550
vants et aux morts : Mère, je sais très mal comme
l’
on cherche les morts… « … Cette chose haute à la voix grave qu’on appe
551
morts : Mère, je sais très mal comme l’on cherche
les
morts… « … Cette chose haute à la voix grave qu’on appelle un père da
552
e l’on cherche les morts… « … Cette chose haute à
la
voix grave qu’on appelle un père dans les maisons. » Comme Valéry, ce
553
haute à la voix grave qu’on appelle un père dans
les
maisons. » Comme Valéry, ce poète sait « des complicités étranges pou
554
s’est créé. Jamais banal, il est parfois facile :
la
description du monde qu’il invente nous lasse quand elle ne l’étonne
555
n du monde qu’il invente nous lasse quand elle ne
l’
étonne plus assez lui-même (pourtant l’autel et le surréalisme l’ont e
556
nd elle ne l’étonne plus assez lui-même (pourtant
l’
autel et le surréalisme l’ont enrichie d’images…). Je cite des noms :
557
l’étonne plus assez lui-même (pourtant l’autel et
le
surréalisme l’ont enrichie d’images…). Je cite des noms : y a-t-il in
558
ssez lui-même (pourtant l’autel et le surréalisme
l’
ont enrichie d’images…). Je cite des noms : y a-t-il influence ou seul
559
rtent des cafés littéraires, nos poètes respirent
le
même air du temps. Leur originalité se retrouve dans la manière dont
560
e air du temps. Leur originalité se retrouve dans
la
manière dont ils tentent de fuir l’inquiétude où ils baignent. Celui-
561
retrouve dans la manière dont ils tentent de fuir
l’
inquiétude où ils baignent. Celui-ci vient à peine de quitter l’air du
562
ù ils baignent. Celui-ci vient à peine de quitter
l’
air dur des pampas. « Le voilà qui s’avance, foulant les hautes herbes
563
vient à peine de quitter l’air dur des pampas. «
Le
voilà qui s’avance, foulant les hautes herbes du ciel. » Le gaucho a
564
dur des pampas. « Le voilà qui s’avance, foulant
les
hautes herbes du ciel. » Le gaucho a dompté Pégase et caracole dans l
565
ui s’avance, foulant les hautes herbes du ciel. »
Le
gaucho a dompté Pégase et caracole dans les étoiles. J’avoue que l’un
566
iel. » Le gaucho a dompté Pégase et caracole dans
les
étoiles. J’avoue que l’univers intérieur où il lui arrive de graviter
567
Pégase et caracole dans les étoiles. J’avoue que
l’
univers intérieur où il lui arrive de graviter me trouble mieux que so
568
eux que son lyrisme cosmique. On est plus près de
l’
infini au fond de soi qu’au fond du ciel. l. « Jules Supervielle : G
569
Simone Téry,
L’
Île des bardes (décembre 1925)m L’Irlande contemporaine offre un sp
570
Simone Téry, L’Île des bardes (décembre 1925)m
L’
Irlande contemporaine offre un spectacle bien passionnant : celui de l
571
ne offre un spectacle bien passionnant : celui de
la
renaissance d’une littérature nationale à la fois cause et effet de l
572
littérature nationale à la fois cause et effet de
la
libération politique. Cause, puisque pour mener à chef cette libérati
573
es, ont su payer de leur personne. Effet, puisque
l’
héroïsme d’une révolution en faveur du passé, révolution tout de même,
574
lle Simone Téry ne fait pas. Car elle veut éviter
l’
emballement et conserver dans l’admiration son sens critique de Parisi
575
elle veut éviter l’emballement et conserver dans
l’
admiration son sens critique de Parisienne. C’est une sympathie malici
576
commentaires parfois un peu copieux ; mais elle a
la
vertu de rendre contagieuse la curiosité de l’auteur à l’endroit de c
577
ieux ; mais elle a la vertu de rendre contagieuse
la
curiosité de l’auteur à l’endroit de cette âme irlandaise en laquelle
578
a la vertu de rendre contagieuse la curiosité de
l’
auteur à l’endroit de cette âme irlandaise en laquelle s’allient une f
579
réalisme également lyriques. m. « Simone Téry :
L’
Île des bardes. “Notes sur la littérature irlandaise contemporaine” (F
580
m. « Simone Téry : L’Île des bardes. “Notes sur
la
littérature irlandaise contemporaine” (Flammarion, Paris) », Biblioth
581
Hugh Walpole,
La
Cité secrète (décembre 1925)n La Révolution russe va-t-elle usurpe
582
Hugh Walpole, La Cité secrète (décembre 1925)n
La
Révolution russe va-t-elle usurper dans le roman d’aventures le rôle
583
5)n La Révolution russe va-t-elle usurper dans
le
roman d’aventures le rôle de la mer Océane avec ses écumeurs ? Déjà u
584
russe va-t-elle usurper dans le roman d’aventures
le
rôle de la mer Océane avec ses écumeurs ? Déjà un Mac Orlan, un Kesse
585
elle usurper dans le roman d’aventures le rôle de
la
mer Océane avec ses écumeurs ? Déjà un Mac Orlan, un Kessel ont donné
586
t donné de beaux exemples du parti que peut tirer
le
nouveau romantisme de ce chaos. Salmon a même tenté d’en écrire l’épo
587
isme de ce chaos. Salmon a même tenté d’en écrire
l’
épopée dans Prikaz, cette traduction française de l’énorme cri de déli
588
épopée dans Prikaz, cette traduction française de
l’
énorme cri de délivrance du peuple fou. Belles étincelles échappées d’
589
u. Belles étincelles échappées d’un brasier. Pour
les
causes de l’incendie, voir Dostoïevski. M. Walpole, lui, commence son
590
celles échappées d’un brasier. Pour les causes de
l’
incendie, voir Dostoïevski. M. Walpole, lui, commence son roman quelqu
591
mmence son roman quelques mois avant que n’éclate
le
sinistre, et s’arrête au moment où l’on est sûr que ça brûle bien. Qu
592
ue n’éclate le sinistre, et s’arrête au moment où
l’
on est sûr que ça brûle bien. Quel sujet plus riche pouvait-on rêver p
593
lus riche pouvait-on rêver pour un psychologue de
la
puissance de Walpole, que l’âme russe — cette âme russe qui pour le P
594
ur un psychologue de la puissance de Walpole, que
l’
âme russe — cette âme russe qui pour le Parisien restera toujours « in
595
lpole, que l’âme russe — cette âme russe qui pour
le
Parisien restera toujours « indéfinissable ». M. Walpole, dont nous c
596
mençons aujourd’hui un roman bien différent, a vu
la
Révolution sans romantisme, dans le détail de la vie d’une ville. Il
597
fférent, a vu la Révolution sans romantisme, dans
le
détail de la vie d’une ville. Il sait qu’un grand mouvement est la ré
598
la Révolution sans romantisme, dans le détail de
la
vie d’une ville. Il sait qu’un grand mouvement est la résultante de m
599
ie d’une ville. Il sait qu’un grand mouvement est
la
résultante de millions de petits. Voici naître la révolution dans un
600
la résultante de millions de petits. Voici naître
la
révolution dans un cœur, puis dans une famille. Et une fois le grand
601
dans un cœur, puis dans une famille. Et une fois
le
grand bouleversement accompli dans la « Cité secrète » de la vie priv
602
Et une fois le grand bouleversement accompli dans
la
« Cité secrète » de la vie privée, quelques regards sur la foule suff
603
uleversement accompli dans la « Cité secrète » de
la
vie privée, quelques regards sur la foule suffisent pour en préciser
604
secrète » de la vie privée, quelques regards sur
la
foule suffisent pour en préciser les conséquences. C’est ainsi qu’int
605
s regards sur la foule suffisent pour en préciser
les
conséquences. C’est ainsi qu’interviennent les trois Anglais mêlés au
606
er les conséquences. C’est ainsi qu’interviennent
les
trois Anglais mêlés au drame. M. Walpole leur a dévolu le soin d’entr
607
Anglais mêlés au drame. M. Walpole leur a dévolu
le
soin d’entrer tantôt dans un foyer, tantôt dans une église, pour cons
608
foyer, tantôt dans une église, pour constater que
la
foule ne réagit pas autrement que les individus. L’auteur, qui est l’
609
onstater que la foule ne réagit pas autrement que
les
individus. L’auteur, qui est l’un de ces Anglais, tombe malade avec à
610
foule ne réagit pas autrement que les individus.
L’
auteur, qui est l’un de ces Anglais, tombe malade avec à-propos et per
611
vec à-propos et perd connaissance chaque fois que
le
récit doit sauter quelques semaines. Qu’on veuille bien ne voir autre
612
« procédés », d’ailleurs assez peu choquants, que
le
revers de grandes qualités de réalisation d’idées en faits ou en situ
613
ts ou en situations dramatiques. Je donnerai tous
les
essais de M. de Voguë sur l’âme slave pour deux ou trois scènes de La
614
s. Je donnerai tous les essais de M. de Voguë sur
l’
âme slave pour deux ou trois scènes de La Cité secrète. Pour celle-ci
615
oguë sur l’âme slave pour deux ou trois scènes de
La
Cité secrète. Pour celle-ci par exemple (caché dans un réduit, Markov
616
ci par exemple (caché dans un réduit, Markovitch,
l’
idéaliste, surprend sa femme, la vertueuse Véra avec un des Anglais) :
617
duit, Markovitch, l’idéaliste, surprend sa femme,
la
vertueuse Véra avec un des Anglais) : Ils s’embrassaient comme des g
618
ébucher et de faire du bruit. Il songea : — C’est
la
fin pour moi. Puis : — Quelle imprudence ! Avec la lumière et peut-êt
619
a fin pour moi. Puis : — Quelle imprudence ! Avec
la
lumière et peut-être du monde dans l’appartement. Il avait si froid q
620
ence ! Avec la lumière et peut-être du monde dans
l’
appartement. Il avait si froid que ses dents claquaient. Il quitta sa
621
aquaient. Il quitta sa fenêtre, se traîna jusqu’à
l’
angle le plus éloigné du réduit, et se blottit là, sur le sol, les yeu
622
. Il quitta sa fenêtre, se traîna jusqu’à l’angle
le
plus éloigné du réduit, et se blottit là, sur le sol, les yeux grands
623
le plus éloigné du réduit, et se blottit là, sur
le
sol, les yeux grands ouverts dans le vide, sans rien voir. Ainsi le
624
éloigné du réduit, et se blottit là, sur le sol,
les
yeux grands ouverts dans le vide, sans rien voir. Ainsi le moujik de
625
ttit là, sur le sol, les yeux grands ouverts dans
le
vide, sans rien voir. Ainsi le moujik devant le bolchévique violant
626
ands ouverts dans le vide, sans rien voir. Ainsi
le
moujik devant le bolchévique violant sa patrie. Une effroyable accept
627
le vide, sans rien voir. Ainsi le moujik devant
le
bolchévique violant sa patrie. Une effroyable acceptation, mais elle
628
ment en révolte. Aucun cadre logique ne détermine
l’
avenir le plus proche. Il n’y a pas même des forces endormies dans l’â
629
évolte. Aucun cadre logique ne détermine l’avenir
le
plus proche. Il n’y a pas même des forces endormies dans l’âme russe
630
oche. Il n’y a pas même des forces endormies dans
l’
âme russe : mais des possibilités, à chaque instant, d’explosion. Le g
631
des possibilités, à chaque instant, d’explosion.
Le
géant russe est un enfant : va-t-il rire, va-t-il pleurer ? m’embrass
632
me tuer ? Il sent autour de lui quelque chose qui
le
gêne. C’est l’empire. Il le renverse, pour voir. Pendant qu’il est en
633
nt autour de lui quelque chose qui le gêne. C’est
l’
empire. Il le renverse, pour voir. Pendant qu’il est encore ébahi du f
634
lui quelque chose qui le gêne. C’est l’empire. Il
le
renverse, pour voir. Pendant qu’il est encore ébahi du fracas, le jui
635
r voir. Pendant qu’il est encore ébahi du fracas,
le
juif survient avec une méthode simplifiée pour l’exploitation des rui
636
le juif survient avec une méthode simplifiée pour
l’
exploitation des ruines. On sait le reste. Tout cela, Walpole ne le di
637
implifiée pour l’exploitation des ruines. On sait
le
reste. Tout cela, Walpole ne le dit pas. Mais ses personnages le sugg
638
s ruines. On sait le reste. Tout cela, Walpole ne
le
dit pas. Mais ses personnages le suggèrent de toute la force du troub
639
cela, Walpole ne le dit pas. Mais ses personnages
le
suggèrent de toute la force du trouble qu’ils créent en nous : Markov
640
t pas. Mais ses personnages le suggèrent de toute
la
force du trouble qu’ils créent en nous : Markovitch par exemple, ou S
641
nté qui enchantera M. Gide. n. « Hugh Walpole :
La
Cité secrète (Perrin, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
642
Conférence de René Guisan « Sur
le
Saint » (2 février 1926)c M. René Guisan, professeur de théologie
643
rofesseur de théologie à Lausanne et directeur de
la
Revue de théologie et de philosophie, inaugura lundi soir à l’aula, d
644
héologie et de philosophie, inaugura lundi soir à
l’
aula, devant un très nombreux public, la série des conférences que nou
645
di soir à l’aula, devant un très nombreux public,
la
série des conférences que nous promet le groupe neuchâtelois des « Am
646
public, la série des conférences que nous promet
le
groupe neuchâtelois des « Amis de la pensée protestante ». M. Guisan
647
nous promet le groupe neuchâtelois des « Amis de
la
pensée protestante ». M. Guisan avait choisi un sujet qui permet de f
648
et qui permet de façon particulièrement frappante
la
comparaison des points de vue catholique et protestant : la notion de
649
ison des points de vue catholique et protestant :
la
notion de « Saint » et son évolution au cours des siècles. Primitivem
650
on évolution au cours des siècles. Primitivement,
le
Saint est un homme que Dieu a mis à part par grâce pour qu’il serve.
651
r grâce pour qu’il serve. Mais très vite on étend
l’
appellation de saint à ceux qui par leur élévation morale ou leurs sou
652
ation morale ou leurs souffrances semblent s’être
le
plus rapprochés du Christ ; et dans l’Église persécutée, le martyre d
653
ent s’être le plus rapprochés du Christ ; et dans
l’
Église persécutée, le martyre devient le signe par excellence de la sa
654
pprochés du Christ ; et dans l’Église persécutée,
le
martyre devient le signe par excellence de la sainteté. Le peuple, en
655
; et dans l’Église persécutée, le martyre devient
le
signe par excellence de la sainteté. Le peuple, encore païen, voit da
656
ée, le martyre devient le signe par excellence de
la
sainteté. Le peuple, encore païen, voit dans la vénération des pèleri
657
e devient le signe par excellence de la sainteté.
Le
peuple, encore païen, voit dans la vénération des pèlerins pour les t
658
e la sainteté. Le peuple, encore païen, voit dans
la
vénération des pèlerins pour les tombes de leurs saints une forme d’a
659
païen, voit dans la vénération des pèlerins pour
les
tombes de leurs saints une forme d’adoration de dieux protecteurs. Ce
660
tecteurs. Cette croyance se répand, favorisée par
la
souplesse dont fait preuve l’Église d’alors quand il s’agit d’adapter
661
pand, favorisée par la souplesse dont fait preuve
l’
Église d’alors quand il s’agit d’adapter des traditions antiques au do
662
ions antiques au dogme en formation. Au Moyen Âge
l’
évolution se continue dans le même sens. On spécialise les « compétenc
663
mation. Au Moyen Âge l’évolution se continue dans
le
même sens. On spécialise les « compétences » des saints, ou de leurs
664
tion se continue dans le même sens. On spécialise
les
« compétences » des saints, ou de leurs reliques qui se multiplient p
665
qui se multiplient prodigieusement. Alors éclate
la
protestation de la Réforme. Honorons les saints pour l’exemple de leu
666
prodigieusement. Alors éclate la protestation de
la
Réforme. Honorons les saints pour l’exemple de leur vie : mais Christ
667
rs éclate la protestation de la Réforme. Honorons
les
saints pour l’exemple de leur vie : mais Christ est le seul médiateur
668
testation de la Réforme. Honorons les saints pour
l’
exemple de leur vie : mais Christ est le seul médiateur à qui doit s’a
669
ints pour l’exemple de leur vie : mais Christ est
le
seul médiateur à qui doit s’adresser le culte, en son cœur, du croyan
670
hrist est le seul médiateur à qui doit s’adresser
le
culte, en son cœur, du croyant. Le centre de gravité religieux est re
671
oit s’adresser le culte, en son cœur, du croyant.
Le
centre de gravité religieux est replacé en Christ. — Comment l’Église
672
ravité religieux est replacé en Christ. — Comment
l’
Église catholique réagit-elle ? En codifiant l’état de choses antérieu
673
nt l’Église catholique réagit-elle ? En codifiant
l’
état de choses antérieur. Donc l’Église continue à faire des saints, t
674
e ? En codifiant l’état de choses antérieur. Donc
l’
Église continue à faire des saints, tandis que ce terme n’a plus qu’un
675
tif pour nous protestants. Est-ce là nous juger ?
Les
catholiques nous reprochent d’avoir méconnu l’élément de grandeur mor
676
? Les catholiques nous reprochent d’avoir méconnu
l’
élément de grandeur morale que les saints maintiennent dans l’Église.
677
d’avoir méconnu l’élément de grandeur morale que
les
saints maintiennent dans l’Église. M. Guisan va très loin dans ses co
678
grandeur morale que les saints maintiennent dans
l’
Église. M. Guisan va très loin dans ses concessions à de telles critiq
679
avec d’autant plus de force que « en situant tout
le
devoir chrétien dans l’accomplissement scrupuleux, joyeux et fidèle d
680
rce que « en situant tout le devoir chrétien dans
l’
accomplissement scrupuleux, joyeux et fidèle de la vocation, le protes
681
l’accomplissement scrupuleux, joyeux et fidèle de
la
vocation, le protestantisme affirme qu’il existe divers ordres de sai
682
ment scrupuleux, joyeux et fidèle de la vocation,
le
protestantisme affirme qu’il existe divers ordres de sainteté ». Cett
683
de saints protestants, il existe des saints dans
le
protestantisme. Mais il n’est pas de fin aux œuvres de Dieu. La saint
684
sme. Mais il n’est pas de fin aux œuvres de Dieu.
La
sainteté parfaite ne commence qu’aux limites les plus hautes de la ve
685
. La sainteté parfaite ne commence qu’aux limites
les
plus hautes de la vertu. Dans ce sens, il ne peut exister de saint vé
686
ite ne commence qu’aux limites les plus hautes de
la
vertu. Dans ce sens, il ne peut exister de saint véritable. Il n’y a
687
pas de saints, mais il faut être parfait. Tel est
l’
enseignement de Jésus, telle est la pensée qu’a voulu restaurer le pro
688
rfait. Tel est l’enseignement de Jésus, telle est
la
pensée qu’a voulu restaurer le protestantisme. La place nous manque p
689
e Jésus, telle est la pensée qu’a voulu restaurer
le
protestantisme. La place nous manque pour louer comme il conviendrait
690
la pensée qu’a voulu restaurer le protestantisme.
La
place nous manque pour louer comme il conviendrait la clarté d’un exp
691
lace nous manque pour louer comme il conviendrait
la
clarté d’un exposé solidement documenté, et le scrupule d’historien e
692
it la clarté d’un exposé solidement documenté, et
le
scrupule d’historien et de chrétien qui permet à M. Guisan de montrer
693
et de chrétien qui permet à M. Guisan de montrer
le
point de vue adverse avec autant de compréhension et de sympathie que
694
rillant appareil dialectique ne sait produire que
l’
illusion. C’est la revanche du fameux scrupule protestant, qui ne peut
695
ialectique ne sait produire que l’illusion. C’est
la
revanche du fameux scrupule protestant, qui ne peut être un danger lo
696
ut être un danger lorsqu’il n’est, comme ici, que
la
loyauté d’un esprit animé par une foi agissante. c. « Conférence Gu
697
Adieu, beau désordre… (mars 1926)o
L’
époque s’en va très vite vers on ne sait quoi. On a mis le bonheur dev
698
s’en va très vite vers on ne sait quoi. On a mis
le
bonheur devant soi, dans un progrès mal défini, et l’on court après s
699
onheur devant soi, dans un progrès mal défini, et
l’
on court après sans fin. Même ceux qui ont perdu la croyance en un bon
700
’on court après sans fin. Même ceux qui ont perdu
la
croyance en un bonheur possible ou désirable subissent cette rage dés
701
essives lassitudes ou faim de violences — on sent
l’
approche de quelque chose, catastrophe ou révélation, brusque échappée
702
hoisir encore entre un ressaisissement profond et
la
ruine. Mais certes, il est temps qu’une lueur de conscience inquiète
703
iété affolée et ridiculement opportuniste où mène
la
pente de notre civilisation. Meneurs et chefs : des économistes, des
704
s, des financiers, des industriels. Il y a encore
les
hommes politiques, mais on a si souvent l’impression qu’ils battent l
705
ncore les hommes politiques, mais on a si souvent
l’
impression qu’ils battent la mesure devant un orchestre qui, sans eux,
706
mais on a si souvent l’impression qu’ils battent
la
mesure devant un orchestre qui, sans eux, jouerait aussi bien, aussi
707
erait aussi bien, aussi mal. Quant aux meneurs de
l’
opinion publique, il est trop tard pour les éduquer, il faudrait balay
708
eurs de l’opinion publique, il est trop tard pour
les
éduquer, il faudrait balayer. Je parle en général, sachant bien qu’un
709
Romier, un Bainville, quelques autres, sont parmi
les
plus conscients de ce temps ; mais si l’on songe aux bataillons de pâ
710
t parmi les plus conscients de ce temps ; mais si
l’
on songe aux bataillons de pâles opportunistes sans culture qui se cha
711
portunistes sans culture qui se chargent de gaver
les
masses du pain quotidien de la bêtise de tous les partis, on comprend
712
chargent de gaver les masses du pain quotidien de
la
bêtise de tous les partis, on comprendra ce que je veux dire. Il faud
713
les masses du pain quotidien de la bêtise de tous
les
partis, on comprendra ce que je veux dire. Il faudrait balayer, — et
714
veux dire. Il faudrait balayer, — et mettre qui à
la
place ? Nos penseurs, nos écrivains ont perdu le sens social. Cela de
715
la place ? Nos penseurs, nos écrivains ont perdu
le
sens social. Cela devient frappant dans les générations nouvelles. To
716
perdu le sens social. Cela devient frappant dans
les
générations nouvelles. Toute la jeune littérature décrit un type d’ho
717
nt frappant dans les générations nouvelles. Toute
la
jeune littérature décrit un type d’homme profondément antisocial, glo
718
rale résolument anarchiste. Ceux qui s’essaient à
l’
action, c’est encore pour cultiver leur moi. Ils y cherchent un fortif
719
Il leur manque une certitude foncière, une foi en
la
valeur de l’action. C’est pourquoi ils ne peuvent prétendre à l’actio
720
e une certitude foncière, une foi en la valeur de
l’
action. C’est pourquoi ils ne peuvent prétendre à l’action sociale que
721
action. C’est pourquoi ils ne peuvent prétendre à
l’
action sociale que l’époque réclame 1. C’est aussi pourquoi l’on ne sa
722
i ils ne peuvent prétendre à l’action sociale que
l’
époque réclame 1. C’est aussi pourquoi l’on ne saurait accorder trop d
723
iale que l’époque réclame 1. C’est aussi pourquoi
l’
on ne saurait accorder trop d’importance à leurs tentatives morales, s
724
tives morales, si singulières soient-elles — dont
le
grand public reste le témoin souvent sceptique ou railleur. Au cœur d
725
ulières soient-elles — dont le grand public reste
le
témoin souvent sceptique ou railleur. Au cœur de la crise de notre ci
726
témoin souvent sceptique ou railleur. Au cœur de
la
crise de notre civilisation, il y a un problème de morale à résoudre,
727
nce individuelle à recréer. Nous y employer, pour
l’
heure, c’est la seule façon efficace de servir. ⁂ On se complaît à rép
728
e à recréer. Nous y employer, pour l’heure, c’est
la
seule façon efficace de servir. ⁂ On se complaît à répéter que nous v
729
. ⁂ On se complaît à répéter que nous vivons dans
le
chaos des idées et des doctrines, et qu’il n’existe pas d’esprit du s
730
le, hors un certain « confusionnisme ». Mais sous
les
épaves de tous les vieux bateaux, il y a une seule mer. Nos agitation
731
« confusionnisme ». Mais sous les épaves de tous
les
vieux bateaux, il y a une seule mer. Nos agitations contradictoires s
732
comme des vagues soulevées par une même tempête.
L’
unité de notre temps est en profondeur : c’est une unité d’inquiétude.
733
it des édifices très différents de style, et dont
les
façades s’opposent avec hostilité. Dans l’intérieur des deux maisons
734
dont les façades s’opposent avec hostilité. Dans
l’
intérieur des deux maisons pourtant se débattent les mêmes brouilles d
735
’intérieur des deux maisons pourtant se débattent
les
mêmes brouilles de famille entre Art et Morale, Pensée et Action… Ces
736
, Pensée et Action… Ces deux moralistes adonnés à
la
culture et à la libération du moi paraissent bien les ancêtres des no
737
on… Ces deux moralistes adonnés à la culture et à
la
libération du moi paraissent bien les ancêtres des nouvelles générati
738
culture et à la libération du moi paraissent bien
les
ancêtres des nouvelles générations de héros de roman, lesquels sont t
739
rtu. Ce qui n’a rien d’étonnant : ils ne sont que
les
projections du moi de leurs auteurs. Or l’égoïsme est vertu cardinale
740
t que les projections du moi de leurs auteurs. Or
l’
égoïsme est vertu cardinale pour le créateur. Mais quel est ce besoin
741
rs auteurs. Or l’égoïsme est vertu cardinale pour
le
créateur. Mais quel est ce besoin si général de s’incarner, dans le h
742
quel est ce besoin si général de s’incarner, dans
le
héros de son roman, de se voir vivre, dans son œuvre ? C’est ici la c
743
man, de se voir vivre, dans son œuvre ? C’est ici
la
conception même de la littérature, telle qu’elle apparaît chez les ém
744
dans son œuvre ? C’est ici la conception même de
la
littérature, telle qu’elle apparaît chez les émules de Barrès comme c
745
me de la littérature, telle qu’elle apparaît chez
les
émules de Barrès comme chez ceux de Gide, qu’il faut préciser. L’éthi
746
rès comme chez ceux de Gide, qu’il faut préciser.
L’
éthique et l’esthétique convergent dans la littérature d’aujourd’hui,
747
z ceux de Gide, qu’il faut préciser. L’éthique et
l’
esthétique convergent dans la littérature d’aujourd’hui, et plusieurs
748
éciser. L’éthique et l’esthétique convergent dans
la
littérature d’aujourd’hui, et plusieurs déjà reconnaissent ne pas pou
749
i, et plusieurs déjà reconnaissent ne pas pouvoir
les
séparer. On n’écrit plus pour s’amuser : ni pour amuser un public. Un
750
lic. Un livre est une action, une expérience. Et,
le
plus souvent, sur soi-même. On écrit pour cultiver son moi, pour l’ép
751
ur soi-même. On écrit pour cultiver son moi, pour
l’
éprouver et le prémunir, pour y découvrir des possibilités neuves, — p
752
n écrit pour cultiver son moi, pour l’éprouver et
le
prémunir, pour y découvrir des possibilités neuves, — pour le libérer
753
pour y découvrir des possibilités neuves, — pour
le
libérer. Il n’est pas question de rechercher ici les origines histori
754
libérer. Il n’est pas question de rechercher ici
les
origines historiques d’une conception qui, de plus en plus, se révèle
755
’une conception qui, de plus en plus, se révèle à
la
base de tous les problèmes modernes en littérature. Jacques Rivière s
756
qui, de plus en plus, se révèle à la base de tous
les
problèmes modernes en littérature. Jacques Rivière s’y appliqua dans
757
erniers articles2. Il rendait responsable de tout
le
« mal », le romantisme — et c’est plus que probable. Mais il en tirai
758
cles2. Il rendait responsable de tout le « mal »,
le
romantisme — et c’est plus que probable. Mais il en tirait une raison
759
robable. Mais il en tirait une raison nouvelle de
le
condamner, et nous ne pouvons le suivre jusque-là : il est vain de di
760
ison nouvelle de le condamner, et nous ne pouvons
le
suivre jusque-là : il est vain de dire qu’une époque s’est trompée, p
761
ne époque s’est trompée, puisqu’elle seule permet
la
suivante qui peut-être retrouvera une nouvelle face de la vérité. Bor
762
nte qui peut-être retrouvera une nouvelle face de
la
vérité. Bornons-nous à noter le phénomène, puis à en suivre quelques
763
nouvelle face de la vérité. Bornons-nous à noter
le
phénomène, puis à en suivre quelques conséquences. Connaissance inté
764
ance intégrale et culture de soi, telle peut être
l’
épigraphe de toute la littérature moderne. Il n’a pas fallu longtemps
765
ture de soi, telle peut être l’épigraphe de toute
la
littérature moderne. Il n’a pas fallu longtemps aux Français pour pou
766
fallu longtemps aux Français pour pousser à bout
l’
expérience3. Ingénieux équilibres entre la raison et les sens, entre l
767
à bout l’expérience3. Ingénieux équilibres entre
la
raison et les sens, entre le moi et le monde : l’ennui est venu avant
768
érience3. Ingénieux équilibres entre la raison et
les
sens, entre le moi et le monde : l’ennui est venu avant l’épuisement
769
eux équilibres entre la raison et les sens, entre
le
moi et le monde : l’ennui est venu avant l’épuisement des combinaison
770
bres entre la raison et les sens, entre le moi et
le
monde : l’ennui est venu avant l’épuisement des combinaisons possible
771
la raison et les sens, entre le moi et le monde :
l’
ennui est venu avant l’épuisement des combinaisons possibles. Exaltati
772
entre le moi et le monde : l’ennui est venu avant
l’
épuisement des combinaisons possibles. Exaltation méthodique de nos fa
773
cultiver certaines douleurs, plaisirs rares ; et
les
dissonances les plus aiguës prennent la place d’honneur dans des esth
774
nes douleurs, plaisirs rares ; et les dissonances
les
plus aiguës prennent la place d’honneur dans des esthétiques construi
775
res ; et les dissonances les plus aiguës prennent
la
place d’honneur dans des esthétiques construites en hâte à l’usage de
776
onneur dans des esthétiques construites en hâte à
l’
usage de sensibilités surmenées. Dégoût, parce que tout a été essayé.
777
se, contre soi, contre une difficulté.) Dégoût de
la
vie, dégoût du bonheur, dégoût de soi, — on l’étend vite à la société
778
de la vie, dégoût du bonheur, dégoût de soi, — on
l’
étend vite à la société entière. Dégoût d’une civilisation qui aboutit
779
ût du bonheur, dégoût de soi, — on l’étend vite à
la
société entière. Dégoût d’une civilisation qui aboutit logiquement à
780
ogiquement à cet épuisant et forcené gaspillage :
la
guerre. Certains s’en tiennent à leur dégoût et l’exploitent. Ainsi s
781
a guerre. Certains s’en tiennent à leur dégoût et
l’
exploitent. Ainsi se légitime le surréalisme, qui vomit le monde entie
782
à leur dégoût et l’exploitent. Ainsi se légitime
le
surréalisme, qui vomit le monde entier et la raison avec. « Révolutio
783
tent. Ainsi se légitime le surréalisme, qui vomit
le
monde entier et la raison avec. « Révolution d’abord. Révolution touj
784
time le surréalisme, qui vomit le monde entier et
la
raison avec. « Révolution d’abord. Révolution toujours ». « Pour nous
785
tion d’abord. Révolution toujours ». « Pour nous,
le
salut n’est nulle part… » « Je comprends la révolte des autres et que
786
nous, le salut n’est nulle part… » « Je comprends
la
révolte des autres et quelles prières cela fait à Dieu », disait Drie
787
n dégoût, un Montherlant s’abandonne au salut par
la
violence. Une sensualité moins énervée lui permet de brutaliser quelq
788
oins énervée lui permet de brutaliser quelque peu
les
« grands problèmes », et le voilà reparti dans un égoïsme triomphant,
789
utaliser quelque peu les « grands problèmes », et
le
voilà reparti dans un égoïsme triomphant, pur du désir d’action qui e
790
’action qui empêtrait Barrès dans des dilemmes où
l’
art trouvait mal sa nourriture. Drieu la Rochelle tente la même fuite.
791
ouvait mal sa nourriture. Drieu la Rochelle tente
la
même fuite. Mais trop lucide, hésite, trébuche, oscille entre la viol
792
Mais trop lucide, hésite, trébuche, oscille entre
la
violence et le désespoir (c’est l’amour), et, déchiré de contradictio
793
e, hésite, trébuche, oscille entre la violence et
le
désespoir (c’est l’amour), et, déchiré de contradictions, tire du dés
794
oscille entre la violence et le désespoir (c’est
l’
amour), et, déchiré de contradictions, tire du désordre de ses certitu
795
tire du désordre de ses certitudes fragmentaires
la
matière de quelques pamphlets par quoi il se raccroche au monde. Mais
796
au monde. Mais il a touché certains bas-fonds de
l’
âme où s’éveille un désenchantement qui l’amène au besoin d’une mystiq
797
onds de l’âme où s’éveille un désenchantement qui
l’
amène au besoin d’une mystique. Et pour finir, l’un des derniers venus
798
nus, Marcel Arland, — plus jeune, il n’a pas fait
la
guerre — c’est le même désenchantement précoce, sans la brusquerie de
799
, — plus jeune, il n’a pas fait la guerre — c’est
le
même désenchantement précoce, sans la brusquerie de ses aînés. Encore
800
rre — c’est le même désenchantement précoce, sans
la
brusquerie de ses aînés. Encore un qui s’est complu dans son dégoût ;
801
voir comme un appel du Dieu perdu. Il avoue enfin
la
cause secrète des inquiétudes modernes : la perte d’une foi. Il a bes
802
enfin la cause secrète des inquiétudes modernes :
la
perte d’une foi. Il a besoin de Dieu, mais il attend en vain sa Révél
803
on : « C’est peut-être que je suis médiocre entre
les
hommes ». C’est plutôt qu’il est trop attaché encore à se regarder ch
804
on dessein. ⁂ Décidément nous sommes malades dans
les
profondeurs. Et le mal est si cruellement isolé, commenté par ceux qu
805
ment nous sommes malades dans les profondeurs. Et
le
mal est si cruellement isolé, commenté par ceux qui le portent en eux
806
l est si cruellement isolé, commenté par ceux qui
le
portent en eux qu’il en paraît plus incurable. Ces jeunes gens n’en f
807
indre leur déséquilibre. Il serait temps de faire
la
critique des méthodes et des façons de vivre autant que de penser qui
808
s et des façons de vivre autant que de penser qui
les
ont amenés aux positions qu’on vient d’esquisser. Mais on trouve tout
809
qu’on vient d’esquisser. Mais on trouve tout dans
les
livres des jeunes, dites-vous, le pire et le meilleur, toutes les vie
810
ouve tout dans les livres des jeunes, dites-vous,
le
pire et le meilleur, toutes les vieilleries morales et immorales, tou
811
ans les livres des jeunes, dites-vous, le pire et
le
meilleur, toutes les vieilleries morales et immorales, tous les parad
812
eunes, dites-vous, le pire et le meilleur, toutes
les
vieilleries morales et immorales, tous les paradoxes, le chaos, etc.
813
toutes les vieilleries morales et immorales, tous
les
paradoxes, le chaos, etc. — Certes, aucune époque ne fut à la fois pl
814
lleries morales et immorales, tous les paradoxes,
le
chaos, etc. — Certes, aucune époque ne fut à la fois plus morale et p
815
u’aucune ne s’est autant attachée à chercher dans
le
seul moi les fondements d’une éthique. Presque tous sont hantés par l
816
s’est autant attachée à chercher dans le seul moi
les
fondements d’une éthique. Presque tous sont hantés par la peur d’une
817
ments d’une éthique. Presque tous sont hantés par
la
peur d’une morale qui « déforme », qui mutile une tendance naturelle,
818
e naturelle, qui élague, qui opère un choix parmi
les
éléments mêlés de la personnalité. Toute tendance qu’ils découvrent e
819
e, qui opère un choix parmi les éléments mêlés de
la
personnalité. Toute tendance qu’ils découvrent en eux est non seuleme
820
oi ordre et désordre, raison et folie, etc. Si je
les
cultive simultanément il est clair que les tendances négatives l’empo
821
Si je les cultive simultanément il est clair que
les
tendances négatives l’emportent, il est plus facile et plus enivrant
822
tanément il est clair que les tendances négatives
l’
emportent, il est plus facile et plus enivrant de se laisser glisser q
823
vrant de se laisser glisser que de construire. Et
l’
on y prend vite goût. Cela tourne alors en passion de détruire, en ha
824
t de quoi se glorifient ses tenants, ils y voient
la
suprême liberté. Le désir se précisait en moi de commettre enfin l’ac
825
ent ses tenants, ils y voient la suprême liberté.
Le
désir se précisait en moi de commettre enfin l’acte vraiment indéfend
826
. Le désir se précisait en moi de commettre enfin
l’
acte vraiment indéfendable de tout point de vue… J’avais goûté à l’alc
827
ndéfendable de tout point de vue… J’avais goûté à
l’
alcool singulièrement perfide de perdre ce que nous chérissons… Nous a
828
ce que nous chérissons… Nous apprîmes à mépriser
les
longues vies heureuses que nous avions jusqu’alors enviées, et une nu
829
ions jusqu’alors enviées, et une nuit, nous fîmes
le
procès de toutes les jouissances humaines. L’espèce de sincérité terr
830
iées, et une nuit, nous fîmes le procès de toutes
les
jouissances humaines. L’espèce de sincérité terroriste dans laquelle
831
mes le procès de toutes les jouissances humaines.
L’
espèce de sincérité terroriste dans laquelle nous nous obstinions nous
832
nous niions toute vérité, nous étions dominés par
le
sens d’une réalité morale absolue que certains d’entre nous eussent a
833
illeurs admirable4, de Louis Aragon, pour marquer
l’
aboutissement d’une évolution qui a son origine dans l’œuvre de Gide.
834
utissement d’une évolution qui a son origine dans
l’
œuvre de Gide. Entre les Nourritures terrestres, les Caves du Vatican
835
ion qui a son origine dans l’œuvre de Gide. Entre
les
Nourritures terrestres, les Caves du Vatican et Dada, il y a place po
836
’œuvre de Gide. Entre les Nourritures terrestres,
les
Caves du Vatican et Dada, il y a place pour tous les chaînons d’inqui
837
Caves du Vatican et Dada, il y a place pour tous
les
chaînons d’inquiétude, de malaises, de révoltes plus ou moins complèt
838
plus ou moins complètes au gré des tempéraments.
Le
geste de Lafcadio généralisé : c’est le surréalisme. De l’acte gratui
839
éraments. Le geste de Lafcadio généralisé : c’est
le
surréalisme. De l’acte gratuit commis par un héros de roman, à la vie
840
de Lafcadio généralisé : c’est le surréalisme. De
l’
acte gratuit commis par un héros de roman, à la vie gratuite que préte
841
De l’acte gratuit commis par un héros de roman, à
la
vie gratuite que prétendent mener les surréalistes, il n’a fallu que
842
de roman, à la vie gratuite que prétendent mener
les
surréalistes, il n’a fallu que le temps pour une folie de s’emballer.
843
étendent mener les surréalistes, il n’a fallu que
le
temps pour une folie de s’emballer. La plupart des romans de jeunes q
844
qui se situent entre Gide et Aragon nous montrent
le
même personnage : un être sans foi, à qui une sorte de « sincérité »
845
nné parce que ce serait fausser quelque chose ; à
la
merci des circonstances extérieures qu’il méprise toutes également ;
846
e juger5. Il y a véritablement une littérature de
l’
acte gratuit, qui restera caractéristique de notre époque. Mais Gide
847
méthode de culture de soi, « d’intensification de
la
vie », et qui consiste à pousser à l’extrême certaines « vertus », le
848
fication de la vie », et qui consiste à pousser à
l’
extrême certaines « vertus », les pousser jusqu’à l’absurde. Surenchèr
849
siste à pousser à l’extrême certaines « vertus »,
les
pousser jusqu’à l’absurde. Surenchère morale dont le début de la Tent
850
extrême certaines « vertus », les pousser jusqu’à
l’
absurde. Surenchère morale dont le début de la Tentative amoureuse off
851
pousser jusqu’à l’absurde. Surenchère morale dont
le
début de la Tentative amoureuse offrait déjà une singulière préfigura
852
u’à l’absurde. Surenchère morale dont le début de
la
Tentative amoureuse offrait déjà une singulière préfiguration : Certe
853
singulière préfiguration : Certes ce ne seront ni
les
lois importunes des hommes, ni les craintes, ni la pudeur, ni le remo
854
e ne seront ni les lois importunes des hommes, ni
les
craintes, ni la pudeur, ni le remords, ni le respect de moi ni de mes
855
s lois importunes des hommes, ni les craintes, ni
la
pudeur, ni le remords, ni le respect de moi ni de mes rêves, ni toi,
856
nes des hommes, ni les craintes, ni la pudeur, ni
le
remords, ni le respect de moi ni de mes rêves, ni toi, triste mort, n
857
ni les craintes, ni la pudeur, ni le remords, ni
le
respect de moi ni de mes rêves, ni toi, triste mort, ni l’effroi d’ap
858
t de moi ni de mes rêves, ni toi, triste mort, ni
l’
effroi d’après-tombe qui m’empêcheront de joindre ce que je désire ; n
859
de joindre ce que je désire ; ni rien — rien que
l’
orgueil, sachant une chose si forte, de me sentir plus fort encore et
860
ose si forte, de me sentir plus fort encore et de
la
vaincre. — Mais la joie d’une si haute victoire — n’est pas si douce
861
sentir plus fort encore et de la vaincre. — Mais
la
joie d’une si haute victoire — n’est pas si douce encore, n’est pas s
862
à quel genre de sophismes conduit ce mouvement de
l’
esprit qui n’utilise une borne que pour sauter plus loin. Ainsi, c’est
863
loin. Ainsi, c’est par humilité qu’on renoncera à
la
vertu, sous prétexte qu’elle pousse à l’orgueil ; c’est par sincérité
864
oncera à la vertu, sous prétexte qu’elle pousse à
l’
orgueil ; c’est par sincérité qu’on mentira, puisque parfois nous somm
865
llement à considérer un certain immoralisme comme
la
seule vertu digne d’une élite. Tel est l’état d’esprit de la plupart
866
e comme la seule vertu digne d’une élite. Tel est
l’
état d’esprit de la plupart de nos jeunes moralistes. Le mot de parado
867
d’esprit de la plupart de nos jeunes moralistes.
Le
mot de paradoxe serait bien pauvre pour expliquer ce besoin de porter
868
chose, au-delà de toutes limites. « Il n’y a que
les
excès qui méritent notre enthousiasme ». Mais « cette fureur qui le s
869
ent notre enthousiasme ». Mais « cette fureur qui
le
soulevait contre lui-même, qui lui faisait mépriser son propre intérê
870
mépriser son propre intérêt6… » c’est proprement
la
perversion d’une vertu qui se brûle elle-même. Je ne vais point nier
871
rtu qui se brûle elle-même. Je ne vais point nier
la
fécondité psychologique d’une attitude par ailleurs si proche de cert
872
es dernières conséquences suppose qu’on ait perdu
le
sens des ensembles rationnels. Nous ne pensons plus par ensembles7 :
873
pas d’une fatigue immense. Nous voyons se fausser
le
rythme des jours et des nuits à mesure que se développe une civilisat
874
que se développe une civilisation mécanicienne. (
Les
machines n’ont pas besoin de sommeil.) La fatigue devient un des élém
875
enne. (Les machines n’ont pas besoin de sommeil.)
La
fatigue devient un des éléments les plus importants de notre psycholo
876
n de sommeil.) La fatigue devient un des éléments
les
plus importants de notre psychologie. Images des surréalistes — ils l
877
notre psychologie. Images des surréalistes — ils
l’
indiquent eux-mêmes —, calembours, expression métaphorique et symboliq
878
embours, expression métaphorique et symbolique de
la
pensée : la littérature d’avant-garde est fille de la fatigue. La Mus
879
ression métaphorique et symbolique de la pensée :
la
littérature d’avant-garde est fille de la fatigue. La Muse a trop vei
880
ensée : la littérature d’avant-garde est fille de
la
fatigue. La Muse a trop veillé. L’amour moderne, nerveux, saugrenu ju
881
ittérature d’avant-garde est fille de la fatigue.
La
Muse a trop veillé. L’amour moderne, nerveux, saugrenu jusqu’au sadis
882
e est fille de la fatigue. La Muse a trop veillé.
L’
amour moderne, nerveux, saugrenu jusqu’au sadisme, trop lucide, est un
883
u sadisme, trop lucide, est un amour de fatigués (
Les
Nuits, l’Europe galante, de Morand). La lucidité aiguë de nos psychol
884
trop lucide, est un amour de fatigués (Les Nuits,
l’
Europe galante, de Morand). La lucidité aiguë de nos psychologues est
885
atigués (Les Nuits, l’Europe galante, de Morand).
La
lucidité aiguë de nos psychologues est cet état presque inhumain de c
886
ie, à ses sensations, à ses automatismes. En art,
la
fatigue est un des états les plus riches de visions nouvelles, et qui
887
automatismes. En art, la fatigue est un des états
les
plus riches de visions nouvelles, et qui résiste le mieux à l’analyse
888
plus riches de visions nouvelles, et qui résiste
le
mieux à l’analyse. Seulement nous y perdons graduellement l’intellige
889
s de visions nouvelles, et qui résiste le mieux à
l’
analyse. Seulement nous y perdons graduellement l’intelligence de nos
890
l’analyse. Seulement nous y perdons graduellement
l’
intelligence de nos instincts, la conscience de nos limites naturelles
891
ns graduellement l’intelligence de nos instincts,
la
conscience de nos limites naturelles, tout ce qui servirait de frein
892
⁂ Recréer une conscience individuelle ; retrouver
le
sens social, le sens des ensembles et des proportions ; rééduquer les
893
nscience individuelle ; retrouver le sens social,
le
sens des ensembles et des proportions ; rééduquer les instincts du co
894
sens des ensembles et des proportions ; rééduquer
les
instincts du corps et de l’âme ; vouloir une foi… La morale de demain
895
portions ; rééduquer les instincts du corps et de
l’
âme ; vouloir une foi… La morale de demain sera en réaction complète c
896
instincts du corps et de l’âme ; vouloir une foi…
La
morale de demain sera en réaction complète contre celle d’aujourd’hui
897
out. Il ne s’agit pas, encore une fois, de renier
l’
immense effort pour se libérer de l’universelle hypocrisie accompli pa
898
is, de renier l’immense effort pour se libérer de
l’
universelle hypocrisie accompli par des générations qui ne lèguent aux
899
hons au contraire profiter des démonstrations par
l’
absurde de quelques problèmes moraux et littéraires 8, à quoi beaucoup
900
t agir, ou bien être agi. Donner une conscience à
l’
époque, ou se défaire avec elle et dériver vers un Orient d’oubli — (m
901
hies, quels Niagaras 9 !) Quelques jeunes hommes
l’
ont compris. Ils sont modestes — ne s’isolant pas de la Société ; ils
902
compris. Ils sont modestes — ne s’isolant pas de
la
Société ; ils savent que pour lutter il faut des armes et ne méprisen
903
pour lutter il faut des armes et ne méprisent pas
la
culture ; sans autre parti pris que celui de vivre, c’est-à-dire de c
904
ttie à son objet, qu’il n’y a de liberté que dans
la
soumission aux lois naturelles ; et leur effort est de retrouver ces
905
gnent pas de choisir parmi leurs instincts, ni de
les
améliorer 10. Tout ceci est assez nouveau. (Après tant de cocktails,
906
ouveau. (Après tant de cocktails, quelle saveur a
l’
eau claire !) Quelques autres se recueillent encore dans l’attente ang
907
ire !) Quelques autres se recueillent encore dans
l’
attente angoissée d’une révélation et dans la connaissance de leur mis
908
dans l’attente angoissée d’une révélation et dans
la
connaissance de leur misère. Pareils à ceux dont Vinet disait qu’ils
909
ont Vinet disait qu’ils s’en vont « épiant toutes
les
émotions de l’âme, et lui multipliant ses douleurs en les lui nommant
910
qu’ils s’en vont « épiant toutes les émotions de
l’
âme, et lui multipliant ses douleurs en les lui nommant », ils décrive
911
ions de l’âme, et lui multipliant ses douleurs en
les
lui nommant », ils décrivent le tourment dont sortira peut-être une f
912
ses douleurs en les lui nommant », ils décrivent
le
tourment dont sortira peut-être une foi nouvelle ; mais qu’ils sachen
913
foi nouvelle ; mais qu’ils sachent, quand viendra
le
moment, détourner les yeux de leur recherche pour contempler un absol
914
u’ils sachent, quand viendra le moment, détourner
les
yeux de leur recherche pour contempler un absolu ; qu’ils osent se fa
915
u’ils osent se faire violence pour se hisser dans
la
lumière. « Il vaut mieux, dit encore Vinet, ne voir d’abord que les g
916
vaut mieux, dit encore Vinet, ne voir d’abord que
les
grands traits de sa nature, ne connaître que les grands mots de la la
917
les grands traits de sa nature, ne connaître que
les
grands mots de la langue morale, suivre à l’égard de soi-même la méth
918
de sa nature, ne connaître que les grands mots de
la
langue morale, suivre à l’égard de soi-même la méthode de l’Évangile
919
de la langue morale, suivre à l’égard de soi-même
la
méthode de l’Évangile qui, prenant à plein poing toutes ces petites m
920
orale, suivre à l’égard de soi-même la méthode de
l’
Évangile qui, prenant à plein poing toutes ces petites misères, en com
921
civiques. Mais que nos moralistes — presque tous
les
jeunes écrivains — se souviennent de penser en fonction du temps prés
922
temps présent, soit qu’ils veuillent en améliorer
les
conditions, ou les transformer totalement. — Alors, vous croyez à l’a
923
qu’ils veuillent en améliorer les conditions, ou
les
transformer totalement. — Alors, vous croyez à l’action sociale des é
924
es transformer totalement. — Alors, vous croyez à
l’
action sociale des écrivains ? Peut-être. En tout cas je vois bien le
925
s écrivains ? Peut-être. En tout cas je vois bien
le
mal qu’ils ont fait et qu’au fond, leur refus d’agir sur l’époque, c’
926
ils ont fait et qu’au fond, leur refus d’agir sur
l’
époque, c’est une manière d’agir contre elle. 2. « La crise du concep
927
oque, c’est une manière d’agir contre elle. 2. «
La
crise du concept de littérature », NRF, 1923. 3. « Il s’était dévelo
928
« Il s’était développé en nous un goût furieux de
l’
expérience humaine. » (Aragon) 4. « Lorsque tout est fini » dans Libe
929
Libertinage. (NRF) 5. Détours de René Crevel ;
les
romans de Philippe Soupault ; l’Incertain de Maurice Betz ; certains
930
e René Crevel ; les romans de Philippe Soupault ;
l’
Incertain de Maurice Betz ; certains personnages d’Arland, de Louis Ar
931
ouis Aragon, de Drieu la Rochelle. Je ne cite que
les
plus significatifs. 6. Aragon, loc. cit. 7. Le « goût du désastre
932
es plus significatifs. 6. Aragon, loc. cit. 7.
Le
« goût du désastre » qui est au fond du romantisme moderne nous empêc
933
ement de construire et de nous construire. Jamais
l’
on ne fut plus loin de l’idéal goethéen : au lieu de tout composer en
934
nous construire. Jamais l’on ne fut plus loin de
l’
idéal goethéen : au lieu de tout composer en soi, on veut tout cultive
935
omposer en soi, on veut tout cultiver, et en fait
l’
on se contente d’une violence, d’un vice, d’une inquiétude. 8. « Cert
936
réelles » (Marcel Arland). 9. Ce serait au moins
la
liberté ! crieront les surréalistes. Voire. On est moins libre à Mosc
937
nd). 9. Ce serait au moins la liberté ! crieront
les
surréalistes. Voire. On est moins libre à Moscou qu’à Montparnasse. D
938
D’ailleurs leurs théories nous ramèneraient vite
l’
âge de la pierre, à la condition d’homme la plus nue ; la plus éloigné
939
rs leurs théories nous ramèneraient vite l’âge de
la
pierre, à la condition d’homme la plus nue ; la plus éloignée de cell
940
ries nous ramèneraient vite l’âge de la pierre, à
la
condition d’homme la plus nue ; la plus éloignée de celle qui permet
941
t vite l’âge de la pierre, à la condition d’homme
la
plus nue ; la plus éloignée de celle qui permet le surréalisme. 10.
942
e la pierre, à la condition d’homme la plus nue ;
la
plus éloignée de celle qui permet le surréalisme. 10. Une équipe d’h
943
a plus nue ; la plus éloignée de celle qui permet
le
surréalisme. 10. Une équipe d’hommes solides suffirait à restaurer u
944
voulait…) o. « Adieu, beau désordre… (Notes sur
la
jeune littérature et la morale) », Bibliothèque universelle et Revue
945
beau désordre… (Notes sur la jeune littérature et
la
morale) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mars
946
vril 1926)d Pour la première fois cette année,
les
conférences de l’Association chrétienne d’étudiants eurent lieu au pr
947
la première fois cette année, les conférences de
l’
Association chrétienne d’étudiants eurent lieu au printemps, et non pl
948
ne. Un plein succès a répondu à cette innovation.
Le
sujet de la première partie des conférences, les Objections des intel
949
. Le sujet de la première partie des conférences,
les
Objections des intellectuels au Dieu chrétien, fut introduit par M. R
950
istingué, qui se fit avec beaucoup d’intelligence
l’
avocat du diable, en montrant que tous les faits religieux admettent à
951
lligence l’avocat du diable, en montrant que tous
les
faits religieux admettent à côté de l’explication mystique une explic
952
que tous les faits religieux admettent à côté de
l’
explication mystique une explication scientifique. C’est donc à la seu
953
stique une explication scientifique. C’est donc à
la
seule volonté de choisir. M. le pasteur Bertrand de Lyon, répondit en
954
que. C’est donc à la seule volonté de choisir. M.
le
pasteur Bertrand de Lyon, répondit en exposant les exigences de l’Éva
955
le pasteur Bertrand de Lyon, répondit en exposant
les
exigences de l’Évangile en face de la pensée moderne, et fut impressi
956
nd de Lyon, répondit en exposant les exigences de
l’
Évangile en face de la pensée moderne, et fut impressionnant de vigueu
957
n exposant les exigences de l’Évangile en face de
la
pensée moderne, et fut impressionnant de vigueur dialectique et de la
958
que et de largeur d’idées. Une soirée consacrée à
la
fédération vint interrompre les discussions philosophiques provoquées
959
soirée consacrée à la fédération vint interrompre
les
discussions philosophiques provoquées par ces deux travaux. Avec la c
960
losophiques provoquées par ces deux travaux. Avec
la
conférence de M. Jean Cadier, un jeune pasteur français, on descendit
961
ier, un jeune pasteur français, on descendit — ou
l’
on monta suivant M. A. Léo — du domaine de la pensée pure dans celui d
962
— ou l’on monta suivant M. A. Léo — du domaine de
la
pensée pure dans celui de l’action. M. Cadier montra le conflit de la
963
Léo — du domaine de la pensée pure dans celui de
l’
action. M. Cadier montra le conflit de la théologie moderne avec l’act
964
sée pure dans celui de l’action. M. Cadier montra
le
conflit de la théologie moderne avec l’action religieuse en s’appuyan
965
celui de l’action. M. Cadier montra le conflit de
la
théologie moderne avec l’action religieuse en s’appuyant sur des expé
966
er montra le conflit de la théologie moderne avec
l’
action religieuse en s’appuyant sur des expériences faites pendant le
967
en s’appuyant sur des expériences faites pendant
le
réveil de la Drôme, dont il est l’un des artisans les plus actifs. Po
968
t sur des expériences faites pendant le réveil de
la
Drôme, dont il est l’un des artisans les plus actifs. Pour remplacer
969
réveil de la Drôme, dont il est l’un des artisans
les
plus actifs. Pour remplacer un travail promis par M. A. Reymond malhe
970
é, M. Pierre Maury fit une causerie émouvante sur
l’
Évolution religieuse de Jacques Rivière, qui se trouva préciser bien d
971
nts laissés en suspens dans la première partie de
la
conférence. Puis M. A. Brémond, étudiant en théologie, présenta deux
972
riers de Paris, Clerville et Janson, dont il a eu
l’
occasion de partager les conditions de vie et qui nous parlèrent l’un
973
le et Janson, dont il a eu l’occasion de partager
les
conditions de vie et qui nous parlèrent l’un de la Réalité prolétarie
974
s conditions de vie et qui nous parlèrent l’un de
la
Réalité prolétarienne, l’autre de la Mentalité prolétarienne. Brémond
975
rent l’un de la Réalité prolétarienne, l’autre de
la
Mentalité prolétarienne. Brémond conclut en montrant la nécessité et
976
talité prolétarienne. Brémond conclut en montrant
la
nécessité et les difficultés d’une action missionnaire dans ces milie
977
enne. Brémond conclut en montrant la nécessité et
les
difficultés d’une action missionnaire dans ces milieux, comme M. Terr
978
missionnaire dans ces milieux, comme M. Terrisse
l’
avait fait le soir avant pour les milieux d’ouvriers noirs au Cap. San
979
dans ces milieux, comme M. Terrisse l’avait fait
le
soir avant pour les milieux d’ouvriers noirs au Cap. Sans toucher à d
980
comme M. Terrisse l’avait fait le soir avant pour
les
milieux d’ouvriers noirs au Cap. Sans toucher à des questions de part
981
cher leurs auditeurs de leur lit de préjugés pour
les
placer véritablement en face de la « réalité prolétarienne ». « Cercl
982
préjugés pour les placer véritablement en face de
la
« réalité prolétarienne ». « Cercles vicieux que nos syndicats. Cercl
983
ercles vicieux que nos syndicats. Cercle vicieux,
l’
augmentation des salaires. Ce que nous voulons, c’est élever l’homme a
984
n des salaires. Ce que nous voulons, c’est élever
l’
homme au-dessus de la plus dégradante condition, et nous n’y arriveron
985
e nous voulons, c’est élever l’homme au-dessus de
la
plus dégradante condition, et nous n’y arriverons que par un travail
986
, cela peut paraître excessif à qui n’a pas connu
l’
atmosphère particulière à ces rencontres. Rien de plus aéré, au moral
987
l pense sans se préoccuper d’être bien pensant et
les
Romands recouvrent l’usage de la parole, puis on va se dégourdir sur
988
per d’être bien pensant et les Romands recouvrent
l’
usage de la parole, puis on va se dégourdir sur un ballon ou bien l’on
989
bien pensant et les Romands recouvrent l’usage de
la
parole, puis on va se dégourdir sur un ballon ou bien l’on poursuit h
990
le, puis on va se dégourdir sur un ballon ou bien
l’
on poursuit hors du village une discussion toujours trop courte. Et le
991
u village une discussion toujours trop courte. Et
les
repas réunissent tout le monde dans la gaieté la plus charmante. On y
992
ourte. Et les repas réunissent tout le monde dans
la
gaieté la plus charmante. On y vit un ouvrier en maillot rouge assis
993
les repas réunissent tout le monde dans la gaieté
la
plus charmante. On y vit un ouvrier en maillot rouge assis entre un b
994
rançais. Miracle qui nous fit croire un instant à
la
fameuse devise de la Révolution. d. « Conférences d’Aubonne », Suis
995
nous fit croire un instant à la fameuse devise de
la
Révolution. d. « Conférences d’Aubonne », Suisse libérale, Neuchâte
996
)p Au creux des couleurs assourdies d’un divan
le
soir, tandis que les fenêtres s’ouvraient vers le ciel de Florence… «
997
ouleurs assourdies d’un divan le soir, tandis que
les
fenêtres s’ouvraient vers le ciel de Florence… « Du sang, de la volup
998
le soir, tandis que les fenêtres s’ouvraient vers
le
ciel de Florence… « Du sang, de la volupté et de la mort », un titre
999
ouvraient vers le ciel de Florence… « Du sang, de
la
volupté et de la mort », un titre s’effaçait dans l’ombre. Jouve a rê
1000
ciel de Florence… « Du sang, de la volupté et de
la
mort », un titre s’effaçait dans l’ombre. Jouve a rêvé une histoire d
1001
volupté et de la mort », un titre s’effaçait dans
l’
ombre. Jouve a rêvé une histoire de passion mystique et de crime, inte
1002
t d’autres, comme chaque soir un nouveau ciel. Il
l’
a transcrite en brèves notations lyriques suivant le rythme d’un songe
1003
a transcrite en brèves notations lyriques suivant
le
rythme d’un songe, sans cesse brisé par les élans alternés ou confond
1004
uivant le rythme d’un songe, sans cesse brisé par
les
élans alternés ou confondus du désir et de la prière. On sort lenteme
1005
ar les élans alternés ou confondus du désir et de
la
prière. On sort lentement d’une chambre bleue qui est le mystère même
1006
re. On sort lentement d’une chambre bleue qui est
le
mystère même, pour suivre la naissance et l’embrasement de la passion
1007
hambre bleue qui est le mystère même, pour suivre
la
naissance et l’embrasement de la passion de Paulina. Le Péché ; le Co
1008
est le mystère même, pour suivre la naissance et
l’
embrasement de la passion de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechu
1009
ême, pour suivre la naissance et l’embrasement de
la
passion de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ;
1010
ssance et l’embrasement de la passion de Paulina.
Le
Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ; et l’étrange apaisement
1011
’embrasement de la passion de Paulina. Le Péché ;
le
Couvent ; la rechute et le crime ; et l’étrange apaisement d’une viei
1012
de la passion de Paulina. Le Péché ; le Couvent ;
la
rechute et le crime ; et l’étrange apaisement d’une vieillesse au sol
1013
de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechute et
le
crime ; et l’étrange apaisement d’une vieillesse au soleil. Jouve sem
1014
Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ; et
l’
étrange apaisement d’une vieillesse au soleil. Jouve semble avoir hési
1015
servation psychologique ironique et minutieuse, à
la
Stendhal, succède à des effusions haletantes ou à une relation cinéma
1016
ion cinématographique. Mais tout cela baigne dans
le
même lyrisme et s’agite sur un fond sombre et riche de passions incon
1017
iche de passions inconscientes qui donnent à tous
les
actes une signification plus profonde. (Il serait aisé de montrer que
1018
de poétique où il paraît inconvenant d’introduire
le
jargon de la science moderne.) Si nous reconnaissons à la base de cet
1019
ù il paraît inconvenant d’introduire le jargon de
la
science moderne.) Si nous reconnaissons à la base de cette œuvre inég
1020
n de la science moderne.) Si nous reconnaissons à
la
base de cette œuvre inégale des idées vieilles comme Rousseau sur les
1021
vre inégale des idées vieilles comme Rousseau sur
les
droits de la passion, — et dans sa trame quelques chapitres inspirés
1022
s idées vieilles comme Rousseau sur les droits de
la
passion, — et dans sa trame quelques chapitres inspirés presque litté
1023
anecdote italienne de Stendhal ; si d’autre part
l’
évolution mystique de Paulina semble parfois un peu trop « classique »
1024
mble parfois un peu trop « classique » et prévue,
l’
originalité foncière du roman de Jouve reste indéniable : c’est son mo
1025
nes proses mystiques de Paulina au couvent valent
les
meilleurs poèmes de l’auteur de Tragiques et de Vous êtes des hommes.
1026
Paulina au couvent valent les meilleurs poèmes de
l’
auteur de Tragiques et de Vous êtes des hommes. p. « Pierre Jean Jou
1027
Alix de Watteville,
La
Folie de l’espace (avril 1926)q Un artiste de grand talent à qui l
1028
Alix de Watteville, La Folie de
l’
espace (avril 1926)q Un artiste de grand talent à qui la guerre a f
1029
(avril 1926)q Un artiste de grand talent à qui
la
guerre a fait perdre le goût des théories d’écoles et de quelques aut
1030
ste de grand talent à qui la guerre a fait perdre
le
goût des théories d’écoles et de quelques autres plaisirs pour civils
1031
de quelques autres plaisirs pour civils : mettez-
le
aux prises avec une petite cité patricienne dont il devra portraiture
1032
etite cité patricienne dont il devra portraiturer
les
gentilshommes archéologiques et les vieilles dames à principes. Voilà
1033
portraiturer les gentilshommes archéologiques et
les
vieilles dames à principes. Voilà, n’est-ce pas, un amusant sujet de
1034
al, avec ses personnages un peu conventionnels et
l’
invraisemblance assez piquante de ses péripéties. Quel dommage que l’a
1035
ssez piquante de ses péripéties. Quel dommage que
l’
auteur l’ait alourdi d’une idéologie, souvent plus généreuse que neuve
1036
ante de ses péripéties. Quel dommage que l’auteur
l’
ait alourdi d’une idéologie, souvent plus généreuse que neuve, et qui
1037
à être mise en action plutôt qu’en commentaires.
Le
talent de Mme de Watteville paraît mieux à l’aise dans la description
1038
es. Le talent de Mme de Watteville paraît mieux à
l’
aise dans la description du milieu patricien que dans la création d’un
1039
t de Mme de Watteville paraît mieux à l’aise dans
la
description du milieu patricien que dans la création d’un caractère d
1040
dans la description du milieu patricien que dans
la
création d’un caractère de grand peintre. Pourtant, malgré des longue
1041
ongueurs, on ne lira pas sans plaisir ce livre où
l’
on voit un homme appeler en vain le vent du large, parmi des gens qui
1042
ir ce livre où l’on voit un homme appeler en vain
le
vent du large, parmi des gens qui craignent de s’enrhumer. q. « Ali
1043
ignent de s’enrhumer. q. « Alix de Watteville :
La
Folie de l’espace (Delachaux et Niestlé) », Bibliothèque universelle
1044
enrhumer. q. « Alix de Watteville : La Folie de
l’
espace (Delachaux et Niestlé) », Bibliothèque universelle et Revue de
1045
ilège ironique (mai 1926)r Un léger flirt avec
la
muse, parce que c’est dimanche, parce qu’il pleut et qu’on s’ennuie.
1046
dimanche, parce qu’il pleut et qu’on s’ennuie. Si
la
vie est bête à pleurer, sourire est moins fatigant. « Le paon dédaign
1047
est bête à pleurer, sourire est moins fatigant. «
Le
paon dédaigne encor mais ne fait plus sa roue. » Ce poète — qui fut a
1048
ne fait plus sa roue. » Ce poète — qui fut aussi
le
prosateur charmant du Pédagogue et l’Amour — sourit avec une grâce un
1049
i fut aussi le prosateur charmant du Pédagogue et
l’
Amour — sourit avec une grâce un peu frileuse et se permet de bâiller
1050
use et se permet de bâiller en public. On connaît
le
danger… r. « Wilfred Chopard : Spicilège ironique, poèmes (Spes, L
1051
Cécile-Claire Rivier,
L’
Athée (mai 1926)s C’est le récit de la découverte de Dieu par une j
1052
écile-Claire Rivier, L’Athée (mai 1926)s C’est
le
récit de la découverte de Dieu par une jeune fille élevée dans l’athé
1053
Rivier, L’Athée (mai 1926)s C’est le récit de
la
découverte de Dieu par une jeune fille élevée dans l’athéisme. Invrai
1054
écouverte de Dieu par une jeune fille élevée dans
l’
athéisme. Invraisemblablement ignorante de toute religion jusqu’à 20 a
1055
e religion jusqu’à 20 ans, Denise s’abandonne à «
la
vie », laquelle — un peu aidée par l’auteur — lui révèlera peu à peu
1056
andonne à « la vie », laquelle — un peu aidée par
l’
auteur — lui révèlera peu à peu le sens divin de la destinée. Ce livre
1057
n peu aidée par l’auteur — lui révèlera peu à peu
le
sens divin de la destinée. Ce livre à thèse est plutôt une argumentat
1058
’auteur — lui révèlera peu à peu le sens divin de
la
destinée. Ce livre à thèse est plutôt une argumentation à coups d’exe
1059
à coups d’exemples vivants qu’un véritable roman.
La
profusion souvent facile des incidents et le style volontairement sec
1060
man. La profusion souvent facile des incidents et
le
style volontairement sec permettent de suivre sans passion ni fatigue
1061
sec permettent de suivre sans passion ni fatigue
le
développement un peu théorique mais intelligent d’un problème que l’o
1062
peu théorique mais intelligent d’un problème que
l’
on pressent trop complètement résolu dès les premières pages, mais qu’
1063
Rivier d’avoir posé courageusement. Dirai-je que
l’
abus des points d’exclamation — trait commun à presque toutes les femm
1064
nts d’exclamation — trait commun à presque toutes
les
femmes auteur, et qui plaît aux lectrices — m’agace un peu ? C’est un
1065
un peu ? C’est une vétille. s. « C.-C. Rivier :
L’
Athée (Payot, Lausanne) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève
1066
Jean Cocteau, Rappel à
l’
ordre (mai 1926)t Sous ce titre, le plus étonnant peut-être qu’il a
1067
u, Rappel à l’ordre (mai 1926)t Sous ce titre,
le
plus étonnant peut-être qu’il ait trouvé, Jean Cocteau a réuni ce qui
1068
ait trouvé, Jean Cocteau a réuni ce qui me paraît
le
meilleur de son œuvre : ses récits de critique et d’esthétique (Le Co
1069
n œuvre : ses récits de critique et d’esthétique (
Le
Coq et l’Arlequin, la Noce massacrée, le Secret professionnel, etc.)
1070
ses récits de critique et d’esthétique (Le Coq et
l’
Arlequin, la Noce massacrée, le Secret professionnel, etc.) Sans doute
1071
e critique et d’esthétique (Le Coq et l’Arlequin,
la
Noce massacrée, le Secret professionnel, etc.) Sans doute faudrait-il
1072
hétique (Le Coq et l’Arlequin, la Noce massacrée,
le
Secret professionnel, etc.) Sans doute faudrait-il préciser ce qu’il
1073
’il entend par ordre, et montrer que si cet ordre
l’
écarte de Dada, il ne le conduit pas pour autant à l’Académie. Disons
1074
montrer que si cet ordre l’écarte de Dada, il ne
le
conduit pas pour autant à l’Académie. Disons pour aller vite que sa r
1075
carte de Dada, il ne le conduit pas pour autant à
l’
Académie. Disons pour aller vite que sa recherche de l’ordre révèle si
1076
démie. Disons pour aller vite que sa recherche de
l’
ordre révèle simplement une volonté de construire jusque dans le grabu
1077
simplement une volonté de construire jusque dans
le
grabuge, qu’il aime pour les matériaux qu’on en peut tirer. L[e] malh
1078
onstruire jusque dans le grabuge, qu’il aime pour
les
matériaux qu’on en peut tirer. L[e] malheur de Cocteau est qu’il se v
1079
heur de Cocteau est qu’il se veuille poète. Il ne
l’
est jamais moins qu’en vers. Sa plus incontestable réussite à ce jour
1080
ers. Sa plus incontestable réussite à ce jour est
le
Secret professionnel, petit catéchisme cubiste qui dépasse de beaucou
1081
petit catéchisme cubiste qui dépasse de beaucoup
les
limites de cette école, et qu’il eut le tort à notre sens de vouloir
1082
beaucoup les limites de cette école, et qu’il eut
le
tort à notre sens de vouloir illustrer de pédants exercices poétiques
1083
ices poétiques. Mais quelle intelligence, et dont
l’
audace est de se vouloir plus juste que bizarre. Il sait bien d’ailleu
1084
us juste que bizarre. Il sait bien d’ailleurs que
les
miracles les plus étonnants sont ceux de la lumière. « Le mystère se
1085
bizarre. Il sait bien d’ailleurs que les miracles
les
plus étonnants sont ceux de la lumière. « Le mystère se passe en plei
1086
que les miracles les plus étonnants sont ceux de
la
lumière. « Le mystère se passe en plein jour et à toute vitesse. » Te
1087
les les plus étonnants sont ceux de la lumière. «
Le
mystère se passe en plein jour et à toute vitesse. » Telle est bien l
1088
n plein jour et à toute vitesse. » Telle est bien
la
nouveauté de son théâtre et de l’art qu’il défend en peinture, en mus
1089
Telle est bien la nouveauté de son théâtre et de
l’
art qu’il défend en peinture, en musique. Suppression du clair-obscur
1090
re, en musique. Suppression du clair-obscur et de
la
pénombre. Ôter la pédale à la poésie. (« Le poète ne rêve pas, il com
1091
ppression du clair-obscur et de la pénombre. Ôter
la
pédale à la poésie. (« Le poète ne rêve pas, il compte. ») Six projec
1092
clair-obscur et de la pénombre. Ôter la pédale à
la
poésie. (« Le poète ne rêve pas, il compte. ») Six projecteurs conver
1093
et de la pénombre. Ôter la pédale à la poésie. («
Le
poète ne rêve pas, il compte. ») Six projecteurs convergent sur une m
1094
convergent sur une machine luisante et tournante.
L’
esprit de Cocteau est une arme admirable de précision, d’élégance méca
1095
te et tournante. L’esprit de Cocteau est une arme
admirable
de précision, d’élégance mécanique et de rapidité. Il lassera, parce
1096
de rapidité. Il lassera, parce que c’est toujours
le
même déclic. Cocteau le sait, et pour varier il tire tantôt à gauche
1097
parce que c’est toujours le même déclic. Cocteau
le
sait, et pour varier il tire tantôt à gauche tantôt à droite, sur Bar
1098
ur Barrès, sur Wagner, sur quelques fantômes, sur
le
public. (Bientôt sur lui-même je le crains, pour renaître catholique.
1099
fantômes, sur le public. (Bientôt sur lui-même je
le
crains, pour renaître catholique.) Certes, il bannit le charme et tou
1100
ins, pour renaître catholique.) Certes, il bannit
le
charme et toute grâce vaporeuse. Mais ses fleurs de cristal, si elles
1101
e se faneront pas. t. « Jean Cocteau : Rappel à
l’
ordre (Stock, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, G
1102
René Crevel, Mon corps et moi (mai 1926)u
Les
témoignages ne manquent pas sur la détresse morale de la génération s
1103
mai 1926)u Les témoignages ne manquent pas sur
la
détresse morale de la génération surréaliste. Mais tandis que la plup
1104
ignages ne manquent pas sur la détresse morale de
la
génération surréaliste. Mais tandis que la plupart en sont encore à d
1105
ls en disent, « artistiqués », — ils n’osent plus
le
mensonge de l’art, et pas encore la vérité pure — Crevel décrit sans
1106
artistiqués », — ils n’osent plus le mensonge de
l’
art, et pas encore la vérité pure — Crevel décrit sans aucune transpos
1107
n’osent plus le mensonge de l’art, et pas encore
la
vérité pure — Crevel décrit sans aucune transposition romanesque le t
1108
revel décrit sans aucune transposition romanesque
le
trouble caractéristique de sa génération. Terrible aveu d’impuissance
1109
on. Terrible aveu d’impuissance, il n’a plus même
la
force de l’hypocrisie. Isolé dans un hôtel perdu, avec son corps qui
1110
aveu d’impuissance, il n’a plus même la force de
l’
hypocrisie. Isolé dans un hôtel perdu, avec son corps qui se souvient
1111
erdu, avec son corps qui se souvient — « mémoire,
l’
ennemie » — avec une intelligence dont la triste profession est de dét
1112
mémoire, l’ennemie » — avec une intelligence dont
la
triste profession est de détruire le désir qu’elle excite par curiosi
1113
ligence dont la triste profession est de détruire
le
désir qu’elle excite par curiosité passagère, il monologue. « Oui, je
1114
par curiosité passagère, il monologue. « Oui, je
le
redirai, tous mes essais furent prétextes à me dissoudre, à me perdre
1115
prétextes à me dissoudre, à me perdre. » Vouloir
la
vérité pure sur soi, c’est se refuser à l’élan vital qui nous crée sa
1116
ouloir la vérité pure sur soi, c’est se refuser à
l’
élan vital qui nous crée sans cesse : l’analyse de sa solitude le lais
1117
refuser à l’élan vital qui nous crée sans cesse :
l’
analyse de sa solitude le laisse en face de quelques réactions physiol
1118
i nous crée sans cesse : l’analyse de sa solitude
le
laisse en face de quelques réactions physiologiques dont la pauvreté
1119
en face de quelques réactions physiologiques dont
la
pauvreté le rejette dans une angoisse qu’il nomme « élan mortel ». Ce
1120
uelques réactions physiologiques dont la pauvreté
le
rejette dans une angoisse qu’il nomme « élan mortel ». Cette inversio
1121
e qui est constructif et créateur, voilà je pense
le
véritable désordre. Une intelligence parvenue au point où elle « ne s
1122
ocès », une intelligence qui se dégoûte, tel est
le
spectacle que nous dévoile cyniquement René Crevel. Il en est peu de
1123
u de plus effrayants. Ah ! Seigneur, donnez-nous
la
force et le courage de contempler nos corps et nos cœurs sans dégoût
1124
frayants. Ah ! Seigneur, donnez-nous la force et
le
courage de contempler nos corps et nos cœurs sans dégoût implorait B
1125
ans dégoût implorait Baudelaire. Encore avait-il
le
courage de prier… u. « René Crevel : Mon corps et moi », Bibliothèq
1126
L’
atmosphère d’Aubonne : 22-25 mars 1926 (mai 1926)e Cette conférence
1127
qu’on peut bien dire du diable et se termina sous
le
plus beau soleil de printemps. Libre à qui veut d’y voir un symbole.
1128
veut d’y voir un symbole. On ne saurait exagérer
l’
importance des conditions météorologiques du succès d’une telle rencon
1129
e rencontre : tout alla froidement jusqu’à ce que
la
bise tombée permît à « l’atmosphère » de s’établir. Alors le miracle
1130
oidement jusqu’à ce que la bise tombée permît à «
l’
atmosphère » de s’établir. Alors le miracle apparut, grandit. Le mirac
1131
bée permît à « l’atmosphère » de s’établir. Alors
le
miracle apparut, grandit. Le miracle, c’est l’esprit d’Aubonne. C’est
1132
de s’établir. Alors le miracle apparut, grandit.
Le
miracle, c’est l’esprit d’Aubonne. C’est ce miracle tout ce qu’il y a
1133
rs le miracle apparut, grandit. Le miracle, c’est
l’
esprit d’Aubonne. C’est ce miracle tout ce qu’il y a de plus protestan
1134
e se produire ailleurs qu’en terre romande. C’est
l’
esprit de liberté, tout simplement. Mais précisons : c’est bien plus q
1135
simplement. Mais précisons : c’est bien plus que
la
liberté de défendre sa petite hérésie personnelle et de s’affirmer au
1136
lle et de s’affirmer aux dépens d’autrui, — c’est
la
liberté dans la recherche. Chose plus rare qu’on ne pense, à Aubonne
1137
rmer aux dépens d’autrui, — c’est la liberté dans
la
recherche. Chose plus rare qu’on ne pense, à Aubonne on se sent prêt
1138
ient moins à convaincre qu’à se convaincre. Après
les
exposés de Janson, de Brémond, j’en sais plusieurs qui ont ainsi « lâ
1139
Mais ce qui est peut-être plus important, on eut
l’
impression, durant les discussions entre de Saussure et Bertrand, que
1140
-être plus important, on eut l’impression, durant
les
discussions entre de Saussure et Bertrand, que les orateurs exprimaie
1141
es discussions entre de Saussure et Bertrand, que
les
orateurs exprimaient tour à tour les objections que chacun se faisait
1142
ertrand, que les orateurs exprimaient tour à tour
les
objections que chacun se faisait à part soi, qu’ils incarnaient les v
1143
chacun se faisait à part soi, qu’ils incarnaient
les
voix contradictoires d’un débat que tous menaient en eux-mêmes loyale
1144
chose de définitif à la fois et d’intelligent, je
le
mesure aussi à l’émotion qui accueillit l’étude de Maury sur Jacques
1145
à la fois et d’intelligent, je le mesure aussi à
l’
émotion qui accueillit l’étude de Maury sur Jacques Rivière : combien
1146
nt, je le mesure aussi à l’émotion qui accueillit
l’
étude de Maury sur Jacques Rivière : combien reconnurent dans le tourm
1147
ry sur Jacques Rivière : combien reconnurent dans
le
tourment de cette âme leur propre recherche, — et dans ses lumineuses
1148
recherche, — et dans ses lumineuses conquêtes sur
le
doute, le modèle des réponses désirées. Tout cela, c’est l’atmosphère
1149
— et dans ses lumineuses conquêtes sur le doute,
le
modèle des réponses désirées. Tout cela, c’est l’atmosphère de la cha
1150
le modèle des réponses désirées. Tout cela, c’est
l’
atmosphère de la chapelle où ont lieu travaux et méditations. Dehors,
1151
ponses désirées. Tout cela, c’est l’atmosphère de
la
chapelle où ont lieu travaux et méditations. Dehors, on honore la lib
1152
nt lieu travaux et méditations. Dehors, on honore
la
liberté d’un culte moins platonique : n’est-ce pas Léo qui prétendit
1153
’est-ce pas Léo qui prétendit qu’on ne peut juger
les
Associations qu’à leur façon de jouer le volley-ball ? Le Casino offr
1154
t juger les Associations qu’à leur façon de jouer
le
volley-ball ? Le Casino offrit pendant quelques nuits la vision étran
1155
iations qu’à leur façon de jouer le volley-ball ?
Le
Casino offrit pendant quelques nuits la vision étrange d’une salle où
1156
ey-ball ? Le Casino offrit pendant quelques nuits
la
vision étrange d’une salle où les spectateurs étendus en pyjamas sur
1157
t quelques nuits la vision étrange d’une salle où
les
spectateurs étendus en pyjamas sur des paillasses attendraient en vai
1158
n pyjamas sur des paillasses attendraient en vain
le
lever d’un rideau sur une pièce inexistante. Enfin le dernier soir, l
1159
sur une pièce inexistante. Enfin le dernier soir,
l’
on vit apparaître un fakir… Il y eut aussi une assemblée délibérative
1160
eut pas trop de toute sa souplesse pour maintenir
l’
équilibre des discussions et de sa propre personne. Et il y eut encore
1161
encore un dîner très démocratique pendant lequel
le
philosophe Abauzit chanta « les Crapauds » avec âme, appuyé d’une mai
1162
que pendant lequel le philosophe Abauzit chanta «
les
Crapauds » avec âme, appuyé d’une main sur l’épaule de Janson, et de
1163
« les Crapauds » avec âme, appuyé d’une main sur
l’
épaule de Janson, et de l’autre dessinant dans l’air des phrases music
1164
l’épaule de Janson, et de l’autre dessinant dans
l’
air des phrases musicales. Après quoi Richardot, entrant par la fenêtr
1165
ases musicales. Après quoi Richardot, entrant par
la
fenêtre, vint annoncer qu’on était libre — comme si on l’avait attend
1166
re, vint annoncer qu’on était libre — comme si on
l’
avait attendu pour le manifester ! — et qu’il suffisait de souscrire à
1167
on était libre — comme si on l’avait attendu pour
le
manifester ! — et qu’il suffisait de souscrire à la brochure de la co
1168
manifester ! — et qu’il suffisait de souscrire à
la
brochure de la conférence3 pour savoir tout ce que je n’ai pas dit da
1169
et qu’il suffisait de souscrire à la brochure de
la
conférence3 pour savoir tout ce que je n’ai pas dit dans ces quelques
1170
Il suffit encore : f 2.50, nom et adresse. e. «
L’
atmosphère d’Aubonne : 22-25 mars 1926 », Lux et Vita : nouvelles de l
1171
e : 22-25 mars 1926 », Lux et Vita : nouvelles de
l’
Association chrétienne suisse d’étudiants, Lausanne, mai 1926, p. 44-4
1172
Le
Corbusier, Urbanisme (juin 1926)v Nous disons adieu aux charmes tr
1173
disons adieu aux charmes troubles et inhumains de
la
nature. Il s’agit de créer à notre vie moderne un décor utile et beau
1174
à notre vie moderne un décor utile et beau. Or «
la
grande ville, phénomène de force en mouvement, est aujourd’hui une ca
1175
astrophe menaçante pour n’avoir pas été animée de
l’
esprit de géométrie… Elle use et conduit lentement l’usure des millier
1176
sprit de géométrie… Elle use et conduit lentement
l’
usure des milliers d’êtres humains ». Elle n’est plus adaptée aux cond
1177
de travail ou de repos, ni dans son plan ni dans
le
détail des rues. Congestion : « un cheval arrête 1000 chevaux-vapeurs
1178
eval arrête 1000 chevaux-vapeurs ». Et pourtant «
la
ville est une image puissante qui actionne notre esprit » après avoir
1179
e esprit » après avoir été créée par lui, — comme
la
poésie. C’est ainsi que le problème de l’Urbanisme se place au croise
1180
créée par lui, — comme la poésie. C’est ainsi que
le
problème de l’Urbanisme se place au croisement des préoccupations est
1181
— comme la poésie. C’est ainsi que le problème de
l’
Urbanisme se place au croisement des préoccupations esthétiques et soc
1182
hétiques et sociales d’aujourd’hui. Pour résoudre
la
crise de notre civilisation sous cet aspect comme sous les autres, il
1183
de notre civilisation sous cet aspect comme sous
les
autres, il nous faut mieux que des dictateurs : des Architectes, de l
1184
ut mieux que des dictateurs : des Architectes, de
l’
esprit et de la matière. Si Le Corbusier réalise son plan, ce sera plu
1185
s dictateurs : des Architectes, de l’esprit et de
la
matière. Si Le Corbusier réalise son plan, ce sera plus fort que Muss
1186
des Architectes, de l’esprit et de la matière. Si
Le
Corbusier réalise son plan, ce sera plus fort que Mussolini (lequel s
1187
nisme est une étude technique et un pamphlet dont
l’
argumentation serrée éclate parfois en boutades mordantes, en brèves f
1188
lyrisme. C’est d’une verve puissante jusque dans
la
statistique. On en sort convaincu ou bouleversé, enthousiasmé d’avoir
1189
vaincu ou bouleversé, enthousiasmé d’avoir trouvé
la
formule même de tant d’aspirations modernes. Voici sans aucun doute u
1190
ns modernes. Voici sans aucun doute un des livres
les
plus représentatifs de l’époque de Lénine, du fascisme, du ciment arm
1191
un doute un des livres les plus représentatifs de
l’
époque de Lénine, du fascisme, du ciment armé. « Notre monde comme un
1192
poques mortes. Une tâche nous incombe, construire
le
cadre de notre existence… construire les villes de notre temps ». Et
1193
onstruire le cadre de notre existence… construire
les
villes de notre temps ». Et je déplie ce plan d’une « ville contempor
1194
verre et de ciment blanc, flamboyantes au soleil.
Les
vingt-quatre gratte-ciel de la cité, au centre, s’espacent autour d’u
1195
yantes au soleil. Les vingt-quatre gratte-ciel de
la
cité, au centre, s’espacent autour d’un aérodrome-gare circulaire, pr
1196
un aérodrome-gare circulaire, prismes perdus dans
le
silence de l’azur au-dessus des rumeurs de la ville. Puis s’étendent
1197
are circulaire, prismes perdus dans le silence de
l’
azur au-dessus des rumeurs de la ville. Puis s’étendent les quartiers
1198
ans le silence de l’azur au-dessus des rumeurs de
la
ville. Puis s’étendent les quartiers de résidence ; les jardins suspe
1199
u-dessus des rumeurs de la ville. Puis s’étendent
les
quartiers de résidence ; les jardins suspendus à tous les étages soul
1200
lle. Puis s’étendent les quartiers de résidence ;
les
jardins suspendus à tous les étages soulignent de verdure l’horizonta
1201
tiers de résidence ; les jardins suspendus à tous
les
étages soulignent de verdure l’horizontale des toitures en terrasses.
1202
suspendus à tous les étages soulignent de verdure
l’
horizontale des toitures en terrasses. Des perspectives régulières rec
1203
ives régulières recoupées à 200 et 400 mètres par
les
plans fuyants des rues immenses livrées au 100 à l’heure des autos. L
1204
plans fuyants des rues immenses livrées au 100 à
l’
heure des autos. Les maisons habitées ne sont plus que des enceintes t
1205
rues immenses livrées au 100 à l’heure des autos.
Les
maisons habitées ne sont plus que des enceintes transparentes, et min
1206
es « redents » des terrains de jeux et des parcs,
la
nature annexée à la ville. « C’est un spectacle organisé par l’Archit
1207
errains de jeux et des parcs, la nature annexée à
la
ville. « C’est un spectacle organisé par l’Architecture avec les ress
1208
xée à la ville. « C’est un spectacle organisé par
l’
Architecture avec les ressources de la plastique qui est le jeu de for
1209
est un spectacle organisé par l’Architecture avec
les
ressources de la plastique qui est le jeu de formes sous la lumière »
1210
rganisé par l’Architecture avec les ressources de
la
plastique qui est le jeu de formes sous la lumière ». Cristallisation
1211
cture avec les ressources de la plastique qui est
le
jeu de formes sous la lumière ». Cristallisation d’un rêve de joie et
1212
ces de la plastique qui est le jeu de formes sous
la
lumière ». Cristallisation d’un rêve de joie et de raison où de grand
1213
iels formidables des ensembles soumis aux lois de
l’
esprit et de la vie sociale, non plus à un opportunisme anarchique. Ti
1214
s des ensembles soumis aux lois de l’esprit et de
la
vie sociale, non plus à un opportunisme anarchique. Tirer des lignes
1215
tunisme anarchique. Tirer des lignes droites, est
le
propre de l’homme. Toutes les civilisations fortes l’ont osé. Créer u
1216
hique. Tirer des lignes droites, est le propre de
l’
homme. Toutes les civilisations fortes l’ont osé. Créer un espace arch
1217
lignes droites, est le propre de l’homme. Toutes
les
civilisations fortes l’ont osé. Créer un espace architectural lumineu
1218
ropre de l’homme. Toutes les civilisations fortes
l’
ont osé. Créer un espace architectural lumineux à la place de nos cité
1219
ution. Déjà des ingénieurs se sont mis à calculer
la
réalisation de ce phénomène de haute poésie — la « ville contemporain
1220
la réalisation de ce phénomène de haute poésie —
la
« ville contemporaine ». Un labeur précis et anonyme concourt obscuré
1221
rément à cette parfaite expression du triomphe de
l’
homme sur la Nature. Architecture : « tout ce qui est au-delà du calcu
1222
te parfaite expression du triomphe de l’homme sur
la
Nature. Architecture : « tout ce qui est au-delà du calcul… Ce sera l
1223
re : « tout ce qui est au-delà du calcul… Ce sera
la
passion du siècle ». v. « Le Corbusier : Urbanisme (G. Crès, Paris)
1224
du calcul… Ce sera la passion du siècle ». v. «
Le
Corbusier : Urbanisme (G. Crès, Paris) », Bibliothèque universelle et
1225
mprenons que nos œuvres, si elles furent faites à
l’
image de notre esprit, le lui rendent bien dans la suite ; c’est peut-
1226
si elles furent faites à l’image de notre esprit,
le
lui rendent bien dans la suite ; c’est peut-être pourquoi nous accord
1227
l’image de notre esprit, le lui rendent bien dans
la
suite ; c’est peut-être pourquoi nous accordons voix dans le débat d’
1228
c’est peut-être pourquoi nous accordons voix dans
le
débat d’écrire, aux forces les plus secrètes de notre être comme aux
1229
accordons voix dans le débat d’écrire, aux forces
les
plus secrètes de notre être comme aux calculs les plus rusés. Nous ch
1230
les plus secrètes de notre être comme aux calculs
les
plus rusés. Nous choisissons les idées comme on choisit un amour dont
1231
omme aux calculs les plus rusés. Nous choisissons
les
idées comme on choisit un amour dont on est anxieux de prévoir l’infl
1232
n choisit un amour dont on est anxieux de prévoir
l’
influence, avant de s’y jeter, et dont on craint de ressortir trop dif
1233
e réticences dont nous ne comprenons pas toujours
l’
objet. Peur de perdre le fil de la conscience de soi, peur de subir l’
1234
e comprenons pas toujours l’objet. Peur de perdre
le
fil de la conscience de soi, peur de subir l’empreinte imprévisible d
1235
ns pas toujours l’objet. Peur de perdre le fil de
la
conscience de soi, peur de subir l’empreinte imprévisible des choses.
1236
dre le fil de la conscience de soi, peur de subir
l’
empreinte imprévisible des choses. Amour de soi… Mais moi, qui suis-je
1237
is moi, qui suis-je ? Par ces trois mots commence
le
drame de toute vie. Ha ! Qui je suis ? Mais je le sens très bien ! je
1238
le drame de toute vie. Ha ! Qui je suis ? Mais je
le
sens très bien ! je sens très bien cette force — ici, je tape du pied
1239
r. Vous me direz qui je suis, mes amis ; quel est
le
vrai ? — Ils me proposent vingt visages que je puis à peine reconnaît
1240
gt visages que je puis à peine reconnaître. Reste
le
monde, — les choses, les faits, la vie, comme ils disent. Je me suis
1241
ue je puis à peine reconnaître. Reste le monde, —
les
choses, les faits, la vie, comme ils disent. Je me suis abandonné au
1242
peine reconnaître. Reste le monde, — les choses,
les
faits, la vie, comme ils disent. Je me suis abandonné au jeu du hasar
1243
nnaître. Reste le monde, — les choses, les faits,
la
vie, comme ils disent. Je me suis abandonné au jeu du hasard, jusqu’a
1244
suis abandonné au jeu du hasard, jusqu’au jour où
l’
on me fit comprendre qu’il n’est que le jeu de sauter follement d’une
1245
au jour où l’on me fit comprendre qu’il n’est que
le
jeu de sauter follement d’une habitude dans une autre. Il ne me resta
1246
supportables, si cruellement présentes et dures ?
La
cause de cette inadaptation, je la soupçonnais si grave, si fondament
1247
tes et dures ? La cause de cette inadaptation, je
la
soupçonnais si grave, si fondamentale que je préférais me leurrer à c
1248
e des imperfections de détail dont je m’exagérais
l’
importance. Et c’est ainsi par feintes que je progressais, jusqu’au jo
1249
mmer peur de rire. Cette amertume au fond de tous
les
plaisirs, cette envie de rire quand il m’arrivait un ennui, cette inc
1250
à pleurer sur mes déboires, ce malaise seul liait
les
personnages auxquels je me prêtais. Mais en même temps que je le déco
1251
auxquels je me prêtais. Mais en même temps que je
le
découvrais, dans tout mon être une force aveugle de violence s’était
1252
nce s’était levée. Ce fut elle qui m’entraîna sur
les
stades où je connus quelle confiance sourde aux contradictions intime
1253
our de cette brutalité s’organisaient brusquement
les
éléments désaccordés de ce moi que j’avais tant choyé. « Maintenant,
1254
e — c’était un des premiers jours du printemps —,
l’
heure est venue de la violence. Jeunes tempêtes, lavez, bousculez ! La
1255
emiers jours du printemps —, l’heure est venue de
la
violence. Jeunes tempêtes, lavez, bousculez ! La parole est aux insti
1256
la violence. Jeunes tempêtes, lavez, bousculez !
La
parole est aux instincts combatifs et dominateurs par quoi l’homme ne
1257
t aux instincts combatifs et dominateurs par quoi
l’
homme ne se distingue plus de l’animal. Louée soit ma force et tout ce
1258
inateurs par quoi l’homme ne se distingue plus de
l’
animal. Louée soit ma force et tout ce qui l’exalte, et tout ce qui la
1259
s de l’animal. Louée soit ma force et tout ce qui
l’
exalte, et tout ce qui la dompte, tout ce qui sourd en moi de trop gra
1260
ma force et tout ce qui l’exalte, et tout ce qui
la
dompte, tout ce qui sourd en moi de trop grand pour ma vie — toute ma
1261
’allais plier des résistances à mon gré, agir sur
les
choses… Vers le soir, l’ardeur tombe : agir ? dans quel sens ? Provis
1262
résistances à mon gré, agir sur les choses… Vers
le
soir, l’ardeur tombe : agir ? dans quel sens ? Provisoirement j’étais
1263
ces à mon gré, agir sur les choses… Vers le soir,
l’
ardeur tombe : agir ? dans quel sens ? Provisoirement j’étais sauvé d’
1264
s ? Provisoirement j’étais sauvé d’un désordre où
l’
on glisse vers la mort. L’important, c’est de ne pas se défaire. Mais
1265
t j’étais sauvé d’un désordre où l’on glisse vers
la
mort. L’important, c’est de ne pas se défaire. Mais rien n’était réso
1266
sauvé d’un désordre où l’on glisse vers la mort.
L’
important, c’est de ne pas se défaire. Mais rien n’était résolu. Me vo
1267
nt je sais qu’il est absolument vain de prétendre
les
résoudre, mais que je dois feindre d’avoir résolus : c’est ce qui s’a
1268
c’est ce qui s’appelle vivre. Problème de Dieu, à
la
base. J’aurai garde de m’y perdre au début d’une recherche qui n’a qu
1269
riant, je m’arrête parfois, heureux : « J’ai donc
la
foi ? » Mais c’est encore une question… Je crois qu’il ne faut pas at
1270
dans sa prière, qu’une révélation vienne chercher
l’
âme qui se sent misérable. Je ne recevrai pas une foi, mais peut-être
1271
cevrai pas une foi, mais peut-être arriverai-je à
la
vouloir, et c’est le tout. S’il est une révélation, c’est en me renda
1272
ais peut-être arriverai-je à la vouloir, et c’est
le
tout. S’il est une révélation, c’est en me rendant plus parfait que j
1273
en me rendant plus parfait que je lui préparerai
les
voies. Agir ? Sur moi d’abord. Il ne faut plus que je respecte tout e
1274
nir. Se perfectionner : cela consiste à retrouver
l’
instinct le plus profond de l’homme, la vertu conservatrice qui ne peu
1275
fectionner : cela consiste à retrouver l’instinct
le
plus profond de l’homme, la vertu conservatrice qui ne peut dicter qu
1276
onsiste à retrouver l’instinct le plus profond de
l’
homme, la vertu conservatrice qui ne peut dicter que les gestes les pl
1277
retrouver l’instinct le plus profond de l’homme,
la
vertu conservatrice qui ne peut dicter que les gestes les plus favora
1278
me, la vertu conservatrice qui ne peut dicter que
les
gestes les plus favorables. J’ai d’autres instincts et je n’entends p
1279
u conservatrice qui ne peut dicter que les gestes
les
plus favorables. J’ai d’autres instincts et je n’entends pas tous les
1280
J’ai d’autres instincts et je n’entends pas tous
les
cultiver pour cela seul qu’ils sont naturels : la nature est un champ
1281
es cultiver pour cela seul qu’ils sont naturels :
la
nature est un champ de luttes, de tendances vers la destruction et ve
1282
nature est un champ de luttes, de tendances vers
la
destruction et vers la construction ; c’est un mélange à doses égales
1283
luttes, de tendances vers la destruction et vers
la
construction ; c’est un mélange à doses égales de mort et de vie. Et
1284
ange à doses égales de mort et de vie. Et c’est à
l’
intelligence de faire primer la vie, puisque n’est pas encore parfait
1285
de vie. Et c’est à l’intelligence de faire primer
la
vie, puisque n’est pas encore parfait cet instinct qui est la Vertu.
1286
que n’est pas encore parfait cet instinct qui est
la
Vertu. Ma vertu est de chercher cette Vertu ; de me replacer dans le
1287
est de chercher cette Vertu ; de me replacer dans
le
sens de ma vie ; de rendre toutes mes forces complices de mon destin.
1288
in. D’abord donc, choisir Mes instincts, ensuite,
les
éduquer, selon des lois établies par le concours de l’expérience et d
1289
ensuite, les éduquer, selon des lois établies par
le
concours de l’expérience et d’un sentiment de convenance en quoi se c
1290
uquer, selon des lois établies par le concours de
l’
expérience et d’un sentiment de convenance en quoi se composent le pla
1291
d’un sentiment de convenance en quoi se composent
le
plaisir et la conscience de Mes limites. Je m’attache particulièremen
1292
de convenance en quoi se composent le plaisir et
la
conscience de Mes limites. Je m’attache particulièrement à retrouver
1293
ttache particulièrement à retrouver ces limites :
la
vie moderne, mécanique, nous les fait oublier, d’où cette fatigue gén
1294
ver ces limites : la vie moderne, mécanique, nous
les
fait oublier, d’où cette fatigue générale qui fausse tout, et qui s’o
1295
usse tout, et qui s’oppose au perfectionnement de
l’
esprit, puisqu’elle ne permet que des associations suivant les directi
1296
uisqu’elle ne permet que des associations suivant
les
directions de moindre résistance. Mais je ne m’emprisonnerai pas dans
1297
isonnerai pas dans ces limites. Ma liberté est de
les
porter plus loin sans cesse, de battre mes propres records. De ce len
1298
une certaine méfiance vis-à-vis de ma sincérité.
La
sincérité m’apparaît parfois comme un arrêt artificiel dans ma vie, u
1299
re dangereuse. (On donne corps à une faiblesse en
la
nommant ; or je ne veux plus de faiblesses4.) Et demain peut-être, ag
1300
s de faiblesses4.) Et demain peut-être, agir dans
le
monde, si je m’en suis d’abord rendu digne. L’époque nous veut, comme
1301
ns le monde, si je m’en suis d’abord rendu digne.
L’
époque nous veut, comme elle veut une conscience. Je fais partie d’un
1302
ence. Je fais partie d’un ensemble social et dans
la
mesure où j’en dépends, je me dois de m’employer à sa sauvegarde ou à
1303
ormation. Mais il y faut une doctrine, me dit-on.
L’
avouerai-je, quand je médite sur une doctrine possible, sur une systém
1304
sation de mes petites certitudes5, j’éprouve vite
le
sentiment d’être dans un débat étranger à ce véritable débat de ma vi
1305
alaise sans cesse renaissant, comment m’adapter à
l’
existence que m’imposent mon corps et les lois du monde, et comment au
1306
adapter à l’existence que m’imposent mon corps et
les
lois du monde, et comment augmenter ma puissance de jouir, en même te
1307
agir. Que tout cela s’agite sur fond de néant, je
le
comprends par éclairs, mais une secrète espérance m’emporte de nouvea
1308
orte de nouveau, premier gage du divin… Reprendre
l’
offensive — au soir, je m’amuserai à mettre des étiquettes sur mes act
1309
un peu mes lèvres, et s’affirmer à mesure que je
le
décris. Mais comme un écho profond, une attirance aussi d’anciennes f
1310
ie, dégoût, lueurs éteintes dans une nuit froide.
Les
notes d’un chant qui voudrait s’élever. Puis enfin la marée de mes dé
1311
otes d’un chant qui voudrait s’élever. Puis enfin
la
marée de mes désirs. Qu’ils viennent battre ce corps triste, qu’ils l
1312
s. Qu’ils viennent battre ce corps triste, qu’ils
l’
emportent d’un flot fou ! Revenez, mes joies du large !… Tiens, j’écou
1313
! Revenez, mes joies du large !… Tiens, j’écoute
le
vent ; je pense au monde. Chant des horizons, images qui s’éclairent…
1314
er son plaisir ? Je reste candidat au salut. 4.
La
sincérité absolue, « scientifique » me paraît aller contre fin. Une a
1315
e et soutenue modifie son objet vivant. Pour moi,
la
sincérité ne peut être que spontanée. Et spontanément je suis porté à
1316
périences ratées on puisse encore se persuader de
la
vérité d’un système, hors la religion. Un système n’est pas vrai, il
1317
core se persuader de la vérité d’un système, hors
la
religion. Un système n’est pas vrai, il est utile. C’est pourquoi je
1318
l est utile. C’est pourquoi je ne puis comprendre
les
excommunications et les intransigeances. Toutes les aspirations me pa
1319
uoi je ne puis comprendre les excommunications et
les
intransigeances. Toutes les aspirations me paraissent légitimes chez
1320
s excommunications et les intransigeances. Toutes
les
aspirations me paraissent légitimes chez d’autres, même celles que je
1321
normal » de vie. f. « Confession tendancieuse »,
Les
Cahiers du mois, Paris, n° 21-22, mai 1926, p. 144-148.
1322
Les
Bestiaires, par Henry de Montherlant (10 juillet 1926)g Je ferme l
1323
nry de Montherlant (10 juillet 1926)g Je ferme
les
Bestiaires, et me tirant hors de ce « long songe de violence et de vo
1324
ffées par des forces qui se lèvent. Car telle est
la
vertu de ce livre, qu’on l’éprouve d’abord trop vivement pour le juge
1325
lèvent. Car telle est la vertu de ce livre, qu’on
l’
éprouve d’abord trop vivement pour le juger. L’auteur l’appelle un « p
1326
livre, qu’on l’éprouve d’abord trop vivement pour
le
juger. L’auteur l’appelle un « poème solaire », l’éditeur un roman, p
1327
on l’éprouve d’abord trop vivement pour le juger.
L’
auteur l’appelle un « poème solaire », l’éditeur un roman, parce que ç
1328
uve d’abord trop vivement pour le juger. L’auteur
l’
appelle un « poème solaire », l’éditeur un roman, parce que ça se vend
1329
e juger. L’auteur l’appelle un « poème solaire »,
l’
éditeur un roman, parce que ça se vend mieux. Ce récit des premiers co
1330
e, sans cette orchestration de thèmes qui faisait
la
richesse du Songe, mais d’une ligne plus ferme, d’une unité plus pure
1331
ne ligne plus ferme, d’une unité plus pure aussi.
Le
sujet était périlleux : si particulier, il prêtait à des abus de pitt
1332
n’a pas toujours échappé, mais qu’il domine dans
l’
ensemble et entraîne dans l’allure puissante à la fois et désinvolte d
1333
ais qu’il domine dans l’ensemble et entraîne dans
l’
allure puissante à la fois et désinvolte de son récit. On a souvent pa
1334
emiers ouvrages de Montherlant. Cette fois-ci, on
le
traite de naturaliste. Mais comment montrer des taureaux sans que cel
1335
t montrer des taureaux sans que cela sente un peu
l’
étable ? L’étonnant, c’est de voir à quel point Montherlant reste poèt
1336
es taureaux sans que cela sente un peu l’étable ?
L’
étonnant, c’est de voir à quel point Montherlant reste poète jusque da
1337
à quel point Montherlant reste poète jusque dans
la
description la plus réaliste de la vie animale. Et n’est-ce pas juste
1338
ontherlant reste poète jusque dans la description
la
plus réaliste de la vie animale. Et n’est-ce pas justement parce qu’i
1339
te jusque dans la description la plus réaliste de
la
vie animale. Et n’est-ce pas justement parce qu’il est poète qu’il pe
1340
out rôdent des présences animales. Tandis que sur
la
plaine s’élève le long beuglement des taureaux et le ohéohéohé des bo
1341
sences animales. Tandis que sur la plaine s’élève
le
long beuglement des taureaux et le ohéohéohé des bouviers « comme un
1342
plaine s’élève le long beuglement des taureaux et
le
ohéohéohé des bouviers « comme un chant mystérieux entendu au-dessus
1343
« comme un chant mystérieux entendu au-dessus de
la
mer », il y a toujours dans un coin du tableau des ruades, des chevau
1344
u des ruades, des chevaux qui partent tout droit,
la
tête dressée, des vachettes qui se mordillent et se frôlent amoureuse
1345
bêtes de désir ». Une intelligence si profonde de
la
vie animale suppose entre l’homme et la bête une sympathie que Monthe
1346
gence si profonde de la vie animale suppose entre
l’
homme et la bête une sympathie que Montherlant note à plusieurs repris
1347
ofonde de la vie animale suppose entre l’homme et
la
bête une sympathie que Montherlant note à plusieurs reprises. C’est «
1348
ontherlant note à plusieurs reprises. C’est « par
la
divination de cet amour qu’Alban (le jeune héros du récit) sent ce qu
1349
C’est « par la divination de cet amour qu’Alban (
le
jeune héros du récit) sent ce que sent la bête en même temps qu’elle.
1350
’Alban (le jeune héros du récit) sent ce que sent
la
bête en même temps qu’elle. Et parce qu’il sait ce qu’elle va faire,
1351
Et parce qu’il sait ce qu’elle va faire, il peut
la
dominer… : on ne vainc vraiment que ce qu’on aime, et les victorieux
1352
ner… : on ne vainc vraiment que ce qu’on aime, et
les
victorieux sont d’immenses amants »6. Mais envers les taureaux cet am
1353
victorieux sont d’immenses amants »6. Mais envers
les
taureaux cet amour tourne en adoration ou en une véritable horreur sa
1354
Voici Alban devant une bête qu’il devra combattre
le
lendemain : « Salaud, cochon, saligaud ! » Il l’apostrophait ainsi t
1355
le lendemain : « Salaud, cochon, saligaud ! » Il
l’
apostrophait ainsi tout bas, sur un ton révérenciel, et comme on dérou
1356
évérenciel, et comme on déroule une litanie. Sous
les
grands cils brillants, lustrés par la lumière descendante, les prunel
1357
anie. Sous les grands cils brillants, lustrés par
la
lumière descendante, les prunelles laiteuses du dieu avaient un refle
1358
ls brillants, lustrés par la lumière descendante,
les
prunelles laiteuses du dieu avaient un reflet bleu clair, soudain inq
1359
avaient un reflet bleu clair, soudain inquiètes à
l’
approche de l’inconnu. Nulle part mieux que dans la description des t
1360
let bleu clair, soudain inquiètes à l’approche de
l’
inconnu. Nulle part mieux que dans la description des taureaux ne se
1361
approche de l’inconnu. Nulle part mieux que dans
la
description des taureaux ne se manifeste ce passage du réalisme le pl
1362
s taureaux ne se manifeste ce passage du réalisme
le
plus hardi à un lyrisme plein de simple grandeur. Voici la mort du ta
1363
ardi à un lyrisme plein de simple grandeur. Voici
la
mort du taureau dit « le Mauvais Ange » : La bête chancela de l’arri
1364
e simple grandeur. Voici la mort du taureau dit «
le
Mauvais Ange » : La bête chancela de l’arrière-train, tenta de se ra
1365
ici la mort du taureau dit « le Mauvais Ange » :
La
bête chancela de l’arrière-train, tenta de se raidir, enfin croula su
1366
au dit « le Mauvais Ange » : La bête chancela de
l’
arrière-train, tenta de se raidir, enfin croula sur le flanc, accompli
1367
rière-train, tenta de se raidir, enfin croula sur
le
flanc, accomplissant sa destinée. Quelques secondes encore elle clign
1368
rent peu à peu, comme un corps qu’on gonflerait à
la
pompe, tandis que dans cet agrandissement les articulations grinçaien
1369
it à la pompe, tandis que dans cet agrandissement
les
articulations grinçaient, avec le bruit d’un câble de navire qu’on se
1370
agrandissement les articulations grinçaient, avec
le
bruit d’un câble de navire qu’on serre sur un treuil. Elle arriva ave
1371
n serre sur un treuil. Elle arriva avec emphase à
la
cime de son spasme, comme l’homme à la cime de son plaisir, et comme
1372
rriva avec emphase à la cime de son spasme, comme
l’
homme à la cime de son plaisir, et comme lui, elle y resta immobile. E
1373
emphase à la cime de son spasme, comme l’homme à
la
cime de son plaisir, et comme lui, elle y resta immobile. Et son âme
1374
t son âme divine s’échappa, pleurant ses jeux, et
les
génisses, et la chère plaine. De tels passages qui abondent dans les
1375
s’échappa, pleurant ses jeux, et les génisses, et
la
chère plaine. De tels passages qui abondent dans les Bestiaires font
1376
chère plaine. De tels passages qui abondent dans
les
Bestiaires font pardonner bien d’autres pages de vrais délires taurol
1377
utres pages de vrais délires taurologiques. Quand
le
lyrisme de Montherlant décolle de la réalité, c’est tout de suite une
1378
iques. Quand le lyrisme de Montherlant décolle de
la
réalité, c’est tout de suite une orgie d’évocations antiques, de rapp
1379
ents superstitieux, de grands symboles païens, et
l’
on se perd dans un syncrétisme effarant, où Mithra, Jésus, les taureau
1380
d dans un syncrétisme effarant, où Mithra, Jésus,
les
taureaux et Alban confondent leurs génies dans une sorte de cauchemar
1381
e qu’on veut de ce paganisme exalté, tout ivre de
la
fumée des sacrifices sanglants. Pour ma part, je le trouve assez peu
1382
fumée des sacrifices sanglants. Pour ma part, je
le
trouve assez peu humain et comme obsédé par une idée de violence toni
1383
s donnons ? » ⁂ Il est impossible de ne voir dans
les
Bestiaires qu’une évocation de l’Espagne et du génie taurin. Ce qui p
1384
e ne voir dans les Bestiaires qu’une évocation de
l’
Espagne et du génie taurin. Ce qui perce à chaque page, ce qui peu à p
1385
perce à chaque page, ce qui peu à peu obsède dans
l’
inflexion des phrases, ce qui s’élève en fin de compte de tous ces tab
1386
ous ces tableaux de violence et de passion, c’est
la
présence d’un tempérament. À l’inverse de tant d’autres qui s’analyse
1387
de passion, c’est la présence d’un tempérament. À
l’
inverse de tant d’autres qui s’analysent sans fin, avant que d’être, M
1388
soulève directement aucun des grands problèmes de
l’
heure. La violence même qui sourd dans son être intime l’en empêche, l
1389
irectement aucun des grands problèmes de l’heure.
La
violence même qui sourd dans son être intime l’en empêche, le préserv
1390
. La violence même qui sourd dans son être intime
l’
en empêche, le préserve des états d’incertitude douloureux, où ces pro
1391
même qui sourd dans son être intime l’en empêche,
le
préserve des états d’incertitude douloureux, où ces problèmes viennen
1392
douloureux, où ces problèmes viennent se poser à
l’
esprit, profitant de son désaccord avec la vie. Ni métaphysicien, ni l
1393
poser à l’esprit, profitant de son désaccord avec
la
vie. Ni métaphysicien, ni logicien, dit-il d’Alban — (de lui-même) —
1394
pas à ce qui est triste ou ennuyeux, que ce soit
l’
idée de la mort ou les soucis politiques, sociaux, etc., et il ne met
1395
qui est triste ou ennuyeux, que ce soit l’idée de
la
mort ou les soucis politiques, sociaux, etc., et il ne met de la grav
1396
ste ou ennuyeux, que ce soit l’idée de la mort ou
les
soucis politiques, sociaux, etc., et il ne met de la gravité que dans
1397
soucis politiques, sociaux, etc., et il ne met de
la
gravité que dans les choses voluptueuses, je n’ai pas dit les choses
1398
ociaux, etc., et il ne met de la gravité que dans
les
choses voluptueuses, je n’ai pas dit les choses sentimentales. Le tra
1399
que dans les choses voluptueuses, je n’ai pas dit
les
choses sentimentales. Le tragique de la vie ne lui échappe pas. Il en
1400
ueuses, je n’ai pas dit les choses sentimentales.
Le
tragique de la vie ne lui échappe pas. Il en parle, il le chante avec
1401
pas dit les choses sentimentales. Le tragique de
la
vie ne lui échappe pas. Il en parle, il le chante avec pathétique. Ma
1402
que de la vie ne lui échappe pas. Il en parle, il
le
chante avec pathétique. Mais c’est parce qu’il est poète : le chant f
1403
ec pathétique. Mais c’est parce qu’il est poète :
le
chant fini, il n’y pense plus. On comprend qu’une telle attitude agac
1404
se soucient avant tout de trouver des réponses de
l’
intelligence ou de la foi aux inquiétudes profondes de leurs âmes sépa
1405
t de trouver des réponses de l’intelligence ou de
la
foi aux inquiétudes profondes de leurs âmes séparées de Dieu. Monther
1406
é dont il manifeste avec une magnifique insolence
les
forces créatrices, ne vaut-elle pas d’être élevée en témoignage pour
1407
levée en témoignage pour notre exaltation ? Comme
la
vue des athlètes en action, un tel livre communique une puissance phy
1408
munique une puissance physique, un mouvement vers
la
vie ardente qui peut entraîner l’âme dans un élan de grandeur. N’est-
1409
mouvement vers la vie ardente qui peut entraîner
l’
âme dans un élan de grandeur. N’est-ce point une solution aussi ? Plut
1410
ois à ces forces obscures qui nous replacent dans
l’
intelligence de l’instinct universel et nous élèvent à une vie plus âp
1411
bscures qui nous replacent dans l’intelligence de
l’
instinct universel et nous élèvent à une vie plus âpre et violemment c
1412
à une vie plus âpre et violemment contractée, par
la
grâce de l’éternel Désir ? 6. Il est curieux de noter que de tels p
1413
us âpre et violemment contractée, par la grâce de
l’
éternel Désir ? 6. Il est curieux de noter que de tels passages vien
1414
noter que de tels passages viennent à l’appui de
la
théorie de l’instinct de Bergson. Bergson suppose aussi entre le sphe
1415
tels passages viennent à l’appui de la théorie de
l’
instinct de Bergson. Bergson suppose aussi entre le sphex qui pique un
1416
’instinct de Bergson. Bergson suppose aussi entre
le
sphex qui pique une chenille précisément aux trois-centres nerveux, e
1417
« une sympathie (au sens étymologique du mot) qui
la
renseigne du dedans, pour ainsi dire, sur la vulnérabilité de la chen
1418
qui la renseigne du dedans, pour ainsi dire, sur
la
vulnérabilité de la chenille. » (Évolution créatrice, p. 188) Je n’ai
1419
dedans, pour ainsi dire, sur la vulnérabilité de
la
chenille. » (Évolution créatrice, p. 188) Je n’ai pas la place de cit
1420
ille. » (Évolution créatrice, p. 188) Je n’ai pas
la
place de citer ici plusieurs autres passages qui préciseraient ce par
1421
ce parallélisme du poète et du philosophe. g. «
Les
Bestiaires, roman, par Henry de Montherlant, chez Grasset », La Semai
1422
roman, par Henry de Montherlant, chez Grasset »,
La
Semaine littéraire, Genève, n° 1697, 10 juillet 1926, p. 335.
1423
Le
Dépaysement oriental (16 juillet 1926)a Il y a dans le monde intel
1424
sement oriental (16 juillet 1926)a Il y a dans
le
monde intellectuel une « Question d’Orient » dont on ne peut plus méc
1425
stion d’Orient » dont on ne peut plus méconnaître
l’
urgence. Des prophètes — hindous à demi-européanisés ou germains désil
1426
nisés ou germains désillusionnés — nous annoncent
le
« crépuscule du monde occidental », et, au-dessus des ruines prochain
1427
chaines de nos cités mécaniciennes, ils rallument
le
mirage d’un Orient paradisiaque d’où nous viendraient une fois de plu
1428
radisiaque d’où nous viendraient une fois de plus
la
sagesse et la lumière. De récentes enquêtes ont dénoncé certaines des
1429
ù nous viendraient une fois de plus la sagesse et
la
lumière. De récentes enquêtes ont dénoncé certaines des confusions su
1430
inaires. Beaucoup pourtant subsistent encore. Or,
le
nouveau livre de M. de Traz1, par les précisions importantes qu’il ap
1431
encore. Or, le nouveau livre de M. de Traz1, par
les
précisions importantes qu’il apporte sur les rapports de l’Orient et
1432
par les précisions importantes qu’il apporte sur
les
rapports de l’Orient et de l’Europe, me paraît destiné à lever plusie
1433
ons importantes qu’il apporte sur les rapports de
l’
Orient et de l’Europe, me paraît destiné à lever plusieurs des plus te
1434
qu’il apporte sur les rapports de l’Orient et de
l’
Europe, me paraît destiné à lever plusieurs des plus tenaces de ces co
1435
us tenaces de ces confusions. M. de Traz a visité
l’
Égypte, ses habitants, ses tombeaux et son passé, en curieux avide du
1436
avec une sorte d’acharnement, comme seul il sait
l’
être aujourd’hui sans que cela nuise en rien à un don de sympathie qui
1437
ise en rien à un don de sympathie qui est parfois
la
plus subtile de ses ruses de psychologue. C’est parce que son livre,
1438
hevés, n’est ni un album de vues pittoresques, ni
le
journal plus ou moins lyrique auquel nous ont habitués les voyageurs
1439
al plus ou moins lyrique auquel nous ont habitués
les
voyageurs en Orient, mais une suite de coups d’œil aigus sur l’âme or
1440
n Orient, mais une suite de coups d’œil aigus sur
l’
âme orientale de l’islam, que nous l’avons lu avec un intérêt si soute
1441
suite de coups d’œil aigus sur l’âme orientale de
l’
islam, que nous l’avons lu avec un intérêt si soutenu et parfois — je
1442
il aigus sur l’âme orientale de l’islam, que nous
l’
avons lu avec un intérêt si soutenu et parfois — je pense à certaines
1443
tie orientale de lui-même, comme c’est si souvent
le
cas, mais bien sur l’Orient. Encore faut-il s’entendre : les meilleur
1444
ême, comme c’est si souvent le cas, mais bien sur
l’
Orient. Encore faut-il s’entendre : les meilleurs documents sur l’Orie
1445
is bien sur l’Orient. Encore faut-il s’entendre :
les
meilleurs documents sur l’Orient sont les œuvres des Orientaux. L’int
1446
faut-il s’entendre : les meilleurs documents sur
l’
Orient sont les œuvres des Orientaux. L’intérêt d’un livre comme celui
1447
endre : les meilleurs documents sur l’Orient sont
les
œuvres des Orientaux. L’intérêt d’un livre comme celui-ci est plus da
1448
ments sur l’Orient sont les œuvres des Orientaux.
L’
intérêt d’un livre comme celui-ci est plus dans l’opposition des deux
1449
L’intérêt d’un livre comme celui-ci est plus dans
l’
opposition des deux mondes que dans la peinture elle-même de l’Orient.
1450
t plus dans l’opposition des deux mondes que dans
la
peinture elle-même de l’Orient. Tandis que s’accumulent les traits qu
1451
des deux mondes que dans la peinture elle-même de
l’
Orient. Tandis que s’accumulent les traits qui composent le portrait m
1452
re elle-même de l’Orient. Tandis que s’accumulent
les
traits qui composent le portrait moral de l’Oriental, celui de l’Euro
1453
Tandis que s’accumulent les traits qui composent
le
portrait moral de l’Oriental, celui de l’Européen se précise dans la
1454
ent les traits qui composent le portrait moral de
l’
Oriental, celui de l’Européen se précise dans la même mesure, — et aus
1455
mposent le portrait moral de l’Oriental, celui de
l’
Européen se précise dans la même mesure, — et aussi la figure de l’aut
1456
e l’Oriental, celui de l’Européen se précise dans
la
même mesure, — et aussi la figure de l’auteur : car il n’est guère de
1457
ropéen se précise dans la même mesure, — et aussi
la
figure de l’auteur : car il n’est guère de comparaison valable qu’ent
1458
cise dans la même mesure, — et aussi la figure de
l’
auteur : car il n’est guère de comparaison valable qu’entre individus,
1459
er mieux que lui-même. S’il dit des Égyptiens : «
Le
mensonge, autant qu’une politesse, leur paraît une beauté », c’est po
1460
par contraste une « préférence irréductible pour
le
vrai ». Ce qui lui permet de voir profond dans cet islam qu’il qualif
1461
cet islam qu’il qualifie de « religion du fil de
l’
eau », ou de « prodigieux stupéfiant », tandis que « l’attrait du chri
1462
», ou de « prodigieux stupéfiant », tandis que «
l’
attrait du christianisme est dans l’inquiétude qu’il nous inflige ». «
1463
tandis que « l’attrait du christianisme est dans
l’
inquiétude qu’il nous inflige ». « Ils mettent leur âme en veilleuse,
1464
i de soi-même nous avons fait une vertu. Eux, ils
l’
ont rendu facile et en ont fait un plaisir. » Et encore ceci que je tr
1465
re ceci que je trouve si juste : « Ce qui définit
le
plus profondément l’Occidental, c’est peut-être la fidélité. » Ses re
1466
si juste : « Ce qui définit le plus profondément
l’
Occidental, c’est peut-être la fidélité. » Ses remarques sur la psycho
1467
e plus profondément l’Occidental, c’est peut-être
la
fidélité. » Ses remarques sur la psychologie de l’Égyptien ne sont pa
1468
c’est peut-être la fidélité. » Ses remarques sur
la
psychologie de l’Égyptien ne sont pas moins subtiles et le mènent à c
1469
a fidélité. » Ses remarques sur la psychologie de
l’
Égyptien ne sont pas moins subtiles et le mènent à cette constatation
1470
logie de l’Égyptien ne sont pas moins subtiles et
le
mènent à cette constatation fondamentale que « notre intelligence et
1471
fondamentale que « notre intelligence et celle de
l’
Oriental ne sont pas superposables ». Dès lors, comment collaborer, co
1472
si c’est impossible, pourra-t-on du moins éviter
le
conflit que certains prétendent menaçant ? Malgré l’« anxiété mélanco
1473
conflit que certains prétendent menaçant ? Malgré
l’
« anxiété mélancolique » qu’il éprouve à se sentir si loin de l’Orient
1474
lancolique » qu’il éprouve à se sentir si loin de
l’
Oriental, les conclusions de M. de Traz — si tant est qu’on peut concl
1475
qu’il éprouve à se sentir si loin de l’Oriental,
les
conclusions de M. de Traz — si tant est qu’on peut conclure en une ma
1476
t que nous ayons à chercher là-bas notre salut. «
La
seule leçon à attendre des musulmans, c’est que le spectacle de leur
1477
a seule leçon à attendre des musulmans, c’est que
le
spectacle de leur décadence nous enseigne comment éviter la nôtre. »
1478
le de leur décadence nous enseigne comment éviter
la
nôtre. » La place me manque pour parler comme j’aurais voulu le faire
1479
écadence nous enseigne comment éviter la nôtre. »
La
place me manque pour parler comme j’aurais voulu le faire des deux au
1480
place me manque pour parler comme j’aurais voulu
le
faire des deux autres parties du volume, d’une importance moins actue
1481
e, mais d’une qualité d’art peut-être supérieure.
Les
méditations sur les ruines de la Haute-Égypte révèlent en de Traz un
1482
é d’art peut-être supérieure. Les méditations sur
les
ruines de la Haute-Égypte révèlent en de Traz un philosophe de l’hist
1483
tre supérieure. Les méditations sur les ruines de
la
Haute-Égypte révèlent en de Traz un philosophe de l’histoire aux vues
1484
Haute-Égypte révèlent en de Traz un philosophe de
l’
histoire aux vues larges et pourtant réalistes, aux hypothèses hardies
1485
t pourtant réalistes, aux hypothèses hardies — de
la
hardiesse de ce bon sens qui est le plus éloigné du sens commun — mai
1486
hardies — de la hardiesse de ce bon sens qui est
le
plus éloigné du sens commun — mais qui reste trop méfiant de tout rom
1487
nt de tout romantisme pour édifier aucun système.
Le
livre se termine par un voyage à Jérusalem : le christianisme n’est-i
1488
. Le livre se termine par un voyage à Jérusalem :
le
christianisme n’est-il pas le plus beau don de l’Orient à l’Europe ?
1489
oyage à Jérusalem : le christianisme n’est-il pas
le
plus beau don de l’Orient à l’Europe ? Il y a là des pages d’un accen
1490
le christianisme n’est-il pas le plus beau don de
l’
Orient à l’Europe ? Il y a là des pages d’un accent très noble et cour
1491
nisme n’est-il pas le plus beau don de l’Orient à
l’
Europe ? Il y a là des pages d’un accent très noble et courageux mêlé,
1492
rfois, d’une certaine amertume, où de Traz quitte
le
ton mesuré qu’il s’impose d’ordinaire. Mais j’avoue que m’a parfois u
1493
oue que m’a parfois un peu gêné cette présence de
la
mort qu’il fait sentir partout aux lieux mêmes où naquit la religion
1494
’il fait sentir partout aux lieux mêmes où naquit
la
religion du « Prince de la vie »… Qu’on ne croie pas, d’ailleurs, que
1495
lieux mêmes où naquit la religion du « Prince de
la
vie »… Qu’on ne croie pas, d’ailleurs, que l’attitude presque constam
1496
de la vie »… Qu’on ne croie pas, d’ailleurs, que
l’
attitude presque constamment critique de M. de Traz diminue l’intérêt
1497
resque constamment critique de M. de Traz diminue
l’
intérêt vivant de son livre : cette impartialité même, cette façon de
1498
es, révèle sa personnalité peut-être mieux que ne
le
feraient une suite de pages lyriques toujours un peu stylisées. Il ap
1499
oujours un peu stylisées. Il apparaît, ici, comme
le
type du voyageur intelligent, qui n’accepte d’être séduit que pour «
1500
arer et, parfois, juger ; préférant obstinément à
la
légende le vrai, même amer, non par défaut d’un sens artistique dont
1501
rfois, juger ; préférant obstinément à la légende
le
vrai, même amer, non par défaut d’un sens artistique dont plusieurs d
1502
tistique dont plusieurs de ses morceaux attestent
la
délicatesse, mais parce qu’il sait y trouver les seuls motifs réels d
1503
t la délicatesse, mais parce qu’il sait y trouver
les
seuls motifs réels d’exaltation. 1. Le Dépaysement oriental, chez
1504
rouver les seuls motifs réels d’exaltation. 1.
Le
Dépaysement oriental, chez Grasset, Paris. a. « Le Dépaysement orien
1505
Dépaysement oriental, chez Grasset, Paris. a. «
Le
Dépaysement oriental », Journal de Genève, Genève, n° 192, 16 juillet
1506
e construction et de synthèse qui se dessine chez
les
jeunes écrivains d’aujourd’hui. La « critique philosophique » qu’il v
1507
dessine chez les jeunes écrivains d’aujourd’hui.
La
« critique philosophique » qu’il voudrait inaugurer « ne se contenter
1508
rait inaugurer « ne se contenterait pas d’étudier
les
œuvres pour elles-mêmes dans leur signification historique ou techniq
1509
historique ou technique, mais tâcherait d’épouser
le
dynamisme spirituel qu’elle révèle, puis de les situer dans l’univers
1510
er le dynamisme spirituel qu’elle révèle, puis de
les
situer dans l’univers humain ». M. Fernandez a tout le talent qu’il f
1511
spirituel qu’elle révèle, puis de les situer dans
l’
univers humain ». M. Fernandez a tout le talent qu’il faut pour lui fa
1512
tuer dans l’univers humain ». M. Fernandez a tout
le
talent qu’il faut pour lui faire acquérir droit de cité. Voici enfin
1513
eçon constructive des expériences entreprises par
les
générations précédentes. Parce qu’elles se sont souvent enlisées dans
1514
ont souvent enlisées dans leurs recherches, il ne
les
condamne pas d’un « Jugement » sans issue sinon vers le passé catholi
1515
damne pas d’un « Jugement » sans issue sinon vers
le
passé catholique ; mais tenant compte de leur effort, il puise dans l
1516
mais tenant compte de leur effort, il puise dans
l’
échec même de leurs analyses les éléments de sa synthèse, qui se trouv
1517
ort, il puise dans l’échec même de leurs analyses
les
éléments de sa synthèse, qui se trouve ainsi continuer leur œuvre, co
1518
verte couronne une série d’expériences négatives.
La
critique de ces expériences négatives est contenue surtout dans ses e
1519
st, Pater et Stendhal. Certes, il était temps que
l’
on dénonce la confusion romantique de l’art avec la vie, qui empoisonn
1520
Stendhal. Certes, il était temps que l’on dénonce
la
confusion romantique de l’art avec la vie, qui empoisonne et la moral
1521
temps que l’on dénonce la confusion romantique de
l’
art avec la vie, qui empoisonne et la morale et l’esthétique modernes.
1522
’on dénonce la confusion romantique de l’art avec
la
vie, qui empoisonne et la morale et l’esthétique modernes. Et à ce pr
1523
omantique de l’art avec la vie, qui empoisonne et
la
morale et l’esthétique modernes. Et à ce propos, il faut souhaiter qu
1524
l’art avec la vie, qui empoisonne et la morale et
l’
esthétique modernes. Et à ce propos, il faut souhaiter que M. Fernande
1525
ut souhaiter que M. Fernandez aborde par ce biais
l’
œuvre de Gide, qui plus qu’aucune autre me paraît liée à cette confusi
1526
à cette confusion. Mais s’il est bien établi que
les
lois de la vie sont essentiellement différentes des lois de l’œuvre d
1527
fusion. Mais s’il est bien établi que les lois de
la
vie sont essentiellement différentes des lois de l’œuvre d’art, il ne
1528
vie sont essentiellement différentes des lois de
l’
œuvre d’art, il ne s’en suit pas forcément que l’on doit nier toute co
1529
l’œuvre d’art, il ne s’en suit pas forcément que
l’
on doit nier toute communication directe entre l’œuvre et le moi, comm
1530
l’on doit nier toute communication directe entre
l’
œuvre et le moi, comme le fait M. Fernandez dans un essai sur l’Autobi
1531
nier toute communication directe entre l’œuvre et
le
moi, comme le fait M. Fernandez dans un essai sur l’Autobiographie e
1532
munication directe entre l’œuvre et le moi, comme
le
fait M. Fernandez dans un essai sur l’Autobiographie et le Roman, do
1533
moi, comme le fait M. Fernandez dans un essai sur
l’
Autobiographie et le Roman, dont pour ma part je suis loin d’admettre
1534
Fernandez dans un essai sur l’Autobiographie et
le
Roman, dont pour ma part je suis loin d’admettre plusieurs thèses bea
1535
es. M. Fernandez tente de prouver par exemple que
l’
œuvre d’art ne peut être un moyen de connaissance personnelle. Après q
1536
voir se concevoir et s’essayer. » Fort bien, mais
l’
œuvre n’est-elle pas une façon particulière de s’essayer ? Je ne puis
1537
e discussion de ces thèses subtiles, d’autant que
la
position de l’auteur dans cet essai me paraît encore ambiguë : on peu
1538
ces thèses subtiles, d’autant que la position de
l’
auteur dans cet essai me paraît encore ambiguë : on peut se demander s
1539
e ambiguë : on peut se demander s’il nie vraiment
l’
interaction de la vie et de l’art, ou s’il la condamne plutôt, à cause
1540
ut se demander s’il nie vraiment l’interaction de
la
vie et de l’art, ou s’il la condamne plutôt, à cause des confusions q
1541
r s’il nie vraiment l’interaction de la vie et de
l’
art, ou s’il la condamne plutôt, à cause des confusions qu’il y décèle
1542
ment l’interaction de la vie et de l’art, ou s’il
la
condamne plutôt, à cause des confusions qu’il y décèle. Le meilleur m
1543
ne plutôt, à cause des confusions qu’il y décèle.
Le
meilleur morceau du livre est l’essai sur Proust et sa théorie des «
1544
qu’il y décèle. Le meilleur morceau du livre est
l’
essai sur Proust et sa théorie des « intermittences du cœur » dont Fer
1545
que décisive. Et c’est justement par opposition à
la
conception proustienne de la personnalité — « mosaïque de sensations
1546
ent par opposition à la conception proustienne de
la
personnalité — « mosaïque de sensations juxtaposées » — qu’il définit
1547
uxtaposées » — qu’il définit sa propre théorie de
la
« garantie des sentiments », où l’on est en droit de voir le germe d’
1548
pre théorie de la « garantie des sentiments », où
l’
on est en droit de voir le germe d’un moralisme nouveau qui se fondera
1549
ie des sentiments », où l’on est en droit de voir
le
germe d’un moralisme nouveau qui se fonderait solidement sur les donn
1550
moralisme nouveau qui se fonderait solidement sur
les
données modernes de la psychologie et de la philosophie. Pour nous pr
1551
fonderait solidement sur les données modernes de
la
psychologie et de la philosophie. Pour nous prémunir contre le pouvoi
1552
sur les données modernes de la psychologie et de
la
philosophie. Pour nous prémunir contre le pouvoir d’analyse — une ana
1553
e et de la philosophie. Pour nous prémunir contre
le
pouvoir d’analyse — une analyse qui retient les éléments de la person
1554
re le pouvoir d’analyse — une analyse qui retient
les
éléments de la personnalité moins le « principe unificateur » — que l
1555
analyse — une analyse qui retient les éléments de
la
personnalité moins le « principe unificateur » — que la psychologie f
1556
qui retient les éléments de la personnalité moins
le
« principe unificateur » — que la psychologie freudienne et proustien
1557
sonnalité moins le « principe unificateur » — que
la
psychologie freudienne et proustienne a porté à un point si dangereux
1558
a porté à un point si dangereux, il nous propose
l’
expérience d’un Newman, les exemples d’un Meredith et d’un Stendhal, q
1559
gereux, il nous propose l’expérience d’un Newman,
les
exemples d’un Meredith et d’un Stendhal, qui ont su « penser dans le
1560
redith et d’un Stendhal, qui ont su « penser dans
le
train de l’action, faire de la psychologie à la volée », et donc conn
1561
un Stendhal, qui ont su « penser dans le train de
l’
action, faire de la psychologie à la volée », et donc connaître l’homm
1562
t su « penser dans le train de l’action, faire de
la
psychologie à la volée », et donc connaître l’homme dans l’élan qui f
1563
s le train de l’action, faire de la psychologie à
la
volée », et donc connaître l’homme dans l’élan qui fait sa véritable
1564
de la psychologie à la volée », et donc connaître
l’
homme dans l’élan qui fait sa véritable unité. Je me borne à signaler
1565
ogie à la volée », et donc connaître l’homme dans
l’
élan qui fait sa véritable unité. Je me borne à signaler encore un thè
1566
thème qui revient dans la plupart de ces essais :
l’
esthétique du roman. Fernandez en formule une théorie assez proche du
1567
téraire, et qu’il serait bien utile d’adopter, si
l’
on veut éviter les confusions qui sont en train d’ôter sa valeur litté
1568
serait bien utile d’adopter, si l’on veut éviter
les
confusions qui sont en train d’ôter sa valeur littéraire au genre le
1569
ont en train d’ôter sa valeur littéraire au genre
le
plus encombré et le plus impur qui soit. On n’a pas ménagé les critiq
1570
sa valeur littéraire au genre le plus encombré et
le
plus impur qui soit. On n’a pas ménagé les critiques à cette œuvre. C
1571
mbré et le plus impur qui soit. On n’a pas ménagé
les
critiques à cette œuvre. Cela tient surtout à sa forme : il est parfo
1572
forme : il est parfois agaçant de pressentir sous
l’
expression trop technique ou obscure, une richesse d’idées neuves et f
1573
Périlleuse situation que la sienne, en effet, où
l’
on court le double risque de paraître trop littéraire aux philosophes,
1574
situation que la sienne, en effet, où l’on court
le
double risque de paraître trop littéraire aux philosophes, et trop ph
1575
ndez un certain recul par rapport à ses idées, on
le
sent un peu gauche encore dans les positions conquises. Il n’empêche
1576
à ses idées, on le sent un peu gauche encore dans
les
positions conquises. Il n’empêche que son livre manifeste une belle u
1577
uvre comme Plaisir des Sports de Jean Prévost, et
les
essais politiques de Drieu la Rochelle, les Messages de Fernandez son
1578
t, et les essais politiques de Drieu la Rochelle,
les
Messages de Fernandez sont les premières contributions à l’établissem
1579
s de Fernandez sont les premières contributions à
l’
établissement d’une éthique adaptée aux besoins modernes. w. « Ramon
1580
Henry de Montherlant,
Les
Bestiaires (septembre 1926)x J’éprouve quelque gêne à porter un ju
1581
Montherlant : dans ce récit plus encore que dans
les
œuvres précédentes, on voit beaucoup moins l’œuvre d’art que l’auteur
1582
ns les œuvres précédentes, on voit beaucoup moins
l’
œuvre d’art que l’auteur ; dans ce portrait de Montherlant toréador, à
1583
édentes, on voit beaucoup moins l’œuvre d’art que
l’
auteur ; dans ce portrait de Montherlant toréador, à 16 ans, c’est sur
1584
de Montherlant toréador, à 16 ans, c’est surtout
le
Montherlant actuel que l’on sent. C’est dire que le livre vaut par so
1585
à 16 ans, c’est surtout le Montherlant actuel que
l’
on sent. C’est dire que le livre vaut par son allure plus que par des
1586
Montherlant actuel que l’on sent. C’est dire que
le
livre vaut par son allure plus que par des qualités de composition ou
1587
savante sensualité, pour ces insolences jolies et
les
subites violences, qui composent la séduction de cet « homme de la Re
1588
es jolies et les subites violences, qui composent
la
séduction de cet « homme de la Renaissance », pour quelques descripti
1589
ces, qui composent la séduction de cet « homme de
la
Renaissance », pour quelques descriptions des prairies espagnoles ple
1590
ur communier, il faudrait sans doute être né sous
le
signe du Taureau. Mais il sera pardonné à Montherlant beaucoup de déf
1591
a souveraine désinvolture. Elle est tonique comme
le
spectacle des athlètes. Et c’est elle avant tout que j’admire dans ce
1592
ets d’esprit ! Qu’ils paissent éternellement dans
les
prairies célestes, pour avoir donné une grande gloire aux jeunes homm
1593
s ! » Mais ce jeune homme qui écrivit naguère sur
les
Fontaines du désir certaines pages magnifiques et sobres, jetées de h
1594
pages magnifiques et sobres, jetées de haut avec
la
nonchalance des vrais puissants, je compte qu’il saura fonder sa gloi
1595
eurs plus humaines. x. « Henry de Montherlant :
Les
Bestiaires (Grasset, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de G
1596
ce (13 novembre 1926)h Des cris mouraient vers
les
berges du fleuve jaune, entre les deux façades longues que la ville p
1597
mouraient vers les berges du fleuve jaune, entre
les
deux façades longues que la ville présente au couchant, dans ce corri
1598
fleuve jaune, entre les deux façades longues que
la
ville présente au couchant, dans ce corridor de lumière où elle accue
1599
nt, dans ce corridor de lumière où elle accueille
le
ciel — et derrière, elle devient plus secrète. Vers l’est, des collin
1600
el — et derrière, elle devient plus secrète. Vers
l’
est, des collines fluides et roses. De l’autre côté, c’est le vide, où
1601
collines fluides et roses. De l’autre côté, c’est
le
vide, où s’en vont lentement les eaux et les lueurs, vers la mer. Sur
1602
autre côté, c’est le vide, où s’en vont lentement
les
eaux et les lueurs, vers la mer. Sur le Lungarno trop vaste et nu, le
1603
c’est le vide, où s’en vont lentement les eaux et
les
lueurs, vers la mer. Sur le Lungarno trop vaste et nu, les voitures r
1604
s’en vont lentement les eaux et les lueurs, vers
la
mer. Sur le Lungarno trop vaste et nu, les voitures revenaient au pas
1605
entement les eaux et les lueurs, vers la mer. Sur
le
Lungarno trop vaste et nu, les voitures revenaient au pas des Cascine
1606
s, vers la mer. Sur le Lungarno trop vaste et nu,
les
voitures revenaient au pas des Cascine. Vers sept heures, il n’y en e
1607
il n’y en eut presque plus. Nous étions seuls sur
le
pavé qui exhalait sa chaleur, au long des quais sans bancs pour notre
1608
s’éloignait derrière nous qui suivions maintenant
le
sentier du bord du fleuve, plus bas que la Promenade désertée. Sur le
1609
tenant le sentier du bord du fleuve, plus bas que
la
Promenade désertée. Sur les eaux, comme immobiles, des nuages rouges
1610
u fleuve, plus bas que la Promenade désertée. Sur
les
eaux, comme immobiles, des nuages rouges et le vert dur des berges :
1611
r les eaux, comme immobiles, des nuages rouges et
le
vert dur des berges : un malaise montait dans l’air plus frais, avec
1612
le vert dur des berges : un malaise montait dans
l’
air plus frais, avec l’odeur du limon. Nous marchions vers ces hauts a
1613
: un malaise montait dans l’air plus frais, avec
l’
odeur du limon. Nous marchions vers ces hauts arbres clairs, au tourna
1614
hauts arbres clairs, au tournant du fleuve, parmi
les
dissonances mélancoliques des lumières et des odeurs, espérant entrer
1615
Seule une maison blanche est arrêtée tout près de
l’
eau. Mais ce n’est pas d’elle que vient cette chanson jamais entendue
1616
entendue qui nous accompagne depuis un moment sur
le
chemin de l’autre rive. Il y a un homme debout à l’avant d’un char ti
1617
chemin de l’autre rive. Il y a un homme debout à
l’
avant d’un char tiré par des bœufs blancs. Comme une apparition. (Tu p
1618
de triste volupté emplit notre monde à ce chant.
L’
odeur du fleuve est son parfum, le soleil rouge sa douleur. Les bœufs
1619
nde à ce chant. L’odeur du fleuve est son parfum,
le
soleil rouge sa douleur. Les bœufs blancs, les roues peintes du char,
1620
leuve est son parfum, le soleil rouge sa douleur.
Les
bœufs blancs, les roues peintes du char, l’Italie des poètes… Mais ce
1621
um, le soleil rouge sa douleur. Les bœufs blancs,
les
roues peintes du char, l’Italie des poètes… Mais ce pays tout entier
1622
eur. Les bœufs blancs, les roues peintes du char,
l’
Italie des poètes… Mais ce pays tout entier pâmé dans une beauté que s
1623
nt tant de souvenirs n’a d’autre nom que celui de
l’
instant, ô mélodieuse lassitude. Vivre ainsi simplement. Sans pensée,
1624
, perdus dans un soir de n’importe où, un soir de
la
Nature… L’homme chante une plainte inouïe de pureté. Deux phrases rap
1625
ns un soir de n’importe où, un soir de la Nature…
L’
homme chante une plainte inouïe de pureté. Deux phrases rapides ondule
1626
uïe de pureté. Deux phrases rapides ondulent dans
l’
air lourd. Le chant descend très doucement la berge, les bœufs s’engag
1627
. Deux phrases rapides ondulent dans l’air lourd.
Le
chant descend très doucement la berge, les bœufs s’engagent dans le m
1628
dans l’air lourd. Le chant descend très doucement
la
berge, les bœufs s’engagent dans le marais, cherchant le gué. Plus pr
1629
lourd. Le chant descend très doucement la berge,
les
bœufs s’engagent dans le marais, cherchant le gué. Plus proches, les
1630
rès doucement la berge, les bœufs s’engagent dans
le
marais, cherchant le gué. Plus proches, les syllabes nous parviennent
1631
e, les bœufs s’engagent dans le marais, cherchant
le
gué. Plus proches, les syllabes nous parviennent au ras du fleuve som
1632
t dans le marais, cherchant le gué. Plus proches,
les
syllabes nous parviennent au ras du fleuve sombre. Nul désir en nous
1633
mbre. Nul désir en nous de comprendre ce lamento.
Le
ciel est un silence qui s’impose à nos pensées. Ici la vie n’a presqu
1634
el est un silence qui s’impose à nos pensées. Ici
la
vie n’a presque plus de sens, comme le fleuve. Elle n’est qu’odeurs,
1635
nsées. Ici la vie n’a presque plus de sens, comme
le
fleuve. Elle n’est qu’odeurs, formes mouvantes, remous dans l’air et
1636
le n’est qu’odeurs, formes mouvantes, remous dans
l’
air et musiques sourdes. Penser serait sacrilège, comme une barre droi
1637
n tableau. Nos yeux ont regardé longtemps — où va
l’
âme durant ces minutes ? — jusqu’à ce que les bœufs ruisselants remont
1638
où va l’âme durant ces minutes ? — jusqu’à ce que
les
bœufs ruisselants remontent sur notre rive. Fraîcheur humide, parfums
1639
ement vague des roseaux aux feuilles sèches… Puis
la
brume est venue comme une envie de sommeil. Une lampe dans la maison
1640
venue comme une envie de sommeil. Une lampe dans
la
maison blanche nous a révélé proche la nuit. Nous nous sommes retourn
1641
lampe dans la maison blanche nous a révélé proche
la
nuit. Nous nous sommes retournés vers la ville. Fleurs de lumières s
1642
é proche la nuit. Nous nous sommes retournés vers
la
ville. Fleurs de lumières sur les champs sombres du ciel de l’est, e
1643
retournés vers la ville. Fleurs de lumières sur
les
champs sombres du ciel de l’est, et une façade parfaite répond encore
1644
urs de lumières sur les champs sombres du ciel de
l’
est, et une façade parfaite répond encore au couchant. San Miniato sur
1645
chant. San Miniato sur sa colline. Derrière nous,
les
arbres se brouillent dans une buée sans couleurs, nous quittons un my
1646
us quittons un mystère à jamais impénétrable pour
l’
homme, nous fuyons ces bords où conspirent des ombres informes et des
1647
nous laisse gourds et faibles, caressant en nous
la
lâche volupté de sentir l’esprit se défaire et couler sans fin vers u
1648
les, caressant en nous la lâche volupté de sentir
l’
esprit se défaire et couler sans fin vers un sommeil à l’odeur fade de
1649
t se défaire et couler sans fin vers un sommeil à
l’
odeur fade de fleuve, un sommeil de plante vaguement heureuse d’être p
1650
nous enivrait, promettant à nos sens, fatigués de
l’
esprit qui les exerce, des voluptés plus faciles — pour infuser dans n
1651
, promettant à nos sens, fatigués de l’esprit qui
les
exerce, des voluptés plus faciles — pour infuser dans nos corps charm
1652
dont on ne voudrait plus guérir… Mais nous voyons
la
ville debout dans ses lumières. Architectures ! langage des dieux, ô
1653
s qu’épousent nos ferveurs, angles purs, repos de
l’
esprit qui s’appuie sur son œuvre ! La sérénité de cette façade élevée
1654
s, repos de l’esprit qui s’appuie sur son œuvre !
La
sérénité de cette façade élevée lumineuse sur le ciel fut le signe d’
1655
La sérénité de cette façade élevée lumineuse sur
le
ciel fut le signe d’un équilibre retrouvé. Un grand pont de fer, près
1656
de cette façade élevée lumineuse sur le ciel fut
le
signe d’un équilibre retrouvé. Un grand pont de fer, près de nous, ér
1657
uvé. Un grand pont de fer, près de nous, érigeait
l’
image de la lutte et des forces humaines, et rendait sous des coups un
1658
nd pont de fer, près de nous, érigeait l’image de
la
lutte et des forces humaines, et rendait sous des coups un son qui no
1659
et rendait sous des coups un son qui nous évoqua
les
rumeurs de villes d’usines. Il y avait la vie des hommes pour demain,
1660
évoqua les rumeurs de villes d’usines. Il y avait
la
vie des hommes pour demain, et il était beau d’y songer un peu avant
1661
beau d’y songer un peu avant de nous abandonner à
l’
oubli luxueux des rues. Le long de l’Arno, les façades sont jaunes et
1662
abandonner à l’oubli luxueux des rues. Le long de
l’
Arno, les façades sont jaunes et roses près de l’eau, puis perdent dan
1663
er à l’oubli luxueux des rues. Le long de l’Arno,
les
façades sont jaunes et roses près de l’eau, puis perdent dans la nuit
1664
l’Arno, les façades sont jaunes et roses près de
l’
eau, puis perdent dans la nuit leurs lignes graves. Toutes ces formes
1665
jaunes et roses près de l’eau, puis perdent dans
la
nuit leurs lignes graves. Toutes ces formes devinées dans l’espace no
1666
rs lignes graves. Toutes ces formes devinées dans
l’
espace nous environnent d’une obscure confiance. Livrons-nous aux jeux
1667
ons-nous aux jeux des hommes-qui-font-des-gestes.
Les
autos répètent sans fin les notes mêlées d’une symphonie qui va peut-
1668
-qui-font-des-gestes. Les autos répètent sans fin
les
notes mêlées d’une symphonie qui va peut-être composer tous les bruit
1669
es d’une symphonie qui va peut-être composer tous
les
bruits de la ville en un chant immense. Il passe une possibilité de b
1670
onie qui va peut-être composer tous les bruits de
la
ville en un chant immense. Il passe une possibilité de bonheur par pe
1671
passe une possibilité de bonheur par personne et
les
devantures ne cherchent qu’à vous plaire. Chaque ruelle croisée propo
1672
oublie pour celui des regards étrangers. Et voici
la
place régulière, les galeries, les cafés, les musiques, Donizetti qui
1673
s regards étrangers. Et voici la place régulière,
les
galeries, les cafés, les musiques, Donizetti qui pleure délicieusemen
1674
ngers. Et voici la place régulière, les galeries,
les
cafés, les musiques, Donizetti qui pleure délicieusement jusque dans
1675
oici la place régulière, les galeries, les cafés,
les
musiques, Donizetti qui pleure délicieusement jusque dans les gestes
1676
, Donizetti qui pleure délicieusement jusque dans
les
gestes des passantes. Sous cette agitation aimable et monotone nous a
1677
ation aimable et monotone nous allons voir courir
l’
arabesque des sentiments et le mouvement perpétuel de l’amour. Plaisir
1678
allons voir courir l’arabesque des sentiments et
le
mouvement perpétuel de l’amour. Plaisir de se sentir engagé dans un s
1679
esque des sentiments et le mouvement perpétuel de
l’
amour. Plaisir de se sentir engagé dans un système d’ondes de forces q
1680
ngagé dans un système d’ondes de forces qui tisse
la
nuit vibrante, intérêts, politesses, politiques, regards, musiques —
1681
musiques — cette vie rapide dans un décor qui est
le
rêve éternisé des plus voluptueuses intelligences — tous les tableaux
1682
ernisé des plus voluptueuses intelligences — tous
les
tableaux dans le noir des musées ! — et si tu veux soudain le son gra
1683
luptueuses intelligences — tous les tableaux dans
le
noir des musées ! — et si tu veux soudain le son grave de l’infini, p
1684
dans le noir des musées ! — et si tu veux soudain
le
son grave de l’infini, pour être seul parmi la foule, lève les yeux,
1685
musées ! — et si tu veux soudain le son grave de
l’
infini, pour être seul parmi la foule, lève les yeux, au plus beau cie
1686
in le son grave de l’infini, pour être seul parmi
la
foule, lève les yeux, au plus beau ciel du monde. h. « Soir de Flor
1687
de l’infini, pour être seul parmi la foule, lève
les
yeux, au plus beau ciel du monde. h. « Soir de Florence », La Semai
1688
us beau ciel du monde. h. « Soir de Florence »,
La
Semaine littéraire, Genève, n° 1715, 13 novembre 1926, p. 547-548.
1689
Jacques Spitz,
La
Croisière indécise (décembre 1926)y L’auteur veut amuser en nous q
1690
Spitz, La Croisière indécise (décembre 1926)y
L’
auteur veut amuser en nous quelques idées graves en leur présentant le
1691
en nous quelques idées graves en leur présentant
les
miroirs de personnages cocasses à souhait, qui manifestent, avec un c
1692
manque de conviction et des poses de mannequins,
les
tendances contradictoires d’un individu. C’est pour traiter ce sujet
1693
sière de vacances, qui finit par un naufrage dans
la
littérature, le navire succombant sous les allégories. L’étonnant, c’
1694
s, qui finit par un naufrage dans la littérature,
le
navire succombant sous les allégories. L’étonnant, c’est que le livre
1695
ge dans la littérature, le navire succombant sous
les
allégories. L’étonnant, c’est que le livre soit réellement amusant, e
1696
rature, le navire succombant sous les allégories.
L’
étonnant, c’est que le livre soit réellement amusant, et qu’il trouve
1697
ombant sous les allégories. L’étonnant, c’est que
le
livre soit réellement amusant, et qu’il trouve une sorte d’unité viva
1698
t, et qu’il trouve une sorte d’unité vivante dans
le
rythme des désirs jamais simultanés de ses petits héros. M. Spitz che
1699
etits héros. M. Spitz cherche à faire sourire, on
le
sent ; pourtant l’on sourit : il faut bien croire qu’il y a là un tal
1700
tz cherche à faire sourire, on le sent ; pourtant
l’
on sourit : il faut bien croire qu’il y a là un talent, charmant, glac
1701
rituellement « poétique ». y. « Jacques Spitz :
La
Croisière indécise (NRF, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue
1702
Alfred Colling,
L’
Iroquois (décembre 1926)z Ce roman a le charme d’un automne, une am
1703
olling, L’Iroquois (décembre 1926)z Ce roman a
le
charme d’un automne, une amertume enveloppée, une atmosphère trop cla
1704
mertume enveloppée, une atmosphère trop claire où
les
cris se font un peu aigres et les couleurs fluides. Toute la tendress
1705
trop claire où les cris se font un peu aigres et
les
couleurs fluides. Toute la tendresse que ranime un soleil lointain va
1706
font un peu aigres et les couleurs fluides. Toute
la
tendresse que ranime un soleil lointain va tourner en cruelle mélanco
1707
e mélancolie. Pourquoi, Henri de Closain, quitter
le
domaine enchanté où des amis très fins, précieux poètes, dissertent s
1708
e sait plus de quels souvenirs ; jusqu’au soir où
la
douleur nette d’un amour réveillé l’envahit. Et Closain rencontre, da
1709
u’au soir où la douleur nette d’un amour réveillé
l’
envahit. Et Closain rencontre, dans l’inévitable bar, le couple de jui
1710
ur réveillé l’envahit. Et Closain rencontre, dans
l’
inévitable bar, le couple de juifs espagnols qui va l’entraîner avec s
1711
hit. Et Closain rencontre, dans l’inévitable bar,
le
couple de juifs espagnols qui va l’entraîner avec son mauvais cœur, d
1712
évitable bar, le couple de juifs espagnols qui va
l’
entraîner avec son mauvais cœur, dans une aventure incertaine et doulo
1713
taine et douloureuse ; enfin Orpha, sa maîtresse,
le
fuit, parce que son silence devient insupportable : « Orpha ne compre
1714
rir et ne plus aimer ». Closain se tue pour finir
le
livre. Livre charmant et bizarre, où la sentimentalité moderne trouve
1715
our finir le livre. Livre charmant et bizarre, où
la
sentimentalité moderne trouve l’expression ironique qui lui convient,
1716
t et bizarre, où la sentimentalité moderne trouve
l’
expression ironique qui lui convient, mais ici mêlée à une émotion plu
1717
ui transparaît parfois et nous fait regretter que
l’
auteur ne se soit pas mieux abandonné à son sujet, d’un pathétique ass
1718
un pathétique assez neuf. z. « Alfred Colling :
L’
Iroquois (Émile-Paul, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de G
1719
André Malraux,
La
Tentation de l’Occident (décembre 1926)aa Un Chinois écrit d’Europ
1720
André Malraux, La Tentation de
l’
Occident (décembre 1926)aa Un Chinois écrit d’Europe à un Français
1721
e. Nous sommes loin du ton des Lettres persanes :
le
Chinois s’étonne non sans quelque aigreur, et critique avec un mépris
1722
aigreur, et critique avec un mépris tranquille ;
le
Français riposte sans conviction, et sous sa défense on devine une dé
1723
n devine une détresse. C’est encore une vision de
l’
Occident qui naît de ce petit livre si dense, si inquiétant. Le Chinoi
1724
i naît de ce petit livre si dense, si inquiétant.
Le
Chinois voit dans l’Europe « une barbarie attentivement ordonnée, où
1725
vre si dense, si inquiétant. Le Chinois voit dans
l’
Europe « une barbarie attentivement ordonnée, où l’idée de la civilisa
1726
’Europe « une barbarie attentivement ordonnée, où
l’
idée de la civilisation et celle de l’ordre sont chaque jour confondue
1727
une barbarie attentivement ordonnée, où l’idée de
la
civilisation et celle de l’ordre sont chaque jour confondues ». Nous
1728
rdonnée, où l’idée de la civilisation et celle de
l’
ordre sont chaque jour confondues ». Nous cherchons à conquérir non le
1729
jour confondues ». Nous cherchons à conquérir non
le
monde, mais son ordre. Nous humilions sans trêve notre sensibilité au
1730
e « mythe cohérent » vers quoi tend notre esprit.
La
passion apparaît dans notre ordre social « comme une adroite fêlure »
1731
ure ». Notre morale est entièrement subordonnée à
l’
action ; notre individualisme en naît logiquement, et toutes nos catég
1732
nos catégories artificielles et nécessaires. Mais
le
monde échappe toujours à nos cadres — perpétuel conflit du réel avec
1733
réel avec nos rêves de puissance : notre ambition
la
plus haute échoue. La tristesse règne sur nos villes. (Neurasthénie,
1734
puissance : notre ambition la plus haute échoue.
La
tristesse règne sur nos villes. (Neurasthénie, ce mal de l’Occident.)
1735
se règne sur nos villes. (Neurasthénie, ce mal de
l’
Occident.) Et notre vertu suprême, aussi, est douloureuse : le sacrifi
1736
Et notre vertu suprême, aussi, est douloureuse :
le
sacrifice. Sans doute, cette « absurdité essentielle » que le Chinois
1737
. Sans doute, cette « absurdité essentielle » que
le
Chinois distingue au cœur de la vie occidentale apparaît mieux par la
1738
essentielle » que le Chinois distingue au cœur de
la
vie occidentale apparaît mieux par la comparaison de l’idéal asiatiqu
1739
au cœur de la vie occidentale apparaît mieux par
la
comparaison de l’idéal asiatique avec le nôtre. Mais je crois que tou
1740
occidentale apparaît mieux par la comparaison de
l’
idéal asiatique avec le nôtre. Mais je crois que toute intelligence eu
1741
fait parler son Chinois de telle façon qu’ils ne
le
paraissent point. Et alors le relativisme angoissant qui semblait dev
1742
lle façon qu’ils ne le paraissent point. Et alors
le
relativisme angoissant qui semblait devoir résulter de cette confront
1743
nouit : c’est bien plutôt une unité supérieure de
l’
esprit humain que nous découvrons, et qui nous permettra de juger à no
1744
er à notre tour certaines démences qui enfièvrent
l’
Europe. Tandis que M. Ford expose victorieusement sa méthode pour « r
1745
prenons chaque jour une conscience plus claire de
la
vanité de nos buts, « capables d’agir jusqu’au sacrifice, mais pleins
1746
jusqu’au sacrifice, mais pleins de dégoût devant
la
volonté d’action qui tord aujourd’hui notre race… ». Et peut-être n’e
1747
laisser subsister en nous qu’un « étrange goût de
la
destruction et de l’anarchie, exempt de passion, divertissement suprê
1748
nous qu’un « étrange goût de la destruction et de
l’
anarchie, exempt de passion, divertissement suprême de l’incertitude…
1749
hie, exempt de passion, divertissement suprême de
l’
incertitude… » aa. « André Malraux : La Tentation de l’Occident (Gra
1750
prême de l’incertitude… » aa. « André Malraux :
La
Tentation de l’Occident (Grasset, Paris) », Bibliothèque universelle
1751
titude… » aa. « André Malraux : La Tentation de
l’
Occident (Grasset, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genè
1752
Paradoxe de
la
sincérité (décembre 1926)b Nous voyons un mythe prendre corps parm
1753
926)b Nous voyons un mythe prendre corps parmi
les
ruines de ce temps. Il fallait bien tirer quelque vertu d’une anarchi
1754
essaire — provisoirement — que satisfaisante pour
l’
esprit. C’est ainsi que nous trompant nous-mêmes, sous le prétexte tou
1755
t. C’est ainsi que nous trompant nous-mêmes, sous
le
prétexte toujours de probité intellectuelle ou de courage moral, nous
1756
lectuelle ou de courage moral, nous avons élevé à
la
hauteur d’une vertu première — et qui légitime tous les dénis de mora
1757
uteur d’une vertu première — et qui légitime tous
les
dénis de morale à quoi nous obligeaient en réalité on sait quel dégoû
1758
et certains désirs de grabuge moins avouables, —
la
sincérité, masque fier et un peu douloureux des défaitismes les plus
1759
masque fier et un peu douloureux des défaitismes
les
plus subtils comme des plus pures et loyales inquiétudes. Sincérité,
1760
des plus pures et loyales inquiétudes. Sincérité,
le
mal du siècle. Tout le monde en parle, et chacun s’en autorise pour e
1761
excuser sa petite faiblesse originale : tant qu’à
la
fin la notion concrète de sincérité s’évanouit en mille définitions t
1762
sa petite faiblesse originale : tant qu’à la fin
la
notion concrète de sincérité s’évanouit en mille définitions tendanci
1763
doctrine acceptée ; envers votre idéal ou envers
les
fluctuations de votre moi ? Votre sincérité est-elle consentement imm
1764
fois curieuse et désintéressée, de naturaliste de
l’
âme ? Heureusement que M. Brémond ne s’est pas encore mêlé de l’affair
1765
sement que M. Brémond ne s’est pas encore mêlé de
l’
affaire. Au reste, on n’a pas attendu les éclaircissements du subtil a
1766
e mêlé de l’affaire. Au reste, on n’a pas attendu
les
éclaircissements du subtil abbé pour n’y plus rien comprendre. ⁂ Qu’o
1767
mettre à décrire ce qu’il voit autour de lui — et
l’
étonnement indigné du spectateur. Pour parler avec un peu de clairvoya
1768
déduction passablement sèche pourrait nous donner
l’
illusion et peut-être certains bénéfices de cette opération idéale. En
1769
néfices de cette opération idéale. En même temps,
la
froideur d’une telle méthode atténuerait dans une certaine mesure — p
1770
que nécessaire — ce qu’il y a de déplaisant dans
l’
effort d’un esprit pour se dégager de confusions aussi perfides et si
1771
ntures. Sincérité et spontanéité « Nos actes
les
plus sincères sont aussi les moins calculés », écrit Gide. D’où l’on
1772
néité « Nos actes les plus sincères sont aussi
les
moins calculés », écrit Gide. D’où l’on peut tirer par une sorte de p
1773
sont aussi les moins calculés », écrit Gide. D’où
l’
on peut tirer par une sorte de passage à la limite que les faits justi
1774
. D’où l’on peut tirer par une sorte de passage à
la
limite que les faits justifient : sincérité = spontanéité. Mais la mo
1775
ut tirer par une sorte de passage à la limite que
les
faits justifient : sincérité = spontanéité. Mais la morale est ce qui
1776
faits justifient : sincérité = spontanéité. Mais
la
morale est ce qui s’oppose en premier lieu à la spontanéité. C’est po
1777
s la morale est ce qui s’oppose en premier lieu à
la
spontanéité. C’est pourquoi Gide écrit ailleurs : « En chaque être, l
1778
pourquoi Gide écrit ailleurs : « En chaque être,
le
pire instinct me paraissait le plus sincère. » La sincérité spontanée
1779
« En chaque être, le pire instinct me paraissait
le
plus sincère. » La sincérité spontanée, vertu moderne en qui renaît u
1780
le pire instinct me paraissait le plus sincère. »
La
sincérité spontanée, vertu moderne en qui renaît un mythe rousseauist
1781
usseauiste, inspire, explique un vaste domaine de
la
littérature contemporaine. Cette sorte-là de sincérité, on la nomme g
1782
re contemporaine. Cette sorte-là de sincérité, on
la
nomme gratuité. Lafcadio poussant Fleurissoire « pour rien » ne songe
1783
rien » ne songeait pas qu’il allait faire école.
Le
fait est que ce geste symbolique a déclenché tout un mouvement littér
1784
-là même qui aboutit naguère au surréalisme. Tous
les
héros de roman se sont mis à gesticuler « gratuitement ». Et les crit
1785
man se sont mis à gesticuler « gratuitement ». Et
les
critiques d’abord de s’indigner. Aujourd’hui, on les voit assez encha
1786
critiques d’abord de s’indigner. Aujourd’hui, on
les
voit assez enchantés de l’affaire : « Gratuit ! », déclarent-ils chaq
1787
gner. Aujourd’hui, on les voit assez enchantés de
l’
affaire : « Gratuit ! », déclarent-ils chaque fois qu’ils ne comprenne
1788
endre. Et, ici encore, prenons garde de confondre
le
plan littéraire avec le plan moral. Telle action peut paraître gratui
1789
renons garde de confondre le plan littéraire avec
le
plan moral. Telle action peut paraître gratuite au lecteur parce qu’i
1790
tuite au lecteur parce qu’il ne sait pas tout sur
le
personnage. Mais quant à l’auteur, il n’y a pas de gratuité. Le geste
1791
ne sait pas tout sur le personnage. Mais quant à
l’
auteur, il n’y a pas de gratuité. Le geste le plus incongru du héros n
1792
Mais quant à l’auteur, il n’y a pas de gratuité.
Le
geste le plus incongru du héros n’est jamais que le résultat d’un méc
1793
nt à l’auteur, il n’y a pas de gratuité. Le geste
le
plus incongru du héros n’est jamais que le résultat d’un mécanisme in
1794
geste le plus incongru du héros n’est jamais que
le
résultat d’un mécanisme inconscient, aussi révélateur du personnage q
1795
t, aussi révélateur du personnage que ses actions
les
mieux concertées. Rien n’est gratuit que relativement à un système re
1796
s. Il résulte de semblables considérations, dans
le
domaine de la morale, que le meilleur moyen de se livrer à ses déterm
1797
de semblables considérations, dans le domaine de
la
morale, que le meilleur moyen de se livrer à ses déterminants, c’est
1798
considérations, dans le domaine de la morale, que
le
meilleur moyen de se livrer à ses déterminants, c’est de mener la vie
1799
n de se livrer à ses déterminants, c’est de mener
la
vie gratuite que réclament les surréalistes. Le contraire de la liber
1800
nts, c’est de mener la vie gratuite que réclament
les
surréalistes. Le contraire de la liberté. D’autre part, on veut donne
1801
r la vie gratuite que réclament les surréalistes.
Le
contraire de la liberté. D’autre part, on veut donner à l’acte gratui
1802
e que réclament les surréalistes. Le contraire de
la
liberté. D’autre part, on veut donner à l’acte gratuit une valeur mor
1803
ire de la liberté. D’autre part, on veut donner à
l’
acte gratuit une valeur morale en disant qu’il révèle ce qu’il y a de
1804
ant qu’il révèle ce qu’il y a de plus secret dans
la
personnalité. Ce serait un moyen de connaissance plus intégrale de so
1805
pittoresque et plus « entachée d’utilitarisme »,
la
décision réfléchie, aussi peu gratuite que possible, d’un Julien Sore
1806
ins révélatrice du fond de l’âme humaine ? Que si
l’
on s’étonne de me voir donner ici la préférence à l’acte volontaire, o
1807
aine ? Que si l’on s’étonne de me voir donner ici
la
préférence à l’acte volontaire, ou mieux : intéressé, tandis qu’en li
1808
on s’étonne de me voir donner ici la préférence à
l’
acte volontaire, ou mieux : intéressé, tandis qu’en littérature je déf
1809
: intéressé, tandis qu’en littérature je défends
l’
acte gratuit, je réponds que la littérature remplirait déjà suffisamme
1810
érature je défends l’acte gratuit, je réponds que
la
littérature remplirait déjà suffisamment son rôle en se bornant à nou
1811
onnaissance plus intense et plus émouvante ; mais
la
morale, plutôt que de nous constater, doit nous construire — selon le
1812
e de nous constater, doit nous construire — selon
le
mode le plus libre, le plus conscient à la fois et le plus voluptueux
1813
s constater, doit nous construire — selon le mode
le
plus libre, le plus conscient à la fois et le plus voluptueux. Sin
1814
it nous construire — selon le mode le plus libre,
le
plus conscient à la fois et le plus voluptueux. Sincérité envers s
1815
ode le plus libre, le plus conscient à la fois et
le
plus voluptueux. Sincérité envers soi-même Noli me tangere.
1816
vers certain but précis. Ou bien j’aurais juste
le
temps de le noter avant de partir. Ou bien je me mettrai à l’analyser
1817
n but précis. Ou bien j’aurais juste le temps de
le
noter avant de partir. Ou bien je me mettrai à l’analyser plus longue
1818
le noter avant de partir. Ou bien je me mettrai à
l’
analyser plus longuement. Mais alors je le fausse, puisque je le prive
1819
ttrai à l’analyser plus longuement. Mais alors je
le
fausse, puisque je le prive de la puissance de se délivrer en gestes,
1820
s longuement. Mais alors je le fausse, puisque je
le
prive de la puissance de se délivrer en gestes, en conséquences matér
1821
. Mais alors je le fausse, puisque je le prive de
la
puissance de se délivrer en gestes, en conséquences matérielles. Ce n
1822
estes, en conséquences matérielles. Ce n’est plus
l’
élan pur que je décris : c’est un élan freiné dans mon esprit, c’est l
1823
ris : c’est un élan freiné dans mon esprit, c’est
le
frein lui-même, bientôt — par un mouvement normal de l’attention — et
1824
in lui-même, bientôt — par un mouvement normal de
l’
attention — et fatalement c’est à la découverte d’une faiblesse que j’
1825
ent normal de l’attention — et fatalement c’est à
la
découverte d’une faiblesse que j’aboutis : ce quelque chose qui m’a r
1826
e quelque chose qui m’a retenu d’accomplir ce que
l’
élan appelait. Second exemple. — J’éprouve le besoin de faire le po
1827
e l’élan appelait. Second exemple. — J’éprouve
le
besoin de faire le point : à quoi en suis-je, qui suis-je ? Je revois
1828
Second exemple. — J’éprouve le besoin de faire
le
point : à quoi en suis-je, qui suis-je ? Je revois des actes accompli
1829
cher du soleil, des phares d’automobiles étoilent
le
brouillard, les visages se cachent dans des fourrures, personne ne sa
1830
des phares d’automobiles étoilent le brouillard,
les
visages se cachent dans des fourrures, personne ne sait la richesse d
1831
s se cachent dans des fourrures, personne ne sait
la
richesse de ta vie…). J’écris ces choses. Puis, dans un ancien carnet
1832
arnet de notes, je retrouve un être si différent.
Les
gestes et les sentiments qui se proposaient à mon souvenir ont été pa
1833
, je retrouve un être si différent. Les gestes et
les
sentiments qui se proposaient à mon souvenir ont été passés au crible
1834
saient à mon souvenir ont été passés au crible de
la
minute où je me penchais sur mon passé. Ou, pour user d’une image plu
1835
ueur de tristesse ou de sérénité qui métamorphose
le
paysage du passé. Ainsi de certains décors modernes : vous changez l’
1836
Ainsi de certains décors modernes : vous changez
l’
éclairage, et la chaumière devient palais. C’est l’objection classique
1837
ns décors modernes : vous changez l’éclairage, et
la
chaumière devient palais. C’est l’objection classique et irréfutable
1838
’éclairage, et la chaumière devient palais. C’est
l’
objection classique et irréfutable à toute introspection : ce daltonis
1839
m’apprendre quelque chose, c’est bien le second.
La
qualité des souvenirs qu’il me livre me renseigne assez exactement, n
1840
gne assez exactement, non sur mon passé, mais sur
le
moment que je vis1. Il est bien clair qu’on ne saurait atteindre « la
1841
1. Il est bien clair qu’on ne saurait atteindre «
la
vérité sur soi » en se servant de la méthode indiquée dans le premier
1842
atteindre « la vérité sur soi » en se servant de
la
méthode indiquée dans le premier exemple. C’est un cas-limite, j’en c
1843
cas-limite, j’en conviens. Pourtant, n’est-ce pas
le
schéma de tout un genre littéraire moderne, cette espèce de confessio
1844
moderne, cette espèce de confession romancée dont
les
livres de Bopp, d’Arland, de Soupault et surtout de René Crevel ont d
1845
, de Soupault et surtout de René Crevel ont donné
les
exemples les plus récents et significatifs ? Tous ces livres évoquent
1846
et surtout de René Crevel ont donné les exemples
les
plus récents et significatifs ? Tous ces livres évoquent assez précis
1847
tifs ? Tous ces livres évoquent assez précisément
la
forme d’un entonnoir. La vie serait le liquide tourbillonnant à l’int
1848
oquent assez précisément la forme d’un entonnoir.
La
vie serait le liquide tourbillonnant à l’intérieur. Un arrêt (l’auteu
1849
récisément la forme d’un entonnoir. La vie serait
le
liquide tourbillonnant à l’intérieur. Un arrêt (l’auteur se met à se
1850
onnoir. La vie serait le liquide tourbillonnant à
l’
intérieur. Un arrêt (l’auteur se met à se regarder vivre, le personnag
1851
e liquide tourbillonnant à l’intérieur. Un arrêt (
l’
auteur se met à se regarder vivre, le personnage à douter du sens de s
1852
r. Un arrêt (l’auteur se met à se regarder vivre,
le
personnage à douter du sens de sa vie) et les forces centripètes l’em
1853
vre, le personnage à douter du sens de sa vie) et
les
forces centripètes l’emportent peu à peu, une aspiration vers le bas
1854
uter du sens de sa vie) et les forces centripètes
l’
emportent peu à peu, une aspiration vers le bas produit une agitation
1855
ipètes l’emportent peu à peu, une aspiration vers
le
bas produit une agitation accélérée et folle, puis tout finit dans un
1856
, puis tout finit dans un râle, brusquement c’est
le
vide. Centre de soi, l’aspiration du néant. J’ai revu à l’envers le f
1857
n râle, brusquement c’est le vide. Centre de soi,
l’
aspiration du néant. J’ai revu à l’envers le film de mon passé : ce qu
1858
Centre de soi, l’aspiration du néant. J’ai revu à
l’
envers le film de mon passé : ce qui était élan devient recul, et l’év
1859
soi, l’aspiration du néant. J’ai revu à l’envers
le
film de mon passé : ce qui était élan devient recul, et l’évocation d
1860
e mon passé : ce qui était élan devient recul, et
l’
évocation de mes désirs anciens ne me restitue qu’un dégoût. J’ai cru
1861
. En réalité, je n’assiste pas à moi-même, mais à
la
destruction de moi-même. Par les fissures, un instant, j’ai pu soupço
1862
moi-même, mais à la destruction de moi-même. Par
les
fissures, un instant, j’ai pu soupçonner des profondeurs ; mais déjà
1863
i pu soupçonner des profondeurs ; mais déjà c’est
le
chaos. Mon corps et moi, le livre si poignant de René Crevel, est la
1864
rs ; mais déjà c’est le chaos. Mon corps et moi,
le
livre si poignant de René Crevel, est la démonstration la plus cyniqu
1865
et moi, le livre si poignant de René Crevel, est
la
démonstration la plus cynique que je connaisse de ces ravages du sinc
1866
si poignant de René Crevel, est la démonstration
la
plus cynique que je connaisse de ces ravages du sincérisme. Dans la s
1867
e je connaisse de ces ravages du sincérisme. Dans
la
solitude qu’il s’acharne à approfondir — il était venu y chercher que
1868
rcher quelque raison de vivre, il voulait se voir
le
plus purement (« cette curiosité donnée comme raison d’une perpétuell
1869
mme raison d’une perpétuelle attente »), — ce que
l’
auteur découvre c’est ce « merveilleux contraire » de l’élan vital qu’
1870
ur découvre c’est ce « merveilleux contraire » de
l’
élan vital qu’il nomme élan mortel — générateur de l’incurable tristes
1871
lan vital qu’il nomme élan mortel — générateur de
l’
incurable tristesse qui rôde dans certaine littérature d’aujourd’hui.
1872
é de faire mon autoportrait moral : je bouge tout
le
temps. Danger de faire mon autoportrait moral : je me compose plus la
1873
s laid que nature. Faut-il conclure avec Gide : «
L’
analyse psychologique a perdu pour moi tout intérêt du jour où je me s
1874
moi tout intérêt du jour où je me suis avisé que
l’
homme éprouve ce qu’il imagine d’éprouver. » Non. Car à supposer que l
1875
’il imagine d’éprouver. » Non. Car à supposer que
l’
analyse nous crée, elle ne nous crée pas n’importe comment, mais selon
1876
u des remarques précédentes). Rivière définissait
la
sincérité comme « un perpétuel effort pour créer son âme telle qu’ell
1877
qu’elle est ». Il voyait dans cet effort sur soi
le
gage d’un enrichissement, d’une consolidation de l’individu mais avan
1878
gage d’un enrichissement, d’une consolidation de
l’
individu mais avant tout un moyen de se connaître. Cependant, n’est-ce
1879
Cependant, n’est-ce pas lui-même qui ajoutait que
l’
homme sincère « en vient à ne plus pouvoir même souhaiter d’être diffé
1880
oir même souhaiter d’être différent », ce qui est
la
négation de tout progrès moral. De la sincérité envisagée comme moyen
1881
ce qui est la négation de tout progrès moral. De
la
sincérité envisagée comme moyen de connaissance, le cas extrême d’un
1882
sincérité envisagée comme moyen de connaissance,
le
cas extrême d’un Crevel nous montre assez ce qu’il faut penser2. Il n
1883
limites assez étroites empiriquement fournies par
le
sens de son intérêt propre, une analyse sincère ne puisse faire décou
1884
es et ne serve parfois de contrôle efficace. Mais
les
bénéfices sont maigres en regard des dangers que la sincérité du noli
1885
bénéfices sont maigres en regard des dangers que
la
sincérité du noli me tangere fait courir, tant dans le domaine littér
1886
ncérité du noli me tangere fait courir, tant dans
le
domaine littéraire que dans celui de l’action. En littérature : refus
1887
tant dans le domaine littéraire que dans celui de
l’
action. En littérature : refus de construire, de composer ; impuissanc
1888
sance à inventer. Car inventer, c’est se porter à
l’
extrême pointe de soi, et, d’un élan, se dépasser ; c’est créer une di
1889
e dépasser ; c’est créer une différence. Pourquoi
les
romanciers modernes ont-ils tant de mal à créer des personnages ? C’e
1890
rsonnages ? C’est parce qu’une sorte de sincérité
les
retient d’imposer aux héros ce rythme volontaire par lequel un Balzac
1891
x héros ce rythme volontaire par lequel un Balzac
les
fait vivre. Ce serait fausser quelque chose à leurs yeux. Le cas des
1892
re. Ce serait fausser quelque chose à leurs yeux.
Le
cas des Faux-Monnayeurs le montre clairement. En morale : défaitisme
1893
ue chose à leurs yeux. Le cas des Faux-Monnayeurs
le
montre clairement. En morale : défaitisme quand il s’agit de gestes q
1894
cement. (Il faut, pour sauter, une confiance dans
l’
élan qui échappe à toute analyse préalable et sans quoi le saut paraît
1895
ui échappe à toute analyse préalable et sans quoi
le
saut paraît impossible, absurde.) Enfin, désagrégation de la personna
1896
aît impossible, absurde.) Enfin, désagrégation de
la
personnalité, car l’analyse la plus savante, comme l’a fort bien dit
1897
de.) Enfin, désagrégation de la personnalité, car
l’
analyse la plus savante, comme l’a fort bien dit Ramon Fernandez, « re
1898
, désagrégation de la personnalité, car l’analyse
la
plus savante, comme l’a fort bien dit Ramon Fernandez, « retient tous
1899
ersonnalité, car l’analyse la plus savante, comme
l’
a fort bien dit Ramon Fernandez, « retient tous les éléments du moi, m
1900
l’a fort bien dit Ramon Fernandez, « retient tous
les
éléments du moi, moins le principe unificateur ». De quelques soph
1901
nandez, « retient tous les éléments du moi, moins
le
principe unificateur ». De quelques sophismes libérateurs La fo
1902
cateur ». De quelques sophismes libérateurs
La
fonction de l’homme est aussi bien de croire que de constater. F. Ra
1903
quelques sophismes libérateurs La fonction de
l’
homme est aussi bien de croire que de constater. F. Raub. La sincér
1904
ussi bien de croire que de constater. F. Raub.
La
sincérité obstinée d’un Rivière n’a plus rien de spontané. En quoi es
1905
a plus rien de spontané. En quoi est-ce encore de
la
sincérité ? Trop sincère, pas sincère. Ou bien si l’on prétend que la
1906
sincérité ? Trop sincère, pas sincère. Ou bien si
l’
on prétend que la sincérité est la recherche, puis l’acceptation de to
1907
sincère, pas sincère. Ou bien si l’on prétend que
la
sincérité est la recherche, puis l’acceptation de toute tendance du m
1908
ère. Ou bien si l’on prétend que la sincérité est
la
recherche, puis l’acceptation de toute tendance du moi, je réponds qu
1909
n prétend que la sincérité est la recherche, puis
l’
acceptation de toute tendance du moi, je réponds que le mensonge est s
1910
eptation de toute tendance du moi, je réponds que
le
mensonge est sincère aussi, qui révèle mon besoin de mentir. Il devie
1911
ils vous aident3 — mais jamais au point d’oublier
la
vérité qu’on désirait qu’ils cachent pour un moment. « L’art est un m
1912
é qu’on désirait qu’ils cachent pour un moment. «
L’
art est un mensonge, mais un bon artiste n’est pas menteur », dit Max
1913
dit Max Jacob. « Être sincère, c’est avoir toutes
les
pensées » (Rivière). Mais on ne peut se maintenir dans cet état. Ce «
1914
mensonge », ce choix faux mais bon, nécessaire à
la
vie, n’est-ce pas être sincère aussi que de s’y prêter ? Or, il vous
1915
que de s’y prêter ? Or, il vous tire aussitôt de
l’
indétermination violente qu’est la sincérité selon Rivière. La sincéri
1916
ire aussitôt de l’indétermination violente qu’est
la
sincérité selon Rivière. La sincérité véritable vous pousse à faire l
1917
ation violente qu’est la sincérité selon Rivière.
La
sincérité véritable vous pousse à faire le saut dans le vide qu’exige
1918
vière. La sincérité véritable vous pousse à faire
le
saut dans le vide qu’exige toute foi ; c’est la volonté de sincérité,
1919
cérité véritable vous pousse à faire le saut dans
le
vide qu’exige toute foi ; c’est la volonté de sincérité, c’est-à-dire
1920
e le saut dans le vide qu’exige toute foi ; c’est
la
volonté de sincérité, c’est-à-dire une sincérité tournée au vice, inv
1921
ncérité tournée au vice, invertie, qui retient de
l’
oser. Petite anthologie ou que le « style » est de l’homme même
1922
ui retient de l’oser. Petite anthologie ou que
le
« style » est de l’homme même J’en étais à peu près à ce point de
1923
. Petite anthologie ou que le « style » est de
l’
homme même J’en étais à peu près à ce point de mes notes — à ce poi
1924
ues lectures, je pris note des passages suivants (
les
paraphraser serait d’une ingratitude insigne — ils marquent au reste
1925
atitude insigne — ils marquent au reste fort bien
les
jalons de cette recherche) : Puissiez-vous avouer moins de sincérité
1926
ropre témoin, intelligent mais immobile : ce sont
les
mêmes qui s’ignorent en tant que personnes. Comment se trouveraient-i
1927
eraient-ils, n’existant pas ? (François Mauriac.)
La
valeur morale de M. Godeau serait définie par l’aspect seul qu’il sou
1928
La valeur morale de M. Godeau serait définie par
l’
aspect seul qu’il souffrirait de garder lui-même à son propre regard.
1929
ait de garder lui-même à son propre regard. Ainsi
la
valeur morale d’un homme équivalait-elle à l’illusion qu’il était cap
1930
nsi la valeur morale d’un homme équivalait-elle à
l’
illusion qu’il était capable d’entretenir sur lui-même. (Marcel Jouhan
1931
lle qui est douée d’assez de force pour donner de
la
réalité à l’illusion. (Max Jacob.) Un rôle ? Oui. Mais si le personna
1932
ouée d’assez de force pour donner de la réalité à
l’
illusion. (Max Jacob.) Un rôle ? Oui. Mais si le personnage est mainte
1933
à l’illusion. (Max Jacob.) Un rôle ? Oui. Mais si
le
personnage est maintenu jusqu’à la mort, il se confond avec l’homme m
1934
? Oui. Mais si le personnage est maintenu jusqu’à
la
mort, il se confond avec l’homme même. (André Maurois.) (Quel effro
1935
est maintenu jusqu’à la mort, il se confond avec
l’
homme même. (André Maurois.) (Quel effroi, ce jour de l’adolescence
1936
même. (André Maurois.) (Quel effroi, ce jour de
l’
adolescence où l’on soupçonne pour la première fois que certains, peut
1937
ois.) (Quel effroi, ce jour de l’adolescence où
l’
on soupçonne pour la première fois que certains, peut-être, jouent leu
1938
, jouent leur vie. Rien ne paraît plus sinistre à
la
sincérité presque pure de cet âge. Mais il le faut dépasser.) Si j’
1939
e à la sincérité presque pure de cet âge. Mais il
le
faut dépasser.) Si j’en crois l’intensité d’un sentiment intime, ce
1940
t âge. Mais il le faut dépasser.) Si j’en crois
l’
intensité d’un sentiment intime, ce moi idéal que j’appelle en chaque
1941
’imaginait retenir. Dès lors, ce n’est pas lâcher
la
proie pour l’ombre que de tendre vers ce modèle. Dirais-je que c’est
1942
enir. Dès lors, ce n’est pas lâcher la proie pour
l’
ombre que de tendre vers ce modèle. Dirais-je que c’est ma sincérité d
1943
e. Dirais-je que c’est ma sincérité d’y aller par
les
moyens les plus efficaces ? Mais on nommera cela de l’hypocrisie. Soi
1944
e que c’est ma sincérité d’y aller par les moyens
les
plus efficaces ? Mais on nommera cela de l’hypocrisie. Soit, j’accept
1945
yens les plus efficaces ? Mais on nommera cela de
l’
hypocrisie. Soit, j’accepte. Et aussitôt j’annonce : Éloge de l’hyp
1946
t, j’accepte. Et aussitôt j’annonce : Éloge de
l’
hypocrisie Non, non !… Debout dans l’ère successive ! Brisez, mon c
1947
Éloge de l’hypocrisie Non, non !… Debout dans
l’
ère successive ! Brisez, mon corps, brisez cette forme pensive ! .....
1948
.................................................
Le
vent se lève, il faut tenter de vivre. Paul Valéry. Certes, du sein
1949
is bien quelques voiles à mon dégoût d’un moi que
la
vie me montrait si désespérément vrai, tyrannique, insuffisant. Mais
1950
, un peu sceptique, quand mon esprit partait dans
le
rêve d’un idéal de fortune, idole naïve de ma jeune angoisse… Je t’ai
1951
alors qu’une symphonie de joies émanait de toute
la
vie : chaque chose proposait une ferveur nouvelle, et chaque être un
1952
en pût être privée. Alors, acquiesçant vivement à
l’
invite que je soupçonnais la plus riche d’inconnu, je m’élançais sur l
1953
cquiesçant vivement à l’invite que je soupçonnais
la
plus riche d’inconnu, je m’élançais sur la voie qu’elle m’ouvrait, av
1954
onnais la plus riche d’inconnu, je m’élançais sur
la
voie qu’elle m’ouvrait, avec tant de rires amis, vers tout ce que mom
1955
je choisissais de laisser — et des baisers à tous
les
vents — qu’il eût été loisible d’attribuer comme objet à ma jubilatio
1956
st ainsi que fidèle à soi-même au plus profond de
l’
être, on entretient comme une arrière-pensée sagace et obstinée l’assu
1957
tient comme une arrière-pensée sagace et obstinée
l’
assurance d’une continuité entre ses actions et ses désirs, un quant-à
1958
ui ne gêne aucun geste, mais incline discrètement
les
décisions et les rend complices d’un dessein logique, peut-être loint
1959
geste, mais incline discrètement les décisions et
les
rend complices d’un dessein logique, peut-être lointain, en quoi cons
1960
ein logique, peut-être lointain, en quoi consiste
l’
unité la plus réelle de l’individu — en dehors du corps. Et ce ne sont
1961
que, peut-être lointain, en quoi consiste l’unité
la
plus réelle de l’individu — en dehors du corps. Et ce ne sont point l
1962
ntain, en quoi consiste l’unité la plus réelle de
l’
individu — en dehors du corps. Et ce ne sont point là jeux d’idées et
1963
dées et jongleries verbales. Regards au-dessus de
l’
amour ! Voir l’heure à la pendule pendant l’étreinte d’un adieu et cal
1964
ies verbales. Regards au-dessus de l’amour ! Voir
l’
heure à la pendule pendant l’étreinte d’un adieu et calculer rapidemen
1965
es. Regards au-dessus de l’amour ! Voir l’heure à
la
pendule pendant l’étreinte d’un adieu et calculer rapidement le retou
1966
us de l’amour ! Voir l’heure à la pendule pendant
l’
étreinte d’un adieu et calculer rapidement le retour à une fidélité pl
1967
dant l’étreinte d’un adieu et calculer rapidement
le
retour à une fidélité plus profonde. Fidélité à sa loi individuelle,
1968
e honnêteté peut-être plus réelle que l’autre. Et
l’
on conçoit que ce constant et secret assujettissement au moi idéal exi
1969
re que cette agilité offensive qu’on appelle dans
la
vie publique arrivisme, et séduction dans les salons. Constater une
1970
dans la vie publique arrivisme, et séduction dans
les
salons. Constater une faiblesse, c’est toujours un peu en prendre so
1971
esse, c’est toujours un peu en prendre son parti.
La
sincérité crée en nous un fait accompli. J’appelle hypocrisie envers
1972
ais ce que de toute mon âme je veux être !… 1.
La
véritable description de l’élan supposé dans le premier exemple, ce s
1973
je veux être !… 1. La véritable description de
l’
élan supposé dans le premier exemple, ce serait le récit des gestes qu
1974
l’élan supposé dans le premier exemple, ce serait
le
récit des gestes qu’il m’aurait fait commettre. Manifester est plus s
1975
st plus sincère qu’analyser. 2. D’ailleurs toute
la
psychologie moderne souligne la quasi-impossibilité de traduire un dy
1976
D’ailleurs toute la psychologie moderne souligne
la
quasi-impossibilité de traduire un dynamisme directement dans notre l
1977
t certes quand il s’agit de parole ou d’écriture,
l’
affirmation prouve moins une certitude qu’un désir de certitude né de
1978
doute au fond. » (René Crevel) b. « Paradoxe de
la
sincérité », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribo
1979
bre 1926)a Une mauvaise humeur qui flotte dans
l’
air nous proposerait de débuter par l’inévitable discours sur les diff
1980
flotte dans l’air nous proposerait de débuter par
l’
inévitable discours sur les difficultés du temps, en général, et sur c
1981
poserait de débuter par l’inévitable discours sur
les
difficultés du temps, en général, et sur celles en particulier qu’imp
1982
général, et sur celles en particulier qu’implique
la
publication de notre revue. Mais nous savons, tout comme M. Coué, que
1983
oué, nous nous persuadons que tout ira très bien.
Les
circonstances l’exigent, d’ailleurs, plus que jamais, et plus que jam
1984
suadons que tout ira très bien. Les circonstances
l’
exigent, d’ailleurs, plus que jamais, et plus que jamais, nous semble-
1985
nous semble-t-il, notre revue a sa raison d’être.
La
vie d’aujourd’hui, on le sait, nous oblige à nous affirmer ou à refus
1986
evue a sa raison d’être. La vie d’aujourd’hui, on
le
sait, nous oblige à nous affirmer ou à refuser de nous affirmer avec
1987
i a pu paraître parfois quelque peu impertinente.
Le
fait est que nous éprouvons irrésistiblement l’obligation d’être nous
1988
. Le fait est que nous éprouvons irrésistiblement
l’
obligation d’être nous-mêmes. Et, disons-le tout de suite, c’est en ce
1989
lement l’obligation d’être nous-mêmes. Et, disons-
le
tout de suite, c’est en cela uniquement — être nous-mêmes — que consi
1990
mes — que consistera notre programme. Sans doute,
les
différences s’accusent : mais n’est-ce pas la meilleure raison pour n
1991
e, les différences s’accusent : mais n’est-ce pas
la
meilleure raison pour nos aînés de chercher plus patiemment encore à
1992
elle nous ne saurions aller, et qui, nous voulons
l’
espérer, ne sera pas sans leur donner quelque bénéfice en retour. Cert
1993
nt d’autres, avant tant d’autres. « Amis, ce sont
les
jeunes qui passent… » Pas question de les saluer ni d’emboîter le pas
1994
ce sont les jeunes qui passent… » Pas question de
les
saluer ni d’emboîter le pas, mais seulement de retenir sa place au sp
1995
ssent… » Pas question de les saluer ni d’emboîter
le
pas, mais seulement de retenir sa place au spectacle qu’ils offrent e
1996
etenir sa place au spectacle qu’ils offrent et de
les
considérer avec sympathie. Il est bien facile de s’écrier : « Après m
1997
ie. Il est bien facile de s’écrier : « Après moi,
le
déluge ! », et de se détourner de ce qu’on a coutume d’appeler notre
1998
’appeler notre « désordre ». Mais on est toujours
le
fils de quelqu’un… Et, peut-être, la considération du « déluge » peut
1999
est toujours le fils de quelqu’un… Et, peut-être,
la
considération du « déluge » peut-elle faire réfléchir utilement sur s
2000
Par contre, nous nous empressons de vous laisser
le
soin de juger si nous avons de quoi faire les modestes… Être nous-m
2001
sser le soin de juger si nous avons de quoi faire
les
modestes… Être nous-mêmes, avons-nous dit, c’est à la fois notre bu
2002
littéraire de plus » ; nous ne voulons pas être «
l’
expression de la jeunesse romande ». Nous sommes autre chose. (Belles-
2003
us » ; nous ne voulons pas être « l’expression de
la
jeunesse romande ». Nous sommes autre chose. (Belles-Lettres est touj
2004
nemment peu bellettrienne. Que sommes-nous donc ?
Le
plus qu’on puisse dire, c’est que vous le saurez un peu mieux quand v
2005
donc ? Le plus qu’on puisse dire, c’est que vous
le
saurez un peu mieux quand vous aurez lu nos huit numéros. Il faut que
2006
vergentes, mais qu’un ruban rouge et vert lie par
la
grâce d’une volonté sans doute divine… a. « Avant-propos », Revue d
2007
ve-Fribourg, n° 1, décembre 1926, p. 3-5. Signé :
Le
Comité central.
2008
Louis Aragon,
Le
Paysan de Paris (janvier 1927)ab « Je n’admets pas qu’on reprenne
2009
n’admets pas qu’on reprenne mes paroles, qu’on me
les
oppose. Ce ne sont pas les termes d’un traité de paix. Entre moi et v
2010
mes paroles, qu’on me les oppose. Ce ne sont pas
les
termes d’un traité de paix. Entre moi et vous, c’est la guerre. » Voi
2011
mes d’un traité de paix. Entre moi et vous, c’est
la
guerre. » Voilà pour les critiques, « punaises glabres et poux barbus
2012
Entre moi et vous, c’est la guerre. » Voilà pour
les
critiques, « punaises glabres et poux barbus », qui perdraient leur t
2013
ux barbus », qui perdraient leur temps à recenser
les
incohérences pittoresques de ce petit livre. Quant à ceux que certain
2014
une kyrielle d’injures qui ne font pas honneur à
l’
imagination d’autres fois si prestigieuse du poète : « Ils m’ont suivi
2015
ois si prestigieuse du poète : « Ils m’ont suivi,
les
imbéciles », ricane-t-il ; et sans rire : « À mort ceux qui paraphras
2016
ce que je dis ». Il y a chez Aragon une folie de
la
persécution, qui se cherche partout des prétextes, et une passion far
2017
rtout des prétextes, et une passion farouche pour
la
liberté, qui font de cet ombrageux personnage une manière de Rousseau
2018
tense désespoir, on songe au Frank de La Coupe et
les
Lèvres, à qui ses compagnons criaient : « Te fais-tu le bouffon de ta
2019
res, à qui ses compagnons criaient : « Te fais-tu
le
bouffon de ta propre détresse ? » Tant d’insistance dans le mauvais g
2020
de ta propre détresse ? » Tant d’insistance dans
le
mauvais goût ne m’empêchera pas de le dire, Aragon possède le tempéra
2021
stance dans le mauvais goût ne m’empêchera pas de
le
dire, Aragon possède le tempérament le plus hardi et le plus original
2022
oût ne m’empêchera pas de le dire, Aragon possède
le
tempérament le plus hardi et le plus original de la jeune littérature
2023
era pas de le dire, Aragon possède le tempérament
le
plus hardi et le plus original de la jeune littérature française. Il
2024
e, Aragon possède le tempérament le plus hardi et
le
plus original de la jeune littérature française. Il le proclame « J’a
2025
tempérament le plus hardi et le plus original de
la
jeune littérature française. Il le proclame « J’appartiens à la grand
2026
us original de la jeune littérature française. Il
le
proclame « J’appartiens à la grande race des torrents ». Génie inégal
2027
rature française. Il le proclame « J’appartiens à
la
grande race des torrents ». Génie inégal s’il en fut, voici parmi tro
2028
littérature pour trouver semblable domination de
la
langue. Et parmi les modernes, il bat tous les records de l’image, ce
2029
ouver semblable domination de la langue. Et parmi
les
modernes, il bat tous les records de l’image, ce qui nous vaut avec d
2030
de la langue. Et parmi les modernes, il bat tous
les
records de l’image, ce qui nous vaut avec des bizarreries fatigantes
2031
Et parmi les modernes, il bat tous les records de
l’
image, ce qui nous vaut avec des bizarreries fatigantes et quelques so
2032
ne se croie pas tenu de justifier ses visions par
le
moyen d’une métaphysique aussi prétentieuse qu’incertaine. Son affair
2033
si prétentieuse qu’incertaine. Son affaire, c’est
l’
amour, et certain désespoir vaste et profond comme l’époque. « Voulez-
2034
mour, et certain désespoir vaste et profond comme
l’
époque. « Voulez-vous des douleurs, la mort ou des chansons ? » On a l
2035
ofond comme l’époque. « Voulez-vous des douleurs,
la
mort ou des chansons ? » On a l’hallucination du décor des capitales,
2036
us des douleurs, la mort ou des chansons ? » On a
l’
hallucination du décor des capitales, créatrice d’un merveilleux de ch
2037
instant, d’une véritable « mythologie moderne ».
Le
Paysan de Paris est une suite de promenades dont la composition n’est
2038
Paysan de Paris est une suite de promenades dont
la
composition n’est pas sans rappeler celle des Nuits d’octobre de Nerv
2039
es Nuits d’octobre de Nerval ; forme qui permet à
l’
auteur de divaguer de la philosophie au lyrisme le plus échevelé en pa
2040
rval ; forme qui permet à l’auteur de divaguer de
la
philosophie au lyrisme le plus échevelé en passant par la description
2041
l’auteur de divaguer de la philosophie au lyrisme
le
plus échevelé en passant par la description réaliste ou imaginée d’un
2042
sophie au lyrisme le plus échevelé en passant par
la
description réaliste ou imaginée d’une boîte de nuit, d’une devanture
2043
, d’une devanture, d’un parc public. Ce n’est pas
le
meilleur livre de l’auteur d’Anicet. C’est pourtant un des plus signi
2044
un parc public. Ce n’est pas le meilleur livre de
l’
auteur d’Anicet. C’est pourtant un des plus significatifs du romantism
2045
ogues peut-être mortelles. ab. « Louis Aragon :
Le
Paysan de Paris (NRF, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
2046
riet V. A.-W. Poste aux amours perdues Sur
le
mont gris pâlissants Des bouquets de vagues brumes. Insulter ta beaut
2047
sses, ô col roide, En souffrance mes baisers.
L’
amour est un alibi Nos lèvres sitôt que jointes, Ô dernier mensong
2048
vers d’autres rêves Où sourient quels anges fous.
L’
horaire dicte un adieu, La mode qu’on rie des pleurs, Lors je baise vo
2049
rient quels anges fous. L’horaire dicte un adieu,
La
mode qu’on rie des pleurs, Lors je baise votre main Comme on signe d’
2050
Conte métaphysique :
L’
individu atteint de strabisme (janvier 1927)d Comme le démiurge ven
2051
idu atteint de strabisme (janvier 1927)d Comme
le
démiurge venait de peser sur le commutateur des étoiles… l’une, se dé
2052
r 1927)d Comme le démiurge venait de peser sur
le
commutateur des étoiles… l’une, se décrochant sans plus d’hésitation,
2053
sans plus d’hésitation, se mit à pérégriner dans
les
régions de chasse gardée du ci-devant soleil. C’est là qu’Urbain, pre
2054
par qui ? elle était anticléricale, on ne saurait
le
taire, — Urbain dormait. L’étoile, jeune fille, roulait gentiment sur
2055
ricale, on ne saurait le taire, — Urbain dormait.
L’
étoile, jeune fille, roulait gentiment sur ses pointes, tout scintille
2056
heure, elle éclaira d’une rose caresse lumineuse
la
chevelure rouge d’Urbain, et son nez, lequel, par ses dimensions rema
2057
dimensions remarquablement exagérées, lui valait
le
surnom de Bin-Bin. Urbain ouvrit les yeux et ne vit rien. On rappelle
2058
s, lui valait le surnom de Bin-Bin. Urbain ouvrit
les
yeux et ne vit rien. On rappelle que les étoiles s’étaient décrochées
2059
n ouvrit les yeux et ne vit rien. On rappelle que
les
étoiles s’étaient décrochées de leur poste dans l’éternité. « Éternit
2060
s étoiles s’étaient décrochées de leur poste dans
l’
éternité. « Éternité désaffectée, c’est bien dommage, dit-il en s’étir
2061
fectée, c’est bien dommage, dit-il en s’étirant ;
le
printemps désormais rendra le ciel plus pâle, et nous irons chercher
2062
t-il en s’étirant ; le printemps désormais rendra
le
ciel plus pâle, et nous irons chercher dans le souvenir les vent-coul
2063
ra le ciel plus pâle, et nous irons chercher dans
le
souvenir les vent-coulis de la mort. Garçon, un café, un ! » Mais l’é
2064
lus pâle, et nous irons chercher dans le souvenir
les
vent-coulis de la mort. Garçon, un café, un ! » Mais l’étoile chantai
2065
rons chercher dans le souvenir les vent-coulis de
la
mort. Garçon, un café, un ! » Mais l’étoile chantait dans l’axe de sa
2066
t-coulis de la mort. Garçon, un café, un ! » Mais
l’
étoile chantait dans l’axe de sa vie normale et s’approchait en faisan
2067
rçon, un café, un ! » Mais l’étoile chantait dans
l’
axe de sa vie normale et s’approchait en faisant la roue — celle à qui
2068
’axe de sa vie normale et s’approchait en faisant
la
roue — celle à qui sourit la Fortune. Urbain, fort d’une hérédité jud
2069
pprochait en faisant la roue — celle à qui sourit
la
Fortune. Urbain, fort d’une hérédité judiciaire et française, dédaign
2070
judiciaire et française, dédaigna des avances que
la
perte de son sens de l’éternel rendait pourtant considérables, au sen
2071
dédaigna des avances que la perte de son sens de
l’
éternel rendait pourtant considérables, au sens étymologique du terme.
2072
es, au sens étymologique du terme. Il loucha vers
le
néant, retourna ses poches, ôta ses gants qu’il jeta, puis, après un
2073
u’il jeta, puis, après un grand coup de pied dans
le
vide symbolique des systèmes, sortit, c’est-à-dire qu’il fit un pas d
2074
e qu’il fit un pas dans une direction quelconque.
L’
étoile pleurait, sentimentale. d. « L’individu atteint de strabisme.
2075
elconque. L’étoile pleurait, sentimentale. d. «
L’
individu atteint de strabisme. Conte métaphysique », Revue de Belles-L
2076
Dans
le
Style (janvier 1927)e Nous recevons d’un bellettrien facétieux cet
2077
pour Paul Morand, auteur de « Lewis et Irène »
L’
auteur de maint roman de caractère gras quitte Charing-Cross, songeant
2078
au cerveau du poète qui meurt de sommeil naturel.
Le
tunnel sous la Manche escamoté, le train dépose des complets rigides
2079
oète qui meurt de sommeil naturel. Le tunnel sous
la
Manche escamoté, le train dépose des complets rigides contenant des A
2080
mmeil naturel. Le tunnel sous la Manche escamoté,
le
train dépose des complets rigides contenant des Anglais fragiles. L’a
2081
complets rigides contenant des Anglais fragiles.
L’
aube tire un écran de pluies sur le paysage commercial. Terminus : Mor
2082
lais fragiles. L’aube tire un écran de pluies sur
le
paysage commercial. Terminus : Morand, s’éveillant en français, termi
2083
s, termine : … Irène. (Grasset, 1924… … y compris
la
Suède et la Norvège.) On lit dans les Nouvelles littéraires , du 8
2084
… Irène. (Grasset, 1924… … y compris la Suède et
la
Norvège.) On lit dans les Nouvelles littéraires , du 8 janvier 192
2085
y compris la Suède et la Norvège.) On lit dans
les
Nouvelles littéraires , du 8 janvier 1927, l’information suivante :
2086
s les Nouvelles littéraires , du 8 janvier 1927,
l’
information suivante : Mardi dernier a été célébré en l’église grecque
2087
rmation suivante : Mardi dernier a été célébré en
l’
église grecque de la rue Georges Bizet le mariage de M. Paul Morand av
2088
ardi dernier a été célébré en l’église grecque de
la
rue Georges Bizet le mariage de M. Paul Morand avec la princesse Hélè
2089
lébré en l’église grecque de la rue Georges Bizet
le
mariage de M. Paul Morand avec la princesse Hélène-C. Soutzo. Les tém
2090
e Georges Bizet le mariage de M. Paul Morand avec
la
princesse Hélène-C. Soutzo. Les témoins étaient pour le marié : M. Ph
2091
. Paul Morand avec la princesse Hélène-C. Soutzo.
Les
témoins étaient pour le marié : M. Philippe Berthelot, secrétaire gén
2092
ncesse Hélène-C. Soutzo. Les témoins étaient pour
le
marié : M. Philippe Berthelot, secrétaire général du ministre des Aff
2093
ral du ministre des Affaires étrangères ; et pour
la
mariée : Son Excellence M. Diamanty, ministre de Roumanie à Paris. C’
2094
stre de Roumanie à Paris. C’est encore mieux dans
le
style. e. « Dans le style », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuc
2095
is. C’est encore mieux dans le style. e. « Dans
le
style », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg,
2096
Conférence d’Edmond Esmonin sur «
La
révocation de l’édit de Nantes » (16 février 1927)i Le sujet que M
2097
onférence d’Edmond Esmonin sur « La révocation de
l’
édit de Nantes » (16 février 1927)i Le sujet que M. Esmonin, profes
2098
ation de l’édit de Nantes » (16 février 1927)i
Le
sujet que M. Esmonin, professeur à la Faculté des lettres de Grenoble
2099
r 1927)i Le sujet que M. Esmonin, professeur à
la
Faculté des lettres de Grenoble, traita mardi soir à la Grande salle
2100
ulté des lettres de Grenoble, traita mardi soir à
la
Grande salle des Conférences, devant un très bel auditoire, est un de
2101
des plus passionnants et des plus controversés de
l’
histoire. L’un de ceux, aussi, où il est le plus difficile de rester i
2102
sés de l’histoire. L’un de ceux, aussi, où il est
le
plus difficile de rester impartial. M. Lombard, recteur de l’Universi
2103
icile de rester impartial. M. Lombard, recteur de
l’
Université, en introduisant le conférencier, a fait allusion aux diver
2104
Lombard, recteur de l’Université, en introduisant
le
conférencier, a fait allusion aux divers points de vue auxquels on a
2105
ints de vue auxquels on a pu se placer pour juger
la
révocation. M. Esmonin, lui, se place au point de vue de l’historien
2106
ion. M. Esmonin, lui, se place au point de vue de
l’
historien scrupuleux, qui juge d’après les textes, les causes et les e
2107
e vue de l’historien scrupuleux, qui juge d’après
les
textes, les causes et les effets vérifiables, et non d’après un systè
2108
istorien scrupuleux, qui juge d’après les textes,
les
causes et les effets vérifiables, et non d’après un système préconçu.
2109
uleux, qui juge d’après les textes, les causes et
les
effets vérifiables, et non d’après un système préconçu. (Cette attitu
2110
préconçu. (Cette attitude est plus rare qu’on ne
le
croit, de nos jours.) M. Esmonin montra avec beaucoup de clarté comme
2111
c beaucoup de clarté comment, entre 1578, date de
la
proclamation de l’édit, et 1685, date de la révocation, la France pas
2112
é comment, entre 1578, date de la proclamation de
l’
édit, et 1685, date de la révocation, la France passa de la plus grand
2113
te de la proclamation de l’édit, et 1685, date de
la
révocation, la France passa de la plus grande liberté à la plus grand
2114
mation de l’édit, et 1685, date de la révocation,
la
France passa de la plus grande liberté à la plus grande tyrannie. En
2115
t 1685, date de la révocation, la France passa de
la
plus grande liberté à la plus grande tyrannie. En proclamant la liber
2116
tion, la France passa de la plus grande liberté à
la
plus grande tyrannie. En proclamant la liberté religieuse, Henry IV m
2117
liberté à la plus grande tyrannie. En proclamant
la
liberté religieuse, Henry IV mettait le royaume à la tête de la civil
2118
roclamant la liberté religieuse, Henry IV mettait
le
royaume à la tête de la civilisation ; en interdisant aux réformés d’
2119
liberté religieuse, Henry IV mettait le royaume à
la
tête de la civilisation ; en interdisant aux réformés d’exercer leur
2120
igieuse, Henry IV mettait le royaume à la tête de
la
civilisation ; en interdisant aux réformés d’exercer leur religion, m
2121
rcer leur religion, mais en même temps de quitter
le
pays, Louis XIV commit un des actes les plus vexatoires que l’histoir
2122
de quitter le pays, Louis XIV commit un des actes
les
plus vexatoires que l’histoire ait enregistrés. Après avoir fait un t
2123
s XIV commit un des actes les plus vexatoires que
l’
histoire ait enregistrés. Après avoir fait un tableau de la France de
2124
e ait enregistrés. Après avoir fait un tableau de
la
France de l’édit, victorieuse dans la guerre de Trente Ans, l’orateur
2125
trés. Après avoir fait un tableau de la France de
l’
édit, victorieuse dans la guerre de Trente Ans, l’orateur expose comme
2126
tableau de la France de l’édit, victorieuse dans
la
guerre de Trente Ans, l’orateur expose comment on en vint à la révoca
2127
l’édit, victorieuse dans la guerre de Trente Ans,
l’
orateur expose comment on en vint à la révocation. C’est d’abord l’inf
2128
Trente Ans, l’orateur expose comment on en vint à
la
révocation. C’est d’abord l’influence du clergé, jaloux de ses droits
2129
comment on en vint à la révocation. C’est d’abord
l’
influence du clergé, jaloux de ses droits considérables encore ; puis
2130
de ses droits considérables encore ; puis ce sont
les
conseillers intimes du roi, un jésuite, le père Lachaise, un archevêq
2131
sont les conseillers intimes du roi, un jésuite,
le
père Lachaise, un archevêque libertin, Harlay de Champvallon, et surt
2132
n leurs intérêts immédiats à leur désir de gagner
le
ciel, persuadent Louis XIV que la révocation serait une œuvre digne d
2133
désir de gagner le ciel, persuadent Louis XIV que
la
révocation serait une œuvre digne du Roi-Soleil et capable de lui fai
2134
e du Roi-Soleil et capable de lui faire pardonner
les
erreurs de sa jeunesse. Le roi, « un niais en matière religieuse » au
2135
e lui faire pardonner les erreurs de sa jeunesse.
Le
roi, « un niais en matière religieuse » au dire de sa belle-sœur, la
2136
en matière religieuse » au dire de sa belle-sœur,
la
princesse palatine, se laisse facilement convaincre. D’ailleurs, les
2137
ine, se laisse facilement convaincre. D’ailleurs,
les
jésuites ont déjà réussi à « tourner » l’édit par mille arguties juri
2138
leurs, les jésuites ont déjà réussi à « tourner »
l’
édit par mille arguties juridiques. Et les statistiques faussées peuve
2139
ourner » l’édit par mille arguties juridiques. Et
les
statistiques faussées peuvent faire croire à une très forte diminutio
2140
s. Aussi ne s’effraye-t-on pas trop, au début, de
l’
émigration des fidèles qui suivent leurs pasteurs proscrits. On espère
2141
rtir de gré ou de force tous ceux qui resteront «
Les
enfants seront du moins catholiques, si les pères sont hypocrites »,
2142
ont « Les enfants seront du moins catholiques, si
les
pères sont hypocrites », écrit Madame de Maintenon. Mais bientôt l’on
2143
crites », écrit Madame de Maintenon. Mais bientôt
l’
on voit la France se dépeupler ; des industries sont presque anéanties
2144
écrit Madame de Maintenon. Mais bientôt l’on voit
la
France se dépeupler ; des industries sont presque anéanties ; les con
2145
peupler ; des industries sont presque anéanties ;
les
conséquences funestes de l’acte de révocation commencent à se révéler
2146
presque anéanties ; les conséquences funestes de
l’
acte de révocation commencent à se révéler politiques (guerre de la co
2147
ion commencent à se révéler politiques (guerre de
la
confession d’Augsbourg) et surtout morales : car malgré des félicitat
2148
es félicitations arrachées par Louis XIV au pape,
les
catholiques sont loin d’être unanimes à louer la révocation. L’un d’e
2149
les catholiques sont loin d’être unanimes à louer
la
révocation. L’un d’eux s’indigne, dans une lettre à Louvois, de ce qu
2150
s’indigne, dans une lettre à Louvois, de ce que «
les
dragons ont été les meilleurs prédicateurs de notre Évangile ». Et le
2151
lettre à Louvois, de ce que « les dragons ont été
les
meilleurs prédicateurs de notre Évangile ». Et les persécutions contr
2152
es meilleurs prédicateurs de notre Évangile ». Et
les
persécutions contre ceux qui n’ont commis d’autre crime que de « dépl
2153
déplaire au roi » vont reprendre de plus belle :
la
guerre civile succède aux dragonnades. M. Esmonin s’abstient d’en fai
2154
ent d’en faire un tableau qu’il suppose présent à
l’
esprit de ses auditeurs. Il termine en citant le jugement d’Albert Sor
2155
à l’esprit de ses auditeurs. Il termine en citant
le
jugement d’Albert Sorel, selon qui la date du 16 octobre 1685 marque
2156
e en citant le jugement d’Albert Sorel, selon qui
la
date du 16 octobre 1685 marque une déviation dans l’histoire de la Fr
2157
date du 16 octobre 1685 marque une déviation dans
l’
histoire de la France. Déviation telle, en effet, que nous en sentons
2158
obre 1685 marque une déviation dans l’histoire de
la
France. Déviation telle, en effet, que nous en sentons les conséquenc
2159
e. Déviation telle, en effet, que nous en sentons
les
conséquences de nos jours encore, ajoute M. Esmonin. Et nous ne pouvo
2160
ouvons que nous réjouir de retrouver bientôt dans
l’
ouvrage qu’il va consacrer à Louis XIV l’exposé si dénué de parti pris
2161
tôt dans l’ouvrage qu’il va consacrer à Louis XIV
l’
exposé si dénué de parti pris, si libre et d’une si élégante science d
2162
Grenoble. i. « Troisième conférence des Amis de
la
pensée protestante : La révocation de l’édit de Nantes », Feuille d’A
2163
me conférence des Amis de la pensée protestante :
La
révocation de l’édit de Nantes », Feuille d’Avis de Neuchâtel, n° 39,
2164
Amis de la pensée protestante : La révocation de
l’
édit de Nantes », Feuille d’Avis de Neuchâtel, n° 39, 16 février 1927,
2165
Bernard Barbey,
La
Maladère (février 1927)ac « Quel admirable sujet de roman, écrit G
2166
rd Barbey, La Maladère (février 1927)ac « Quel
admirable
sujet de roman, écrit Gide, au bout de quinze ans, de vingt ans de vi
2167
out de quinze ans, de vingt ans de vie conjugale,
la
décristallisation progressive et réciproque des conjoints. » On sait
2168
èvre d’imagination qui orne de beautés illusoires
l’
objet de l’amour. Mais les jeunes gens de ce temps ne cultivent point
2169
ination qui orne de beautés illusoires l’objet de
l’
amour. Mais les jeunes gens de ce temps ne cultivent point cette fièvr
2170
ne de beautés illusoires l’objet de l’amour. Mais
les
jeunes gens de ce temps ne cultivent point cette fièvre. Et comme la
2171
e temps ne cultivent point cette fièvre. Et comme
la
morale ne sait plus leur imposer de feindre encore ce que le cœur ne
2172
e sait plus leur imposer de feindre encore ce que
le
cœur ne ressent plus, il suffit de quelques mois aux jeunes époux de
2173
s, il suffit de quelques mois aux jeunes époux de
la
Maladère pour se déprendre de leurs rêves. Un malentendu grandit entr
2174
x dans leur isolement, inexplicable et mal avoué.
L’
on songe à une fatalité intérieure qui les ferait se meurtrir l’un l’a
2175
l avoué. L’on songe à une fatalité intérieure qui
les
ferait se meurtrir l’un l’autre. Pourtant, jusqu’au bout, il semble q
2176
u’un mot, un geste décisif, ou certaine amitié de
la
saison suffirait à dissiper le charme perfide qui les tourmente. Mais
2177
certaine amitié de la saison suffirait à dissiper
le
charme perfide qui les tourmente. Mais il faudrait d’abord qu’ils se
2178
saison suffirait à dissiper le charme perfide qui
les
tourmente. Mais il faudrait d’abord qu’ils se soient délivrés d’eux-m
2179
, soient possibles. C’est d’Armande surtout qu’on
les
attendrait, plus franche d’allure. On ne sait ce qui la retient : son
2180
endrait, plus franche d’allure. On ne sait ce qui
la
retient : son amour ? son manque d’amour ? Pour Jacques, il souffre d
2181
able adolescence, d’un défaitisme sentimental qui
l’
empêtre de réticences, et le fait jouer bien maladroitement son rôle d
2182
tisme sentimental qui l’empêtre de réticences, et
le
fait jouer bien maladroitement son rôle d’homme… « Captif de sa propr
2183
e trahit Barbey : son art est justement de voiler
les
intentions du récit et de les exprimer seulement par un geste, une nu
2184
justement de voiler les intentions du récit et de
les
exprimer seulement par un geste, une nuance du paysage, une image qu’
2185
sentiment. Ce n’est qu’à force de discrétion dans
les
moyens qu’il parvient à une certaine puissance de l’effet, aux derniè
2186
moyens qu’il parvient à une certaine puissance de
l’
effet, aux dernières pages. Il règne dans la Maladère une étrange harm
2187
ce de l’effet, aux dernières pages. Il règne dans
la
Maladère une étrange harmonie entre le climat des sentiments et celui
2188
règne dans la Maladère une étrange harmonie entre
le
climat des sentiments et celui des campagnes désolées où ils se dével
2189
ristes et sans violence, autour de ces êtres dont
la
détresse est d’autant plus cruelle qu’elle est contenue sous des deho
2190
ntenue sous des dehors trop polis. Une fois fermé
le
livre de Barbey, on oublie la justesse de son analyse pour n’évoquer
2191
lis. Une fois fermé le livre de Barbey, on oublie
la
justesse de son analyse pour n’évoquer plus que des visions où se con
2192
our n’évoquer plus que des visions où se condense
le
sentiment du récit. Dans le Cœur gros, c’était un parc avant l’orage,
2193
isions où se condense le sentiment du récit. Dans
le
Cœur gros, c’était un parc avant l’orage, le rose sombre d’une joue b
2194
u récit. Dans le Cœur gros, c’était un parc avant
l’
orage, le rose sombre d’une joue brûlante et fraîche dans le vent. Et
2195
Dans le Cœur gros, c’était un parc avant l’orage,
le
rose sombre d’une joue brûlante et fraîche dans le vent. Et dans la M
2196
e rose sombre d’une joue brûlante et fraîche dans
le
vent. Et dans la Maladère, un arbre coupé découvrant le manoir perdu,
2197
ne joue brûlante et fraîche dans le vent. Et dans
la
Maladère, un arbre coupé découvrant le manoir perdu, des fumées sur u
2198
t. Et dans la Maladère, un arbre coupé découvrant
le
manoir perdu, des fumées sur un paysage d’hiver et soudain sous la lu
2199
des fumées sur un paysage d’hiver et soudain sous
la
lueur d’un incendie, deux visages tordus de passion. Cette fin est ad
2200
ie, deux visages tordus de passion. Cette fin est
admirable
, dont la brutalité si longtemps désirée délivre Jacques d’un passé ob
2201
tordus de passion. Cette fin est admirable, dont
la
brutalité si longtemps désirée délivre Jacques d’un passé obsédant, d
2202
laisante à son tourment. ac. « Bernard Barbey :
La
Maladère (Grasset, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Gen
2203
Guy de Pourtalès, Montclar (février 1927)ad
L’
on aime que, pour certains hommes, écrire ne soit que le recensement p
2204
ime que, pour certains hommes, écrire ne soit que
le
recensement passionné de leur vie, ou l’aveu déguisé d’une insatisfac
2205
soit que le recensement passionné de leur vie, ou
l’
aveu déguisé d’une insatisfaction qu’elle leur laisse. Montclar est l’
2206
insatisfaction qu’elle leur laisse. Montclar est
l’
auteur de vers de jeunesse auxquels il ne tient guère, et l’on compren
2207
e vers de jeunesse auxquels il ne tient guère, et
l’
on comprend que ce journal bientôt les rejoindra dans l’armoire aux so
2208
nt guère, et l’on comprend que ce journal bientôt
les
rejoindra dans l’armoire aux souvenirs. Cette façon de ne pas y tenir
2209
omprend que ce journal bientôt les rejoindra dans
l’
armoire aux souvenirs. Cette façon de ne pas y tenir, qu’il manifeste
2210
oute occasion de sa vie est peut-être ce qui nous
le
rend le plus sympathique. « Officiellement comblé, et par dedans… com
2211
asion de sa vie est peut-être ce qui nous le rend
le
plus sympathique. « Officiellement comblé, et par dedans… comment bie
2212
ui, comme pour Barnabooth, il s’agit de « déjouer
le
complot de la commodité ». Mais plus voluptueux que philosophe, c’est
2213
Barnabooth, il s’agit de « déjouer le complot de
la
commodité ». Mais plus voluptueux que philosophe, c’est à l’amour qu’
2214
é ». Mais plus voluptueux que philosophe, c’est à
l’
amour qu’il ira demander la souffrance indispensable au perfectionneme
2215
ue philosophe, c’est à l’amour qu’il ira demander
la
souffrance indispensable au perfectionnement de son âme. Et qu’import
2216
au perfectionnement de son âme. Et qu’importe si
les
Allemands qui, fréquente sontae, pour notre plaisir, un peu plus vien
2217
rle de choses d’art comme on fait dans Proust, si
les
passions qu’il nous peint sont ici tant soit peu russes, et là, gidie
2218
se connaît assez pour savoir ce qui est en lui de
l’
homme même, ou de l’amateur distingué, — et ne peut pas nous tromper l
2219
r savoir ce qui est en lui de l’homme même, ou de
l’
amateur distingué, — et ne peut pas nous tromper là-dessus. Il se conn
2220
sus. Il se connaît avec une sorte de froideur que
l’
on dirait désintéressée si elle n’avait pour effet de souligner, plus
2221
he secrètement, parce que de ces « ratages » naît
le
perpétuel besoin d’évasion qui est la condition de son progrès moral.
2222
ages » naît le perpétuel besoin d’évasion qui est
la
condition de son progrès moral. C’est ainsi qu’il consent, non sans u
2223
consent, non sans une imperceptible satisfaction,
l’
aveu d’une fondamentale indifférence du cœur qui contraste avec une vi
2224
meline, un amour se noue, qui commence où souvent
l’
on finit. Et peut-être l’amour n’est-il possible qu’entre deux cœurs q
2225
qui commence où souvent l’on finit. Et peut-être
l’
amour n’est-il possible qu’entre deux cœurs que l’épreuve du plaisir n
2226
l’amour n’est-il possible qu’entre deux cœurs que
l’
épreuve du plaisir n’a pas exténués. Mais alors quelle avidité cruelle
2227
amour, à force de petites blessures. Ce n’est pas
le
moins troublant d’une telle vie, cette sagesse un peu sombre qui s’en
2228
’en dégage, sagesse qui veut « que nous appelions
les
âmes à la vie après seulement toutes les morts du plaisir », car elle
2229
sagesse qui veut « que nous appelions les âmes à
la
vie après seulement toutes les morts du plaisir », car elle sait « qu
2230
ppelions les âmes à la vie après seulement toutes
les
morts du plaisir », car elle sait « qu’entre les êtres, le bonheur es
2231
les morts du plaisir », car elle sait « qu’entre
les
êtres, le bonheur est un lien sans durée. Seules la souffrance ou de
2232
du plaisir », car elle sait « qu’entre les êtres,
le
bonheur est un lien sans durée. Seules la souffrance ou de secrètes a
2233
êtres, le bonheur est un lien sans durée. Seules
la
souffrance ou de secrètes anomalies ont un pouvoir d’éternité. » Il e
2234
e, ce me semble, d’insister sur ce qui forme dans
le
récit de cette vie comme une arrière-pensée inquiète et un peu hautai
2235
e arrière-pensée inquiète et un peu hautaine. Que
la
composition de cette réminiscence soit assez facile et « artiste » on
2236
le et « artiste » on hésite à en faire reproche à
l’
auteur. Cette espèce de modestie de l’allure est rare autant que sympa
2237
reproche à l’auteur. Cette espèce de modestie de
l’
allure est rare autant que sympathique, dans le temps que sévit l’infl
2238
de l’allure est rare autant que sympathique, dans
le
temps que sévit l’inflation littéraire la plus ridicule. Pourtant, qu
2239
e autant que sympathique, dans le temps que sévit
l’
inflation littéraire la plus ridicule. Pourtant, qu’elle ne laisse poi
2240
e, dans le temps que sévit l’inflation littéraire
la
plus ridicule. Pourtant, qu’elle ne laisse point oublier que ce livre
2241
e. Il manque sans doute un morceau de phrase dans
l’
édition originale.
2242
ivant (février 1927)f « Triste, mais vrai. » (
Les
journaux.) Mademoiselle, Il faut d’abord que je m’excuse : c’est un
2243
vous dise qu’il fait très froid dans ma chambre :
le
feu n’a pas pris, et d’ailleurs cela n’en vaut plus la peine. (Veuill
2244
u n’a pas pris, et d’ailleurs cela n’en vaut plus
la
peine. (Veuillez ne pas voir dans cette phrase quelque allusion de ma
2245
dit, sans doute parce que c’est là que se nouent
les
douleurs les plus atrocement inutiles. La première fois, au théâtre.
2246
ute parce que c’est là que se nouent les douleurs
les
plus atrocement inutiles. La première fois, au théâtre. Dans l’ombre,
2247
ment inutiles. La première fois, au théâtre. Dans
l’
ombre, j’ai suivi le drame sur vos traits seulement ; l’écho n’en fut
2248
emière fois, au théâtre. Dans l’ombre, j’ai suivi
le
drame sur vos traits seulement ; l’écho n’en fut que plus douloureux
2249
e, j’ai suivi le drame sur vos traits seulement ;
l’
écho n’en fut que plus douloureux dans mon cœur. Puis je vous ai oubli
2250
ous voir si entourée… D’autres fois… je n’ai plus
le
courage de les dire. Enfin, avant-hier, à ce bal. J’avais demandé à
2251
tourée… D’autres fois… je n’ai plus le courage de
les
dire. Enfin, avant-hier, à ce bal. J’avais demandé à un de mes amis,
2252
us connaît4, de me présenter. Il m’en avait donné
la
promesse. Vos regards rencontrèrent les miens plus d’une fois pendant
2253
pendant une danse qu’il fit avec vous, mais vous
les
détourniez soudain comme pour vous arracher à une obsession secrèteme
2254
session secrètement attirante ; et je pensais que
la
force de mon désir était telle que vous en éprouviez vaguement la men
2255
désir était telle que vous en éprouviez vaguement
la
menace. Je dis menace, parce que mes airs sombres vous effrayaient sa
2256
seule leur prêtait quelque intention. Quand enfin
l’
orchestre s’arrêta, je me trouvais tout près de vous. Mon ami me fit u
2257
mon du malheur me paralysa. Je venais d’entrevoir
l’
image d’un couple heureux et banal, votre sourire répondant au mien, c
2258
aires et sur des cartes postales illustrées. Déjà
la
foule des danseurs nous séparait, mon ami se détournait, un peu vexé
2259
s une invincible lassitude me saisir et m’assis à
l’
écart. On me demandait, en passant, si j’étais malade. Je désignais d’
2260
s bouteilles de champagne vides ; car on pardonne
l’
ivresse, mais non certaines douleurs. Même, je fus obligé de confier à
2261
bligé de confier à un ami que j’en avais repris …
Les
archets jouaient sur mes nerfs. Le jazz martelait mon désespoir. Dése
2262
vais repris … Les archets jouaient sur mes nerfs.
Le
jazz martelait mon désespoir. Désespoir étroit, ces œillères géantes
2263
sespoir étroit, ces œillères géantes aux pensées,
le
ciel trop bas d’un rêve sans issue, pesant comme l’envie d’un sommeil
2264
ciel trop bas d’un rêve sans issue, pesant comme
l’
envie d’un sommeil sans fin… J’avais soif, mais la seule vue d’un liqu
2265
l’envie d’un sommeil sans fin… J’avais soif, mais
la
seule vue d’un liquide me soulevait le cœur. L’aube parut. On éteigni
2266
soif, mais la seule vue d’un liquide me soulevait
le
cœur. L’aube parut. On éteignit toutes les lampes, et les couples cha
2267
s la seule vue d’un liquide me soulevait le cœur.
L’
aube parut. On éteignit toutes les lampes, et les couples charlestonna
2268
ulevait le cœur. L’aube parut. On éteignit toutes
les
lampes, et les couples charlestonnaient plus furieusement dans l’ombr
2269
. L’aube parut. On éteignit toutes les lampes, et
les
couples charlestonnaient plus furieusement dans l’ombre livide, aux c
2270
s couples charlestonnaient plus furieusement dans
l’
ombre livide, aux cris fêlés et déchirants des saxophones. Sortie dans
2271
s. Sortie dans un matin sourd, frileux, qui avait
la
nausée. Je rentrai seul. Voici quelques mots que j’écrivis à ma table
2272
œillet, pauvre gentillesse d’une autre femme dont
le
seul défaut fut de m’aimer… (Froid aux genoux, odeur de vieille fumée
2273
umée, et ce refus au sommeil qui meurtrit jusqu’à
l’
âme.) Convulsions d’oriflammes sur l’orchestre pensif. Ton regard est
2274
trit jusqu’à l’âme.) Convulsions d’oriflammes sur
l’
orchestre pensif. Ton regard est plus grand que le chant des violons.
2275
l’orchestre pensif. Ton regard est plus grand que
le
chant des violons. Aube dure ! En ma tête rôde ton souvenir, comme un
2276
es heures, d’un sommeil triste, tout enfiévré par
la
crainte du réveil. Puis je suis revenu dans ces rues où je vous renco
2277
n rendez-vous au thé du Printemps. J’ai rôdé dans
la
joie féminine des grands magasins, n’osant pas repasser trop souvent
2278
agasins, n’osant pas repasser trop souvent devant
les
ascenseurs. « Vers 4 heures, me disais-je elle y entrera, et, me glis
2279
tage… » Je délirais, bien sûr. Je m’imaginais que
les
vendeuses me dévisageaient de plus en plus impudemment : je devais pa
2280
qu’un paquet de dix personnes s’engouffrait dans
la
cage rouge et or et s’élevait, j’éprouvais un petit arrachement, comm
2281
ais encore : Si je prends cet ascenseur et que je
la
croise en route dans l’ascenseur descendant… Il aurait fallu monter,
2282
s cet ascenseur et que je la croise en route dans
l’
ascenseur descendant… Il aurait fallu monter, mais l’idée de vous trou
2283
scenseur descendant… Il aurait fallu monter, mais
l’
idée de vous trouver peut-être assise en face de votre bel ami laqué,
2284
je suis sorti. Il y avait beaucoup de monde dans
les
rues, sous la pluie. Les autobus passaient par groupes. Plusieurs foi
2285
Il y avait beaucoup de monde dans les rues, sous
la
pluie. Les autobus passaient par groupes. Plusieurs fois, j’ai cru vo
2286
t beaucoup de monde dans les rues, sous la pluie.
Les
autobus passaient par groupes. Plusieurs fois, j’ai cru vous reconnaî
2287
s. Plusieurs fois, j’ai cru vous reconnaître dans
la
foule qui se précipitait, mais je n’avais pas pris de numéro, je ne p
2288
llu courir après celle-là qui venait de tourner à
l’
angle de cette rue et qui avait votre démarche. Mais, pendant ce temps
2289
désir surmené vous appelait encore, haletant. Et
le
temps passait, à la fois si lent — jusqu’à l’arrivée du prochain métr
2290
Et le temps passait, à la fois si lent — jusqu’à
l’
arrivée du prochain métro, du prochain autobus, — si rapide : déjà les
2291
in métro, du prochain autobus, — si rapide : déjà
les
lumières des boulevards glissaient des reflets sur l’asphalte mouillé
2292
umières des boulevards glissaient des reflets sur
l’
asphalte mouillé. Les pieds dans l’eau, les jambes fatiguées, les paup
2293
ds glissaient des reflets sur l’asphalte mouillé.
Les
pieds dans l’eau, les jambes fatiguées, les paupières lourdes, et ce
2294
es reflets sur l’asphalte mouillé. Les pieds dans
l’
eau, les jambes fatiguées, les paupières lourdes, et ce chant désespér
2295
ets sur l’asphalte mouillé. Les pieds dans l’eau,
les
jambes fatiguées, les paupières lourdes, et ce chant désespéré qui vo
2296
illé. Les pieds dans l’eau, les jambes fatiguées,
les
paupières lourdes, et ce chant désespéré qui vous appelait, assourdis
2297
était arrêté tout près de moi. Je vis un visage à
l’
intérieur se pencher vers la vitre… Je montai. Il n’y avait que des da
2298
i. Je vis un visage à l’intérieur se pencher vers
la
vitre… Je montai. Il n’y avait que des dames. Personne ne parlait. La
2299
Il n’y avait que des dames. Personne ne parlait.
La
jeune femme qui s’était penchée vous ressemblait tant. Mais je n’osai
2300
ous ressemblait tant. Mais je n’osais presque pas
la
regarder, à cause d’une incertitude qui redonnait tout son empire à m
2301
. Peut-être était-ce vous. Je ne saurai jamais. À
l’
arrêt de la Place Saint-Michel, elle sortit, en me frôlant, sans me re
2302
était-ce vous. Je ne saurai jamais. À l’arrêt de
la
Place Saint-Michel, elle sortit, en me frôlant, sans me regarder. Je
2303
derrière elle. Mais tout de suite des parapluies
la
dérobèrent à mes yeux. Une bouche de métro m’attira. Les rames s’arrê
2304
obèrent à mes yeux. Une bouche de métro m’attira.
Les
rames s’arrêtaient avec un sifflement particulièrement doux pour ma f
2305
gue, et ces gens pressés et songeurs respectaient
la
folie douloureuse qui devait contracter mon visage. Je promenais sur
2306
egards angoissés, avides, implorants. Oh ! toutes
les
femmes que j’ai fait souffrir cette nuit d’un long regard de damné. À
2307
je mêlais à mes pensées des fragments de rêves et
les
personnages des affiches, tout en marchant sans fin dans les couloirs
2308
ages des affiches, tout en marchant sans fin dans
les
couloirs implacablement brillants, je me pris à parler à haute voix,
2309
ases incohérentes. Je voyais avec une sombre joie
les
employés et les voyageurs s’inquiéter. Bientôt on m’entraîna de force
2310
s. Je voyais avec une sombre joie les employés et
les
voyageurs s’inquiéter. Bientôt on m’entraîna de force sur un trottoir
2311
force sur un trottoir roulant qui me remonta dans
la
rue. La fraîcheur de la brume m’apaisa. Sur la promesse que je fis qu
2312
r un trottoir roulant qui me remonta dans la rue.
La
fraîcheur de la brume m’apaisa. Sur la promesse que je fis que je me
2313
ulant qui me remonta dans la rue. La fraîcheur de
la
brume m’apaisa. Sur la promesse que je fis que je me sentais mieux, o
2314
ns la rue. La fraîcheur de la brume m’apaisa. Sur
la
promesse que je fis que je me sentais mieux, on me laissa rentrer seu
2315
t 5 heures du matin. Premiers appels d’autos dans
la
ville, mais il me semble que toutes choses s’éloignent de moi vertigi
2316
à rien dans mon esprit. Peut-être que j’ai perdu
la
notion du temps. Je ne me souviens plus que de cette déception insupp
2317
tout ce qui me navre au plus intime de mon être…
Le
revolver est chargé, sur cette table. (Je le caresse, entre deux phra
2318
tre… Le revolver est chargé, sur cette table. (Je
le
caresse, entre deux phrases.) Mais voici que ce geste de ma mort auss
2319
ais voici que ce geste de ma mort aussi me lasse,
l’
image que je m’en forme… Je ne comprends plus pourquoi je devrais me t
2320
is me tuer, pourquoi je souffre, ce que c’est que
la
souffrance, ce que c’est que ma vie, ma mort. Mon Dieu, il n’y a plus
2321
février 1927)g « Cet âge est sans pitié. » «
Le
véritable symbole n’est jamais prévu par l’auteur », écrivait Cocteau
2322
» « Le véritable symbole n’est jamais prévu par
l’
auteur », écrivait Cocteau dans la préface des Mariés de la tour Eiffe
2323
amais prévu par l’auteur », écrivait Cocteau dans
la
préface des Mariés de la tour Eiffel. Et une note d’Orphée précise :
2324
», écrivait Cocteau dans la préface des Mariés de
la
tour Eiffel. Et une note d’Orphée précise : « Inutile de dire qu’il n
2325
tile de dire qu’il n’y a pas un seul symbole dans
la
pièce. » Ce qui me gêne pourtant, c’est d’y découvrir possibles deux
2326
au d’en avoir plus ou moins consciemment concerté
la
possibilité. Orphée, par exemple, serait un poète surréaliste. « Il f
2327
dale. Il faut un de ces orages qui rafraîchissent
l’
air. » Il prétend « traquer l’inconnu ». Sa femme l’accuse de « vouloi
2328
qui rafraîchissent l’air. » Il prétend « traquer
l’
inconnu ». Sa femme l’accuse de « vouloir faire admettre que la poésie
2329
air. » Il prétend « traquer l’inconnu ». Sa femme
l’
accuse de « vouloir faire admettre que la poésie consiste à écrire une
2330
Sa femme l’accuse de « vouloir faire admettre que
la
poésie consiste à écrire une phrase ». Et cette phrase, c’est un chev
2331
se ». Et cette phrase, c’est un cheval savant qui
la
lui a dictée : « Madame Eurydice Reviendra Des Enfers. » — « Ce n’est
2332
un poème, un poème du rêve, une fleur du fond de
la
mort. » Or, on découvre à la fin de la pièce que c’est une anagramme
2333
une fleur du fond de la mort. » Or, on découvre à
la
fin de la pièce que c’est une anagramme un peu ordurière. Ainsi les r
2334
du fond de la mort. » Or, on découvre à la fin de
la
pièce que c’est une anagramme un peu ordurière. Ainsi les rêves publi
2335
e que c’est une anagramme un peu ordurière. Ainsi
les
rêves publiés par les surréalistes, donnés à la fois comme poèmes et
2336
mme un peu ordurière. Ainsi les rêves publiés par
les
surréalistes, donnés à la fois comme poèmes et comme dictées de l’inc
2337
donnés à la fois comme poèmes et comme dictées de
l’
inconscient, au fond desquels on a si vite fait de distinguer les quel
2338
au fond desquels on a si vite fait de distinguer
les
quelques préoccupations assez simples dont l’étude charme le psychana
2339
er les quelques préoccupations assez simples dont
l’
étude charme le psychanalyste. Je pourrais poursuivre le jeu. Et puis,
2340
préoccupations assez simples dont l’étude charme
le
psychanalyste. Je pourrais poursuivre le jeu. Et puis, il y a aussi d
2341
e charme le psychanalyste. Je pourrais poursuivre
le
jeu. Et puis, il y a aussi des sortes de calembours… Art chrétien, a
2342
crivit certains vers qu’on peut lire plus haut :
Les
anges véritables qui connaissent les signes Sont moins bons acrobates
2343
plus haut : Les anges véritables qui connaissent
les
signes Sont moins bons acrobates… (etc.)… Cocteau s’est trop exercé
2344
Cocteau s’est trop exercé avant de se lancer sur
la
corde raide. Je suis sûr qu’il ne tombera pas. J’admire sans émoi. ⁂
2345
’il ne tombera pas. J’admire sans émoi. ⁂ Certes,
les
qualités scéniques de cette pièce sont grandes. Je ne saurais même in
2346
e indiquer aucun endroit par où elle pèche contre
les
principes chers à l’auteur du Secret professionnel et de la préface d
2347
it par où elle pèche contre les principes chers à
l’
auteur du Secret professionnel et de la préface des Mariés — principes
2348
es chers à l’auteur du Secret professionnel et de
la
préface des Mariés — principes dont l’énoncé brillant et définitif re
2349
nnel et de la préface des Mariés — principes dont
l’
énoncé brillant et définitif restera l’un des titres les plus authenti
2350
ncé brillant et définitif restera l’un des titres
les
plus authentiques de Cocteau. Précision et relief du dialogue, ingéni
2351
liques ; enfin, un style parfaitement pauvre dans
le
détail, un vrai style de théâtre, d’une netteté qui pourtant n’est pa
2352
as maigre, d’une familiarité dramatique qui cerne
le
mystère d’un trait pur. Il semble que Cocteau ait réalisé là exacteme
2353
là exactement ce qu’il voulait. Et pourtant cette
admirable
machine ne m’inquiète guère : je sais qu’elle le conduira où il veut,
2354
ble machine ne m’inquiète guère : je sais qu’elle
le
conduira où il veut, sans surprises. « Puisque ces mystères me dépass
2355
que ces mystères me dépassent, feignons d’en être
l’
organisateur », disait le photographe des Mariés. Dans Orphée, le myst
2356
sent, feignons d’en être l’organisateur », disait
le
photographe des Mariés. Dans Orphée, le mystère ne peut plus dépasser
2357
», disait le photographe des Mariés. Dans Orphée,
le
mystère ne peut plus dépasser l’auteur : il l’a trop bien organisé. E
2358
és. Dans Orphée, le mystère ne peut plus dépasser
l’
auteur : il l’a trop bien organisé. En somme, ce qu’il faut reprocher
2359
e, le mystère ne peut plus dépasser l’auteur : il
l’
a trop bien organisé. En somme, ce qu’il faut reprocher à Cocteau, c’e
2360
lètement une pièce, prouvant une fois de plus que
l’
atmosphère de l’« art pur » n’est pas respirable. Il ne manque rien à
2361
ce, prouvant une fois de plus que l’atmosphère de
l’
« art pur » n’est pas respirable. Il ne manque rien à Orphée, sinon pe
2362
art de Dieu » — comme dit Gide — qui serait aussi
la
part de l’humain, l’imperfection secrète qui fait naître l’amour. Par
2363
» — comme dit Gide — qui serait aussi la part de
l’
humain, l’imperfection secrète qui fait naître l’amour. Parce que la c
2364
dit Gide — qui serait aussi la part de l’humain,
l’
imperfection secrète qui fait naître l’amour. Parce que la création es
2365
l’humain, l’imperfection secrète qui fait naître
l’
amour. Parce que la création est venue après la théorie. Parce qu’une
2366
ection secrète qui fait naître l’amour. Parce que
la
création est venue après la théorie. Parce qu’une fois de plus, Cocte
2367
re l’amour. Parce que la création est venue après
la
théorie. Parce qu’une fois de plus, Cocteau a comprimé des pétales de
2368
les de roses dans du cristal taillé, selon toutes
les
règles de l’art, mais que l’essence obtenue, si elle est de rose, est
2369
ans du cristal taillé, selon toutes les règles de
l’
art, mais que l’essence obtenue, si elle est de rose, est sans parfum.
2370
aillé, selon toutes les règles de l’art, mais que
l’
essence obtenue, si elle est de rose, est sans parfum. (Tout de même
2371
: j’en verrais une preuve, pour mon compte, dans
le
fait que je ne sais parler de lui autrement que par métaphores.) 5.
2372
trement que par métaphores.) 5. M. Zimmer, dans
la
Gazette de Lausanne . Et même il appelait Orphée « une tragédie de l
2373
ne . Et même il appelait Orphée « une tragédie de
l’
amour conjugal ». Vraiment, nous n’en demandions pas tant… g. « Orphé
2374
L’autre œil (février 1927)h Décembre
L’
époque s’ouvre où l’on attend un miracle pour la fin de la semaine. «
2375
vrier 1927)h Décembre L’époque s’ouvre où
l’
on attend un miracle pour la fin de la semaine. « Messieurs, disait Da
2376
L’époque s’ouvre où l’on attend un miracle pour
la
fin de la semaine. « Messieurs, disait Dardel, y a pas à tortiller, i
2377
s’ouvre où l’on attend un miracle pour la fin de
la
semaine. « Messieurs, disait Dardel, y a pas à tortiller, il faut fai
2378
ça semble idiot. Il y a des soirs où une idée de
la
responsabilité s’empare de nous. Et nous calculons qu’il s’agit de dé
2379
de déranger 5000 personnes en huit soirées, et de
les
occuper quatre heures durant… Mais la vision, rapidement entrevue par
2380
ées, et de les occuper quatre heures durant… Mais
la
vision, rapidement entrevue par chacun dans son for le plus intérieur
2381
sion, rapidement entrevue par chacun dans son for
le
plus intérieur, d’une fuite en auto, nous rassure provisoirement…
2382
ment… Prosopopée, à propos d’une apparition
La
vieille Monture 6 un soir nous apparut, lugubrement fardée, l’haleine
2383
nture 6 un soir nous apparut, lugubrement fardée,
l’
haleine mauvaise, édentée et tâchant à prendre un accent anglais d’un
2384
nt d’un doigt impitoyable son flanc déjà meurtri,
la
suivaient en hurlant : « Bas-toi là, bas-toi là ! »… Est-il plus atro
2385
onçant de séniles calembours… Pénétrés d’horreur,
les
bellettriens avaient fui. Au détour d’une ivresse, ils rencontrèrent
2386
t une créature évadée d’anciens rêves qui hantait
les
limbes depuis un an déjà. Ils ne tardèrent pas à reconnaître Cinémato
2387
tre. Ils se réunissent parfois autour d’un feu et
le
contemplent un certain temps en silence. « Well ! », dit enfin Dardel
2388
n temps en silence. « Well ! », dit enfin Dardel.
Les
autres n’en pensent pas moins. Quelquefois, Mossoul amène un scénario
2389
et à deux faces. Lugin, qui est théologien, et de
la
Tchaux, n’a pas la foi. Topin, Mahomet désabusé, constate que jamais
2390
gin, qui est théologien, et de la Tchaux, n’a pas
la
foi. Topin, Mahomet désabusé, constate que jamais « la Montagne » ne
2391
i. Topin, Mahomet désabusé, constate que jamais «
la
Montagne » ne saura venir au prophète, même s’il se nomme Mossoul. Po
2392
énie vint s’asseoir certaine nuit. Elle parla par
la
bouche de Lugin, sa langue dans la langue de Lugin : « Le rideau se l
2393
Elle parla par la bouche de Lugin, sa langue dans
la
langue de Lugin : « Le rideau se lève sur un miroir qui occupe toute
2394
e de Lugin, sa langue dans la langue de Lugin : «
Le
rideau se lève sur un miroir qui occupe toute la largeur de la scène.
2395
Le rideau se lève sur un miroir qui occupe toute
la
largeur de la scène. Titre : Socrate et Narcisse, un acte à grande fi
2396
lève sur un miroir qui occupe toute la largeur de
la
scène. Titre : Socrate et Narcisse, un acte à grande figuration. » En
2397
et Narcisse, un acte à grande figuration. » Enfin
l’
on joua aux petits dés le sort de notre parade — et l’on gagna. Enthou
2398
ande figuration. » Enfin l’on joua aux petits dés
le
sort de notre parade — et l’on gagna. Enthousiasmé, « Mimosa » partit
2399
joua aux petits dés le sort de notre parade — et
l’
on gagna. Enthousiasmé, « Mimosa » partit pour la Riviera afin de négo
2400
l’on gagna. Enthousiasmé, « Mimosa » partit pour
la
Riviera afin de négocier la vente de cette martingale avec des surréa
2401
Mimosa » partit pour la Riviera afin de négocier
la
vente de cette martingale avec des surréalistes hétérodoxes. Il revin
2402
érodoxes. Il revint juste à temps pour assister à
la
cérémonie de la pose du point final de « Cinématoma ou les épanchemen
2403
int juste à temps pour assister à la cérémonie de
la
pose du point final de « Cinématoma ou les épanchements de la jeune S
2404
onie de la pose du point final de « Cinématoma ou
les
épanchements de la jeune Synovie », parade « née du mariage de nos ve
2405
oint final de « Cinématoma ou les épanchements de
la
jeune Synovie », parade « née du mariage de nos veilles et de nos rêv
2406
riage de nos veilles et de nos rêves », ainsi que
le
disait si poétiquement le programme. Un peu d’histoire (erratum de la
2407
nos rêves », ainsi que le disait si poétiquement
le
programme. Un peu d’histoire (erratum de la chronique de Mossoul). Be
2408
ement le programme. Un peu d’histoire (erratum de
la
chronique de Mossoul). Belles-Lettres joua l’Inspecteur de Gogol à l’
2409
de la chronique de Mossoul). Belles-Lettres joua
l’
Inspecteur de Gogol à l’époque où le Cuirassé Potemkine était interdit
2410
oul). Belles-Lettres joua l’Inspecteur de Gogol à
l’
époque où le Cuirassé Potemkine était interdit à l’écran. Pitoëff avai
2411
-Lettres joua l’Inspecteur de Gogol à l’époque où
le
Cuirassé Potemkine était interdit à l’écran. Pitoëff avait prêté un a
2412
’époque où le Cuirassé Potemkine était interdit à
l’
écran. Pitoëff avait prêté un accent, Mme d’Assilva deux actrices, M.
2413
re dans des jupons autrement que par métaphore. À
La
Chaux-de-Fonds, il y eut trente membres et cent doigts dans deux lits
2414
cela fait-il de pieds et d’oreillles ? À signaler
la
fuite de Bec-de-Gaz, lequel s’éteignit dans les neiges. Un jour, on s
2415
er la fuite de Bec-de-Gaz, lequel s’éteignit dans
les
neiges. Un jour, on s’aperçut que cette chose avait recommencé, qu’on
2416
mmencé, qu’on appelle, sans doute par antiphrase,
la
vie. 6. Revue ou prologue. h. « L’autre œil », Revue de Belles-Le
2417
se aimée… (mars 1927)af M. Edmond Jaloux offre
l’
exemple rare d’un homme que son évolution naturelle a rapproché, dans
2418
sa maturité, des jeunes générations, en sorte que
l’
espèce de romantisme à la Nerval auquel il aboutit coïncide avec un mo
2419
énérations, en sorte que l’espèce de romantisme à
la
Nerval auquel il aboutit coïncide avec un mouvement dont lui-même s’e
2420
ec un mouvement dont lui-même s’est plu à relever
les
indices chez ses jeunes contemporains, et qu’il vient appuyer de son
2421
éjà riche de romancier. Son regard se promène sur
le
même monde où se plaisent nos jeunes poètes cosmopolites, mais il gar
2422
Giraudoux, j’y vois un signe charmant d’amitié de
l’
aîné au plus jeune, lequel envoie l’un de ses personnages pour remerci
2423
’un René Dubardeau pour cette ambassade). Parfois
l’
on se demande si l’Auber de Jean Cassou ne va pas s’attabler au café e
2424
pour cette ambassade). Parfois l’on se demande si
l’
Auber de Jean Cassou ne va pas s’attabler au café en face des personna
2425
face des personnages de Jaloux. Et peut-être que
la
comtesse Rezzovitch a rencontré M. Paul Morand, mais elle a dû le tro
2426
ovitch a rencontré M. Paul Morand, mais elle a dû
le
trouver un peu froid, n’aura pas été tentée de lui faire ces confiden
2427
confiant et secrètement incertain de ce roman. À
la
veille de se marier, Jérôme Parseval, journaliste parisien, rencontre
2428
carne aussitôt à ses yeux tout ce qu’il attend de
l’
amour. Une confidence, un baiser, et il ne la reverra jamais. Il aime
2429
d de l’amour. Une confidence, un baiser, et il ne
la
reverra jamais. Il aime encore sa femme, « mais comme on aime une pet
2430
d on a failli hériter de Chenonceaux ». Peu à peu
l’
image d’Irène Rezzovitch s’idéalise et gagne la puissance d’une mervei
2431
eu l’image d’Irène Rezzovitch s’idéalise et gagne
la
puissance d’une merveilleuse obsession. Il lui écrit de longues lettr
2432
obsession. Il lui écrit de longues lettres, sans
les
envoyer. Il apprend sa mort, et qu’elle l’aurait peut-être aimé. Enfi
2433
sans les envoyer. Il apprend sa mort, et qu’elle
l’
aurait peut-être aimé. Enfin, divorcé, seul, il la revoit dans une vis
2434
l’aurait peut-être aimé. Enfin, divorcé, seul, il
la
revoit dans une vision prestigieuse et désolée… M. Jaloux a trouvé là
2435
nt aujourd’hui un réalisme discret mais précis et
le
sens de ce qu’il y a en nous d’essentiel, de ce qui détermine nos act
2436
ssentiel, de ce qui détermine nos actes avant que
la
raison n’intervienne, mouvements de nos passions à nous-mêmes inavoué
2437
système de valeurs lyriques et sentimentales que
la
raison ignore ou tyrannise aveuglément, car « nous avons dressé notre
2438
manque guère à ce devoir sacré ». M. Jaloux évite
le
péril d’un réalisme trop amer et celui du roman lyrique, par l’équili
2439
réalisme trop amer et celui du roman lyrique, par
l’
équilibre qu’il maintient entre ces deux inconscients : l’époque et l’
2440
bre qu’il maintient entre ces deux inconscients :
l’
époque et l’être secret du héros. Il sait mieux que quiconque aujourd’
2441
intient entre ces deux inconscients : l’époque et
l’
être secret du héros. Il sait mieux que quiconque aujourd’hui faire éc
2442
rsonne, pas même eux ». Dans ce roman, comme dans
l’
Âge d’or, un désenchantement profond prend le masque d’une aimable mél
2443
dans l’Âge d’or, un désenchantement profond prend
le
masque d’une aimable mélancolie. C’est la sourde tristesse des choses
2444
d prend le masque d’une aimable mélancolie. C’est
la
sourde tristesse des choses qui vous échappent, des amours impossible
2445
rs impossibles, des histoires dont on ne sait pas
la
fin ni le sens véritable, mais seulement qu’elles ont fait souffrir.
2446
bles, des histoires dont on ne sait pas la fin ni
le
sens véritable, mais seulement qu’elles ont fait souffrir. Rendez-vou
2447
compris, et peut-être, un quiproquo de destinées…
Le
tragique du peut-être ; (comme dans l’une des dernières phrases de Sy
2448
’une des dernières phrases de Sylvie : « Là était
le
bonheur, peut-être… »). Mais le ton reste si léger, spirituel, fantai
2449
lvie : « Là était le bonheur, peut-être… »). Mais
le
ton reste si léger, spirituel, fantaisiste (cette touche pour peindre
2450
eindre un personnage épisodique : « Il confondait
la
rose et la pivoine, l’orange et l’ananas… »). Une telle œuvre, dense,
2451
ersonnage épisodique : « Il confondait la rose et
la
pivoine, l’orange et l’ananas… »). Une telle œuvre, dense, sans obscu
2452
isodique : « Il confondait la rose et la pivoine,
l’
orange et l’ananas… »). Une telle œuvre, dense, sans obscurité, riche
2453
Il confondait la rose et la pivoine, l’orange et
l’
ananas… »). Une telle œuvre, dense, sans obscurité, riche et décantée,
2454
Entr’acte de René Clair, ou
L’
éloge du Miracle (mars 1927)i Surprendre est peu de chose, il faut
2455
se, il faut transplanter. Max Jacob. Ce soir-là,
le
programme comprenait : un film d’avant-guerre ; un film japonais ; En
2456
d’avant-guerre ; un film japonais ; Entr’acte et
le
Voyage imaginaire, de René Clair. La Mort de Phèdre (environ 1905) :
2457
ntr’acte et le Voyage imaginaire, de René Clair.
La
Mort de Phèdre (environ 1905) : quelques acteurs d’une troupe de prov
2458
ent dans un décor très pauvre, légèrement coloré.
Le
principe est simple : « Je vous aime » se traduit par trois ou quatre
2459
aime » se traduit par trois ou quatre claques sur
la
poitrine ; et une crise intérieure par un court accès de danse de Sai
2460
ourt accès de danse de Saint-Guy. Art classique :
la
mort d’Hyppolite se passe en coulisse. Mais Phèdre avoue tout « devan
2461
asse en coulisse. Mais Phèdre avoue tout « devant
le
cadavre encore tout chaud ». Affreux. Aussi : « Elle mourut. » On voi
2462
ourut. » On voit que cette bande est antérieure à
l’
époque du long baiser de conclusion. Le film japonais : une historiett
2463
térieure à l’époque du long baiser de conclusion.
Le
film japonais : une historiette un peu plus banale que nature, très b
2464
banale que nature, très bien photographiée. C’est
le
film du type « Jeux de soleil dans les jardins, complets variés, ça f
2465
hiée. C’est le film du type « Jeux de soleil dans
les
jardins, complets variés, ça fait toujours plaisir de voir des gens b
2466
Soudain éclate Entr’acte (1925). « Une étude sur
le
Monde des Rêves ». Rondes de cheminées dans le ciel où des pressentim
2467
ur le Monde des Rêves ». Rondes de cheminées dans
le
ciel où des pressentiments clignent de l’œil. Des poupées en baudruch
2468
es dans le ciel où des pressentiments clignent de
l’
œil. Des poupées en baudruche gonflent leur tête jusqu’à éclater, tand
2469
ne colonnade, puis un jeu d’échec serré, mais sur
la
corniche d’un gratte-ciel, d’où se met à descendre un petit bateau de
2470
bateau de papier, sur fond de boulevards et parmi
les
toits flottants, c’est assez tragique. Mitrailleuse de phares d’auto,
2471
st assez tragique. Mitrailleuse de phares d’auto,
les
100 000 yeux de la nuit. Des imprécisions rapides. Un chasseur, toujo
2472
itrailleuse de phares d’auto, les 100 000 yeux de
la
nuit. Des imprécisions rapides. Un chasseur, toujours sur son toit ;
2473
Un chasseur, toujours sur son toit ; il tire sur
l’
œuf d’où naît une colombe. Chasse. Mais un papillon éclatant qui batta
2474
Chasse. Mais un papillon éclatant qui battait de
l’
aile un dixième de seconde, par intermittences, se pose enfin sur l’éc
2475
de seconde, par intermittences, se pose enfin sur
l’
écran : une danseuse sur une plaque de verre, vue par-dessous. Quelque
2476
s qui suivent sont embrumés dans mon souvenir par
le
rayonnement de la robe, fleur qui s’ouvre pour dégager le mouvement o
2477
embrumés dans mon souvenir par le rayonnement de
la
robe, fleur qui s’ouvre pour dégager le mouvement obsédant de deux ja
2478
nement de la robe, fleur qui s’ouvre pour dégager
le
mouvement obsédant de deux jambes, l’harmonie de leurs arabesques à t
2479
our dégager le mouvement obsédant de deux jambes,
l’
harmonie de leurs arabesques à trois dimensions mêlées avec une lenteu
2480
une perfection dont une brève vue verticale donne
la
clé… Un enterrement bourgeois, mais le corbillard est traîné par un d
2481
cale donne la clé… Un enterrement bourgeois, mais
le
corbillard est traîné par un dromadaire, d’ailleurs dételé. Les amis
2482
est traîné par un dromadaire, d’ailleurs dételé.
Les
amis affligés mangent les couronnes et suivent à grands sauts lents,
2483
ire, d’ailleurs dételé. Les amis affligés mangent
les
couronnes et suivent à grands sauts lents, solennels. Ils revoient la
2484
ent à grands sauts lents, solennels. Ils revoient
la
danseuse, font une ronde autour d’une tour Eiffel de bois de la taill
2485
ont une ronde autour d’une tour Eiffel de bois de
la
taille de l’Obélisque de la Concorde, puis enfilent les Champs-Élysée
2486
autour d’une tour Eiffel de bois de la taille de
l’
Obélisque de la Concorde, puis enfilent les Champs-Élysées à une allur
2487
our Eiffel de bois de la taille de l’Obélisque de
la
Concorde, puis enfilent les Champs-Élysées à une allure grandissante,
2488
ille de l’Obélisque de la Concorde, puis enfilent
les
Champs-Élysées à une allure grandissante, bientôt vertigineuse, pours
2489
e grandissante, bientôt vertigineuse, poursuivant
le
corbillard. Aspects du paysage urbain vu par les poursuivants, arbres
2490
t le corbillard. Aspects du paysage urbain vu par
les
poursuivants, arbres au ciel renversé, maisons obliques, montagnes ru
2491
. (J’ai regretté que René Clair ne nous donne pas
la
vision du mort.) Enfin le cercueil roule dans les marguerites, il en
2492
Clair ne nous donne pas la vision du mort.) Enfin
le
cercueil roule dans les marguerites, il en sort un chef d’orchestre d
2493
la vision du mort.) Enfin le cercueil roule dans
les
marguerites, il en sort un chef d’orchestre dont la baguette éteint t
2494
marguerites, il en sort un chef d’orchestre dont
la
baguette éteint tous les personnages et lui-même. ⁂ Le tout ne dure p
2495
un chef d’orchestre dont la baguette éteint tous
les
personnages et lui-même. ⁂ Le tout ne dure pas 20 minutes. Et c’est h
2496
guette éteint tous les personnages et lui-même. ⁂
Le
tout ne dure pas 20 minutes. Et c’est heureux. Nous manquons d’entraî
2497
c’est heureux. Nous manquons d’entraînement dans
le
domaine du merveilleux moderne. Un peu plus et nous demandions grâce
2498
e de trop de plaisir. Mais je ne suis pas sûr que
le
plaisir du public fût de même essence que le nôtre. Les gens rient à
2499
aisir du public fût de même essence que le nôtre.
Les
gens rient à l’enterrement au ralenti, à l’éclatement des têtes de po
2500
ût de même essence que le nôtre. Les gens rient à
l’
enterrement au ralenti, à l’éclatement des têtes de poupées, à la conc
2501
tre. Les gens rient à l’enterrement au ralenti, à
l’
éclatement des têtes de poupées, à la conclusion. Ce n’est pas le bon
2502
u ralenti, à l’éclatement des têtes de poupées, à
la
conclusion. Ce n’est pas le bon rire de cinéma. Quand la danseuse par
2503
s têtes de poupées, à la conclusion. Ce n’est pas
le
bon rire de cinéma. Quand la danseuse paraît, ils n’attendent que le
2504
lusion. Ce n’est pas le bon rire de cinéma. Quand
la
danseuse paraît, ils n’attendent que le moment où ils pourront se pou
2505
ma. Quand la danseuse paraît, ils n’attendent que
le
moment où ils pourront se pousser en disant : « C’que c’est cochon !
2506
pousser en disant : « C’que c’est cochon ! » Mais
le
moment ne vient pas, ils sont déçus. Enfin, mon voisin, un agent, mur
2507
emple, où nous ne pouvons nous empêcher d’admirer
l’
utilisation artistique ingénieuse et précise de certaines théories sur
2508
e ingénieuse et précise de certaines théories sur
le
rêve, le peuple, qui n’a pas vu ces dessous mais accueille le résulta
2509
use et précise de certaines théories sur le rêve,
le
peuple, qui n’a pas vu ces dessous mais accueille le résultat avec la
2510
peuple, qui n’a pas vu ces dessous mais accueille
le
résultat avec la naïveté qu’il faut, approuve et dit : « C’est bien ç
2511
as vu ces dessous mais accueille le résultat avec
la
naïveté qu’il faut, approuve et dit : « C’est bien ça, c’est comme qu
2512
uand on rêve. » Un des défauts d’Entr’acte, c’est
la
fantaisie recherchée de certaines scènes (l’enterrement). Cela fait b
2513
’est la fantaisie recherchée de certaines scènes (
l’
enterrement). Cela fait bizarre. Or, dans le monde où le cinéma doit n
2514
ènes (l’enterrement). Cela fait bizarre. Or, dans
le
monde où le cinéma doit nous « transplanter », un certain naturel est
2515
rrement). Cela fait bizarre. Or, dans le monde où
le
cinéma doit nous « transplanter », un certain naturel est de rigueur
2516
nsi qualifié : c’est peut-être le premier film où
l’
on a fait du ciné avec des moyens proprement cinégraphiques. Ici le ge
2517
né avec des moyens proprement cinégraphiques. Ici
le
geste pictural remplace le geste de l’acteur. Un mouvement ne soulign
2518
nt cinégraphiques. Ici le geste pictural remplace
le
geste de l’acteur. Un mouvement ne souligne pas, il exprime, et se su
2519
iques. Ici le geste pictural remplace le geste de
l’
acteur. Un mouvement ne souligne pas, il exprime, et se suffit. Mais c
2520
ne pas, il exprime, et se suffit. Mais comme pour
le
film 1905, on a sans cesse envie de crier : « Trop de gestes ! » C’es
2521
C’est une question d’épuration des moyens. Rendre
le
plus par le moins, c’est le fait d’un art à sa maturité. Mais ce sont
2522
estion d’épuration des moyens. Rendre le plus par
le
moins, c’est le fait d’un art à sa maturité. Mais ce sont là critique
2523
on des moyens. Rendre le plus par le moins, c’est
le
fait d’un art à sa maturité. Mais ce sont là critiques de style. D’or
2524
es de style. D’ores et déjà, il faut admirer dans
les
films de René Clair un sens du miracle assez bouleversant. Et je ne p
2525
ne parle pas du miracle genre conte de fée, comme
le
Voyage imaginaire en montre (beaucoup trop à mon gré). Qu’une sorcièr
2526
chien, cela n’a rien d’étonnant au cinéma. C’est
la
photographie d’une chose qui ne serait étonnante que dans le réel ; c
2527
phie d’une chose qui ne serait étonnante que dans
le
réel ; ce n’est pas encore un miracle de ciné. Et les fées paraissent
2528
réel ; ce n’est pas encore un miracle de ciné. Et
les
fées paraissent vieux jeu avec leur baguette, pour moi qui chaque soi
2529
soir crée ma chambre en tournant un commutateur.
Le
vrai miracle du cinéma, c’est, par exemple, l’éclosion d’une rose, un
2530
r. Le vrai miracle du cinéma, c’est, par exemple,
l’
éclosion d’une rose, un homme qui court au ralenti, certaines coïncide
2531
’est une réalité quotidienne dans une lumière qui
la
métamorphose ; c’est un temps nouveau, et l’espace en relation se mod
2532
qui la métamorphose ; c’est un temps nouveau, et
l’
espace en relation se modifie pour maintenir je ne sais quelle harmoni
2533
elle dont nous avons convenu et que nous pensions
la
seule possible. Le monde « normal » nous apparaît alors comme l’une s
2534
s convenu et que nous pensions la seule possible.
Le
monde « normal » nous apparaît alors comme l’une seulement des mille
2535
nécessités sociales — nous empêchent de découvrir
la
richesse immédiate. Surréel qui n’est pas synonyme d’incompréhensible
2536
on Madame, car alors quoi de plus surréaliste que
le
film 1905. Ce n’est peut-être qu’une question d’imagination ; il rest
2537
gineuses, et nous en sommes encore à nous frotter
les
yeux… Peut-être, quand nos regards plus assurés sauront enfin gagner
2538
ards plus assurés sauront enfin gagner de vitesse
les
prodiges que déclenche René Clair, verrons-nous, pris par surprise da
2539
René Clair, verrons-nous, pris par surprise dans
l’
exploration ivre d’un projecteur, des signes fatidiques, le visage d’u
2540
tion ivre d’un projecteur, des signes fatidiques,
le
visage d’un ange. i. « Entr’acte de René Clair, ou L’éloge du Mirac
2541
age d’un ange. i. « Entr’acte de René Clair, ou
L’
éloge du Miracle », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève
2542
927)ag Il faut souhaiter que ce témoignage sur
les
générations nouvelles et leurs maîtres soit lu par tous ceux qui cher
2543
lu par tous ceux qui cherchent à s’orienter dans
la
crise moderne. M. Daniel-Rops unit en lui à l’état de velléités contr
2544
ns la crise moderne. M. Daniel-Rops unit en lui à
l’
état de velléités contradictoires que son intelligence très nuancée ma
2545
ncée maintient en une sorte d’instable équilibre,
les
tendances que ses contemporains ont poussées à l’extrême avec moins d
2546
es tendances que ses contemporains ont poussées à
l’
extrême avec moins de prudence mais aussi de lucidité. Séduit par Gide
2547
lucidité. Séduit par Gide ; admirant Maurras sans
l’
aimer ; saluant en Valéry une réussite unique mais presque inhumaine ;
2548
e mais presque inhumaine ; secrètement attiré par
les
thèses extrémistes mais non dépourvues d’une sombre grandeur, des sur
2549
et en même temps par cette solution universelle,
la
foi, il résume en lui cette inquiétude qui fait la grandeur et la mis
2550
a foi, il résume en lui cette inquiétude qui fait
la
grandeur et la misère de l’époque — et qu’il avoue préférer à une cer
2551
e en lui cette inquiétude qui fait la grandeur et
la
misère de l’époque — et qu’il avoue préférer à une certitude trop vit
2552
e inquiétude qui fait la grandeur et la misère de
l’
époque — et qu’il avoue préférer à une certitude trop vite atteinte, o
2553
jeunesse ne verrait qu’une abdication. Il décrit
la
« génération nouvelle » avec une intelligente sympathie et un sens ra
2554
amlétisme », pouvoir aigu d’analyse qui conduit à
la
dispersion autant qu’à l’approfondissement du moi, soif de tout et po
2555
d’analyse qui conduit à la dispersion autant qu’à
l’
approfondissement du moi, soif de tout et pourtant mépris de tout, pro
2556
t pourtant mépris de tout, procédant d’un goût de
l’
absolu à la fois mystique et anarchique : ce sont bien les grands trai
2557
u à la fois mystique et anarchique : ce sont bien
les
grands traits de notre inquiétude. (Mais peut-être M. Rops a-t-il tro
2558
tude. (Mais peut-être M. Rops a-t-il trop négligé
le
rôle extérieur, que je crois décisif, des conditions de la vie modern
2559
xtérieur, que je crois décisif, des conditions de
la
vie moderne.) Après avoir défini quelques « positions en face de l’in
2560
près avoir défini quelques « positions en face de
l’
inquiétude », M. Rops considère les deux solutions les plus parfaites
2561
ions en face de l’inquiétude », M. Rops considère
les
deux solutions les plus parfaites qui s’offrent aux jeunes gens d’auj
2562
nquiétude », M. Rops considère les deux solutions
les
plus parfaites qui s’offrent aux jeunes gens d’aujourd’hui. Il consta
2563
qu’en y substituant ce qui ne vient que de Dieu :
la
Foi ». Acculée à la rigueur d’un choix presque impossible, notre ince
2564
ce qui ne vient que de Dieu : la Foi ». Acculée à
la
rigueur d’un choix presque impossible, notre incertitude paraît sans
2565
de. Mais, ici, M. Daniel-Rops n’a-t-il pas cédé à
la
tentation de créer des dilemmes irréductibles, suprême et inconscient
2566
uprême et inconsciente ruse d’un inquiet qui veut
le
rester ? Ces deux solutions peuvent se résumer en deux mots : inquiét
2567
: inquiétude ou foi. Dès lors sont-elles vraiment
les
deux termes d’un dilemme, l’une n’étant que le chemin qui mène à l’au
2568
t les deux termes d’un dilemme, l’une n’étant que
le
chemin qui mène à l’autre ? Car la foi naît de l’inquiétude autant qu
2569
ne n’étant que le chemin qui mène à l’autre ? Car
la
foi naît de l’inquiétude autant que de la grâce, et régénère sans ces
2570
le chemin qui mène à l’autre ? Car la foi naît de
l’
inquiétude autant que de la grâce, et régénère sans cesse l’inquiétude
2571
e ? Car la foi naît de l’inquiétude autant que de
la
grâce, et régénère sans cesse l’inquiétude autant que la sérénité… Au
2572
de autant que de la grâce, et régénère sans cesse
l’
inquiétude autant que la sérénité… Au reste, n’est-elle pas de M. Rops
2573
e, et régénère sans cesse l’inquiétude autant que
la
sérénité… Au reste, n’est-elle pas de M. Rops lui-même, cette phrase
2574
lui-même, cette phrase qui formule admirablement
les
exigences conjointes de l’inquiétude et de la foi : « Si tu as trouvé
2575
formule admirablement les exigences conjointes de
l’
inquiétude et de la foi : « Si tu as trouvé Dieu, il te reste à le che
2576
nt les exigences conjointes de l’inquiétude et de
la
foi : « Si tu as trouvé Dieu, il te reste à le chercher encore… » a
2577
de la foi : « Si tu as trouvé Dieu, il te reste à
le
chercher encore… » ag. « Daniel-Rops : Notre inquiétude (Perrin, Pa
2578
Louis Aragon,
le
beau prétexte (avril 1927)j Ah ! je sens qu’une puissance étrangè
2579
ce étrangère s’est emparée de mon être et a saisi
les
cordes les plus secrètes de mon âme, qu’elle peut faire désormais vib
2580
e s’est emparée de mon être et a saisi les cordes
les
plus secrètes de mon âme, qu’elle peut faire désormais vibrer à sa fa
2581
en décembre 1925, au sortir d’une conférence sur
le
Salut de l’humanité.) Ce soir en moi trépigne une rage. Sur quelles
2582
1925, au sortir d’une conférence sur le Salut de
l’
humanité.) Ce soir en moi trépigne une rage. Sur quelles épaules jet
2583
es jeter ce manteau de flammes, puis à qui dédier
l’
ennui de ma révolte ? Aragon sarcastique se tient là-bas dans un rayon
2584
— auxquels je crois encore, et pas seulement pour
le
pittoresque. — Attrape ! Il n’existe pas de théorie du salut. Il n’
2585
’existe que des systèmes pour faire taire en nous
l’
appel vertigineux du Silence. On nous montre des Dieux, mais c’est pou
2586
ourner nos regards de cela qu’il faut bien nommer
le
Vide. Tant de séductions nous ont en vain tentés, ô tortures fascinan
2587
ous ont en vain tentés, ô tortures fascinantes de
la
sainteté, seules vous nous appelez encore hors de cette voix de l’inf
2588
es vous nous appelez encore hors de cette voix de
l’
infini où chancellent parmi les éclairs nos premiers pas. Aragon, dans
2589
rs de cette voix de l’infini où chancellent parmi
les
éclairs nos premiers pas. Aragon, dans ces tempêtes de nuits filantes
2590
ilantes où s’enfuient, souffles à peine parfumés,
les
vices enlacés aux vertus, c’est un ricanement splendide comme un écla
2591
de comme un éclat de rire de condamné à mort et à
l’
éternité. Le diable avait pris des avocats dont les plaidoyers, tissus
2592
éclat de rire de condamné à mort et à l’éternité.
Le
diable avait pris des avocats dont les plaidoyers, tissus des mensong
2593
l’éternité. Le diable avait pris des avocats dont
les
plaidoyers, tissus des mensonges les plus beaux et des plus mélodieus
2594
avocats dont les plaidoyers, tissus des mensonges
les
plus beaux et des plus mélodieuses palinodies, font encore rêver les
2595
es plus mélodieuses palinodies, font encore rêver
les
anges écœurés d’azur. Alors un juron mélodramatique, d’une voix tortu
2596
ble un anathème sanglant. Louis Aragon, avocat de
l’
infini, annonce l’entrée de l’éternelle anarchiste, la Poésie. On di
2597
nglant. Louis Aragon, avocat de l’infini, annonce
l’
entrée de l’éternelle anarchiste, la Poésie. On dit : « Des mots ! »
2598
s Aragon, avocat de l’infini, annonce l’entrée de
l’
éternelle anarchiste, la Poésie. On dit : « Des mots ! » au lieu de
2599
fini, annonce l’entrée de l’éternelle anarchiste,
la
Poésie. On dit : « Des mots ! » au lieu de « Je ne comprends pas ».
2600
rends pas ». On dit : « Je ne comprends pas », et
l’
on pense : « C’est donc incompréhensible ». On dit : « C’est incompréh
2601
ble ». On dit : « C’est incompréhensible ! » — et
l’
on est enfin rassuré. C’est incompréhensible !, trois mots dont l’un
2602
vos glandes salivaires, pourtant si éprouvées par
le
repas dont vous sortez, que ces trois mots où se résume la défense de
2603
dont vous sortez, que ces trois mots où se résume
la
défense de la loi sociale, patriotique, religieuse (?) et ci-devant m
2604
ez, que ces trois mots où se résume la défense de
la
loi sociale, patriotique, religieuse (?) et ci-devant morale qui prot
2605
rallumez votre cigare. Vous vous êtes assuré que
la
porte ferme bien sur l’infini. Rien à craindre de ce côté. Retournez
2606
Vous vous êtes assuré que la porte ferme bien sur
l’
infini. Rien à craindre de ce côté. Retournez à vos amours. ..........
2607
........ Solitude, antichambre du ciel. À travers
l’
amour ou la poésie — et d’autres, à travers les déserts de la sainteté
2608
litude, antichambre du ciel. À travers l’amour ou
la
poésie — et d’autres, à travers les déserts de la sainteté que hanten
2609
ers l’amour ou la poésie — et d’autres, à travers
les
déserts de la sainteté que hantent les fantômes adorables du désir, —
2610
la poésie — et d’autres, à travers les déserts de
la
sainteté que hantent les fantômes adorables du désir, — quelques homm
2611
à travers les déserts de la sainteté que hantent
les
fantômes adorables du désir, — quelques hommes y pénètrent, et le goû
2612
ables du désir, — quelques hommes y pénètrent, et
le
goût de s’amuser ne renaîtra plus en eux. Ni même celui de souffrir.
2613
elui de souffrir. Le dernier rire d’Aragon, c’est
l’
éclat de sa joie brusque d’être seul sur un faux sommet vers quoi des
2614
s’efforcent — mais déjà c’est de plus loin qu’il
les
nargue. Il connaît enfin une solitude défendue de tous côtés par ses
2615
quelques « goujateries » affectées par mépris de
l’
honneur, le mot de Cambronne prodigué et des phrases d’un fascinant éc
2616
goujateries » affectées par mépris de l’honneur,
le
mot de Cambronne prodigué et des phrases d’un fascinant éclat : « Ô g
2617
quitte plus, attiré par les premiers sophismes de
l’
aurore, ces corniches de craie où t’accoudant tu mêles tes traits purs
2618
t’accoudant tu mêles tes traits purs et labiles à
l’
immobilité miraculeuse des statues7. » Il s’agit bien de critique litt
2619
ci en présence d’une des tentatives de libération
les
plus violentes et belles — malgré tant de maladresses dédaigneuses, d
2620
ravades et de faciles tricheries8 — qu’ait connue
l’
esprit humain. Sens de l’Absolu, sens de la pureté ou fanatisme de l’e
2621
cheries8 — qu’ait connue l’esprit humain. Sens de
l’
Absolu, sens de la pureté ou fanatisme de l’esprit. Jusqu’au-boutisme
2622
connue l’esprit humain. Sens de l’Absolu, sens de
la
pureté ou fanatisme de l’esprit. Jusqu’au-boutisme désespéré. « Il s’
2623
ns de l’Absolu, sens de la pureté ou fanatisme de
l’
esprit. Jusqu’au-boutisme désespéré. « Il s’agit de rendre impraticabl
2624
rtie » ou compromis : « Nous étions dominés par
le
sens d’une réalité morale absolue que certains d’entre nous eussent a
2625
martyre… Nos jugements se rendaient sans cesse à
l’
échelle de l’infini, et cet infini nous écrasait. Comment aurions-nous
2626
jugements se rendaient sans cesse à l’échelle de
l’
infini, et cet infini nous écrasait. Comment aurions-nous accepté le s
2627
nfini nous écrasait. Comment aurions-nous accepté
le
sort communément heureux de nos contemporains qui ont puisé dans Augu
2628
omte cette tranquillité de rejeter définitivement
les
problèmes métaphysiques ? » Nous naissons à quelque chose qui imite
2629
ues ? » Nous naissons à quelque chose qui imite
la
vie dans une époque d’inconcevables compromissions où triomphe sous t
2630
nconcevables compromissions où triomphe sous tous
les
déguisements, de Ford à Clément Vautel, le matérialisme le plus pauvr
2631
tous les déguisements, de Ford à Clément Vautel,
le
matérialisme le plus pauvre auquel se soit jamais abaissée une civili
2632
ements, de Ford à Clément Vautel, le matérialisme
le
plus pauvre auquel se soit jamais abaissée une civilisation. Mais nou
2633
rniers atouts sur notre salut. Nous courons enfin
l’
Aventure. « Le salut pour nous n’est nulle part9 ». Ultime affirmation
2634
sur notre salut. Nous courons enfin l’Aventure. «
Le
salut pour nous n’est nulle part9 ». Ultime affirmation d’une foi que
2635
rien ne peut duper. Depuis certaines paroles sur
la
Croix, il n’y a peut-être pas eu d’expression plus haute de l’angoiss
2636
n’y a peut-être pas eu d’expression plus haute de
l’
angoisse humaine, et vous aurez beau rire, pharisiens, et dire qu’elle
2637
et vous, dubitatives barbes. Je viens d’entendre
la
voix d’un mystique. Que si l’on vient nous empêtrer de dogmes basseme
2638
Je viens d’entendre la voix d’un mystique. Que si
l’
on vient nous empêtrer de dogmes bassement ingénieux : « Si j’essaie u
2639
ngénieux : « Si j’essaie un instant de m’élever à
la
notion de Dieu, répond Aragon, je me révolte qu’elle puisse en aucun
2640
nts ! Jouant tout sur une révélation possible, ou
la
naissance d’un prophète qui rapprenne comment aimer un Dieu. Ce n’est
2641
eût un sens, il faudrait être sûr de n’avoir pas
la
tête en bas par rapport au soleil. Quelques gestes encore, intercepta
2642
t au soleil. Quelques gestes encore, interceptant
les
messages égarés de l’infini… Un tel homme, — est-ce encore Aragon, s
2643
estes encore, interceptant les messages égarés de
l’
infini… Un tel homme, — est-ce encore Aragon, sinon qui ? — sa grande
2644
pages écrites il y a un an, tel soir de colère où
le
thermomètre eût indiqué 39° selon toute vraisemblance. Et voici Arago
2645
erait sans doute un peu ridicule. C’est ainsi que
l’
on arrive à croire, pour un autre, que c’est arrivé, ajoutant foi, dan
2646
autre, que c’est arrivé, ajoutant foi, dans tous
les
sens qu’admet ce terme, à des exaltations que leur lyrisme rendait se
2647
ules contagieuses. Comment, en effet, ne pas voir
la
part de littérature que renferme cette œuvre, et qui fait, en dépit d
2648
fait, en dépit des prétentions désobligeantes de
l’
auteur, son incontestable « séduction ». Pour un peu, je découvrais un
2649
un brin janséniste chez ce poète. Aujourd’hui, je
le
verrais plutôt comme un Musset10 plus véritablement désespéré. Un Mus
2650
ynisme verbeux 1830, une théorie du scandale pour
le
scandale qui a le mérite de n’être pas qu’un jeu littéraire. Mais enf
2651
0, une théorie du scandale pour le scandale qui a
le
mérite de n’être pas qu’un jeu littéraire. Mais enfin, c’est encore u
2652
bel écrivain, comme on dit. Et qui sait tirer un
admirable
parti littéraire de son tempérament vif, insolent et ombrageux. « J’a
2653
ment vif, insolent et ombrageux. « J’appartiens à
la
grande race des torrents. » Une belle phrase, n’est-ce pas ? Je ne sa
2654
e pas ? Je ne sais qu’un Montherlant qui pourrait
l’
oser dire comme Aragon sans ridicule. Et ce que je prenais pour le ton
2655
e Aragon sans ridicule. Et ce que je prenais pour
le
ton prophétique, ne serait-ce pas plutôt une sorte de donquichottisme
2656
une sorte de donquichottisme assez fréquent dans
les
cafés littéraires et dont il serait le premier à s’amuser ? Février
2657
user ? Février 1927. Relu Une vague de rêves et
la
préface de Libertinage. Sous une certaine rhétorique — mais la plus b
2658
Libertinage. Sous une certaine rhétorique — mais
la
plus belle, — ce qui tressaille et m’atteint au vif, c’est tout de mê
2659
en quoi je ne vais pas m’empêcher de reconnaître
la
voix secrète de notre mal de vivre. Désespoir métaphysique. Je me sou
2660
de Vinet — laissons s’esclaffer du rapprochement
les
auteurs de manuels de littérature — : « Un mysticisme creux et affamé
2661
ttérature — : « Un mysticisme creux et affamé est
le
contrecoup du christianisme dans les âmes profondes ou délicates qui
2662
et affamé est le contrecoup du christianisme dans
les
âmes profondes ou délicates qui ne sont pas devenues chrétiennes. » «
2663
licates qui ne sont pas devenues chrétiennes. » «
Le
salut pour nous n’est nulle part. » Nulle part, pensais-je : le salut
2664
nous n’est nulle part. » Nulle part, pensais-je :
le
salut n’est pas là, ou là, à Rome, à Athènes, à Moscou, dans cette do
2665
droite, à gauche, — nulle part sur cette terre où
l’
orgueil des hommes croit pouvoir nous le désigner, veut nous l’imposer
2666
terre où l’orgueil des hommes croit pouvoir nous
le
désigner, veut nous l’imposer pour quelles fins assez basses, nous le
2667
hommes croit pouvoir nous le désigner, veut nous
l’
imposer pour quelles fins assez basses, nous le savons… Mais pour Arag
2668
us l’imposer pour quelles fins assez basses, nous
le
savons… Mais pour Aragon, ce n’est point façon de parler. Son « nulle
2669
e « globe d’attente » comme dit Crevel. Pourtant,
le
plus irrévocable désespoir n’est encore qu’un appel à la foi la plus
2670
irrévocable désespoir n’est encore qu’un appel à
la
foi la plus haute. 1er mai 1927. Mieux vaut pécher par ridicule qu
2671
cable désespoir n’est encore qu’un appel à la foi
la
plus haute. 1er mai 1927. Mieux vaut pécher par ridicule que par s
2672
e que par scepticisme ; par excès que par défaut.
L’
enthousiasme trompe moins que le bon sens. Don Quichotte est tout de m
2673
s que par défaut. L’enthousiasme trompe moins que
le
bon sens. Don Quichotte est tout de même moins misérable que Clément
2674
lle n’a pas mérité du premier coup qu’on se donne
la
peine de l’écraser, — c’est qu’il symbolise tout cet état d’esprit «
2675
mérité du premier coup qu’on se donne la peine de
l’
écraser, — c’est qu’il symbolise tout cet état d’esprit « bien Parisie
2676
de récentes statistiques de librairie montrèrent
les
ravages bien plus étendus qu’on n’osait le craindre11. Si dans un ess
2677
èrent les ravages bien plus étendus qu’on n’osait
le
craindre11. Si dans un essai sur la sincérité j’ai soutenu qu’une int
2678
qu’on n’osait le craindre11. Si dans un essai sur
la
sincérité j’ai soutenu qu’une introspection immobile ne retient rien
2679
qu’une introspection immobile ne retient rien de
la
réalité vivante ; si je dénie à des incrédules le droit à parler des
2680
la réalité vivante ; si je dénie à des incrédules
le
droit à parler des choses de la foi comme étant d’un ordre qui leur é
2681
à des incrédules le droit à parler des choses de
la
foi comme étant d’un ordre qui leur échappe ; de même je récuse ici c
2682
critique dont on voudrait que soient justiciables
les
œuvres d’un écrivain, les démarches de sa pensée, ses délires, ses vi
2683
que soient justiciables les œuvres d’un écrivain,
les
démarches de sa pensée, ses délires, ses visions. Un critique qui n’é
2684
élires, ses visions. Un critique qui n’épouse pas
le
rythme d’une œuvre, mais s’avance à sa rencontre armé de l’appareil à
2685
d’une œuvre, mais s’avance à sa rencontre armé de
l’
appareil à frigorifier de sa raison, est destiné à dire des bêtises. C
2686
présenter… d’ailleurs une ancienne connaissance…
le
Sens Critique. Moi (gêné)… Rougemont. Le Sens Critique. — Il y a un
2687
sance… le Sens Critique. Moi (gêné)… Rougemont.
Le
Sens Critique. — Il y a un certain temps déjà que nous ne nous sommes
2688
t. Seulement, mon cher Monsieur, nous n’avons pas
le
temps ces jours-ci, beaucoup trop à faire, beaucoup trop d’êtres et d
2689
suppose. Comprenez-moi : submergés, absolument…
Le
Sens Critique. — Justement j’aurais en quelque manière la prétention…
2690
Critique. — Justement j’aurais en quelque manière
la
prétention… Moi. — Que voilà un singulier impertinent de votre part.
2691
ue voilà un singulier impertinent de votre part. (
Le
reconduisant :) Croyez, Monsieur, à mon estime la plus vive. Mais déc
2692
Le reconduisant :) Croyez, Monsieur, à mon estime
la
plus vive. Mais décidément nous sommes débordés, voyez vous-même, pas
2693
ut rien faire sans vous. Mais n’oubliez pas que «
l’
artiste serait peu de chose s’il ne spéculait sur l’incertain », c’est
2694
artiste serait peu de chose s’il ne spéculait sur
l’
incertain », c’est un académicien qui l’a dit. Voulez-vous me faire qu
2695
ulait sur l’incertain », c’est un académicien qui
l’
a dit. Voulez-vous me faire quelque chose là-dessus pour la Revue ? Ma
2696
Voulez-vous me faire quelque chose là-dessus pour
la
Revue ? Mais plus tard, plus tard. Tenez, voici un traité de métaphys
2697
ndant. Très bien fait. Excellente méthode ! (Sort
le
Sens Critique, un peu bousculé.) Moi. — Vous disiez, ma vie ? La Mu
2698
un peu bousculé.) Moi. — Vous disiez, ma vie ?
La
Muse (mais oui, la Muse, sortant de derrière un rideau). — J’attends
2699
Moi. — Vous disiez, ma vie ? La Muse (mais oui,
la
Muse, sortant de derrière un rideau). — J’attends votre plaisir… I
2700
qui croient avoir tout dit quand ils ont montré à
l’
origine de telle doctrine mystique une exaltation nerveuse ou des trou
2701
oubles organiques. Ils opposent à ces « délires »
les
thèses rassurantes de la « saine raison », sans se demander jamais si
2702
osent à ces « délires » les thèses rassurantes de
la
« saine raison », sans se demander jamais si cela ne condamne pas et
2703
ans se demander jamais si cela ne condamne pas et
la
santé et la raison. Il s’est trouvé des Maurras et autres « héritiers
2704
der jamais si cela ne condamne pas et la santé et
la
raison. Il s’est trouvé des Maurras et autres « héritiers de la grand
2705
s’est trouvé des Maurras et autres « héritiers de
la
grande tradition gréco-latine » pour assigner à Minerve le bassin de
2706
tradition gréco-latine » pour assigner à Minerve
le
bassin de la Méditerranée comme promenoir, avec défense sous peine de
2707
éco-latine » pour assigner à Minerve le bassin de
la
Méditerranée comme promenoir, avec défense sous peine de mort de s’en
2708
naire. Vous tracez des frontières géographiques à
la
raison ? Eh bien, c’est vous qui l’aurez voulu, mais tant pis, nous s
2709
ographiques à la raison ? Eh bien, c’est vous qui
l’
aurez voulu, mais tant pis, nous serons du Nord. Nous serons romantiqu
2710
rdonnés, brumeux, absurdes, vivants, libres. Avec
la
poésie contre vos principes. Avec l’esprit contre votre raison. Et av
2711
libres. Avec la poésie contre vos principes. Avec
l’
esprit contre votre raison. Et avec Aragon lorsqu’il vous crie : « À b
2712
son. Et avec Aragon lorsqu’il vous crie : « À bas
le
clair génie français. » Alors la voix de Rimbardk à la cantonade : Q
2713
s crie : « À bas le clair génie français. » Alors
la
voix de Rimbardk à la cantonade : Qu’il vienne, qu’il vienne Le temp
2714
air génie français. » Alors la voix de Rimbardk à
la
cantonade : Qu’il vienne, qu’il vienne Le temps dont on s’éprenne !
2715
ardk à la cantonade : Qu’il vienne, qu’il vienne
Le
temps dont on s’éprenne ! Les œuvres les plus significatives de ce
2716
enne, qu’il vienne Le temps dont on s’éprenne !
Les
œuvres les plus significatives de ce siècle sont écrites en haine de
2717
vienne Le temps dont on s’éprenne ! Les œuvres
les
plus significatives de ce siècle sont écrites en haine de l’époque12.
2718
nificatives de ce siècle sont écrites en haine de
l’
époque12. Le reproche d’obscurité que l’on fait à la littérature moder
2719
de ce siècle sont écrites en haine de l’époque12.
Le
reproche d’obscurité que l’on fait à la littérature moderne n’est qu’
2720
haine de l’époque12. Le reproche d’obscurité que
l’
on fait à la littérature moderne n’est qu’une manifestation de ce divo
2721
époque12. Le reproche d’obscurité que l’on fait à
la
littérature moderne n’est qu’une manifestation de ce divorce radical
2722
qu’une manifestation de ce divorce radical entre
l’
époque et les quelques centaines (?) d’individus pour qui l’esprit est
2723
festation de ce divorce radical entre l’époque et
les
quelques centaines (?) d’individus pour qui l’esprit est la seule réa
2724
t les quelques centaines (?) d’individus pour qui
l’
esprit est la seule réalité. C’est pourquoi nous ne pourrons plus sépa
2725
s centaines (?) d’individus pour qui l’esprit est
la
seule réalité. C’est pourquoi nous ne pourrons plus séparer du concep
2726
rquoi nous ne pourrons plus séparer du concept de
l’
esprit celui de Révolution. Et j’entends ce mot dans son sens le plus
2727
de Révolution. Et j’entends ce mot dans son sens
le
plus vaste. Il y a eu quatre-vingt-treize, la Réforme, Karl Marx, la
2728
ens le plus vaste. Il y a eu quatre-vingt-treize,
la
Réforme, Karl Marx, la préface de Cromwell. Mais il ne s’agit pas de
2729
a eu quatre-vingt-treize, la Réforme, Karl Marx,
la
préface de Cromwell. Mais il ne s’agit pas de refaire notre petite ré
2730
ltaire, etc., et tout ce qui leur correspond dans
l’
ordre politique par exemple. Parce que c’est très beau, ridiculement,
2731
ne dites pas aussi merde pour Marx ou Lénine, je
le
dirai pour vous. Quand on a entrepris la Révolution au nom de l’espri
2732
nine, je le dirai pour vous. Quand on a entrepris
la
Révolution au nom de l’esprit, on ne va pas s’acoquiner avec des gens
2733
ous. Quand on a entrepris la Révolution au nom de
l’
esprit, on ne va pas s’acoquiner avec des gens qui ont fait, il y a 10
2734
ne pouvez vous libérer de cette manie française,
la
politique, et ne voyez-vous pas que c’est faire le jeu de vos ennemis
2735
a politique, et ne voyez-vous pas que c’est faire
le
jeu de vos ennemis de discuter avec eux dans leur langue et de crier
2736
avec eux dans leur langue et de crier rouge pour
la
simple raison qu’ils ont dit blanc ? Pensez-vous combattre cet esprit
2737
socie à tant d’objets de votre mépris, en prenant
le
contre-pied de tout ce qu’il inspire ? Alors que cette réaction même
2738
leurs… Mais non, il y aurait trop à dire, et puis
l’
on croirait encore que je suis avec ceux qui traitent Aragon, Breton e
2739
arceurs, de chacals, de déments. Et puis surtout,
l’
heure est venue de clore des discussions énervantes où s’épuise vainem
2740
vantes où s’épuise vainement une dialectique dont
l’
objet fuit sans cesse par la quatrième dimension. Aragon et les surréa
2741
sans cesse par la quatrième dimension. Aragon et
les
surréalistes auront raison même encore s’ils ont tort, envers et cont
2742
me encore s’ils ont tort, envers et contre toutes
les
critiques qu’on pourrait leur adresser, parce que ces « maudits » ont
2743
rait leur adresser, parce que ces « maudits » ont
la
grâce, parce qu’ils sont la vie, même quand ils appellent la mort, pa
2744
e ces « maudits » ont la grâce, parce qu’ils sont
la
vie, même quand ils appellent la mort, parce qu’ils ont la passion et
2745
arce qu’ils sont la vie, même quand ils appellent
la
mort, parce qu’ils ont la passion et l’incommunicable secret de l’inv
2746
ême quand ils appellent la mort, parce qu’ils ont
la
passion et l’incommunicable secret de l’invention. Il nous faut des
2747
appellent la mort, parce qu’ils ont la passion et
l’
incommunicable secret de l’invention. Il nous faut des entrepreneurs
2748
’ils ont la passion et l’incommunicable secret de
l’
invention. Il nous faut des entrepreneurs de tempêtes. Un grand pri
2749
à nos mœurs. … et nous portant dans nos actions à
la
limite de nos forces, notre joie parmi vous fut une très grande joie.
2750
ons acquises, sièges faits, autorités fondées sur
la
gloire et la sénilité, etc., etc. Et certes ce n’étaient pas des être
2751
sièges faits, autorités fondées sur la gloire et
la
sénilité, etc., etc. Et certes ce n’étaient pas des êtres, mais leurs
2752
ine morale ne venait-elle pas de ce qu’en son nom
l’
on mesurait odieusement une sympathie humaine pour nous sans prix ? Ma
2753
lus grandes que nous. Nous nous connaissions dans
les
coins et nous mourions d’ennui avec les aspects irrévocablement prévu
2754
ions dans les coins et nous mourions d’ennui avec
les
aspects irrévocablement prévus de nous-mêmes que faisaient paraître l
2755
ement prévus de nous-mêmes que faisaient paraître
les
petits faits de nos longues journées. Nous aimions la révolution comm
2756
etits faits de nos longues journées. Nous aimions
la
révolution comme on aime l’amour. Nous n’aimions pas telle révolution
2757
ournées. Nous aimions la révolution comme on aime
l’
amour. Nous n’aimions pas telle révolution — la russe, par exemple — p
2758
me l’amour. Nous n’aimions pas telle révolution —
la
russe, par exemple — parce que ce n’est pas encore assez révolution ;
2759
asseoir et que son siège était fait. Nous aimions
la
Révolution qui nous perdrait corps et biens dans sa grandeur comme un
2760
emme merveilleuse nous perdrait corps et âme dans
l’
ivresse amoureuse ; nous cherchions cette Révolution de toutes nos for
2761
ns, comme on cherche cette femme à travers toutes
les
femmes. C’était un vice, la révolution-vice. Mais on ne vit, on ne me
2762
mme à travers toutes les femmes. C’était un vice,
la
révolution-vice. Mais on ne vit, on ne meurt que de vices. ⁂ Ici le
2763
Mais on ne vit, on ne meurt que de vices. ⁂ Ici
le
lecteur se rassure. « Il s’y retrouve. » Il pense que c’est bien jeun
2764
que c’est bien jeune. Et : encore un qui rue dans
les
brancards, c’est très bellettrien. Un disque de gramo comme par hasar
2765
us fait ça Plus ou moins, n’est-ce pas ? Et puis
l’
aiguille divague vers des souvenirs, quand nous allions tous deux, ces
2766
ort des suites. Quand cesserez-vous de nous faire
la
jambe, pardon escuses, avec ce thème à condamnations par contumace. I
2767
ns par contumace. Il y a encore des gens pour qui
les
limites de l’anarchie sont : chanter l’Internationale dans les rues,
2768
e. Il y a encore des gens pour qui les limites de
l’
anarchie sont : chanter l’Internationale dans les rues, faire la noce,
2769
pour qui les limites de l’anarchie sont : chanter
l’
Internationale dans les rues, faire la noce, écrire un livre de tendan
2770
e l’anarchie sont : chanter l’Internationale dans
les
rues, faire la noce, écrire un livre de tendances très modernes. Et d
2771
t : chanter l’Internationale dans les rues, faire
la
noce, écrire un livre de tendances très modernes. Et des gens pour se
2772
i nous en voulons, et finalement nous écraser par
l’
évidence définitive de notre absurdité. Car l’homme « s’est fait une v
2773
par l’évidence définitive de notre absurdité. Car
l’
homme « s’est fait une vérité changeante et toujours évidente, de laqu
2774
est plus détruire, ce n’est plus combattre, c’est
l’
épanouissement violent d’une immense fleur palpitante au parfum de pas
2775
es dangereux. Un orage de tendresse va crever sur
le
monde. Aigles d’amours, oiseaux doux et cruels, nous parlerons vos la
2776
ue des valeurs de passion. Balayez ces douanes de
l’
esprit, proclamez le grand Libre-Échange, voici déjà s’avancer des pro
2777
ssion. Balayez ces douanes de l’esprit, proclamez
le
grand Libre-Échange, voici déjà s’avancer des prodiges à cette invite
2778
voici déjà s’avancer des prodiges à cette invite
la
plus persuasive : nous sommes prêts à les accueillir. 7. Une vague
2779
e invite la plus persuasive : nous sommes prêts à
les
accueillir. 7. Une vague de rêves (dans Commerce). 8. Et malgré c
2780
perficielles et hâtives, comme cette prétention à
la
libération par le Rêve. « La liberté commence où naît le merveilleux.
2781
tives, comme cette prétention à la libération par
le
Rêve. « La liberté commence où naît le merveilleux. » Au vrai, et sur
2782
e cette prétention à la libération par le Rêve. «
La
liberté commence où naît le merveilleux. » Au vrai, et surtout pour u
2783
ration par le Rêve. « La liberté commence où naît
le
merveilleux. » Au vrai, et surtout pour un homme qui élit Freud « pré
2784
rtout pour un homme qui élit Freud « président de
la
République du Rêve » – c’est presque un non-sens de chercher l’absolu
2785
du Rêve » – c’est presque un non-sens de chercher
l’
absolue liberté dans le rêve. Le rêve, c’est la tyrannie des souvenirs
2786
ue un non-sens de chercher l’absolue liberté dans
le
rêve. Le rêve, c’est la tyrannie des souvenirs ; et ce n’est pas se l
2787
-sens de chercher l’absolue liberté dans le rêve.
Le
rêve, c’est la tyrannie des souvenirs ; et ce n’est pas se libérer qu
2788
er l’absolue liberté dans le rêve. Le rêve, c’est
la
tyrannie des souvenirs ; et ce n’est pas se libérer que de brasser ce
2789
onores. 9. Lettre à Paul Claudel. 10. Musset de
La
coupe et les lèvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11. Les livres les p
2790
Lettre à Paul Claudel. 10. Musset de La coupe et
les
lèvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11. Les livres les plus répandus
2791
pe et les lèvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11.
Les
livres les plus répandus à Genève sont Ma vie et mon œuvre de Ford et
2792
èvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11. Les livres
les
plus répandus à Genève sont Ma vie et mon œuvre de Ford et Mon curé c
2793
sont Ma vie et mon œuvre de Ford et Mon curé chez
les
riches. Très loin derrière viennent des France et des Bordeaux. 12.
2794
lus étroit, quelques esthètes du machinisme. 13.
Le
Paysan de Paris. j. « Louis Aragon, le beau prétexte », Revue de Bel
2795
sme. 13. Le Paysan de Paris. j. « Louis Aragon,
le
beau prétexte », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-F
2796
, n° 5, avril 1927, p. 131-144. k. On a conservé
la
graphie de l’original, sans doute voulue par l’auteur.
2797
1927, p. 131-144. k. On a conservé la graphie de
l’
original, sans doute voulue par l’auteur.
2798
é la graphie de l’original, sans doute voulue par
l’
auteur.
2799
Quatre incidents (avril 1927)l
La
maîtresse d’École Au printemps pur comme une joue, École errait, É
2800
joue, École errait, École suivait une femme dans
les
rues tant soit peu métaphysiques d’une capitale de mes songes. On exi
2801
t évanouis des arcs-en-ciel de névroses dans tous
les
poèmes où détresse rimait avec maîtresse. École savait le mythe du vo
2802
s où détresse rimait avec maîtresse. École savait
le
mythe du voyage, et qu’on ne manque pas le train bleu d’un désir. Ell
2803
savait le mythe du voyage, et qu’on ne manque pas
le
train bleu d’un désir. Elle était donc venue. Il la suivait entre les
2804
train bleu d’un désir. Elle était donc venue. Il
la
suivait entre les devantures qui se passaient de l’une à l’autre deux
2805
désir. Elle était donc venue. Il la suivait entre
les
devantures qui se passaient de l’une à l’autre deux séries de profils
2806
qu’au soleil toujours de face. Il ne vit plus que
la
foule des yeux bleus, son éblouissement. Soudain la voici, elle desce
2807
foule des yeux bleus, son éblouissement. Soudain
la
voici, elle descend à sa rencontre parmi les éclairs d’un luxe mécani
2808
udain la voici, elle descend à sa rencontre parmi
les
éclairs d’un luxe mécanique, le visage dans sa fourrure. Elle découvr
2809
rencontre parmi les éclairs d’un luxe mécanique,
le
visage dans sa fourrure. Elle découvre en passant près de lui le sour
2810
sa fourrure. Elle découvre en passant près de lui
le
sourire d’amitié mortel de tout ce qui n’arrive jamais. Il s’est trom
2811
Il pensa que c’était un ange, de ceux qui vont à
la
recherche des âmes. Aussitôt il téléphone à ceux du paradis : « Qui v
2812
sitôt il téléphone à ceux du paradis : « Qui va à
la
chasse perd sa place, nous nous comprenons. » On lui offrit immédiate
2813
À Max-Marc-Jean Jacob Reymond. Une étoile à
la
boutonnière, le marquis pénétra dans le salon de la duchesse, lui bai
2814
ean Jacob Reymond. Une étoile à la boutonnière,
le
marquis pénétra dans le salon de la duchesse, lui baisa la main et l’
2815
étoile à la boutonnière, le marquis pénétra dans
le
salon de la duchesse, lui baisa la main et l’abattit d’un coup de rev
2816
boutonnière, le marquis pénétra dans le salon de
la
duchesse, lui baisa la main et l’abattit d’un coup de revolver. Puis
2817
s pénétra dans le salon de la duchesse, lui baisa
la
main et l’abattit d’un coup de revolver. Puis s’en fut avec un tact e
2818
ans le salon de la duchesse, lui baisa la main et
l’
abattit d’un coup de revolver. Puis s’en fut avec un tact exquis, qui
2819
n fut avec un tact exquis, qui fut très remarqué.
Le
duc riait sous une table, complètement ivre, et Bettina lui disait à
2820
table, complètement ivre, et Bettina lui disait à
l’
oreille : « Mon chéri, si j’aime la comtesse ? Mais tu es si laid que
2821
a lui disait à l’oreille : « Mon chéri, si j’aime
la
comtesse ? Mais tu es si laid que cela me donne encore plus de plaisi
2822
laid que cela me donne encore plus de plaisir. »
Le
duc paya et s’enfuit en disant que ce n’était pas lui. L’enterrement
2823
aya et s’enfuit en disant que ce n’était pas lui.
L’
enterrement aura lieu sans suite. Suicide du Marquis Salomon le
2824
lieu sans suite. Suicide du Marquis Salomon
le
danseur triste baisa cette main cruelle… et quitta le bal au matin. I
2825
anseur triste baisa cette main cruelle… et quitta
le
bal au matin. Il neigeait dans les rues sourdes comme un songe de son
2826
elle… et quitta le bal au matin. Il neigeait dans
les
rues sourdes comme un songe de son enfance. Aux fenêtres du palais s’
2827
e. Aux fenêtres du palais s’étoilèrent des halos.
Le
jour tendre paraissait sous l’égide de la mort. Il vit des fleurs de
2828
ilèrent des halos. Le jour tendre paraissait sous
l’
égide de la mort. Il vit des fleurs de son enfance, une églantine, que
2829
halos. Le jour tendre paraissait sous l’égide de
la
mort. Il vit des fleurs de son enfance, une églantine, quelques roses
2830
e églantine, quelques roses, un sourire qui perce
le
cœur sur les glaces du passé. Cet abandon aux fuyantes chansons, et d
2831
quelques roses, un sourire qui perce le cœur sur
les
glaces du passé. Cet abandon aux fuyantes chansons, et des violons dé
2832
ons, et des violons déchirants dans sa tête… Mais
le
sommeil s’évaporait aux caresses des flocons, plus perfides que des m
2833
perfides que des murmures d’adieu. Il tomba parmi
les
statues, dans l’amitié pensive des jardins. Une fenêtre s’était ouver
2834
urmures d’adieu. Il tomba parmi les statues, dans
l’
amitié pensive des jardins. Une fenêtre s’était ouverte et des accords
2835
’était ouverte et des accords échappés tombaient,
les
ailes coupées. Puis le silence se reprit à ses songes désolés. Aut
2836
cords échappés tombaient, les ailes coupées. Puis
le
silence se reprit à ses songes désolés. Autre suicide ou la promen
2837
reprit à ses songes désolés. Autre suicide ou
la
promenade en bateau À Grego More. Il disait : « Je suis né pour
2838
À Grego More. Il disait : « Je suis né pour
la
mort. » Il fait assez beau pour que s’ouvre ce cœur de l’après-midi,
2839
» Il fait assez beau pour que s’ouvre ce cœur de
l’
après-midi, comme un camélia de tendre orgueil. Il respire déjà l’odeu
2840
mme un camélia de tendre orgueil. Il respire déjà
l’
odeur merveilleuse des objets et des êtres véritables. Un bateau ne gl
2841
bles. Un bateau ne glisse pas plus doucement vers
le
soleil du haut-lac. Justement, voici que tout va s’ouvrir, qu’un mond
2842
s’ouvrir, qu’un monde s’est ouvert devant lui. Et
l’
eau n’est pas moins somptueuse. Et bien sûr, je n’ai pas bougé. C’est
2843
me rendre seul et sans argent. Je ne voulais pas
le
retenir, Je ne pouvais pas le suivre. On dit de ces phrases. Même, on
2844
. Je ne voulais pas le retenir, Je ne pouvais pas
le
suivre. On dit de ces phrases. Même, on en pleure. l. « Quatre inc
2845
is (avril 1927)j Neuchâtel va-t-elle redevenir
le
centre artistique qu’elle fut au siècle passé ? Allons-nous assister
2846
ster à un regroupement de ses forces créatrices ?
La
question est peut-être prématurée. Mais le seul fait qu’elle se pose
2847
ices ? La question est peut-être prématurée. Mais
le
seul fait qu’elle se pose me paraît indiquer que l’un au moins des de
2848
artistes, en effet, n’ignorent rien des courants
les
plus modernes, et sont bien situés pour n’en prendre que le meilleur
2849
dernes, et sont bien situés pour n’en prendre que
le
meilleur ; mais l’émulation, l’atmosphère de combat nécessaire au dév
2850
n situés pour n’en prendre que le meilleur ; mais
l’
émulation, l’atmosphère de combat nécessaire au développement de certa
2851
n’en prendre que le meilleur ; mais l’émulation,
l’
atmosphère de combat nécessaire au développement de certains jeunes te
2852
ertains jeunes tempéraments leur fait défaut dans
la
même mesure. Ainsi risquent de s’établir autour d’eux des mœurs un pe
2853
œurs un peu bourgeoises dont je ne vais pas faire
le
procès, mais qui expliquent, me semble-t-il, pour une part, la disper
2854
is qui expliquent, me semble-t-il, pour une part,
la
dispersion des efforts artistiques. Tout ce monde d’amateurs de décou
2855
aux, de critiques d’avant-garde, ce monde où tous
les
extrémismes sont prônés comme vertus cardinales, et qui forme ailleur
2856
r public des jeunes artistes, n’existant pas ici,
le
peintre se trouve placé d’emblée en face de ce qu’on nomme le gros pu
2857
e trouve placé d’emblée en face de ce qu’on nomme
le
gros public. L’épreuve est pénible, énervante, souvent fatale aux nov
2858
’emblée en face de ce qu’on nomme le gros public.
L’
épreuve est pénible, énervante, souvent fatale aux novateurs. Alors il
2859
le d’une consécration étrangère. Un jour en effet
l’
on apprend que tel tableau de jeune est « coté » chez un gros marchand
2860
une est « coté » chez un gros marchand. Aussitôt,
les
feuilles locales retentissent de touchants échos : « C’est avec un lé
2861
bien méritée du talent d’un de ses enfants… » Car
le
fils prodigue, s’il rentre au foyer dans une Rolls-Royce et fortune f
2862
ttendait pas moins du fils d’un tel père. « Voilà
le
train du monde… » Je ne pense pas qu’il en faille gémir. Une certaine
2863
. Une certaine résistance est nécessaire pour que
la
force se développe. N’était certain petit plaisir d’impertinence, je
2864
une actualité toujours vive. D’ailleurs, sachons
le
reconnaître, il y a moins de malice que de paresse dans les jugements
2865
aître, il y a moins de malice que de paresse dans
les
jugements du public, et moins d’incompréhension que de timidité. ⁂ On
2866
ans, jusqu’à André Evard, qui en a près de 50, si
les
peintres dont nous allons parler méritent d’être appelés jeunes, c’es
2867
leurs œuvres avant tout. D’autre part je préfère
la
légende à l’histoire comme la peinture à la photographie. Une œuvre d
2868
avant tout. D’autre part je préfère la légende à
l’
histoire comme la peinture à la photographie. Une œuvre d’art est un m
2869
tre part je préfère la légende à l’histoire comme
la
peinture à la photographie. Une œuvre d’art est un merveilleux foyer
2870
éfère la légende à l’histoire comme la peinture à
la
photographie. Une œuvre d’art est un merveilleux foyer de contagion c
2871
agion contre lequel je ne saurais me prémunir par
le
moyen d’aucun de ces appareils à jugements garantis qui posent un cri
2872
t un critique d’art diplômé. Premier péché contre
l’
histoire : au seuil d’un article consacré aux jeunes artistes neuchâte
2873
t entre trente pareilles, aux cactus qui ornaient
les
fenêtres, dans une chambre peinte en bleu vif et ornée de surprenants
2874
straites. De cette époque datent des toiles comme
le
Souvenir de l’Évêché. Décors et personnages semblent d’une matière id
2875
tte époque datent des toiles comme le Souvenir de
l’
Évêché. Décors et personnages semblent d’une matière idéale. Tout est
2876
fait seulement. Il manque à ces recompositions de
la
nature, à ces natures remises à neuf, l’imperfection humaine qui touc
2877
tions de la nature, à ces natures remises à neuf,
l’
imperfection humaine qui touche. Mais l’atmosphère pure de ces espaces
2878
s à neuf, l’imperfection humaine qui touche. Mais
l’
atmosphère pure de ces espaces définis par quelques plans ne tue pas u
2879
ailleurs… Qu’il sorte enfin et se mette à graver
les
scènes qu’il voit dans la petite cité ouvrière, et c’est merveille de
2880
n et se mette à graver les scènes qu’il voit dans
la
petite cité ouvrière, et c’est merveille de constater combien l’épura
2881
ouvrière, et c’est merveille de constater combien
l’
épuration rigoriste de sa technique sert une vision aigüe de la vie. L
2882
igoriste de sa technique sert une vision aigüe de
la
vie. La série de gravures sur bois colorées qu’il intitule la cité es
2883
de sa technique sert une vision aigüe de la vie.
La
série de gravures sur bois colorées qu’il intitule la cité est un pet
2884
érie de gravures sur bois colorées qu’il intitule
la
cité est un petit chef-d’œuvre de réalisme stylisé. C’est d’un art tr
2885
, qui connaît ses ressources et sait en user avec
la
sobriété qui produit le maximum d’expression. Cette « simplicité préc
2886
rces et sait en user avec la sobriété qui produit
le
maximum d’expression. Cette « simplicité précieuse », il sait la conf
2887
pression. Cette « simplicité précieuse », il sait
la
conférer à tout ce qu’il touche, qu’il décore une bannière, fabrique
2888
e un peu bizarre qu’il glisse si souvent là où on
l’
attend le moins. Conrad Meili apporte chez nous une inspiration neuve,
2889
bizarre qu’il glisse si souvent là où on l’attend
le
moins. Conrad Meili apporte chez nous une inspiration neuve, d’origin
2890
e germanique, mais qui a choisi de s’astreindre à
la
voluptueuse rigueur latine, et qui tout en s’épurant dans des formes
2891
ui tout en s’épurant dans des formes claires a su
les
renouveler. Il nous apporte aussi cet élément de vitalité combative q
2892
’il casse des vitres, ce n’est pas seulement pour
le
plaisir, mais plutôt par amour du courant d’air. Cela dérange toujour
2893
air. Cela dérange toujours quelques frileux, mais
les
autres sont soulagés. Et ne fût-ce qu’en prenant une initiative comme
2894
uchâtel 1927 7 il aura bien mérité sa place parmi
les
artistes neuchâtelois. Actuellement, Meili achève la décoration d’une
2895
artistes neuchâtelois. Actuellement, Meili achève
la
décoration d’une salle d’hôtel en collaboration avec Paul Donzé. Qui
2896
ssionniste s’astreindrait jamais aux exigences de
la
technique décorative ! Voilà qui laisse espérer parmi nos artistes bi
2897
oins paradoxaux. Donzé n’est pas de ceux pour qui
la
peinture consiste à habiller une idée. Voyez son portrait de Meili :
2898
ée. Voyez son portrait de Meili : il ne prend pas
le
sujet par l’intérieur, mais il taille ce visage dans une pâte riche e
2899
portrait de Meili : il ne prend pas le sujet par
l’
intérieur, mais il taille ce visage dans une pâte riche et un peu lour
2900
dans une pâte riche et un peu lourde, son pinceau
la
palpe, la presse, la réduit à la forme qu’il voit. Il y a de la sensu
2901
âte riche et un peu lourde, son pinceau la palpe,
la
presse, la réduit à la forme qu’il voit. Il y a de la sensualité dans
2902
t un peu lourde, son pinceau la palpe, la presse,
la
réduit à la forme qu’il voit. Il y a de la sensualité dans l’écraseme
2903
rde, son pinceau la palpe, la presse, la réduit à
la
forme qu’il voit. Il y a de la sensualité dans l’écrasement de ses co
2904
resse, la réduit à la forme qu’il voit. Il y a de
la
sensualité dans l’écrasement de ses couleurs, une sensualité qui sait
2905
la forme qu’il voit. Il y a de la sensualité dans
l’
écrasement de ses couleurs, une sensualité qui sait se faire délicate
2906
avec des roses et des jaunes jamais mièvres, sous
l’
œil méfiant des fascistes qui le prennent pour un agitateur russe, à c
2907
ais mièvres, sous l’œil méfiant des fascistes qui
le
prennent pour un agitateur russe, à cause de sa chevelure, sans doute
2908
e tromper plus. ⁂ À vrai dire j’en vois peu parmi
les
jeunes qui vouent tout leur amour à la peinture pure. Je crois même q
2909
peu parmi les jeunes qui vouent tout leur amour à
la
peinture pure. Je crois même que, Paul Donzé touché à son tour par la
2910
crois même que, Paul Donzé touché à son tour par
la
grâce décorative, il n’en reste qu’un, du moins à Neuchâtel même : Eu
2911
vier. Ce garçon aux allures discrètes promène sur
le
monde des yeux de Japonais d’une ironie mélancolique et qui voient pl
2912
ient plus loin qu’on ne croit, mais il a toujours
l’
air de songer à la Hollande, sa seconde patrie si la peinture est sa p
2913
on ne croit, mais il a toujours l’air de songer à
la
Hollande, sa seconde patrie si la peinture est sa première et Neuchât
2914
air de songer à la Hollande, sa seconde patrie si
la
peinture est sa première et Neuchâtel la troisième… Il y a par Eugène
2915
par Eugène Bouvier quelque chose de nouveau dans
la
peinture neuchâteloise : un lyrisme un peu amer, d’une tristesse qui
2916
y a une sorte d’aristocratique dissimulation dans
l’
œuvre de Bouvier. Sa technique qui paraît au premier abord masquer ses
2917
premier abord masquer ses intentions, en réalité
les
exprime par ses défauts mêmes ou ses fausses négligences ; mais il fa
2918
oujours une sorte de dissonance, un défaut par où
l’
on va peut-être se glisser dans l’atmosphère de l’œuvre ; que l’on con
2919
n défaut par où l’on va peut-être se glisser dans
l’
atmosphère de l’œuvre ; que l’on consente en effet à telle déformation
2920
l’on va peut-être se glisser dans l’atmosphère de
l’
œuvre ; que l’on consente en effet à telle déformation, et tout devien
2921
tre se glisser dans l’atmosphère de l’œuvre ; que
l’
on consente en effet à telle déformation, et tout devient satisfaisant
2922
ère que Louis de Meuron, parmi ses aînés, dont on
le
puisse rapprocher, parce qu’il est un des rares peintres de ce pays p
2923
’il est un des rares peintres de ce pays pour qui
la
couleur existe avant tout. Mais la nostalgie de Bouvier l’entraîne à
2924
pays pour qui la couleur existe avant tout. Mais
la
nostalgie de Bouvier l’entraîne à mille lieues des jardins de sourire
2925
r existe avant tout. Mais la nostalgie de Bouvier
l’
entraîne à mille lieues des jardins de sourires qui s’épanouissent sur
2926
es des jardins de sourires qui s’épanouissent sur
les
toiles de Meuron. Il semble toujours qu’il peigne entre deux pluies.
2927
onde se mêlent, et sait rendre mieux que personne
la
liquidité d’un lac, certaines atmosphères délavées et sourdes. « Temp
2928
couvert, calme, légères précipitations » annonce
le
bulletin. Tiens, me dis-je, Bouvier va peindre. Comme peintre religie
2929
re religieux, il se cherche encore. On a pourtant
l’
impression, à voir ses dernières toiles, d’une plus grande certitude i
2930
s toiles, d’une plus grande certitude intérieure.
Les
visages sont plus calmes, les couleurs s’avivent, le soleil est sur l
2931
rtitude intérieure. Les visages sont plus calmes,
les
couleurs s’avivent, le soleil est sur le point de reparaître… Charle
2932
visages sont plus calmes, les couleurs s’avivent,
le
soleil est sur le point de reparaître… Charles Humbert ou comment on
2933
nq ans de Baudelaire à Rubens. Il fut un temps où
l’
on put craindre que Charles Humbert ne devînt le chef d’une école du g
2934
ù l’on put craindre que Charles Humbert ne devînt
le
chef d’une école du gris-noir neurasthénique. Il peignait des natures
2935
ue. Il peignait des natures mortes qui décidément
l’
étaient, à faire froid dans le dos ; ou bien des scènes d’une bizarre
2936
rtes qui décidément l’étaient, à faire froid dans
le
dos ; ou bien des scènes d’une bizarre fantaisie, un mélange de Rops
2937
g, G. H. Dessoulavy)… Mais déjà paraissaient dans
les
Voix (cette courageuse revue qu’il avait fondée avec J. P. Zimmermann
2938
un tempérament très rassurant. C’était, je crois,
le
vrai Humbert qui commençait à s’affirmer. Puis il y eut une période i
2939
onies funèbres, comme un qui n’attendrait pas que
l’
enterrement s’éloigne pour entonner une chanson à boire. Et sa techniq
2940
nt maigre se faisait trop lâche. Mais aujourd’hui
la
mue semble s’être opérée. Humbert est rendu à lui-même. Il atteint so
2941
son équilibre et sa maîtrise avec une toile comme
le
Potier. Si la couleur n’est pas encore aussi plantureuse que les form
2942
et sa maîtrise avec une toile comme le Potier. Si
la
couleur n’est pas encore aussi plantureuse que les formes, il y a une
2943
la couleur n’est pas encore aussi plantureuse que
les
formes, il y a une belle richesse de lueurs sur une matière traitée l
2944
possibilités imprévues. Il y a un côté « homme de
la
Renaissance » chez un Charles Humbert livré à sa fougue originale. Il
2945
plus encore chez un Aurèle Barraud. Il suffit de
le
voir peint par lui-même pour s’en assurer. La tête large, aux yeux cl
2946
de le voir peint par lui-même pour s’en assurer.
La
tête large, aux yeux clairs et assurés, le cou robuste, les mains d’u
2947
surer. La tête large, aux yeux clairs et assurés,
le
cou robuste, les mains d’un si beau dessin, qui ont du poids et nulle
2948
arge, aux yeux clairs et assurés, le cou robuste,
les
mains d’un si beau dessin, qui ont du poids et nulle lourdeur, tout c
2949
nce domptée et qui semble se faire une volupté de
la
discipline qu’elle s’impose. Et voilà qui fait encore plus « Renaissa
2950
. Et voilà qui fait encore plus « Renaissance » :
le
costume est drapé avec un soin minutieux, mais une grande mèche insol
2951
x, mais une grande mèche insolente retombe devant
le
visage. Aurèle tient un livre ouvert, et ce n’est pas je pense qu’il
2952
t un livre ouvert, et ce n’est pas je pense qu’il
le
lise, mais il aime caresser la reliure qu’il doit avoir faite lui-mêm
2953
pas je pense qu’il le lise, mais il aime caresser
la
reliure qu’il doit avoir faite lui-même. Car il est artisan, dans le
2954
it avoir faite lui-même. Car il est artisan, dans
le
beau sens ancien du terme, tout comme son frère Charles Barraud, qui
2955
s, à encadrer des glaces. Et plaise aux dieux que
les
visages qui s’y reflèteront soient aussi beaux que ceux qu’il peint o
2956
oient aussi beaux que ceux qu’il peint ou modèle,
le
soir, à la lampe, en compagnie de sa femme (elle peint aussi, d’un œi
2957
beaux que ceux qu’il peint ou modèle, le soir, à
la
lampe, en compagnie de sa femme (elle peint aussi, d’un œil regardant
2958
de sa femme (elle peint aussi, d’un œil regardant
le
sujet, de l’autre ce qu’en fait son mari). Et puis voici François Bar
2959
n fait son mari). Et puis voici François Barraud,
le
plus jeune des frères. Il vient apporter des dessins qui ressemblent
2960
éalistes, plus fins, mais tout aussi habiles dans
l’
utilisation du clair-obscur qui simplifie et renforce l’expression. Dé
2961
isation du clair-obscur qui simplifie et renforce
l’
expression. Décidément ces trois frères sont une école. Délaissant un
2962
ons désormais retrouver, allons errer un peu dans
le
royaume d’Utopie. André Evard va nous y introduire, et nous ne saurio
2963
es années d’avance sur ses contemporains. Un jour
les
jeunes le rattrapent. Salutations, présentations : « André Evard. — L
2964
’avance sur ses contemporains. Un jour les jeunes
le
rattrapent. Salutations, présentations : « André Evard. — Les jeunes
2965
nt. Salutations, présentations : « André Evard. —
Les
jeunes peintres. — Vous suivez la même route que nous ? À la bonne he
2966
André Evard. — Les jeunes peintres. — Vous suivez
la
même route que nous ? À la bonne heure ! ». Et l’on repart bras dessu
2967
eintres. — Vous suivez la même route que nous ? À
la
bonne heure ! ». Et l’on repart bras dessus, bras dessous. Et l’on ap
2968
la même route que nous ? À la bonne heure ! ». Et
l’
on repart bras dessus, bras dessous. Et l’on apprend peu à peu des cho
2969
! ». Et l’on repart bras dessus, bras dessous. Et
l’
on apprend peu à peu des choses bien curieuses sur son compte. Il a fa
2970
hoses bien curieuses sur son compte. Il a fait de
la
pâtisserie, mais on m’assure qu’il se nourrit de noix et d’oranges. I
2971
cles où sous un éclairage très net, mais inusité,
l’
objet le plus banal se charge de mystère. Que va-t-il se passer là-ded
2972
sous un éclairage très net, mais inusité, l’objet
le
plus banal se charge de mystère. Que va-t-il se passer là-dedans ? Et
2973
e va-t-il se passer là-dedans ? Et ces roses sont
le
signe de quel occulte prodige ? Intrigué, vous reprenez ce que vous p
2974
qui s’incarne dans ces motifs géométriques, pour
le
plaisir de la perfection exercée par jeu. Mais quel support à de nouv
2975
dans ces motifs géométriques, pour le plaisir de
la
perfection exercée par jeu. Mais quel support à de nouvelles songerie
2976
rd n’aille trouver une de ces machines à explorer
l’
au-delà. En vérité il faut être sorcier ou artiste pour changer en ins
2977
métaphysiques ces bonnes montres de précision de
La
Chaux-de-Fonds… Avant de quitter les peintres, rappelons le souvenir
2978
précision de La Chaux-de-Fonds… Avant de quitter
les
peintres, rappelons le souvenir de Charles Harder, qui est mort jeune
2979
e-Fonds… Avant de quitter les peintres, rappelons
le
souvenir de Charles Harder, qui est mort jeune, sans avoir pu donner
2980
r qui saura s’imposer. Léon Perrin a compris tout
le
parti qu’on pouvait tirer des principes cubistes dans un art dont la
2981
ait tirer des principes cubistes dans un art dont
la
genèse même est cubiste en quelque sorte, supposant une décomposition
2982
y avait quelque lourdeur dans des morceaux comme
le
Joueur de rugby. C’était le poids de la pierre, plus que celui du cor
2983
ns des morceaux comme le Joueur de rugby. C’était
le
poids de la pierre, plus que celui du corps de l’athlète ; l’œuvre n’
2984
aux comme le Joueur de rugby. C’était le poids de
la
pierre, plus que celui du corps de l’athlète ; l’œuvre n’atteignait p
2985
le poids de la pierre, plus que celui du corps de
l’
athlète ; l’œuvre n’atteignait pas encore pleinement sa vie propre. De
2986
la pierre, plus que celui du corps de l’athlète ;
l’
œuvre n’atteignait pas encore pleinement sa vie propre. Depuis, Léon P
2987
du BIT où se manifeste un heureux équilibre entre
le
réalisme imposé par les sujets et un style qui sait rester ample, d’u
2988
un heureux équilibre entre le réalisme imposé par
les
sujets et un style qui sait rester ample, d’une simplicité non dépour
2989
cité non dépourvue de puissance. Une fois de plus
l’
on peut admirer la salutaire leçon de style donnée par le cubisme aux
2990
de puissance. Une fois de plus l’on peut admirer
la
salutaire leçon de style donnée par le cubisme aux artistes qui ont s
2991
ut admirer la salutaire leçon de style donnée par
le
cubisme aux artistes qui ont su se dégager de son outrance théorique.
2992
se dégager de son outrance théorique. C’est dans
la
manière cubiste encore que Perrin décora naguère fort plaisamment une
2993
e n’est certes pas complète. Mais elle a du moins
l’
avantage de grouper des artistes qui, par le fait des circonstances pe
2994
moins l’avantage de grouper des artistes qui, par
le
fait des circonstances peut-être plus que par de naturelles affinités
2995
ns décoratives qui pourraient aboutir peut-être à
la
formation d’un groupe dont l’activité serait féconde en ce pays. D’au
2996
aboutir peut-être à la formation d’un groupe dont
l’
activité serait féconde en ce pays. D’autre part, des œuvres aussi dif
2997
t, des œuvres aussi différentes par leur objet et
le
domaine où elles se réalisent que celles de Le Corbusier8, Meili, Eva
2998
et le domaine où elles se réalisent que celles de
Le
Corbusier8, Meili, Evard, Perrin, manifestent toutes une recherche de
2999
vard, Perrin, manifestent toutes une recherche de
la
simplicité savante et de la perfection du métier, un goût pour la con
3000
utes une recherche de la simplicité savante et de
la
perfection du métier, un goût pour la construction rigoureuse qui son
3001
vante et de la perfection du métier, un goût pour
la
construction rigoureuse qui sont des éléments peut-être insuffisants
3002
nérale vers une sorte de classicisme moderne dont
les
frères Barraud ne seraient pas très éloignés par d’autres côtés. Un a
3003
samment atteint si nous n’avions fait qu’affirmer
l’
existence et la vitalité d’une jeune peinture originale dans un pays q
3004
si nous n’avions fait qu’affirmer l’existence et
la
vitalité d’une jeune peinture originale dans un pays qu’on s’est trop
3005
ue et d’une maigre végétation artistique. Pays où
l’
on préfère la netteté utile à l’harmonie des lignes ; où la lumière éc
3006
aigre végétation artistique. Pays où l’on préfère
la
netteté utile à l’harmonie des lignes ; où la lumière éclaire plus qu
3007
tistique. Pays où l’on préfère la netteté utile à
l’
harmonie des lignes ; où la lumière éclaire plus qu’elle ne caresse ;
3008
ère la netteté utile à l’harmonie des lignes ; où
la
lumière éclaire plus qu’elle ne caresse ; où pourtant les hivers les
3009
ère éclaire plus qu’elle ne caresse ; où pourtant
les
hivers les plus durs réservent des douceurs secrètes. 7. Publicatio
3010
plus qu’elle ne caresse ; où pourtant les hivers
les
plus durs réservent des douceurs secrètes. 7. Publication dont cett
3011
n vrai nom Ch. E. Jeanneret, un article paru dans
le
numéro de février de cette revue. j. « Jeunes artistes neuchâtelois
3012
hoquer et s’imposer pourtant. M. Lecache présente
le
problème juif avec une obstination à ne rien cacher qui le mène profo
3013
me juif avec une obstination à ne rien cacher qui
le
mène profond. Une famille juive dans le Marais. Le père est un taille
3014
acher qui le mène profond. Une famille juive dans
le
Marais. Le père est un tailleur, biblique, austère et probe, qui n’a
3015
e mène profond. Une famille juive dans le Marais.
Le
père est un tailleur, biblique, austère et probe, qui n’a d’ambition
3016
, qui n’a d’ambition que pour ses enfants. Jacob,
l’
aîné se révolte. Sensualité, intelligence, brutalité : les caractères
3017
se révolte. Sensualité, intelligence, brutalité :
les
caractères se résument dans son avidité de puissance. C’est par l’arg
3018
résument dans son avidité de puissance. C’est par
l’
argent qu’on domine notre âge : il devient grand industriel, assure sa
3019
au prix du peu cynique reniement de ses origines.
Le
vieux père s’effondre de honte et de douleur. « On vend de l’étoffe…
3020
e s’effondre de honte et de douleur. « On vend de
l’
étoffe… eux ils se vendent ! » Mais Jacob a renié ses parents, non leu
3021
ents, non leurs ambitions. Surmontant son dégoût,
le
père ajoute : « Notre sang sera vainqueur… Qu’ils m’oublient, qu’ils
3022
ueur… Qu’ils m’oublient, qu’ils me méprisent ! Je
les
vois régner. Je salue leur Loi. » Le récit grassement pittoresque dan
3023
risent ! Je les vois régner. Je salue leur Loi. »
Le
récit grassement pittoresque dans la description du milieu juif, pren
3024
leur Loi. » Le récit grassement pittoresque dans
la
description du milieu juif, prend une âpre rapidité avec l’ascension
3025
tion du milieu juif, prend une âpre rapidité avec
l’
ascension de Jacob et ses luttes. On pardonne bon nombre de platitudes
3026
ne bon nombre de platitudes et de vulgarités pour
les
derniers chapitres, denses, violents, et dont le profond ricanement s
3027
les derniers chapitres, denses, violents, et dont
le
profond ricanement se prolonge en nous. Je crois entendre Jacob qui s
3028
fort que cette bourgeoisie fatiguée, et de suivre
le
destin que vous m’avez assigné à force de m’humilier et de me craindr
3029
René Crevel,
La
Mort difficile (mai 1927)ai Le jeu de tout dire est une des plus t
3030
René Crevel, La Mort difficile (mai 1927)ai
Le
jeu de tout dire est une des plus tragiques inventions de l’inquiétud
3031
out dire est une des plus tragiques inventions de
l’
inquiétude actuelle. Sous couleur de démasquer l’humain, et par l’acha
3032
l’inquiétude actuelle. Sous couleur de démasquer
l’
humain, et par l’acharnement angoissé qu’on y apporte, l’on en vient à
3033
uelle. Sous couleur de démasquer l’humain, et par
l’
acharnement angoissé qu’on y apporte, l’on en vient à une conception d
3034
n, et par l’acharnement angoissé qu’on y apporte,
l’
on en vient à une conception de la sincérité qui me paraît proprement
3035
u’on y apporte, l’on en vient à une conception de
la
sincérité qui me paraît proprement inhumaine. Tout dire, vraiment ? C
3036
proprement inhumaine. Tout dire, vraiment ? C’est
l’
exigence d’une détresse cachée ; elle fait bientôt considérer toute jo
3037
ôt considérer toute joie comme illusoire et livre
l’
individu pieds et poings liés à l’obsession qu’il voulait avouer pour
3038
usoire et livre l’individu pieds et poings liés à
l’
obsession qu’il voulait avouer pour s’en délivrer peut-être. Cette sin
3039
re. Cette sincérité ne serait-elle à son tour que
le
masque d’un goût du malheur ? Le sujet profond de ce roman, où l’on v
3040
e à son tour que le masque d’un goût du malheur ?
Le
sujet profond de ce roman, où l’on voit comment Pierre en vient à sac
3041
oût du malheur ? Le sujet profond de ce roman, où
l’
on voit comment Pierre en vient à sacrifier Diane, son apaisement, pou
3042
sement, pour Arthur, sa « maladie », c’est encore
l’
« élan mortel » que décrivait Mon Corps et Moi. Quand l’analyse féroce
3043
an mortel » que décrivait Mon Corps et Moi. Quand
l’
analyse féroce de Crevel fouille les pensées de Pierre ou de Diane, le
3044
et Moi. Quand l’analyse féroce de Crevel fouille
les
pensées de Pierre ou de Diane, les gestes d’Arthur, le roman vit et n
3045
Crevel fouille les pensées de Pierre ou de Diane,
les
gestes d’Arthur, le roman vit et nous touche par la force de ce tourm
3046
nsées de Pierre ou de Diane, les gestes d’Arthur,
le
roman vit et nous touche par la force de ce tourment ou de ce sauvage
3047
gestes d’Arthur, le roman vit et nous touche par
la
force de ce tourment ou de ce sauvage égoïsme ; mais qu’elle s’acharn
3048
e ce sauvage égoïsme ; mais qu’elle s’acharne sur
le
détail dégoûtant et mesquin de certain milieu bourgeois, et l’on voit
3049
oûtant et mesquin de certain milieu bourgeois, et
l’
on voit bien que l’auteur n’est pas encore détaché de la matière pour
3050
e certain milieu bourgeois, et l’on voit bien que
l’
auteur n’est pas encore détaché de la matière pour en tirer une œuvre
3051
oit bien que l’auteur n’est pas encore détaché de
la
matière pour en tirer une œuvre d’art. La sincérité audacieuse mais s
3052
aché de la matière pour en tirer une œuvre d’art.
La
sincérité audacieuse mais sans bravade qui donne à ce livre sa valeur
3053
trahissent une écriture hâtive. Mais il y a dans
l’
œuvre de René Crevel un sens de la douleur et un sérieux humain qui fo
3054
ais il y a dans l’œuvre de René Crevel un sens de
la
douleur et un sérieux humain qui forcent la sympathie. ai. « René C
3055
ns de la douleur et un sérieux humain qui forcent
la
sympathie. ai. « René Crevel : La Mort difficile (S. Kra, Paris) »,
3056
n qui forcent la sympathie. ai. « René Crevel :
La
Mort difficile (S. Kra, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue d
3057
Paul Éluard, Capitale de
la
douleur (mai 1927)aj Nocturnes aux caresses coupantes comme certai
3058
ses coupantes comme certaines herbes. Capitale de
la
douleurak, ce sont de belles syllabes sereines, et dans cette ville,
3059
yllabes sereines, et dans cette ville, Éluard est
le
plus séduisant, le plus dangereusement gracieux des noctambules. Rêve
3060
t dans cette ville, Éluard est le plus séduisant,
le
plus dangereusement gracieux des noctambules. Rêves éveillés, entre d
3061
lixir dont il voudrait bien nous faire croire que
le
diable est l’auteur. Beaucoup d’oiseaux volètent, se balancent au bor
3062
voudrait bien nous faire croire que le diable est
l’
auteur. Beaucoup d’oiseaux volètent, se balancent au bord des verres,
3063
t, se balancent au bord des verres, se posent sur
les
cordes d’une lyre dont ils font grésiller l’accord, une patte en l’ai
3064
sur les cordes d’une lyre dont ils font grésiller
l’
accord, une patte en l’air, becquètent le cœur d’une femme qui va les
3065
re dont ils font grésiller l’accord, une patte en
l’
air, becquètent le cœur d’une femme qui va les étrangler doucement. Ce
3066
résiller l’accord, une patte en l’air, becquètent
le
cœur d’une femme qui va les étrangler doucement. Ces vers sont de jol
3067
e en l’air, becquètent le cœur d’une femme qui va
les
étrangler doucement. Ces vers sont de jolies flèches empoisonnées. Qu
3068
e, de laqué, d’élégant, de « bien français » ; et
le
mot sang n’évoque ici qu’une tache de couleur, plus sentimental que c
3069
he de couleur, plus sentimental que cruel. « J’ai
la
beauté facile et c’est heureux. » Il y a aussi un certain tragique, m
3070
compréhensible. aj. « Paul Éluard : Capitale de
la
douleur (NRF) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève,
3071
Genève, mai 1927, p. 693-694. ak. En romain dans
l’
édition originale.
3072
Pierre Drieu la Rochelle,
La
Suite dans les idées (mai 1927)al « De quoi s’agit-il ? de détruir
3073
Pierre Drieu la Rochelle, La Suite dans
les
idées (mai 1927)al « De quoi s’agit-il ? de détruire ou de rafisto
3074
Drieu s’examine. Encore un ? Non, enfin un. Tous
les
autres y ont apporté de secrètes complaisances, ou une arrière-pensée
3075
esoin d’être aimés qui faussaient leurs voix pour
les
rendre plus touchantes. Celui-ci bat sa coulpe avec une saine rudesse
3076
té corrompu et infect et adonné à mal » (Calvin).
Le
tableau n’est pas beau, mais on y sent une « patte » qui révèle encor
3077
is on y sent une « patte » qui révèle encore dans
le
fond quelque chose de solide, d’authentique. J’aime cette violence de
3078
redressement où je distingue bien autre chose que
les
« éclats de l’impuissance ». Un plus délicat eut compris que certains
3079
je distingue bien autre chose que les « éclats de
l’
impuissance ». Un plus délicat eut compris que certains des morceaux t
3080
fection, s’il ne peut encore s’en tirer, du moins
l’
avoue-t-il avec une franchise qui la rend sympathique. Et puis, tout d
3081
rer, du moins l’avoue-t-il avec une franchise qui
la
rend sympathique. Et puis, tout de même, on est bien heureux de renco
3082
t de même, on est bien heureux de rencontrer chez
les
jeunes écrivains français un homme qui ait à ce point le sens de l’ép
3083
es écrivains français un homme qui ait à ce point
le
sens de l’époque, une vision si claire et si tragique de la civilisat
3084
s français un homme qui ait à ce point le sens de
l’
époque, une vision si claire et si tragique de la civilisation d’Occid
3085
l’époque, une vision si claire et si tragique de
la
civilisation d’Occident. Les questions capitales posées ailleurs depu
3086
ire et si tragique de la civilisation d’Occident.
Les
questions capitales posées ailleurs depuis longtemps par des maîtres
3087
ir échappé au surréalisme en tant qu’il n’est que
le
triomphe de la littérature sur la vie, mais d’avoir su en garder une
3088
urréalisme en tant qu’il n’est que le triomphe de
la
littérature sur la vie, mais d’avoir su en garder une passion pour la
3089
qu’il n’est que le triomphe de la littérature sur
la
vie, mais d’avoir su en garder une passion pour la pureté, un « jusqu
3090
a vie, mais d’avoir su en garder une passion pour
la
pureté, un « jusqu’au boutisine » qui seul peut redonner quelque vita
3091
ourd’hui, presque sans pose, et décidé à mépriser
le
bluff. al. « Pierre Drieu la Rochelle : La Suite dans les idées (Au
3092
iser le bluff. al. « Pierre Drieu la Rochelle :
La
Suite dans les idées (Au Sans Pareil) », Bibliothèque universelle et
3093
al. « Pierre Drieu la Rochelle : La Suite dans
les
idées (Au Sans Pareil) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève
3094
mmerce, qu’on m’a appris à voler. Aristophane («
Les
Chevaliers »). Dès qu’on eut déposé devant Isidore un malaga et une
3095
inérale devant son étrange convive, celui-ci prit
la
parole sans plus de cérémonie : « La jeunesse, Monsieur…, la jeunesse
3096
elui-ci prit la parole sans plus de cérémonie : «
La
jeunesse, Monsieur…, la jeunesse est l’âge où l’on atteint la vie. On
3097
ans plus de cérémonie : « La jeunesse, Monsieur…,
la
jeunesse est l’âge où l’on atteint la vie. On s’y maintient cinq ans,
3098
monie : « La jeunesse, Monsieur…, la jeunesse est
l’
âge où l’on atteint la vie. On s’y maintient cinq ans, dix ans au plus
3099
La jeunesse, Monsieur…, la jeunesse est l’âge où
l’
on atteint la vie. On s’y maintient cinq ans, dix ans au plus. Après,
3100
Monsieur…, la jeunesse est l’âge où l’on atteint
la
vie. On s’y maintient cinq ans, dix ans au plus. Après, c’est un long
3101
s, dix ans au plus. Après, c’est un long adieu et
le
corps se fige à mesure que l’esprit s’établit sur ses positions. Or d
3102
st un long adieu et le corps se fige à mesure que
l’
esprit s’établit sur ses positions. Or donc, j’avais vingt ans. Je viv
3103
diverti. J’étais bon, Monsieur, normalement bon.
L’
idée, par exemple, d’étrangler un chat pour le plaisir me répugnait. J
3104
on. L’idée, par exemple, d’étrangler un chat pour
le
plaisir me répugnait. Je détestais de peiner quelque être, même ennem
3105
iner quelque être, même ennemi, — car celui-là je
le
méprisais trop sincèrement. » Vers cette époque, une femme me regarda
3106
ment. » Mes parents me savaient vierge et c’était
la
joie de leur vie, car ils aimaient en moi par-dessus tout la vertu qu
3107
leur vie, car ils aimaient en moi par-dessus tout
la
vertu que je leur devais. Pourtant, je ne détournai pas mes yeux des
3108
frît à cause de moi. Un soir qu’elle pleurait, je
l’
embrassai si fort… En un quart d’heure, je connaissais l’amour dans ce
3109
ssai si fort… En un quart d’heure, je connaissais
l’
amour dans ce qu’il a de plus étrangement prosaïque à la fois et bêtem
3110
angement prosaïque à la fois et bêtement heureux.
Le
lendemain était le premier jour du printemps. Les rues riaient. Le ci
3111
Le lendemain était le premier jour du printemps.
Les
rues riaient. Le ciel descendait dans la ville, on marchait dans le b
3112
t le premier jour du printemps. Les rues riaient.
Le
ciel descendait dans la ville, on marchait dans le bleu. Je sortis av
3113
ntemps. Les rues riaient. Le ciel descendait dans
la
ville, on marchait dans le bleu. Je sortis avec cette femme, qui m’ai
3114
e ciel descendait dans la ville, on marchait dans
le
bleu. Je sortis avec cette femme, qui m’aimait, et nous étions très j
3115
tions très jolis de bonheur et d’insouciance dans
le
bonheur de la saison. — Au soir, mon père savait tout. Il effleura mo
3116
is de bonheur et d’insouciance dans le bonheur de
la
saison. — Au soir, mon père savait tout. Il effleura mon front de ses
3117
èvres sans une parole quand je vins lui souhaiter
le
bonsoir. Le lendemain, ses cheveux avaient légèrement blanchi. Il me
3118
ne parole quand je vins lui souhaiter le bonsoir.
Le
lendemain, ses cheveux avaient légèrement blanchi. Il me regardait av
3119
un sourire de mon amie quand il voulut m’adresser
la
parole après un silence vertigineux. Il vit mon sourire et pleura. Al
3120
mon corps tout entier, je criai un juron, claquai
la
porte et courus dans ma chambre. Une demi-heure plus tard, j’étais à
3121
s ma chambre. Une demi-heure plus tard, j’étais à
la
gare, j’écrivais un mot d’adieu à ma maîtresse d’une nuit et je parta
3122
rection quelconque. Il advint que ce fut celle de
l’
Italie. La lumière, mon pays natal ! — Je vécus d’articles sur la mode
3123
elconque. Il advint que ce fut celle de l’Italie.
La
lumière, mon pays natal ! — Je vécus d’articles sur la mode et la pol
3124
mière, mon pays natal ! — Je vécus d’articles sur
la
mode et la politique, que j’envoyais à divers journaux. Un jour, parc
3125
pays natal ! — Je vécus d’articles sur la mode et
la
politique, que j’envoyais à divers journaux. Un jour, parcourant un q
3126
pier, je lus mon nom en grosses lettres : c’était
l’
annonce du décès de mon père. » J’étais assis à la terrasse ensoleillé
3127
l’annonce du décès de mon père. » J’étais assis à
la
terrasse ensoleillée d’un café ; une brise passa, et une femme en rob
3128
doucement… Je me levai sans payer, je partis par
les
rues, une joie violente commençait à m’envahir, contre laquelle je lu
3129
chaque tour du tambour des bouffées de musique. »
La
femme en bleu dansait en regardant au plafond. Après deux tangos, nou
3130
ous montions ensemble dans une chambre d’hôtel où
l’
on ne voyait d’abord qu’un bouquet transfiguré par la lumière et que r
3131
n ne voyait d’abord qu’un bouquet transfiguré par
la
lumière et que reflétaient de nombreuses glaces. Les fenêtres que j’o
3132
lumière et que reflétaient de nombreuses glaces.
Les
fenêtres que j’ouvris firent tourner des soleils sur les parois clair
3133
êtres que j’ouvris firent tourner des soleils sur
les
parois claires. Du balcon, on voyait la mer, des bateaux, des nuages,
3134
eils sur les parois claires. Du balcon, on voyait
la
mer, des bateaux, des nuages, une avenue et ses autos rouges, tout un
3135
s autos rouges, tout un couchant de grand port de
la
Méditerranée. Nous nous aimâmes en sifflotant encore par instants l’a
3136
us nous aimâmes en sifflotant encore par instants
l’
air de la dernière danse, mais nous avions aussi envie de pleurer, à c
3137
thousiasme juvénile, c’est-à-dire cynique, toutes
les
offres du hasard, ce poète immoral et malicieux. » Je ne sais dans qu
3138
al et malicieux. » Je ne sais dans quel rapide de
l’
Europe centrale — région où l’on est forcé de prendre conscience de so
3139
dans quel rapide de l’Europe centrale — région où
l’
on est forcé de prendre conscience de soi-même — je découvris une nuit
3140
t en moi reniait obscurément. Je sentais bien que
le
ressort secret de la vertu dans laquelle on m’avait emprisonné c’étai
3141
urément. Je sentais bien que le ressort secret de
la
vertu dans laquelle on m’avait emprisonné c’était un bas opportunisme
3142
ocial, résultante des paresses accumulées de tous
les
cerveaux bourgeois incapables de concevoir un monde sans vieilles fil
3143
ns gendarmes. Je sais bien ce que vous me direz :
Les
millions que je pourrais leur soustraire ne compenseront jamais cette
3144
eront jamais cette escroquerie morale dont je fus
la
victime, ce vol de quelques joies parfaites de ma jeunesse… Mais il e
3145
… Mais il est trop tard, Monsieur, pour critiquer
les
modalités de ma vengeance. Veuillez ne voir dans la confusion où je p
3146
modalités de ma vengeance. Veuillez ne voir dans
la
confusion où je parais être engagé, du plan moral avec l’économique,
3147
sion où je parais être engagé, du plan moral avec
l’
économique, qu’une expression nouvelle, et non dénuée d’ironie, de mon
3148
on mépris pour ce qu’ils appellent, ridiculement,
les
fondements mêmes de la société. » C’est avec le produit du vol d’un t
3149
appellent, ridiculement, les fondements mêmes de
la
société. » C’est avec le produit du vol d’un tronc de chapelle que j’
3150
les fondements mêmes de la société. » C’est avec
le
produit du vol d’un tronc de chapelle que j’édifiai à mes parents un
3151
au sur lequel je fis graver : Prêté — rendu, pour
la
gloire de l’Église. (Ici, il but une gorgée et prit un temps.) » Je v
3152
je fis graver : Prêté — rendu, pour la gloire de
l’
Église. (Ici, il but une gorgée et prit un temps.) » Je vous fais grâc
3153
n temps.) » Je vous fais grâce, poursuivit-il, de
la
chronique de ma vie de rat d’hôtel et de sleepings ; encore que… Bref
3154
e… Bref, depuis quelques mois, je m’amuse à jouer
le
pickpocket. Cela permet, avec un minimum d’adresse, de découvrir cert
3155
s auparavant, et pas toujours défavorable, croyez-
le
bien… Le goût de la propriété étant à mon sens l’un des plus vulgaire
3156
ant, et pas toujours défavorable, croyez-le bien…
Le
goût de la propriété étant à mon sens l’un des plus vulgaires et des
3157
toujours défavorable, croyez-le bien… Le goût de
la
propriété étant à mon sens l’un des plus vulgaires et des plus généra
3158
ndus, j’ai vite fait de classer mon monde d’après
les
quelques réactions élémentaires qui ne manquent jamais de succéder au
3159
au moindre vol. » J’ajouterai, cher Monsieur, que
l’
analyse psychologique n’est pas mon fort. Je me contente de quelques o
3160
oriques que je tiens pour vraies, et j’en vérifie
les
manifestations vivantes avec une prodigalité d’épreuves, contre-épreu
3161
tre-épreuves, variantes et enjolivures où je vois
le
véritable intérêt de ma vie. C’est vous dire que seule une certaine c
3162
C’est vous dire que seule une certaine caresse de
l’
événement naissant peut encore m’émouvoir. C’est un plaisir de chaque
3163
sir de chaque minute auquel succède immédiatement
le
sommeil. Je rêve beaucoup. Cela explique, m’a-t-on dit, le peu de goû
3164
l. Je rêve beaucoup. Cela explique, m’a-t-on dit,
le
peu de goût que j’ai pour la poésie imprimée. » J’allais oublier de v
3165
lique, m’a-t-on dit, le peu de goût que j’ai pour
la
poésie imprimée. » J’allais oublier de vous dire qu’on me nomme Saint
3166
n me nomme Saint-Julien. Vous n’ignorez point que
l’
on considère ce saint comme le patron des voyageurs… » Saint-Julien pa
3167
n’ignorez point que l’on considère ce saint comme
le
patron des voyageurs… » Saint-Julien parut satisfait de cette dernièr
3168
gorgées d’eau minérale. Isidore sentit alors que
la
bienséance l’obligeait à émettre une opinion, même la plus générale e
3169
minérale. Isidore sentit alors que la bienséance
l’
obligeait à émettre une opinion, même la plus générale et la moins com
3170
ienséance l’obligeait à émettre une opinion, même
la
plus générale et la moins compromettante, sur cette vie dont le récit
3171
t à émettre une opinion, même la plus générale et
la
moins compromettante, sur cette vie dont le récit n’avait pas laissé
3172
le et la moins compromettante, sur cette vie dont
le
récit n’avait pas laissé que de l’agacer en maint endroit. « Une chos
3173
cette vie dont le récit n’avait pas laissé que de
l’
agacer en maint endroit. « Une chose avant tout me frappe — dit-il, lâ
3174
iments, ce qui est de mauvaise politique, — c’est
l’
extraordinaire netteté de votre vie. Elle est sans bavures, sans rétic
3175
herche ce qu’on est convenu d’appeler — pardonnez
la
lourdeur de l’expression — une règle de vie. Mais, je vous l’avouerai
3176
est convenu d’appeler — pardonnez la lourdeur de
l’
expression — une règle de vie. Mais, je vous l’avouerai, ce qui me ret
3177
de l’expression — une règle de vie. Mais, je vous
l’
avouerai, ce qui me retient de tirer de votre conduite les conclusions
3178
rai, ce qui me retient de tirer de votre conduite
les
conclusions morales qu’elle paraît impliquer, c’est ce caractère de,
3179
conscience ! qui s’attache à vos faits et gestes.
L’
on croirait ouïr parfois le récit de quelqu’une de ces farces d’étudia
3180
à vos faits et gestes. L’on croirait ouïr parfois
le
récit de quelqu’une de ces farces d’étudiants qui ne sont que la trad
3181
lqu’une de ces farces d’étudiants qui ne sont que
la
traduction en actes de jeux de mots plus ou moins cruels… » — Je vous
3182
rrompit Saint-Julien, par pitié pour Isidore dont
la
sincérité tournait vite à l’agressif — effet d’une timidité naturelle
3183
ié pour Isidore dont la sincérité tournait vite à
l’
agressif — effet d’une timidité naturelle dont il paraissait lui-même
3184
né. En deux mots, vous ne me trouvez pas sérieux.
Le
reproche est grave. Je ne saurais y répondre. Je pourrais vous dire q
3185
ez un peu potache, il n’est pas prouvé par là que
le
potache n’ait point raison. Mais justement je n’éprouve aucun désir d
3186
conque est aussi profondément persuadé que moi de
l’
absurdité radicale de notre vie, la moindre farce, le moindre geste co
3187
adé que moi de l’absurdité radicale de notre vie,
la
moindre farce, le moindre geste convenu dans le genre « révolté » pre
3188
bsurdité radicale de notre vie, la moindre farce,
le
moindre geste convenu dans le genre « révolté » prend une saveur de r
3189
, la moindre farce, le moindre geste convenu dans
le
genre « révolté » prend une saveur de raillerie assez amère. Et peut-
3190
découvrir derrière certaines de mes plaisanteries
la
dérision secrète qu’elles masquent par caprice. .....................
3191
, p. 180-185. Une note de bas de page indique : «
La
rédaction rappelle que les idées émises dans la Revue de Belles-Lettr
3192
bas de page indique : « La rédaction rappelle que
les
idées émises dans la Revue de Belles-Lettres sont propres à leur aute
3193
« La rédaction rappelle que les idées émises dans
la
Revue de Belles-Lettres sont propres à leur auteur et qu’elles n’enga
3194
Conseils à
la
jeunesse (mai 1927)n « On a reproché bien des choses aux romantiqu
3195
« On a reproché bien des choses aux romantiques :
le
goût du suicide, l’habitude de boire et de fumer excessivement, leurs
3196
des choses aux romantiques : le goût du suicide,
l’
habitude de boire et de fumer excessivement, leurs amours, l’égoïsme,
3197
de boire et de fumer excessivement, leurs amours,
l’
égoïsme, le mépris de la réalité, l’exaltation maladive de l’imaginati
3198
de fumer excessivement, leurs amours, l’égoïsme,
le
mépris de la réalité, l’exaltation maladive de l’imagination et de la
3199
essivement, leurs amours, l’égoïsme, le mépris de
la
réalité, l’exaltation maladive de l’imagination et de la sensibilité,
3200
leurs amours, l’égoïsme, le mépris de la réalité,
l’
exaltation maladive de l’imagination et de la sensibilité, l’atrophie
3201
le mépris de la réalité, l’exaltation maladive de
l’
imagination et de la sensibilité, l’atrophie du sens critique sous tou
3202
ité, l’exaltation maladive de l’imagination et de
la
sensibilité, l’atrophie du sens critique sous toutes ses formes : rai
3203
n maladive de l’imagination et de la sensibilité,
l’
atrophie du sens critique sous toutes ses formes : raison, jugement, s
3204
es formes : raison, jugement, simple bon sens, et
l’
ignorance systématique, le mépris enfin de tous les principes qui sont
3205
nt, simple bon sens, et l’ignorance systématique,
le
mépris enfin de tous les principes qui sont à la base de la société m
3206
l’ignorance systématique, le mépris enfin de tous
les
principes qui sont à la base de la société même. » Ceci est tiré d’
3207
le mépris enfin de tous les principes qui sont à
la
base de la société même. » Ceci est tiré d’un livre récent sur Aloy
3208
enfin de tous les principes qui sont à la base de
la
société même. » Ceci est tiré d’un livre récent sur Aloysius Bertra
3209
proches s’adressent, ou bien plutôt — vous alliez
le
dire — aux surréalistes ? Si le mal du siècle consistait véritablem
3210
t — vous alliez le dire — aux surréalistes ? Si
le
mal du siècle consistait véritablement dans ces quelques effets, nous
3211
ans un petit article du Journal de Genève sur «
La
maladie du siècle », écrit : « Plante des pommes de terre, jeune homm
3212
de terre, jeune homme ! Quand tu seras au bout de
la
20e ligne de 200 mètres, ce qui représente quatre kilomètres de plant
3213
e qui représente quatre kilomètres de plantation,
le
siècle ne sera plus malade, les temps seront guéris de leur crise, le
3214
res de plantation, le siècle ne sera plus malade,
les
temps seront guéris de leur crise, les valeurs auront retrouvé leur s
3215
us malade, les temps seront guéris de leur crise,
les
valeurs auront retrouvé leur stabilité, et comme M. Albert Muret dont
3216
uvé leur stabilité, et comme M. Albert Muret dont
le
Journal de Genève parlait naguère, tu mangeras avec appétit une pou
3217
ent chez des jeunes « et qui pensent » ce goût de
l’
évasion caractéristique de tous les « vices romantiques ». — Citez-m’e
3218
nt » ce goût de l’évasion caractéristique de tous
les
« vices romantiques ». — Citez-m’en de ces phénomènes ! — Mon Dieu, q
3219
Il y aurait, par exemple, ce fait du triomphe de
la
Machine ; ce fait de la révolution russe… cet autre fait de la guerre
3220
e, ce fait du triomphe de la Machine ; ce fait de
la
révolution russe… cet autre fait de la guerre… et puis, tenez ! ce fa
3221
ce fait de la révolution russe… cet autre fait de
la
guerre… et puis, tenez ! ce fait surtout de la sacro-sainte Raison ut
3222
de la guerre… et puis, tenez ! ce fait surtout de
la
sacro-sainte Raison utilitaire au service des sacro-saints Principes
3223
desquels tout se ligue aujourd’hui pour anéantir
la
seule chose qui reste à nos yeux sacro-sainte : la liberté. Alors n’e
3224
a seule chose qui reste à nos yeux sacro-sainte :
la
liberté. Alors n’est-ce pas, merci du conseil, Monsieur Y. Z., de ce
3225
ches pour enseigner cette méthode à leurs petits.
Le
« satisfait » est un être inadmissible aujourd’hui. À plus forte rais
3226
re inadmissible aujourd’hui. À plus forte raison,
le
satisfait artificiel. n. « Conseils à la jeunesse », Revue de Belle
3227
aison, le satisfait artificiel. n. « Conseils à
la
jeunesse », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribou
3228
Pierre Girard, Connaissez mieux
le
cœur des femmes (juillet 1927)am Quand vous avez fermé ce petit li
3229
fermé ce petit livre, vous partez en chantonnant
le
titre sur un air sentimental, bien décidé au fond, à retrouver Patsy,
3230
timental, bien décidé au fond, à retrouver Patsy,
l’
Irlandaise perdue par cet improbable et sympathique Paterne. Sous le f
3231
e par cet improbable et sympathique Paterne. Sous
le
fallacieux prétexte d’une flânerie de saison, vous vous attardez aux
3232
Justement, voici Pierre Girard : lui seul connaît
l’
adresse de Patsy, mais il ne veut pas vous la donner. Alors pour vous
3233
naît l’adresse de Patsy, mais il ne veut pas vous
la
donner. Alors pour vous venger, vous lui dites que, « d’abord », son
3234
re n’est pas sérieux. Il sourit. Vous ajoutez que
le
lyrisme des noms géographiques vous fatigue ; que c’est une vraie man
3235
lobe dans son voyage « est arrivé à un endroit de
l’
éther où il y a du bonheur ». Vous reconnaissez que Pierre Girard est
3236
son aisance. Vous accordez que s’il force un peu
la
dose de fantaisie, c’est plutôt par excès de facilité que par recherc
3237
ilité que par recherche. Vous voilà même tenté de
l’
en féliciter. Bien plus, vous découvrez dans ses fantoches une malicie
3238
nous seraient épargnés si nous ne regardions que
les
jambes des femmes », dit-il, pour vous apprendre ! — sans se douter q
3239
un devoir de ce plaisir. Un devoir !… Car hélas,
l’
on n’est pas impunément concitoyen de cet oncle Abraham qui interdit à
3240
Abraham qui interdit à Paterne son neveu de fumer
le
matin, de sortir la nuit, et qui lui fait jurer sur la Bible de ne pa
3241
à Paterne son neveu de fumer le matin, de sortir
la
nuit, et qui lui fait jurer sur la Bible de ne pas entrer dans les ca
3242
tin, de sortir la nuit, et qui lui fait jurer sur
la
Bible de ne pas entrer dans les cafés. Et puis, c’est égal, ce soir,
3243
lui fait jurer sur la Bible de ne pas entrer dans
les
cafés. Et puis, c’est égal, ce soir, tout cela est sans importance, c
3244
soir, tout cela est sans importance, car voici «
l’
heure des petits arbres pourpres, l’heure où dans les bibliothèques dé
3245
, car voici « l’heure des petits arbres pourpres,
l’
heure où dans les bibliothèques désertes glisse un grand souffle obliq
3246
heure des petits arbres pourpres, l’heure où dans
les
bibliothèques désertes glisse un grand souffle oblique plein de fraîc
3247
ardon. » am. « Pierre Girard : Connaissez mieux
le
cœur des femmes (Simon Kra, Paris) », Bibliothèque universelle et Rev
3248
La
part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature (juillet 1927)o
3249
La part du feu. Lettres sur
le
mépris de la littérature (juillet 1927)o I Parler littérature
3250
La part du feu. Lettres sur le mépris de
la
littérature (juillet 1927)o I Parler littérature Si je pronon
3251
927)o I Parler littérature Si je prononce
le
nom de tel de vos confrères, si je dis : « Avez-vous lu… », vous voil
3252
« Avez-vous lu… », vous voilà rouge ; et sur moi
les
foudres de votre paradis poétique. Si je cite tel auteur dont nous fî
3253
mes notre nourriture une saison de naguère, voilà
le
rictus de votre bouche, une injure de pythie. Vous dites de ce conte
3254
n goût qu’on aurait pour Nietzsche : que c’est de
la
littérature. Alors, quelque paysan du Danube survenant : — Je vous cr
3255
écrivain ? — Hélas ! soupirez-vous. Mais j’ai tué
la
littérature en moi, n’en parlez plus, j’en sors, je l’abandonne… Mais
3256
ttérature en moi, n’en parlez plus, j’en sors, je
l’
abandonne… Mais notre paysan, rusé : — Vous l’abandonnez ? Pour quoi ?
3257
je l’abandonne… Mais notre paysan, rusé : — Vous
l’
abandonnez ? Pour quoi ? — Pour la vie ! Or je pense, à part moi : j’a
3258
, rusé : — Vous l’abandonnez ? Pour quoi ? — Pour
la
vie ! Or je pense, à part moi : j’ai lu ça quelque part. Voyez ma fra
3259
ennent soin que leurs sincérités gardent au moins
l’
excuse d’une audace qu’ils escomptent scandaleuse. Mais voici un bar o
3260
in de mépris pour Paul Morand par qui découvrîtes
le
charme de ces lieux. Vous composez un cocktail en guise de métaphore,
3261
jour au Grand Écart… », dit quelqu’un. À ce coup,
l’
évocation de Cocteau fait fleurir sur vos lèvres le mot de Cambronne :
3262
’évocation de Cocteau fait fleurir sur vos lèvres
le
mot de Cambronne : hommage à Louis Aragon. Ce cristal est une citatio
3263
Et des phrases, des cris, des mots. Au défaut de
l’
ivresse naissante se glisse un poème où vous aimiez à la folie votre d
3264
sse naissante se glisse un poème où vous aimiez à
la
folie votre douleur. Narcisse se contemple au miroir de son monocle.
3265
il se noie dans un verre à liqueur. Poisson dans
l’
eau, plumes dans le vent, poète au bar, le paradis n’est pas si cher.
3266
verre à liqueur. Poisson dans l’eau, plumes dans
le
vent, poète au bar, le paradis n’est pas si cher. Il y en a aussi qui
3267
on dans l’eau, plumes dans le vent, poète au bar,
le
paradis n’est pas si cher. Il y en a aussi qui posent pour le diable
3268
’est pas si cher. Il y en a aussi qui posent pour
le
diable et ne se baignent que dans des bénitiers : on voit trop qu’ils
3269
: on voit trop qu’ils trouvent ça pittoresque. Et
le
plaisir d’être nu devant un public supposé dévot, et qui n’ose en cro
3270
n’ose en croire sa pudeur, et qui doute enfin de
l’
impossibilité des miracles ! Quelles voluptés plus subtiles et plus ai
3271
e bois pour en faire des poèmes. Alors je cherche
les
raisons de votre indignation, quand il m’échappe une citation. Seraie
3272
ion, quand il m’échappe une citation. Seraient-ce
les
guillemets qui vous choquent ? La vie ! — proclamiez-vous… Soit. Ma
3273
Seraient-ce les guillemets qui vous choquent ?
La
vie ! — proclamiez-vous… Soit. Mais maintenant je vais me fâcher chaq
3274
« hallucinant » ou « purement gratuit ». C’est de
la
littérature. À force d’avoir mérité ces épithètes, pour nous laudati
3275
nous laudatives, vous vous étonnez aujourd’hui de
la
simplicité. Littérateur, va ! qui ne pouvez pas même admettre que la
3276
érateur, va ! qui ne pouvez pas même admettre que
la
simplicité est simple simplement. La bouche brûlée d’alcools, vous dé
3277
admettre que la simplicité est simple simplement.
La
bouche brûlée d’alcools, vous découvrez à l’eau un goût étrange. L’ea
3278
ent. La bouche brûlée d’alcools, vous découvrez à
l’
eau un goût étrange. L’eau est incolore, inodore et sans saveur. Mais
3279
’alcools, vous découvrez à l’eau un goût étrange.
L’
eau est incolore, inodore et sans saveur. Mais fraîche. Ainsi, jusque
3280
ais fraîche. Ainsi, jusque dans votre mépris pour
le
pittoresque, vous témoignez d’un goût du bizarre qui révèle le littér
3281
e, vous témoignez d’un goût du bizarre qui révèle
le
littérateur. Nous ne pouvons pas faire que nous n’ayons rien lu. Vous
3282
lu. Vous refusez de compter avec cette réalité de
la
littérature qui est en nous (dangereuse tant que vous voudrez). Mais
3283
une ingratitude salutaire, c’est refus de limiter
le
mal. Je vous vois envahi par des démons que vous prétendez m’interdir
3284
ensées des autres, je vous ai mis un collier avec
le
nom du propriétaire ; tirez un peu sur la laisse, que j’éprouve la fe
3285
er avec le nom du propriétaire ; tirez un peu sur
la
laisse, que j’éprouve la fermeté de ma main. Je vous tiens. Je sais o
3286
taire ; tirez un peu sur la laisse, que j’éprouve
la
fermeté de ma main. Je vous tiens. Je sais où vous êtes. Vous n’allez
3287
n vante, — j’ai tué un amour naissant, à force de
le
crier sur les toits. Ainsi, parler littérature, c’est faire la part d
3288
ai tué un amour naissant, à force de le crier sur
les
toits. Ainsi, parler littérature, c’est faire la part du feu. Je dis
3289
les toits. Ainsi, parler littérature, c’est faire
la
part du feu. Je dis ces noms, ces opinions, ces titres de livres : to
3290
choque, s’annule. Poussière. Ma vie est ailleurs.
L’
addition, s’il vous plaît. Il est temps de sortir de ce café et de ces
3291
afé et de ces jeux, simulacres de vie, qui sont à
la
vraie vie ce que le flirt est à l’amour. II Sur l’insuffisance de
3292
simulacres de vie, qui sont à la vraie vie ce que
le
flirt est à l’amour. II Sur l’insuffisance de la littérature On
3293
ie, qui sont à la vraie vie ce que le flirt est à
l’
amour. II Sur l’insuffisance de la littérature On reconnaît un é
3294
raie vie ce que le flirt est à l’amour. II Sur
l’
insuffisance de la littérature On reconnaît un écrivain, aujourd’hu
3295
flirt est à l’amour. II Sur l’insuffisance de
la
littérature On reconnaît un écrivain, aujourd’hui, à ce qu’il ne t
3296
e sournoises déclarations d’amour. Tel qui raille
l’
Église et les curés, c’est qu’il se fait une très haute idée de la rel
3297
déclarations d’amour. Tel qui raille l’Église et
les
curés, c’est qu’il se fait une très haute idée de la religion. Ainsi,
3298
curés, c’est qu’il se fait une très haute idée de
la
religion. Ainsi, de la littérature : votre mépris pour ses réalisatio
3299
ait une très haute idée de la religion. Ainsi, de
la
littérature : votre mépris pour ses réalisations actuelles donne la m
3300
otre mépris pour ses réalisations actuelles donne
la
mesure de ce que vous attendez d’elle. Pour dire le fond de ma pensée
3301
mesure de ce que vous attendez d’elle. Pour dire
le
fond de ma pensée, je crois ce mépris et cette attente également exag
3302
ous savez bien que nous cherchons autre chose que
la
littérature. Que la littérature nous est un moyen seulement d’atteind
3303
ous cherchons autre chose que la littérature. Que
la
littérature nous est un moyen seulement d’atteindre et de préparer d’
3304
. Des choses dures, amères comme un destin, comme
le
goût d’une pierre rêche sur ta langue et grinçante sous ta dent. Des
3305
intenses que tout se fond catastrophiquement dans
l’
infini de la seconde. Des peurs sans cause, plus vides que la mort. To
3306
la seconde. Des peurs sans cause, plus vides que
la
mort. Toutes ces choses mystiques, c’est-à-dire réelles, c’est-à-dire
3307
nous importe véritablement n’est dicible. (Depuis
le
temps qu’on sait que la lettre tue ce qu’elle prétend exprimer ; depu
3308
nt n’est dicible. (Depuis le temps qu’on sait que
la
lettre tue ce qu’elle prétend exprimer ; depuis le temps qu’on l’oubl
3309
a lettre tue ce qu’elle prétend exprimer ; depuis
le
temps qu’on l’oublie.) Vous me direz que la poésie, l’état poétique,
3310
qu’elle prétend exprimer ; depuis le temps qu’on
l’
oublie.) Vous me direz que la poésie, l’état poétique, est notre seul
3311
epuis le temps qu’on l’oublie.) Vous me direz que
la
poésie, l’état poétique, est notre seul moyen de connaissance concrèt
3312
mps qu’on l’oublie.) Vous me direz que la poésie,
l’
état poétique, est notre seul moyen de connaissance concrète du monde.
3313
oncrète du monde. Mais c’est à condition qu’on ne
l’
écrive pas, même en pensée. La poésie pure écrite est inconcevable : c
3314
condition qu’on ne l’écrive pas, même en pensée.
La
poésie pure écrite est inconcevable : cela consisterait dans l’expres
3315
écrite est inconcevable : cela consisterait dans
l’
expression directe de la réalité individuelle. Elle serait tellement i
3316
: cela consisterait dans l’expression directe de
la
réalité individuelle. Elle serait tellement incommunicable qu’il devi
3317
ement incommunicable qu’il deviendrait inutile de
la
publier. Et même, en passant à la limite, on peut imaginer que si ell
3318
rait inutile de la publier. Et même, en passant à
la
limite, on peut imaginer que si elle était réalisée, on ne s’en aperc
3319
ercevrait pas. Je pressens encore dans vos poèmes
les
plus obscurs des allusions furtives à certains états de la réalité. M
3320
bscurs des allusions furtives à certains états de
la
réalité. Mais plus les mots se plient à des exigences sémantiques — d
3321
urtives à certains états de la réalité. Mais plus
les
mots se plient à des exigences sémantiques — dont on connaît la porté
3322
ent à des exigences sémantiques — dont on connaît
la
portée sociale, — mariant l’utile à l’agréable selon les rites d’une
3323
es — dont on connaît la portée sociale, — mariant
l’
utile à l’agréable selon les rites d’une esthétique ou d’une autre, pl
3324
on connaît la portée sociale, — mariant l’utile à
l’
agréable selon les rites d’une esthétique ou d’une autre, plus ils per
3325
tée sociale, — mariant l’utile à l’agréable selon
les
rites d’une esthétique ou d’une autre, plus ils perdent leur pouvoir
3326
autre, plus ils perdent leur pouvoir de signifier
les
choses qui nous importent. Vous le savez. Alors vous les lâchez en li
3327
de signifier les choses qui nous importent. Vous
le
savez. Alors vous les lâchez en liberté, par haine de cette esthétiqu
3328
ses qui nous importent. Vous le savez. Alors vous
les
lâchez en liberté, par haine de cette esthétique ou de ce sens social
3329
de ce sens social, — et voilà qu’ils perdent même
la
problématique utilité de liaison qui était leur excuse dernière. Avou
3330
e liaison qui était leur excuse dernière. Avouons-
le
: rien de ce qu’on peut exprimer n’a d’importance véritable. Alors, c
3331
cessons de nous battre contre des moulins à vent.
La
littérature, considérée du point de vue de la psychologie de l’écriva
3332
nt. La littérature, considérée du point de vue de
la
psychologie de l’écrivain, est un besoin organique, un peu anormal, q
3333
, considérée du point de vue de la psychologie de
l’
écrivain, est un besoin organique, un peu anormal, que l’on satisfait
3334
ain, est un besoin organique, un peu anormal, que
l’
on satisfait dans certains états de crise afin de retrouver son équili
3335
rarement, de quoi se payer un petit voyage. C’est
l’
aveu d’une faiblesse secrète. Et c’est une réaction de défense. On che
3336
he un mot, une phrase, pour tuer une réalité dont
la
connaissance devient douloureuse et troublante. Ainsi la conscience t
3337
aissance devient douloureuse et troublante. Ainsi
la
conscience tue la connaissance. (« Connaissance » étant pris avec son
3338
ouloureuse et troublante. Ainsi la conscience tue
la
connaissance. (« Connaissance » étant pris avec son sens le plus prof
3339
sance. (« Connaissance » étant pris avec son sens
le
plus profond, qui est proche du sens biblique. Il ne s’agit pas de la
3340
est proche du sens biblique. Il ne s’agit pas de
la
connaissance abstraite et rationnelle dont le monde moderne se conten
3341
de la connaissance abstraite et rationnelle dont
le
monde moderne se contente, et qui tend à remplacer, grâce à la mental
3342
rne se contente, et qui tend à remplacer, grâce à
la
mentalité scolaire et primaire en particulier, toute connaissance vér
3343
ice ? Peut-être. Ou une maladie ? Ce n’est pas en
l’
ignorant par attitude que vous la guérirez. Au contraire, il s’agit de
3344
Ce n’est pas en l’ignorant par attitude que vous
la
guérirez. Au contraire, il s’agit de l’envisager sans fièvre, pour en
3345
que vous la guérirez. Au contraire, il s’agit de
l’
envisager sans fièvre, pour en circonscrire les effets. J’avoue prendr
3346
de l’envisager sans fièvre, pour en circonscrire
les
effets. J’avoue prendre à cette étude un intérêt bien vif. Et cela fo
3347
en n’est plus facile que d’y échapper. III Sur
l’
utilité de la littérature Montherlant me paraît être le moins « lit
3348
facile que d’y échapper. III Sur l’utilité de
la
littérature Montherlant me paraît être le moins « littératuré » de
3349
é de la littérature Montherlant me paraît être
le
moins « littératuré » des écrivains d’aujourd’hui. Quand il parle lit
3350
rd’hui. Quand il parle littérature, il a toujours
l’
air de mettre un peu les pieds dans le plat, de dire de ces choses qu’
3351
littérature, il a toujours l’air de mettre un peu
les
pieds dans le plat, de dire de ces choses qu’entre gens du métier l’o
3352
a toujours l’air de mettre un peu les pieds dans
le
plat, de dire de ces choses qu’entre gens du métier l’on a convenu de
3353
at, de dire de ces choses qu’entre gens du métier
l’
on a convenu de passer sous silence. C’est assez drôle de voir le mala
3354
de passer sous silence. C’est assez drôle de voir
le
malaise des chers confrères. Ils ne pardonnent pas à ce toréador ses
3355
une Muse qu’ils n’ont pas coutume d’aborder sans
le
mot de passe de la dernière mode ou de savantes séductions. On sait b
3356
tes séductions. On sait bien, d’ailleurs, qu’elle
les
entretient. Bande de gigolos de la littérature ! Qu’on puisse vivre d
3357
eurs, qu’elle les entretient. Bande de gigolos de
la
littérature ! Qu’on puisse vivre de ça, je ne l’ai pas encore avalé.
3358
la littérature ! Qu’on puisse vivre de ça, je ne
l’
ai pas encore avalé. On m’affirme que je n’y échapperai pas plus qu’un
3359
is, pour sûr, jamais vivre pour écrire16. De tous
les
prétextes que l’on a pu avancer pour légitimer l’activité littéraire,
3360
is vivre pour écrire16. De tous les prétextes que
l’
on a pu avancer pour légitimer l’activité littéraire, le plus satisfai
3361
es prétextes que l’on a pu avancer pour légitimer
l’
activité littéraire, le plus satisfaisant, celui qui rend le mieux com
3362
pu avancer pour légitimer l’activité littéraire,
le
plus satisfaisant, celui qui rend le mieux compte de la réalité, c’es
3363
littéraire, le plus satisfaisant, celui qui rend
le
mieux compte de la réalité, c’est André Breton qui l’a exprimé : « On
3364
s satisfaisant, celui qui rend le mieux compte de
la
réalité, c’est André Breton qui l’a exprimé : « On publie pour cherch
3365
ieux compte de la réalité, c’est André Breton qui
l’
a exprimé : « On publie pour chercher des hommes, et rien de plus. » C
3366
pas tant, n’est-ce pas, à poursuivre une quête de
l’
esprit. Et vous savez ce qu’elle nous vaut : les mépris, les haines do
3367
de l’esprit. Et vous savez ce qu’elle nous vaut :
les
mépris, les haines douloureuses ou grossières de tous ceux qui ne peu
3368
Et vous savez ce qu’elle nous vaut : les mépris,
les
haines douloureuses ou grossières de tous ceux qui ne peuvent ou ne v
3369
ous voyez bien que votre attitude méprisante pour
la
littérature vous ferait bientôt renier le signe le plus certain par l
3370
te pour la littérature vous ferait bientôt renier
le
signe le plus certain par lequel ces « quelques-uns » peuvent encore
3371
a littérature vous ferait bientôt renier le signe
le
plus certain par lequel ces « quelques-uns » peuvent encore se reconn
3372
e elle n’aurait plus d’autre excuse que celle-là,
la
littérature mériterait d’exister : qu’elle soit le langage chiffré de
3373
a littérature mériterait d’exister : qu’elle soit
le
langage chiffré de notre inquiétude et de nos naissantes certitudes,
3374
notre inquiétude et de nos naissantes certitudes,
le
seul langage peut-être qui nous permette d’échanger les signaux de l’
3375
ul langage peut-être qui nous permette d’échanger
les
signaux de l’angoisse sur quoi se fondent, en ces temps, nos amitiés
3376
-être qui nous permette d’échanger les signaux de
l’
angoisse sur quoi se fondent, en ces temps, nos amitiés miraculeuses.
3377
ces temps, nos amitiés miraculeuses. Voici donc
les
seules révélations que j’attende de la littérature : que celle des au
3378
oici donc les seules révélations que j’attende de
la
littérature : que celle des autres m’aide à prendre conscience de moi
3379
e la mienne m’aide à découvrir quelques êtres par
le
monde… Il ne s’agit plus de mépris ni d’adoration. J’ai défini une «
3380
ont je parviens à tirer quelque bien pour ma vie.
Le
jour où les soins qu’elle exige me coûteront des sacrifices plus gran
3381
iens à tirer quelque bien pour ma vie. Le jour où
les
soins qu’elle exige me coûteront des sacrifices plus grands que les b
3382
exige me coûteront des sacrifices plus grands que
les
bienfaits que j’en escompte, il sera temps de songer sérieusement à m
3383
. 14. Paul Morand, auteur d’Ouvert et de Fermé
la
nuit, titres également scandaleux. Le Grand Écart, roman de M. Coctea
3384
et de Fermé la nuit, titres également scandaleux.
Le
Grand Écart, roman de M. Cocteau, a donné son nom à un établissement
3385
e lettres et poètes surréalistes. Paul Valéry, de
l’
Académie française. Narcisse, personnage mythologique. — Là ! [NdE] Le
3386
. Narcisse, personnage mythologique. — Là ! [NdE]
Le
texte publié place également un appel de note plus bas dans le paragr
3387
ié place également un appel de note plus bas dans
le
paragraphe, après « Narcisse », sans qu’on sache s’il s’agit d’une er
3388
ache s’il s’agit d’une erreur ou d’une volonté de
l’
auteur. 15. Variante : des puissances d’action. 16. J’en vois certai
3389
et ils en sont tout fiers : « Il n’y a plus qu’à
les
écrire ». o. « La part du feu. Lettres sur le mépris de la littératu
3390
fiers : « Il n’y a plus qu’à les écrire ». o. «
La
part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature », Revue de Bell
3391
à les écrire ». o. « La part du feu. Lettres sur
le
mépris de la littérature », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchât
3392
». o. « La part du feu. Lettres sur le mépris de
la
littérature », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fri
3393
Les
derniers jours (juillet 1927)p Ces « cahiers politiques et littéra
3394
r Drieu la Rochelle et Emmanuel Berl, sont — avec
la
Revue de Belles-Lettres — la seule revue de langue française où l’o
3395
Berl, sont — avec la Revue de Belles-Lettres —
la
seule revue de langue française où l’on dise la vérité librement et p
3396
-Lettres — la seule revue de langue française où
l’
on dise la vérité librement et pour elle-même. Nous regrettons de n’en
3397
— la seule revue de langue française où l’on dise
la
vérité librement et pour elle-même. Nous regrettons de n’en pouvoir c
3398
s phrases de Drieu : « On voit déjà éclater dans
les
singuliers mouvements de sympathie qu’a provoqués l’infortune de l’Ac
3399
singuliers mouvements de sympathie qu’a provoqués
l’
infortune de l’Action française la fraternité qui existe, en dépit des
3400
ements de sympathie qu’a provoqués l’infortune de
l’
Action française la fraternité qui existe, en dépit des protestations
3401
qu’a provoqués l’infortune de l’Action française
la
fraternité qui existe, en dépit des protestations de haine, entre les
3402
xiste, en dépit des protestations de haine, entre
les
athées de l’antidémocratisme et les athées du Capitalisme quand il es
3403
t des protestations de haine, entre les athées de
l’
antidémocratisme et les athées du Capitalisme quand il est conscient d
3404
haine, entre les athées de l’antidémocratisme et
les
athées du Capitalisme quand il est conscient de soi-même, et les athé
3405
apitalisme quand il est conscient de soi-même, et
les
athées du Socialisme et du Communisme. Tous ceux-là travaillent à l’a
3406
isme et du Communisme. Tous ceux-là travaillent à
l’
achèvement d’un certain monde moderne, merveilleuse mécanique sévère e
3407
use mécanique sévère et dénuée de tout secours de
l’
Esprit. Mais un jour viendra où les hommes se révolteront contre le jo
3408
tout secours de l’Esprit. Mais un jour viendra où
les
hommes se révolteront contre le joug atrocement positiviste des Maurr
3409
jour viendra où les hommes se révolteront contre
le
joug atrocement positiviste des Maurras et des Mussolini, des Lénine
3410
s et des Mussolini, des Lénine et des Ford. Alors
les
hommes hurleront un affreux besoin mystique. Vous réveillerez-vous po
3411
freux besoin mystique. Vous réveillerez-vous pour
les
désaltérer, dieux de l’Orient et de l’Occident ? » Certains cris qui
3412
us réveillerez-vous pour les désaltérer, dieux de
l’
Orient et de l’Occident ? » Certains cris qui nous échappèrent n’avai
3413
vous pour les désaltérer, dieux de l’Orient et de
l’
Occident ? » Certains cris qui nous échappèrent n’avaient pas d’autre
3414
re sens. 17. 20, rue Chalgrin, Paris 16e. p. «
Les
derniers jours », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-
3415
Adieu au lecteur (juillet 1927)q Nous passons
la
main au central de Genève, fidèles à la tradition — en ceci au moins.
3416
s passons la main au central de Genève, fidèles à
la
tradition — en ceci au moins. Nous nous retirons : et ce n’est pas qu
3417
ue nous ayons brûlé toutes nos cartouches. Ni que
l’
indignation provoquée sur tous les bancs par certains de nos articles
3418
rtouches. Ni que l’indignation provoquée sur tous
les
bancs par certains de nos articles nous épouvante. Notre retraite est
3419
nte. Notre retraite est toute « statutaire » — si
l’
on ose dire. Elle nous permet donc de considérer la situation sans fiè
3420
’on ose dire. Elle nous permet donc de considérer
la
situation sans fièvre, sans lamentations d’adieu. On nous a parfois
3421
tés de fous (avec ou sans sourire). Nous sommes à
l’
âge de nous en réjouir. On s’est beaucoup étonné de nous voir « si dif
3422
s voir « si différents » de nos aînés. Nous avons
l’
énorme candeur de trouver ça naturel. On nous a fait des reproches con
3423
n nous a fait des reproches contradictoires. Nous
les
additionnons : ils s’annulent. Il reste à dire deux mots sur la parad
3424
s : ils s’annulent. Il reste à dire deux mots sur
la
paradoxale situation intellectuelle d’une revue d’étudiants comme la
3425
tion intellectuelle d’une revue d’étudiants comme
la
nôtre. D’un côté, en effet, on s’accorde pour trouver légèrement ridi
3426
ridicule un jeune homme qui recherche activement
la
Sagesse (« Ça n’est pas de votre âge ! ») ; de l’autre, on se scandal
3427
rces — ou bien de ces affirmations dont en vérité
l’
on n’a pas à se préoccuper de prévoir les conséquences, puisqu’il n’en
3428
en vérité l’on n’a pas à se préoccuper de prévoir
les
conséquences, puisqu’il n’en est aucune qui ne soit connue d’avance e
3429
une qui ne soit connue d’avance et stérilisée par
la
loi, les mœurs et l’habitude. Nous n’avons aucun remords d’avoir déçu
3430
ne soit connue d’avance et stérilisée par la loi,
les
mœurs et l’habitude. Nous n’avons aucun remords d’avoir déçu cette ca
3431
e d’avance et stérilisée par la loi, les mœurs et
l’
habitude. Nous n’avons aucun remords d’avoir déçu cette catégorie de l
3432
t pas encore admis que jeunesse = révolution Tous
les
malentendus viennent de là. Nous sommes assez sages et assez fous pou
3433
sez fous pour ne pas en gémir et pour en accepter
les
conséquences. Et puis, de temps à autre, voici que nous parvient un s
3434
quelques découvertes qui nous consolèrent de tout
le
reste. Et maintenant voici Genève et son mystère. Car chaque année,
3435
année, renaissant des décombres où s’anéantirent
l’
honneur et la fortune de ses derniers rédacteurs, notre Revue-phénix s
3436
ssant des décombres où s’anéantirent l’honneur et
la
fortune de ses derniers rédacteurs, notre Revue-phénix s’élance avec
3437
ction absolument imprévisible. Que nous apportera
le
Central de Genève ? Tout est possible : la guerre et la paix, la trad
3438
ortera le Central de Genève ? Tout est possible :
la
guerre et la paix, la tradition, l’anarchie, l’ironie, le sentiment,
3439
tral de Genève ? Tout est possible : la guerre et
la
paix, la tradition, l’anarchie, l’ironie, le sentiment, un réveil des
3440
enève ? Tout est possible : la guerre et la paix,
la
tradition, l’anarchie, l’ironie, le sentiment, un réveil des vieux, M
3441
st possible : la guerre et la paix, la tradition,
l’
anarchie, l’ironie, le sentiment, un réveil des vieux, Maurras, Lounat
3442
: la guerre et la paix, la tradition, l’anarchie,
l’
ironie, le sentiment, un réveil des vieux, Maurras, Lounatcharsky, la
3443
e et la paix, la tradition, l’anarchie, l’ironie,
le
sentiment, un réveil des vieux, Maurras, Lounatcharsky, la SDN, et mê
3444
ent, un réveil des vieux, Maurras, Lounatcharsky,
la
SDN, et même Edmond Gillard, et même, et surtout, un miracle. Et puis
3445
eureux Jean… Et puis, en voilà assez pour ranimer
la
curiosité des plus blasés. Lecteur, fais confiance au Central de Genè
3446
s confiance au Central de Genève. Souviens-toi de
la
grandeur de ses traditions et ne va pas ajouter à cette lourde charge
3447
itions et ne va pas ajouter à cette lourde charge
le
poids de nos péchés. Ils sont bien nôtres. Et nous y tenons, ah ! com
3448
s nouvelles n’ont guère de commun entre elles que
la
forme : ce sont de lentes réminiscences, des évocations intérieures,
3449
iniscences, des évocations intérieures, — et dans
l’
abandon de leurs méandres, peu à peu, se précisent les circonstances d
3450
bandon de leurs méandres, peu à peu, se précisent
les
circonstances d’une aventure ancienne. Entre hier et demain : Une fe
3451
suicidé pour une femme qu’ils ont aimé tous deux (
L’
Amie du Mort.) Ou bien c’est le récit d’un été de vacances, quand les
3452
nt aimé tous deux (L’Amie du Mort.) Ou bien c’est
le
récit d’un été de vacances, quand les premières inquiétudes du désir
3453
rieure aux deux autres, est une réussite rare par
la
justesse de l’observation autant que par la sympathie de l’auteur pou
3454
autres, est une réussite rare par la justesse de
l’
observation autant que par la sympathie de l’auteur pour ses héros. In
3455
e par la justesse de l’observation autant que par
la
sympathie de l’auteur pour ses héros. Indulgence et regrets, un ton q
3456
e de l’observation autant que par la sympathie de
l’
auteur pour ses héros. Indulgence et regrets, un ton qui permet le tac
3457
s héros. Indulgence et regrets, un ton qui permet
le
tact dans la hardiesse. On reste ravi de tant d’adresse sous un air d
3458
lgence et regrets, un ton qui permet le tact dans
la
hardiesse. On reste ravi de tant d’adresse sous un air de facilité qu
3459
sse sous un air de facilité qui serait presque de
la
nonchalance. M. Vaudoyer ressuscite ces adolescences avec une tendre
3460
objet qu’il en saisit sans mièvrerie ni vulgarité
la
grâce un peu trouble et l’insidieuse mélancolie. Un détail piqué adro
3461
mièvrerie ni vulgarité la grâce un peu trouble et
l’
insidieuse mélancolie. Un détail piqué adroitement, papillon dont frém
3462
iqué adroitement, papillon dont frémissent encore
les
ailes intactes ; l’évocation toute nervalienne en sa nostalgie, de la
3463
illon dont frémissent encore les ailes intactes ;
l’
évocation toute nervalienne en sa nostalgie, de la jeune étrangère don
3464
l’évocation toute nervalienne en sa nostalgie, de
la
jeune étrangère dont on rêve à 15 ans ; et voici ce je ne sais quoi,
3465
oici ce je ne sais quoi, ce délice furtif, ce que
l’
auteur lui-même appelle « cette vague poésie involontaire, intermitten
3466
à ces œuvrettes une si exquise humanité : par lui
le
« charme » reprend quelques droits. an. « Jean-Louis Vaudoyer : Pre
3467
ériser tout lyrisme germanique, il faudra opposer
l’
excellent petit livre d’Edmond Jaloux. C’est un recueil de divers arti
3468
eil de divers articles et essais, dont certains —
le
Message de Rilke — sont du meilleur Jaloux, de ce Jaloux qui sait par
3469
qu’il partage avec eux ce goût du rêve préféré à
la
vie, — à ce qu’on appelle la vie. Jaloux, qui a rencontré plusieurs f
3470
ût du rêve préféré à la vie, — à ce qu’on appelle
la
vie. Jaloux, qui a rencontré plusieurs fois Rilke, trace de lui un po
3471
hotographie morale, mais une sorte de synthèse de
l’
homme et de l’homme dans son œuvre, qui est peut-être plus vraie que l
3472
rale, mais une sorte de synthèse de l’homme et de
l’
homme dans son œuvre, qui est peut-être plus vraie que le vrai, je veu
3473
dans son œuvre, qui est peut-être plus vraie que
le
vrai, je veux dire, plus rilkienne que ne fut Rilke. Rilke y apparaît
3474
telles qu’on en découvre chez certaines femmes et
l’
on y voit une préciosité sentimentale qui touche à la névrose ou bien
3475
n y voit une préciosité sentimentale qui touche à
la
névrose ou bien simplement une clairvoyance exceptionnelle, suivant q
3476
ment une clairvoyance exceptionnelle, suivant que
l’
on juge au nom d’une science ou au nom de l’esprit. « Pour moi qui aim
3477
t que l’on juge au nom d’une science ou au nom de
l’
esprit. « Pour moi qui aime plus que tout la poésie, écrit Jaloux, aus
3478
om de l’esprit. « Pour moi qui aime plus que tout
la
poésie, écrit Jaloux, aussitôt que je vis Rilke, je compris que cet u
3479
arce qu’ils possèdent déjà, au moins obscurément,
le
sens des réalités sur lesquelles s’opère l’expérience. On ne prouve l
3480
ment, le sens des réalités sur lesquelles s’opère
l’
expérience. On ne prouve la religion qu’aux convertis — qui n’ont plus
3481
sur lesquelles s’opère l’expérience. On ne prouve
la
religion qu’aux convertis — qui n’ont plus besoin de preuves. Il rest
3482
celui-ci tend un merveilleux piège sentimental à
la
raison raisonnante. Et qu’il nous mène un peu plus loin que la sempit
3483
sonnante. Et qu’il nous mène un peu plus loin que
la
sempiternelle « stratégie littéraire », de gazetiers ; au cœur de ces
3484
s sujets qui paraît-il, ne sont pas d’actualité :
la
solitude, la maladie, la peur. ao. « Edmond Jaloux : Rainer Maria R
3485
paraît-il, ne sont pas d’actualité : la solitude,
la
maladie, la peur. ao. « Edmond Jaloux : Rainer Maria Rilke (Émile-P
3486
e sont pas d’actualité : la solitude, la maladie,
la
peur. ao. « Edmond Jaloux : Rainer Maria Rilke (Émile-Paul, Paris)
3487
ment il a écrit, sur commande, une Promenade dans
le
Midi. Récit alerte et familier (un brin pédant et un brin vulgaire pa
3488
nt une création littéraire. Bien sûr, c’est cela,
le
malaise d’écrire. Bopp est très intelligent. Et plein de verve, et pa
3489
une effusion « lyrique », histoire de n’avoir pas
l’
air dupe. Mais il a des façons parfois bien désobligeantes de voir jus
3490
scientifique, vis-à-vis du phénomène littéraire.
La
« Promenade » du héros de Bopp est une sorte de pensum. Cela rend peu
3491
oins convaincantes certaines de ses remarques sur
l’
inspiration. D’autre part la simplicité de l’objet était nécessaire à
3492
de ses remarques sur l’inspiration. D’autre part
la
simplicité de l’objet était nécessaire à la sécurité de cette sorte d
3493
sur l’inspiration. D’autre part la simplicité de
l’
objet était nécessaire à la sécurité de cette sorte d’analyse, — encor
3494
part la simplicité de l’objet était nécessaire à
la
sécurité de cette sorte d’analyse, — encore que Bopp ait prouvé dans
3495
facilité même est une réussite. Léon Bopp, c’est
le
combat d’un tempérament avec l’esprit de géométrie. Un scientisme ass
3496
Léon Bopp, c’est le combat d’un tempérament avec
l’
esprit de géométrie. Un scientisme assez insolent et les joyeuses révo
3497
rit de géométrie. Un scientisme assez insolent et
les
joyeuses révoltes de sa verve « interfèrent » en lui. Et aussi (presq
3498
entre autres. ap. « Léon Bopp : Interférences (
La
Renaissance du Livre, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
3499
Dés ou
la
clef des champs (1927)k « On sent l’absurdité d’un semblable syst
3500
Dés ou la clef des champs (1927)k « On sent
l’
absurdité d’un semblable système. » Musset. Une rose et un journal o
3501
e. » Musset. Une rose et un journal oubliés sur
le
marbre vulgaire d’une table de café. Je venais de m’asseoir et de com
3502
’habitude, un peu après six heures. J’étais seul.
Le
café est un lieu anonyme bien plus propice au rêve que ma chambre où
3503
ropice au rêve que ma chambre où m’attendent tous
les
soirs quand je rentre du bureau, les gages insupportablement familier
3504
tendent tous les soirs quand je rentre du bureau,
les
gages insupportablement familiers d’une vie honnête de type courant.
3505
une vie honnête de type courant. Pour dix sous et
le
prétexte d’un apéro, on entre ici dans le jardin des songeries les pl
3506
sous et le prétexte d’un apéro, on entre ici dans
le
jardin des songeries les plus étranges qu’appelle la musique. Je me g
3507
apéro, on entre ici dans le jardin des songeries
les
plus étranges qu’appelle la musique. Je me gardai donc d’ouvrir le jo
3508
jardin des songeries les plus étranges qu’appelle
la
musique. Je me gardai donc d’ouvrir le journal. Les Petites nouvelles
3509
qu’appelle la musique. Je me gardai donc d’ouvrir
le
journal. Les Petites nouvelles ont un pouvoir tyrannique sur mon espr
3510
a musique. Je me gardai donc d’ouvrir le journal.
Les
Petites nouvelles ont un pouvoir tyrannique sur mon esprit. Non que c
3511
ur mon esprit. Non que cela m’intéresse au fond :
les
faits-divers, rien de moins divers. Mais je suis pris dans l’absurde
3512
ers, rien de moins divers. Mais je suis pris dans
l’
absurde réseau des lignes, et cette mécanique me restitue chaque fois
3513
tte rose oubliée me gênait : perdre une rose pour
le
plaisir ! (Et je ne pensais même pas, alors : une si belle rose.) Le
3514
ne pensais même pas, alors : une si belle rose.)
Le
tambour livra un homme élégant et tragique, qui se tint un moment imm
3515
igure aux joues mates, aux yeux clairs. Il déplia
le
journal et se mit à lire les pages d’annonces. On m’apporta une lique
3516
eux clairs. Il déplia le journal et se mit à lire
les
pages d’annonces. On m’apporta une liqueur. Et quand j’eus fini de bo
3517
es pensées plus rapides s’en allèrent un peu vers
l’
avenir et j’osai quelques rêves. C’était, je m’en souviens, une petite
3518
souviens, une petite automobile qui roulait dans
la
banlieue printanière ; des soupers d’amis dans notre modeste salle à
3519
er ; des jaquettes de couleur pour ma femme… Mais
l’
homme avait posé son journal. Soudain, portant la main à son gilet, il
3520
l’homme avait posé son journal. Soudain, portant
la
main à son gilet, il en retira trois dés qu’il jeta sur la table. Les
3521
son gilet, il en retira trois dés qu’il jeta sur
la
table. Les yeux brillants, il compta. Une indécision parut sur ses tr
3522
, il en retira trois dés qu’il jeta sur la table.
Les
yeux brillants, il compta. Une indécision parut sur ses traits. Puis
3523
e indécision parut sur ses traits. Puis il reprit
les
dés brusquement, et me fixant avec un léger sourire : — Jouez ! ordon
3524
t avec un léger sourire : — Jouez ! ordonna-t-il.
La
surprise vainquit ma timidité, je pris les dés et les jetai sans hési
3525
a-t-il. La surprise vainquit ma timidité, je pris
les
dés et les jetai sans hésiter. Il compta de nouveau, puis avec une lé
3526
surprise vainquit ma timidité, je pris les dés et
les
jetai sans hésiter. Il compta de nouveau, puis avec une légère exalta
3527
une légère exaltation : — Vous avez gagné, c’est
admirable
, ah ! mon Dieu, je vous remercie, Monsieur… Il saisit son journal. Il
3528
l saisit son journal. Il en parcourait rapidement
les
pages, la proie d’une agitation visible. Bientôt il m’offrit de jouer
3529
n journal. Il en parcourait rapidement les pages,
la
proie d’une agitation visible. Bientôt il m’offrit de jouer un moment
3530
nsommations. Je gagnai. Il demanda des portos. Je
les
gagnai et je les bus. D’autres encore. Ma tête commençait à osciller
3531
agnai. Il demanda des portos. Je les gagnai et je
les
bus. D’autres encore. Ma tête commençait à osciller vaguement. Les co
3532
encore. Ma tête commençait à osciller vaguement.
Les
couleurs du bar me remplissaient d’une joie inconnue. Et je me refusa
3533
uestions qu’en moi-même posait ma raison effarée.
L’
étranger s’animait aussi : une fièvre faisait s’épanouir sur son visag
3534
quel plaisir cruel. C’était un jeu très simple où
l’
esprit libre de calculs se tend ardemment vers la conclusion d’un hasa
3535
l’esprit libre de calculs se tend ardemment vers
la
conclusion d’un hasard qui opère au commandement de la main. Ce soir-
3536
nclusion d’un hasard qui opère au commandement de
la
main. Ce soir-là, une confiance me possédait, telle que je savais trè
3537
ais très clairement que je gagnerais à tout coup.
L’
étranger se mit à discourir. Et dans mon ivresse, ses paroles peignaie
3538
je bouscule tous tes calculs, ha ! tu te disais :
le
voilà riche, le voilà classé, le voilà prêt à faire des bassesses pou
3539
tes calculs, ha ! tu te disais : le voilà riche,
le
voilà classé, le voilà prêt à faire des bassesses pour durer, et tu t
3540
! tu te disais : le voilà riche, le voilà classé,
le
voilà prêt à faire des bassesses pour durer, et tu te réjouissais, pa
3541
omplètement démodées et d’intrigues usées jusqu’à
la
corde, jusqu’à la corde pour les pendre, ha ha ha ! Tu pensais que j’
3542
es et d’intrigues usées jusqu’à la corde, jusqu’à
la
corde pour les pendre, ha ha ha ! Tu pensais que j’allais me cramponn
3543
ues usées jusqu’à la corde, jusqu’à la corde pour
les
pendre, ha ha ha ! Tu pensais que j’allais me cramponner à cette espè
3544
er à cette espèce de bonheur qu’ils croient lié à
la
possession, et que j’allais vivre aussi sur le dogme l’argent-fait-le
3545
à la possession, et que j’allais vivre aussi sur
le
dogme l’argent-fait-le-bonheur. En somme, tu croyais que j’allais adh
3546
session, et que j’allais vivre aussi sur le dogme
l’
argent-fait-le-bonheur. En somme, tu croyais que j’allais adhérer à l’
3547
heur. En somme, tu croyais que j’allais adhérer à
l’
idéologie socialiste, gros farceur, va. Quand je songe à tous ces gens
3548
d je songe à tous ces gens qui perdent leur vie à
la
gagner9, et leur façon inexplicable de lier des valeurs morales aux c
3549
» comme ils disent dans leurs manuels scolaires.
Les
voler, pour leur apprendre. Et leur manie aussi de situer le paradis
3550
our leur apprendre. Et leur manie aussi de situer
le
paradis dans la classe d’impôts immédiatement supérieure à la leur. I
3551
re. Et leur manie aussi de situer le paradis dans
la
classe d’impôts immédiatement supérieure à la leur. Ils voudraient qu
3552
ans la classe d’impôts immédiatement supérieure à
la
leur. Ils voudraient que leur vie garantît un 5 % régulier de plaisir
3553
ertige sans prix du lâchez-tout ! Ils ont inventé
les
caisses d’épargne, monuments d’une bassesse morale inconcevable, temp
3554
onheur que celui qu’ils ont reçu de papa-maman et
l’
Habitude, leur marraine aux dents jaunes. Ah ! perdre, perdre ; et c’e
3555
stinée dans l’autre, de douleurs en ivresses avec
la
même joie, mon cheval fou, mon beau Désir s’ébroue et part sitôt que
3556
bousse, ils n’y comprendront jamais rien, écoutez-
les
, comme ils me jugent et leurs cris indignés qui couvrent une angoisse
3557
leurs cris indignés qui couvrent une angoisse. Ça
les
dérange terriblement, sauf un ou deux qui s’imaginent gagner à mes dé
3558
in ce brave homme qui est en train de me soutirer
les
quelque billets de mille dont je venais de régler le sort, puisque de
3559
quelque billets de mille dont je venais de régler
le
sort, puisque demain dès l’aube, j’irai tenter la misère aux yeux las
3560
t je venais de régler le sort, puisque demain dès
l’
aube, j’irai tenter la misère aux yeux las pleins de rêves, la misère
3561
le sort, puisque demain dès l’aube, j’irai tenter
la
misère aux yeux las pleins de rêves, la misère qui fait des soirs si
3562
ai tenter la misère aux yeux las pleins de rêves,
la
misère qui fait des soirs si doux aux amants quand ils n’ont plus que
3563
ls n’ont plus que des baisers au goût d’adieu, et
l’
avenir où se mêlent incertaines, une tendresse éperdue et la mort. » I
3564
ù se mêlent incertaines, une tendresse éperdue et
la
mort. » Il ferma les yeux sur des visions. Les lustres doraient un br
3565
nes, une tendresse éperdue et la mort. » Il ferma
les
yeux sur des visions. Les lustres doraient un brouillard de fumée, et
3566
et la mort. » Il ferma les yeux sur des visions.
Les
lustres doraient un brouillard de fumée, et la musique noyait mes pen
3567
. Les lustres doraient un brouillard de fumée, et
la
musique noyait mes pensées. Je vis qu’une femme était assise à notre
3568
, en robe rouge, et très fardée. Elle jouait avec
la
rose. Les dés roulèrent, pour un dernier enjeu. Alors la femme lança
3569
rouge, et très fardée. Elle jouait avec la rose.
Les
dés roulèrent, pour un dernier enjeu. Alors la femme lança sur la tab
3570
. Les dés roulèrent, pour un dernier enjeu. Alors
la
femme lança sur la table cette rose qui s’effeuilla sur les dés, et p
3571
, pour un dernier enjeu. Alors la femme lança sur
la
table cette rose qui s’effeuilla sur les dés, et partit d’un long rir
3572
lança sur la table cette rose qui s’effeuilla sur
les
dés, et partit d’un long rire. Elle me regardait et l’étranger aussi
3573
s, et partit d’un long rire. Elle me regardait et
l’
étranger aussi se mit à me regarder bizarrement et j’étais possédé de
3574
joies et de peurs. Il fallut se lever, traverser
le
café dans la musique et la rumeur des clients. Dehors les réclames lu
3575
peurs. Il fallut se lever, traverser le café dans
la
musique et la rumeur des clients. Dehors les réclames lumineuses dial
3576
ut se lever, traverser le café dans la musique et
la
rumeur des clients. Dehors les réclames lumineuses dialoguaient folle
3577
dans la musique et la rumeur des clients. Dehors
les
réclames lumineuses dialoguaient follement au-dessus des rues parcour
3578
main je n’avais plus un sou). Je n’ai jamais revu
l’
étranger. Quelquefois je songe à ses paroles — ou peut-être n’étaient-
3579
inquiétude, parce que je ne suis plus tout à fait
le
même. Puis elle me laisse, parce que le lait va monter. Alors, dans m
3580
ut à fait le même. Puis elle me laisse, parce que
le
lait va monter. Alors, dans ma chambre, avant d’aller souper, je m’ab
3581
re, avant d’aller souper, je m’abats sur mon lit,
les
cheveux dans les mains. Et je voudrais pouvoir pleurer sur ma lâcheté
3582
souper, je m’abats sur mon lit, les cheveux dans
les
mains. Et je voudrais pouvoir pleurer sur ma lâcheté. Et je t’apostro
3583
haïr… 9. Calembour sur une idée juste. (Note de
l’
éd.) k. « Dés ou la clef des champs », Neuchâtel 1928 : beaux-arts, a
3584
sur une idée juste. (Note de l’éd.) k. « Dés ou
la
clef des champs », Neuchâtel 1928 : beaux-arts, arts appliqués, archi
3585
928)aq C’est un livre sympathique ; et il vaut
la
peine de le dire car la chose n’est pas si fréquente dans la producti
3586
est un livre sympathique ; et il vaut la peine de
le
dire car la chose n’est pas si fréquente dans la production actuelle.
3587
sympathique ; et il vaut la peine de le dire car
la
chose n’est pas si fréquente dans la production actuelle. On retrouve
3588
le dire car la chose n’est pas si fréquente dans
la
production actuelle. On retrouve aux premiers chapitres de Catherine-
3589
-Paris cette magie des sensations et des rêves de
l’
enfance et cette féminité du sentiment, du tour de pensée même, qui fa
3590
opos. Mais dans ce roman, il n’y a plus seulement
la
femme, avec le miracle perpétuel de sa sensibilité. Il y a encore la
3591
ce roman, il n’y a plus seulement la femme, avec
le
miracle perpétuel de sa sensibilité. Il y a encore la princesse, le t
3592
iracle perpétuel de sa sensibilité. Il y a encore
la
princesse, le témoin intelligent et un peu ironique des cours d’Europ
3593
el de sa sensibilité. Il y a encore la princesse,
le
témoin intelligent et un peu ironique des cours d’Europe à la veille
3594
telligent et un peu ironique des cours d’Europe à
la
veille de la guerre. De cette espèce de collaboration résultent à la
3595
un peu ironique des cours d’Europe à la veille de
la
guerre. De cette espèce de collaboration résultent à la fois le défau
3596
cette espèce de collaboration résultent à la fois
le
défaut de composition du livre et sa richesse. L’enfance de Catherine
3597
le défaut de composition du livre et sa richesse.
L’
enfance de Catherine à Paris est du roman pur ; la tournée des cours d
3598
L’enfance de Catherine à Paris est du roman pur ;
la
tournée des cours de l’Europe centrale, qu’elle subit comme jeune épo
3599
Paris est du roman pur ; la tournée des cours de
l’
Europe centrale, qu’elle subit comme jeune épouse d’un comte polonais,
3600
i étonnent de la part d’une femme aussi femme que
l’
auteur du Perroquet Vert. Mais là-dessus, le roman repart dans une tro
3601
e que l’auteur du Perroquet Vert. Mais là-dessus,
le
roman repart dans une troisième action (l’amour de Catherine pour un
3602
essus, le roman repart dans une troisième action (
l’
amour de Catherine pour un aviateur français) assez peu intéressante à
3603
téressante à vrai dire, parce qu’elle n’est pas à
l’
échelle de ce qui la précède. Ces défaillances de la technique du roma
3604
re, parce qu’elle n’est pas à l’échelle de ce qui
la
précède. Ces défaillances de la technique du roman sont sauvées par u
3605
échelle de ce qui la précède. Ces défaillances de
la
technique du roman sont sauvées par un style brillant, plein de trouv
3606
mémoires. Mais si son début permet de croire que
le
Perroquet Vert ne restera pas une réussite isolée dans l’œuvre pureme
3607
quet Vert ne restera pas une réussite isolée dans
l’
œuvre purement romanesque de la princesse Bibesco, Catherine-Paris ann
3608
ussite isolée dans l’œuvre purement romanesque de
la
princesse Bibesco, Catherine-Paris annonce par ailleurs un mémorialis
3609
once par ailleurs un mémorialiste captivant, dans
la
tradition d’un Ligne par exemple. aq. « Princesse Bibesco : Catheri
3610
Le
péril Ford (février 1928)a On a trop dit que notre époque est chao
3611
e est chaotique. Je crois bien, au contraire, que
l’
histoire n’a pas connu de période où les directions d’une civilisation
3612
raire, que l’histoire n’a pas connu de période où
les
directions d’une civilisation apparaissent plus nettement. Un certain
3613
ou, pour mieux dire, une organisation générale de
la
vie mondiale. Toutes les forces du temps y concourent obscurément ; e
3614
organisation générale de la vie mondiale. Toutes
les
forces du temps y concourent obscurément ; et, pour peu que cela cont
3615
nt ; et, pour peu que cela continue, pour peu que
la
bourgeoisie intellectuelle persiste à jouer l’autruche aux yeux clos,
3616
ue la bourgeoisie intellectuelle persiste à jouer
l’
autruche aux yeux clos, l’avènement de cette organisation toute-puissa
3617
tuelle persiste à jouer l’autruche aux yeux clos,
l’
avènement de cette organisation toute-puissante n’est plus qu’une ques
3618
s encore. Ici et là, quelques cris s’élèvent dans
le
désert d’une époque déjà presque abandonnée par l’Esprit. À l’heure d
3619
e désert d’une époque déjà presque abandonnée par
l’
Esprit. À l’heure de toucher aux buts que sa civilisation poursuit dep
3620
ne époque déjà presque abandonnée par l’Esprit. À
l’
heure de toucher aux buts que sa civilisation poursuit depuis près de
3621
ivilisation poursuit depuis près de deux siècles,
l’
Occidental est saisi d’un étrange malaise. Il soupçonne, par éclairs,
3622
ut-être dans ces buts une absurdité fondamentale.
L’
infaillible progrès aurait-il fait fausse route ? Est-il temps encore
3623
ait-il fait fausse route ? Est-il temps encore de
le
détourner du désastre spirituel vers lequel il entraîne l’Occident ?
3624
ner du désastre spirituel vers lequel il entraîne
l’
Occident ? Cris dans le désert. Déserts des villes fiévreuses où le fr
3625
el vers lequel il entraîne l’Occident ? Cris dans
le
désert. Déserts des villes fiévreuses où le fracas des machines couvr
3626
dans le désert. Déserts des villes fiévreuses où
le
fracas des machines couvre déjà la plainte humaine. Il y a ceux qui p
3627
fiévreuses où le fracas des machines couvre déjà
la
plainte humaine. Il y a ceux qui pleurent le passé et ceux qui prophé
3628
déjà la plainte humaine. Il y a ceux qui pleurent
le
passé et ceux qui prophétisent, ceux qui jettent une imprécation stér
3629
tent une imprécation stérile et magnifique contre
l’
époque et ceux qui cherchent à l’oublier dans le rêve, dans l’utopie,
3630
agnifique contre l’époque et ceux qui cherchent à
l’
oublier dans le rêve, dans l’utopie, dans une belle doctrine… Il faudr
3631
e l’époque et ceux qui cherchent à l’oublier dans
le
rêve, dans l’utopie, dans une belle doctrine… Il faudrait d’abord pre
3632
ceux qui cherchent à l’oublier dans le rêve, dans
l’
utopie, dans une belle doctrine… Il faudrait d’abord prendre conscienc
3633
ous, dans cette complaisance générale à proclamer
le
désordre du temps. On a peur de certaines évidences, on préfère affir
3634
n préfère affirmer que tout est incompréhensible.
L’
homme moderne recule devant l’évidence de la banqueroute prochaine de
3635
t incompréhensible. L’homme moderne recule devant
l’
évidence de la banqueroute prochaine de sa civilisation. Il répugne à
3636
ible. L’homme moderne recule devant l’évidence de
la
banqueroute prochaine de sa civilisation. Il répugne à admettre qu’un
3637
rder autour de nous et d’en croire nos yeux. I.
L’
homme qui a réussi Je prends Henry Ford comme un symbole du monde m
3638
Henry Ford comme un symbole du monde moderne, et
le
meilleur, parce que personne ne s’est approché plus que lui du type i
3639
e ne s’est approché plus que lui du type idéal de
l’
industriel et du capitaliste. Le succès immense de ses livres1, sa pop
3640
du type idéal de l’industriel et du capitaliste.
Le
succès immense de ses livres1, sa popularité universelle sont signes
3641
ivres1, sa popularité universelle sont signes que
l’
époque a senti en lui son incarnation la plus parfaite. Qu’on ne m’acc
3642
ignes que l’époque a senti en lui son incarnation
la
plus parfaite. Qu’on ne m’accuse donc pas de caricaturer l’objet de m
3643
rfaite. Qu’on ne m’accuse donc pas de caricaturer
l’
objet de ma critique pour faciliter l’accusation : je prends pour la j
3644
caricaturer l’objet de ma critique pour faciliter
l’
accusation : je prends pour la juger ce que l’époque m’offre de mieux
3645
ique pour faciliter l’accusation : je prends pour
la
juger ce que l’époque m’offre de mieux réussi. Voici la vie de Ford,
3646
ter l’accusation : je prends pour la juger ce que
l’
époque m’offre de mieux réussi. Voici la vie de Ford, telle qu’il la r
3647
er ce que l’époque m’offre de mieux réussi. Voici
la
vie de Ford, telle qu’il la raconte dans Ma vie et mon œuvre. Il naît
3648
e mieux réussi. Voici la vie de Ford, telle qu’il
la
raconte dans Ma vie et mon œuvre. Il naît fils de paysan. Il passe so
3649
des outils qu’il joue encore à présent », dit‑il.
Le
plus mémorable événement de ces années de jeunesse, son « chemin de D
3650
che au juste quelle dose d’« humour » il met dans
l’
expression), c’est la rencontre d’une locomotive routière. « Depuis l’
3651
ose d’« humour » il met dans l’expression), c’est
la
rencontre d’une locomotive routière. « Depuis l’instant où, enfant de
3652
la rencontre d’une locomotive routière. « Depuis
l’
instant où, enfant de 12 ans, j’aperçus cette machine de route, jusqu’
3653
a été de construire une bonne machine routière. »
Les
étapes de sa jeunesse sont : la construction d’un moteur à vapeur, pu
3654
hine routière. » Les étapes de sa jeunesse sont :
la
construction d’un moteur à vapeur, puis d’un moteur à explosion, enfi
3655
simple mécanicien chez Edison. Il fonde tôt après
la
Société des automobiles Ford, « et commence à réaliser son rêve, le t
3656
omobiles Ford, « et commence à réaliser son rêve,
le
type unique d’automobile utilitaire »2. Dès lors, c’est une suite de
3657
. Dès lors, c’est une suite de chiffres indiquant
le
progrès de sa production, d’année en année. On pourrait ajouter à ces
3658
ur lui qu’un résultat secondaire de son activité.
Le
but de sa vie n’a jamais été de s’enrichir. Son « rêve » était autre,
3659
s été de s’enrichir. Son « rêve » était autre, il
l’
a réalisé comme il est donné à peu d’hommes de le faire : 7000 voiture
3660
l’a réalisé comme il est donné à peu d’hommes de
le
faire : 7000 voitures par jour, et la possibilité d’augmenter encore
3661
d’hommes de le faire : 7000 voitures par jour, et
la
possibilité d’augmenter encore cette production. Ford est le plus pui
3662
ité d’augmenter encore cette production. Ford est
le
plus puissant industriel du monde ; le plus riche, au point qu’il peu
3663
. Ford est le plus puissant industriel du monde ;
le
plus riche, au point qu’il peut parler d’égal à égal avec beaucoup d’
3664
peut parler d’égal à égal avec beaucoup d’États ;
le
plus parfait aussi. Son succès sans précédent le met à l’abri de tout
3665
le plus parfait aussi. Son succès sans précédent
le
met à l’abri de toutes les attaques, du point de vue technique. L’org
3666
parfait aussi. Son succès sans précédent le met à
l’
abri de toutes les attaques, du point de vue technique. L’organisation
3667
n succès sans précédent le met à l’abri de toutes
les
attaques, du point de vue technique. L’organisation de ses usines, de
3668
e toutes les attaques, du point de vue technique.
L’
organisation de ses usines, des salaires, des conditions de travail et
3669
et du paupérisme. C’est un résultat qu’on n’a pas
le
droit humainement de sous-estimer. Les griefs que les socialistes fon
3670
’on n’a pas le droit humainement de sous-estimer.
Les
griefs que les socialistes font aux capitalistes européens ne sauraie
3671
droit humainement de sous-estimer. Les griefs que
les
socialistes font aux capitalistes européens ne sauraient l’atteindre.
3672
stes font aux capitalistes européens ne sauraient
l’
atteindre. Au contraire, il a résolu la question sociale d’une façon q
3673
sauraient l’atteindre. Au contraire, il a résolu
la
question sociale d’une façon qui ne devrait pas déplaire aux doctrina
3674
mplète du monde, seule méthode capable d’empêcher
les
abus des capitalistes. Du même coup, en supprimant l’esclavage financ
3675
bus des capitalistes. Du même coup, en supprimant
l’
esclavage financier de l’ouvrier, il supprime la principale cause avou
3676
même coup, en supprimant l’esclavage financier de
l’
ouvrier, il supprime la principale cause avouée de la lutte des classe
3677
t l’esclavage financier de l’ouvrier, il supprime
la
principale cause avouée de la lutte des classes. Il se dégage de la l
3678
uvrier, il supprime la principale cause avouée de
la
lutte des classes. Il se dégage de la lecture de Ma vie et mon œuvre
3679
e avouée de la lutte des classes. Il se dégage de
la
lecture de Ma vie et mon œuvre une impression de netteté, de solidité
3680
pression de netteté, de solidité, de propreté. Si
l’
on ajoute à cela le plaisir qu’on éprouve toujours au récit de succès
3681
, de solidité, de propreté. Si l’on ajoute à cela
le
plaisir qu’on éprouve toujours au récit de succès mirobolants, et le
3682
rouve toujours au récit de succès mirobolants, et
le
charme un peu facile mais fort goûté du grand public, de l’humour amé
3683
un peu facile mais fort goûté du grand public, de
l’
humour américain, l’on comprendra sans peine la popularité mondiale de
3684
ort goûté du grand public, de l’humour américain,
l’
on comprendra sans peine la popularité mondiale des « idées » d’Henry
3685
de l’humour américain, l’on comprendra sans peine
la
popularité mondiale des « idées » d’Henry Ford et des livres qui les
3686
iale des « idées » d’Henry Ford et des livres qui
les
répandent. L’on ne pourra qu’y applaudir, semble-t-il, en souhaitant
3687
s » d’Henry Ford et des livres qui les répandent.
L’
on ne pourra qu’y applaudir, semble-t-il, en souhaitant que les indust
3688
ra qu’y applaudir, semble-t-il, en souhaitant que
les
industriels européens s’en inspirent toujours plus. Ford leur montre
3689
ns s’en inspirent toujours plus. Ford leur montre
le
chemin qu’ils seront bien obligés de prendre tôt ou tard. Il est préf
3690
e quelques chances encore de régler pacifiquement
le
conflit du capital et du travail. « Se fordiser ou mourir », écrivait
3691
vait récemment un économiste. Ford, perfection de
l’
industriel, offre au monde moderne le premier exemple de son achèvemen
3692
exemple de son achèvement intégral. Il a atteint
l’
objectif de la moderne civilisation occidentale. Voici donc venue l’he
3693
n achèvement intégral. Il a atteint l’objectif de
la
moderne civilisation occidentale. Voici donc venue l’heure de la juge
3694
oderne civilisation occidentale. Voici donc venue
l’
heure de la juger. Le héros de l’époque, c’est l’homme qui a réussi. M
3695
lisation occidentale. Voici donc venue l’heure de
la
juger. Le héros de l’époque, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi
3696
ccidentale. Voici donc venue l’heure de la juger.
Le
héros de l’époque, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la
3697
Voici donc venue l’heure de la juger. Le héros de
l’
époque, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la plus grave
3698
l’heure de la juger. Le héros de l’époque, c’est
l’
homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la plus grave question qu’on p
3699
, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est
la
plus grave question qu’on puisse poser à notre temps. II. M. Ford
3700
ser à notre temps. II. M. Ford a ses idées, ou
la
philosophie de ceux qui n’en veulent pas Nous avons dit tout à l’h
3701
eux qui n’en veulent pas Nous avons dit tout à
l’
heure quel fut le but de la vie de Ford, sa « grande et constante ambi
3702
ent pas Nous avons dit tout à l’heure quel fut
le
but de la vie de Ford, sa « grande et constante ambition ». Il semble
3703
Nous avons dit tout à l’heure quel fut le but de
la
vie de Ford, sa « grande et constante ambition ». Il semble que toute
3704
éthode, technique — soit conditionnée jusque dans
le
détail par une idée fixe primitive. Considérons-la sous cet angle. Il
3705
e détail par une idée fixe primitive. Considérons-
la
sous cet angle. Il y a d’abord la vision de l’auto routière : naissan
3706
ve. Considérons-la sous cet angle. Il y a d’abord
la
vision de l’auto routière : naissance de sa passion froide et tenace.
3707
ns-la sous cet angle. Il y a d’abord la vision de
l’
auto routière : naissance de sa passion froide et tenace. Il s’efforce
3708
sion froide et tenace. Il s’efforce d’en réaliser
l’
objet par ses propres moyens, à un exemplaire ; puis, il fonde une usi
3709
plaire ; puis, il fonde une usine pour multiplier
les
réalisations. Bientôt, élargissant son ambition, il conçoit ce mythe
3710
on, il conçoit ce mythe extravagant du bonheur de
l’
humanité par la possession d’automobiles Ford. Et, comme il est très i
3711
ce mythe extravagant du bonheur de l’humanité par
la
possession d’automobiles Ford. Et, comme il est très intelligent, il
3712
l est très intelligent, il a vite fait de démêler
les
conditions les plus rationnelles de la production, avec cette netteté
3713
lligent, il a vite fait de démêler les conditions
les
plus rationnelles de la production, avec cette netteté et cette décis
3714
e démêler les conditions les plus rationnelles de
la
production, avec cette netteté et cette décision qu’une passion conte
3715
te décision qu’une passion contenue peut donner à
l’
homme d’action. Enfin, le voici en mesure de produire des quantités én
3716
n contenue peut donner à l’homme d’action. Enfin,
le
voici en mesure de produire des quantités énormes d’autos. Seulement,
3717
nt, pour pouvoir continuer, il faut vendre ; dans
l’
intérêt de la production, il faut créer la consommation. La réclame s’
3718
oir continuer, il faut vendre ; dans l’intérêt de
la
production, il faut créer la consommation. La réclame s’en charge. Pa
3719
; dans l’intérêt de la production, il faut créer
la
consommation. La réclame s’en charge. Par le procédé très simple de l
3720
de la production, il faut créer la consommation.
La
réclame s’en charge. Par le procédé très simple de la répétition, on
3721
réer la consommation. La réclame s’en charge. Par
le
procédé très simple de la répétition, on fait croire aux gens qu’ils
3722
éclame s’en charge. Par le procédé très simple de
la
répétition, on fait croire aux gens qu’ils ne peuvent plus vivre heur
3723
ls ne peuvent plus vivre heureux sans auto. Voilà
l’
affaire lancée. La passion de Ford se donne libre cours. Il ne s’agit
3724
vivre heureux sans auto. Voilà l’affaire lancée.
La
passion de Ford se donne libre cours. Il ne s’agit plus maintenant qu
3725
À chaque page de ses livres, on pourrait relever
les
sophismes plus ou moins conscients par lesquels il prétend ramener le
3726
moins conscients par lesquels il prétend ramener
le
bénéfice de la production à celui du consommateur. Prenons cette peti
3727
ts par lesquels il prétend ramener le bénéfice de
la
production à celui du consommateur. Prenons cette petite phrase qui n
3728
i n’a l’air de rien : « Nul ne contestera que, si
l’
on abaisse suffisamment les prix, on ne trouve toujours des clients, q
3729
l ne contestera que, si l’on abaisse suffisamment
les
prix, on ne trouve toujours des clients, quel que soit l’état du marc
3730
on ne trouve toujours des clients, quel que soit
l’
état du marché. » Il semble que cela soit tout à l’avantage du client.
3731
’état du marché. » Il semble que cela soit tout à
l’
avantage du client. Mais cherchons un peu les causes réelles de cet ab
3732
out à l’avantage du client. Mais cherchons un peu
les
causes réelles de cet abaissement de prix — la concurrence n’étant bi
3733
u les causes réelles de cet abaissement de prix —
la
concurrence n’étant bien entendu qu’une cause accessoire. Dire que l’
3734
nt bien entendu qu’une cause accessoire. Dire que
l’
état du marché est tel que le client n’achète plus, cela signifie parf
3735
accessoire. Dire que l’état du marché est tel que
le
client n’achète plus, cela signifie parfois que la marchandise est mo
3736
e client n’achète plus, cela signifie parfois que
la
marchandise est momentanément trop chère ; mais surtout que le besoin
3737
e est momentanément trop chère ; mais surtout que
le
besoin qu’on a de tel objet est satisfait ou a disparu. Il semble alo
3738
t est satisfait ou a disparu. Il semble alors que
l’
industriel n’ait plus qu’à plier bagage. Mais c’est ici que Ford montr
3739
qu’à plier bagage. Mais c’est ici que Ford montre
le
bout de l’oreille, et que son but réel est la production pour elle-mê
3740
bagage. Mais c’est ici que Ford montre le bout de
l’
oreille, et que son but réel est la production pour elle-même, non pas
3741
tre le bout de l’oreille, et que son but réel est
la
production pour elle-même, non pas le plaisir ou l’intérêt véritable
3742
ut réel est la production pour elle-même, non pas
le
plaisir ou l’intérêt véritable du client. Le besoin ayant disparu, la
3743
production pour elle-même, non pas le plaisir ou
l’
intérêt véritable du client. Le besoin ayant disparu, la production de
3744
pas le plaisir ou l’intérêt véritable du client.
Le
besoin ayant disparu, la production devant se maintenir, il n’y a qu’
3745
rêt véritable du client. Le besoin ayant disparu,
la
production devant se maintenir, il n’y a qu’une solution : recréer le
3746
se maintenir, il n’y a qu’une solution : recréer
le
besoin. Pour cela, on abaisse les prix. Le client fait la comparaison
3747
lution : recréer le besoin. Pour cela, on abaisse
les
prix. Le client fait la comparaison. Il est impressionné par la baiss
3748
ecréer le besoin. Pour cela, on abaisse les prix.
Le
client fait la comparaison. Il est impressionné par la baisse, au poi
3749
n. Pour cela, on abaisse les prix. Le client fait
la
comparaison. Il est impressionné par la baisse, au point qu’il en oub
3750
ient fait la comparaison. Il est impressionné par
la
baisse, au point qu’il en oublie que cela ne l’intéresse plus réellem
3751
r la baisse, au point qu’il en oublie que cela ne
l’
intéresse plus réellement. Il croit qu’il va gagner 5 francs en acheta
3752
acheté du tout. Autrement dit, il est trompé par
la
baisse. L’industriel comptait. La tromperie est préméditée. Et le sca
3753
tout. Autrement dit, il est trompé par la baisse.
L’
industriel comptait. La tromperie est préméditée. Et le scandale, à mo
3754
est trompé par la baisse. L’industriel comptait.
La
tromperie est préméditée. Et le scandale, à mon sens, n’est pas que l
3755
ustriel comptait. La tromperie est préméditée. Et
le
scandale, à mon sens, n’est pas que l’industriel ait forcé (psycholog
3756
éditée. Et le scandale, à mon sens, n’est pas que
l’
industriel ait forcé (psychologiquement) le client à faire une dépense
3757
as que l’industriel ait forcé (psychologiquement)
le
client à faire une dépense superflue ; le scandale est qu’il l’ait tr
3758
uement) le client à faire une dépense superflue ;
le
scandale est qu’il l’ait trompé sur ses véritables besoins. Car cela
3759
ire une dépense superflue ; le scandale est qu’il
l’
ait trompé sur ses véritables besoins. Car cela va bien plus profond,
3760
régulation et d’alternances. Tel est ce sophisme,
le
paradoxe du bon marché. Celui de la réclame a même but, mêmes effets.
3761
ce sophisme, le paradoxe du bon marché. Celui de
la
réclame a même but, mêmes effets. Mais le plus grave est peut-être le
3762
elui de la réclame a même but, mêmes effets. Mais
le
plus grave est peut-être le sophisme du loisir. M. Guglielmo Ferrero
3763
t, mêmes effets. Mais le plus grave est peut-être
le
sophisme du loisir. M. Guglielmo Ferrero a fort bien montré, dans un
3764
ro a fort bien montré, dans un article intitulé «
Le
grand paradoxe du monde moderne »3, ce qu’il y a de profondément anti
3765
»3, ce qu’il y a de profondément antihumain dans
la
conception fordienne de l’oisiveté. Ford a créé un second dimanche da
3766
dément antihumain dans la conception fordienne de
l’
oisiveté. Ford a créé un second dimanche dans la semaine, « retouché l
3767
e l’oisiveté. Ford a créé un second dimanche dans
la
semaine, « retouché l’œuvre de la Création », comme dit Ferrero. Le b
3768
éé un second dimanche dans la semaine, « retouché
l’
œuvre de la Création », comme dit Ferrero. Le bon peuple s’extasie. Il
3769
d dimanche dans la semaine, « retouché l’œuvre de
la
Création », comme dit Ferrero. Le bon peuple s’extasie. Il ne peut vo
3770
uché l’œuvre de la Création », comme dit Ferrero.
Le
bon peuple s’extasie. Il ne peut voir la duperie : ce jeu du chat et
3771
Ferrero. Le bon peuple s’extasie. Il ne peut voir
la
duperie : ce jeu du chat et de la souris ; si Ford relâche les ouvrie
3772
Il ne peut voir la duperie : ce jeu du chat et de
la
souris ; si Ford relâche les ouvriers et leur donne une apparence de
3773
ce jeu du chat et de la souris ; si Ford relâche
les
ouvriers et leur donne une apparence de liberté, c’est pour mieux les
3774
donne une apparence de liberté, c’est pour mieux
les
prendre dans son engrenage. L’emploi de leurs loisirs est prévu. Il e
3775
c’est pour mieux les prendre dans son engrenage.
L’
emploi de leurs loisirs est prévu. Il est déterminé par la réclame, le
3776
de leurs loisirs est prévu. Il est déterminé par
la
réclame, les produits Ford qu’il faut user, etc. Il a pour but vérita
3777
isirs est prévu. Il est déterminé par la réclame,
les
produits Ford qu’il faut user, etc. Il a pour but véritable d’augment
3778
ut user, etc. Il a pour but véritable d’augmenter
la
consommation. Il rend plus complet l’esclavage de l’ouvrier, puisqu’i
3779
d’augmenter la consommation. Il rend plus complet
l’
esclavage de l’ouvrier, puisqu’il englobe jusqu’à son repos dans le cy
3780
consommation. Il rend plus complet l’esclavage de
l’
ouvrier, puisqu’il englobe jusqu’à son repos dans le cycle de la produ
3781
ouvrier, puisqu’il englobe jusqu’à son repos dans
le
cycle de la production. Cercle vicieux : plus la production s’intensi
3782
squ’il englobe jusqu’à son repos dans le cycle de
la
production. Cercle vicieux : plus la production s’intensifie, plus il
3783
le cycle de la production. Cercle vicieux : plus
la
production s’intensifie, plus il faut créer de besoins et de loisirs.
3784
plus il faut créer de besoins et de loisirs. Or,
l’
industrie ne peut subsister qu’en progressant. Mais la nature humaine
3785
dustrie ne peut subsister qu’en progressant. Mais
la
nature humaine a des limites. Et le temps approche où elles seront at
3786
ressant. Mais la nature humaine a des limites. Et
le
temps approche où elles seront atteintes. On peut se demander jusqu’à
3787
qu’à quel point Ford est conscient des buts et de
l’
avenir de son effort. Pour mon compte, je crois que l’idée fixe de pro
3788
enir de son effort. Pour mon compte, je crois que
l’
idée fixe de produire peut très bien envahir un cerveau moderne au poi
3789
n’empêche pas notre industriel de philosopher sur
les
sujets les plus divers. Les aphorismes sont assez révélateurs de la m
3790
as notre industriel de philosopher sur les sujets
les
plus divers. Les aphorismes sont assez révélateurs de la mentalité ca
3791
el de philosopher sur les sujets les plus divers.
Les
aphorismes sont assez révélateurs de la mentalité capitaliste américa
3792
divers. Les aphorismes sont assez révélateurs de
la
mentalité capitaliste américaine. Voici, par exemple, une définition
3793
américaine. Voici, par exemple, une définition de
la
liberté : La liberté consiste à travailler pendant le temps convenab
3794
ici, par exemple, une définition de la liberté :
La
liberté consiste à travailler pendant le temps convenable et à gagner
3795
berté : La liberté consiste à travailler pendant
le
temps convenable et à gagner, par ce moyen, de quoi vivre convenablem
3796
ement tout en restant maître de régler à sa guise
le
détail de sa vie privée. Cette liberté particulière, et cent autres p
3797
e, et cent autres pareilles, composent, au total,
la
grande Liberté idéale et mettent de l’huile dans les rouages de la vi
3798
au total, la grande Liberté idéale et mettent de
l’
huile dans les rouages de la vie quotidienne. Cette Liberté idéale ré
3799
grande Liberté idéale et mettent de l’huile dans
les
rouages de la vie quotidienne. Cette Liberté idéale réduite au rôle
3800
idéale et mettent de l’huile dans les rouages de
la
vie quotidienne. Cette Liberté idéale réduite au rôle d’huile dans l
3801
Cette Liberté idéale réduite au rôle d’huile dans
les
rouages, n’est-ce pas charmant et prometteur ? Et que dire de cette a
3802
pas charmant et prometteur ? Et que dire de cette
admirable
simplification : « Sur quoi repose la société ? Sur les hommes et les
3803
ette admirable simplification : « Sur quoi repose
la
société ? Sur les hommes et les moyens grâce auxquels on cultive, on
3804
mplification : « Sur quoi repose la société ? Sur
les
hommes et les moyens grâce auxquels on cultive, on fabrique, on trans
3805
« Sur quoi repose la société ? Sur les hommes et
les
moyens grâce auxquels on cultive, on fabrique, on transporte. » « Tou
3806
» « Toute notre gloire est dans nos œuvres, dans
le
prix que nous payons à la terre la satisfaction de nos besoins. » — F
3807
t dans nos œuvres, dans le prix que nous payons à
la
terre la satisfaction de nos besoins. » — Ford se moque de la philoso
3808
s œuvres, dans le prix que nous payons à la terre
la
satisfaction de nos besoins. » — Ford se moque de la philosophie. Il
3809
satisfaction de nos besoins. » — Ford se moque de
la
philosophie. Il ne peut empêcher que son attitude ne porte un nom phi
3810
ations plus nettes encore : « Je ne considère pas
les
machines Ford simplement comme des machines. J’y vois la réalisation
3811
ines Ford simplement comme des machines. J’y vois
la
réalisation concrète d’une théorie qui tend à faire de ce monde un sé
3812
tend à faire de ce monde un séjour meilleur pour
les
hommes. » C’est le bonheur, le salut par l’auto. Philosophie réclame.
3813
monde un séjour meilleur pour les hommes. » C’est
le
bonheur, le salut par l’auto. Philosophie réclame. « Ce que j’ai à cœ
3814
our meilleur pour les hommes. » C’est le bonheur,
le
salut par l’auto. Philosophie réclame. « Ce que j’ai à cœur, aujourd’
3815
pour les hommes. » C’est le bonheur, le salut par
l’
auto. Philosophie réclame. « Ce que j’ai à cœur, aujourd’hui, c’est de
3816
j’ai à cœur, aujourd’hui, c’est de démontrer que
les
idées mises en pratique chez nous ne concernent pas particulièrement
3817
ique chez nous ne concernent pas particulièrement
les
autos et les tracteurs, mais composent en quelque manière, un code un
3818
s ne concernent pas particulièrement les autos et
les
tracteurs, mais composent en quelque manière, un code universel ! » R
3819
e matérialiste ? Un seul doute effleure Ford vers
la
fin de son livre : Le problème de la production a été brillamment ré
3820
l doute effleure Ford vers la fin de son livre :
Le
problème de la production a été brillamment résolu… Mais nous nous ab
3821
e Ford vers la fin de son livre : Le problème de
la
production a été brillamment résolu… Mais nous nous absorbons trop da
3822
e pensons pas assez aux raisons que nous avons de
le
faire. Tout notre système de concurrence, tout notre effort de créati
3823
concurrence, tout notre effort de création, tout
le
jeu de nos facultés semblent dirigés uniquement vers la production ma
3824
de nos facultés semblent dirigés uniquement vers
la
production matérielle et vers la richesse qui en est le fruit. On ne
3825
uniquement vers la production matérielle et vers
la
richesse qui en est le fruit. On ne saurait mieux dire. Mais il faud
3826
duction matérielle et vers la richesse qui en est
le
fruit. On ne saurait mieux dire. Mais il faudrait en tirer des consé
3827
de technique. Il n’a pas senti qu’il touchait là
le
nœud vital du problème moderne. D’ailleurs, les idées générales de ce
3828
là le nœud vital du problème moderne. D’ailleurs,
les
idées générales de cette sorte sont rares dans son livre. En général,
3829
èmes techniques où son triomphe est facile. C’est
le
technicien parfait qui combat les techniciens imparfaits. Il ne se de
3830
st facile. C’est le technicien parfait qui combat
les
techniciens imparfaits. Il ne se demande jamais si la technique même
3831
echniciens imparfaits. Il ne se demande jamais si
la
technique même la plus perfectionnée mérite les sacrifices qu’elle ex
3832
its. Il ne se demande jamais si la technique même
la
plus perfectionnée mérite les sacrifices qu’elle exige de l’homme mod
3833
si la technique même la plus perfectionnée mérite
les
sacrifices qu’elle exige de l’homme moderne. Paradoxes plus ou moins
3834
fectionnée mérite les sacrifices qu’elle exige de
l’
homme moderne. Paradoxes plus ou moins intéressés, optimisme d’homme à
3835
imisme d’homme à qui tout réussit, messianisme de
la
machine, méconnaissance glorieuse des forces spirituelles, le tout ag
3836
méconnaissance glorieuse des forces spirituelles,
le
tout agrémenté d’humour et exposé avec un simplisme qui emporte à cou
3837
t exposé avec un simplisme qui emporte à coup sûr
l’
adhésion du gros public : telle est l’idéologie de celui que M. Cambon
3838
à coup sûr l’adhésion du gros public : telle est
l’
idéologie de celui que M. Cambon, dans sa préface, égale aux plus gran
3839
sa préface, égale aux plus grands esprits de tous
les
temps. On me dira que Ford a mieux à faire que de philosopher. Je le
3840
a que Ford a mieux à faire que de philosopher. Je
le
veux. Mais si j’insiste un peu sur ses « idées », c’est pour souligne
3841
idées », c’est pour souligner ce hiatus étrange :
l’
homme qu’on pourrait appeler le plus actif du monde, l’un de ceux qui
3842
e hiatus étrange : l’homme qu’on pourrait appeler
le
plus actif du monde, l’un de ceux qui influent le plus sur notre civi
3843
le plus actif du monde, l’un de ceux qui influent
le
plus sur notre civilisation, possède la philosophie la plus rudimenta
3844
influent le plus sur notre civilisation, possède
la
philosophie la plus rudimentaire. Le phénomène n’est pas nouveau en O
3845
us sur notre civilisation, possède la philosophie
la
plus rudimentaire. Le phénomène n’est pas nouveau en Occident, mais i
3846
ion, possède la philosophie la plus rudimentaire.
Le
phénomène n’est pas nouveau en Occident, mais il est ici tragiquement
3847
bien que notre temps ait prononcé définitivement
le
divorce de l’esprit et de l’action. III. Le fordisme contre l’Espr
3848
e temps ait prononcé définitivement le divorce de
l’
esprit et de l’action. III. Le fordisme contre l’Esprit La formi
3849
noncé définitivement le divorce de l’esprit et de
l’
action. III. Le fordisme contre l’Esprit La formidable erreur de
3850
nt le divorce de l’esprit et de l’action. III.
Le
fordisme contre l’Esprit La formidable erreur de la bourgeoisie mo
3851
esprit et de l’action. III. Le fordisme contre
l’
Esprit La formidable erreur de la bourgeoisie moderne c’est de croi
3852
l’action. III. Le fordisme contre l’Esprit
La
formidable erreur de la bourgeoisie moderne c’est de croire que les c
3853
rdisme contre l’Esprit La formidable erreur de
la
bourgeoisie moderne c’est de croire que les choses pourront aller ain
3854
eur de la bourgeoisie moderne c’est de croire que
les
choses pourront aller ainsi longtemps encore. On se refuse à l’idée d
3855
ront aller ainsi longtemps encore. On se refuse à
l’
idée d’une catastrophe, pourtant plus que probable, par crainte de se
3856
lus que probable, par crainte de se voir obligé à
la
révision des valeurs, la plus difficile et la plus grave : celle qu’o
3857
inte de se voir obligé à la révision des valeurs,
la
plus difficile et la plus grave : celle qu’on ne peut faire qu’au nom
3858
é à la révision des valeurs, la plus difficile et
la
plus grave : celle qu’on ne peut faire qu’au nom de l’Esprit et de se
3859
us grave : celle qu’on ne peut faire qu’au nom de
l’
Esprit et de ses exigences. Mais le « rien de nouveau sous le soleil »
3860
e qu’au nom de l’Esprit et de ses exigences. Mais
le
« rien de nouveau sous le soleil » derrière lequel on se réfugie avec
3861
de ses exigences. Mais le « rien de nouveau sous
le
soleil » derrière lequel on se réfugie avec une paresse et une légère
3862
e avec une paresse et une légèreté inouïes, c’est
le
signe d’une complicité avec un état de choses funeste pour l’Esprit.
3863
ne complicité avec un état de choses funeste pour
l’
Esprit. Si l’Esprit nous abandonne, c’est que nous avons voulu tenter
3864
avec un état de choses funeste pour l’Esprit. Si
l’
Esprit nous abandonne, c’est que nous avons voulu tenter sans lui une
3865
e que nous pensions gratuite : nous avons cherché
le
bonheur dans le développement matériel, avec l’arrière-pensée sournoi
3866
ons gratuite : nous avons cherché le bonheur dans
le
développement matériel, avec l’arrière-pensée sournoise que, si cela
3867
é le bonheur dans le développement matériel, avec
l’
arrière-pensée sournoise que, si cela ratait, on gardait toutes les au
3868
sournoise que, si cela ratait, on gardait toutes
les
autres chances. J’accorderai que le progrès matériel n’est pas mauvai
3869
rdait toutes les autres chances. J’accorderai que
le
progrès matériel n’est pas mauvais en soi. Mais par l’importance qu’i
3870
ogrès matériel n’est pas mauvais en soi. Mais par
l’
importance qu’il a prise dans notre vie, il détourne la civilisation d
3871
ortance qu’il a prise dans notre vie, il détourne
la
civilisation de son but véritable : aller à l’Esprit, y conduire les
3872
ne la civilisation de son but véritable : aller à
l’
Esprit, y conduire les peuples. Ainsi, détournant de l’essentiel une g
3873
son but véritable : aller à l’Esprit, y conduire
les
peuples. Ainsi, détournant de l’essentiel une grande part des forces
3874
rit, y conduire les peuples. Ainsi, détournant de
l’
essentiel une grande part des forces humaines, il travaille contre l’E
3875
nde part des forces humaines, il travaille contre
l’
Esprit. Rien n’est gratuit. Nous payons notre passion de posséder la m
3876
st gratuit. Nous payons notre passion de posséder
la
matière du prix de la seule possession véritable, la connaissance de
3877
s notre passion de posséder la matière du prix de
la
seule possession véritable, la connaissance de l’Esprit. C’est déjà u
3878
matière du prix de la seule possession véritable,
la
connaissance de l’Esprit. C’est déjà un fait d’expérience. Et qui n’e
3879
la seule possession véritable, la connaissance de
l’
Esprit. C’est déjà un fait d’expérience. Et qui n’en pourrait citer un
3880
ple individuel ? Nous savons assez en quel mépris
l’
homme d’affaires à l’américaine tient les choses de l’Esprit. Dans le
3881
savons assez en quel mépris l’homme d’affaires à
l’
américaine tient les choses de l’Esprit. Dans le cas le plus favorable
3882
el mépris l’homme d’affaires à l’américaine tient
les
choses de l’Esprit. Dans le cas le plus favorable, « il se passera bi
3883
mme d’affaires à l’américaine tient les choses de
l’
Esprit. Dans le cas le plus favorable, « il se passera bien de cette l
3884
à l’américaine tient les choses de l’Esprit. Dans
le
cas le plus favorable, « il se passera bien de cette littérature ». P
3885
ricaine tient les choses de l’Esprit. Dans le cas
le
plus favorable, « il se passera bien de cette littérature ». Plus tar
3886
symphonies, ou autres œuvres destinées à charmer
les
loisirs de personnes oisives et raffinées, réunies pour admirer mutue
3887
ement leur culture », dit Ford. Et tout est dit !
Le
simplisme arrogant avec lequel, de nos jours, on tranche les grandes
3888
me arrogant avec lequel, de nos jours, on tranche
les
grandes questions humaines est une des manifestations les plus frappa
3889
des questions humaines est une des manifestations
les
plus frappantes de notre régression. Cette perte du sens de l’âme se
3890
antes de notre régression. Cette perte du sens de
l’
âme se nomme bon sens américain. On en fait quelque chose de jovial et
3891
ophie. Mais, sans qu’on s’en doute, cela en prend
la
place. Les facultés de l’âme, inutilisées, s’atrophient. Pourvu, dit-
3892
s, sans qu’on s’en doute, cela en prend la place.
Les
facultés de l’âme, inutilisées, s’atrophient. Pourvu, dit-on, que sub
3893
en doute, cela en prend la place. Les facultés de
l’
âme, inutilisées, s’atrophient. Pourvu, dit-on, que subsiste le peu de
3894
isées, s’atrophient. Pourvu, dit-on, que subsiste
le
peu de morale nécessaire aux affaires, tout ira bien. (On pense que l
3895
ssaire aux affaires, tout ira bien. (On pense que
les
formes de la morale peuvent exister sans leur substance religieuse.)
3896
aires, tout ira bien. (On pense que les formes de
la
morale peuvent exister sans leur substance religieuse.) L’homme moder
3897
peuvent exister sans leur substance religieuse.)
L’
homme moderne manie les choses de l’âme avec une maladresse de barbare
3898
leur substance religieuse.) L’homme moderne manie
les
choses de l’âme avec une maladresse de barbare. IV. « En être » ou
3899
religieuse.) L’homme moderne manie les choses de
l’
âme avec une maladresse de barbare. IV. « En être » ou ne pas en êt
3900
en être Une fois qu’on a compris à quel point
le
fordisme et l’Esprit sont incompatibles, le monde moderne impose ce d
3901
fois qu’on a compris à quel point le fordisme et
l’
Esprit sont incompatibles, le monde moderne impose ce dilemme : « en ê
3902
point le fordisme et l’Esprit sont incompatibles,
le
monde moderne impose ce dilemme : « en être » ou ne pas en être, c’es
3903
» ou ne pas en être, c’est-à-dire se soumettre à
la
technique et s’abrutir spirituellement — ou se soumettre à l’Esprit,
3904
et s’abrutir spirituellement — ou se soumettre à
l’
Esprit, et tomber presque fatalement dans un anarchisme stérile. 1° Ac
3905
atalement dans un anarchisme stérile. 1° Accepter
la
technique et ses conditions. Dans cette mécanique bien huilée, au mou
3906
nt si régulier qu’il en devient insensible et que
la
fatigue semble disparaître, l’homme s’abandonne à des lois géométriqu
3907
insensible et que la fatigue semble disparaître,
l’
homme s’abandonne à des lois géométriques. Un jeu de chiffres d’horlog
3908
une fois pour toutes et qu’il sent immuable comme
la
mort le restitue au monde vers 5 heures du soir, dans la détresse des
3909
pour toutes et qu’il sent immuable comme la mort
le
restitue au monde vers 5 heures du soir, dans la détresse des dernièr
3910
le restitue au monde vers 5 heures du soir, dans
la
détresse des dernières sirènes. Au monde, c’est-à-dire à une nature d
3911
sirènes. Au monde, c’est-à-dire à une nature dont
l’
usine lui a fait oublier jusqu’à l’existence, et à une liberté qu’il s
3912
ne nature dont l’usine lui a fait oublier jusqu’à
l’
existence, et à une liberté qu’il s’empresse d’aliéner au profit de pl
3913
vec ses désirs réels, et dont il subit docilement
l’
abstraite et commerciale nécessité. Ennui, fatigue, sommeil sans prièr
3914
il sans prière. Cela s’appelle encore vivre. Mais
l’
homme qui était un membre vivant dans le corps de la Nature, lié par l
3915
vre. Mais l’homme qui était un membre vivant dans
le
corps de la Nature, lié par les liens les plus subtils et les plus pr
3916
homme qui était un membre vivant dans le corps de
la
Nature, lié par les liens les plus subtils et les plus profonds à tou
3917
membre vivant dans le corps de la Nature, lié par
les
liens les plus subtils et les plus profonds à tous les autres membres
3918
ant dans le corps de la Nature, lié par les liens
les
plus subtils et les plus profonds à tous les autres membres de la Nat
3919
la Nature, lié par les liens les plus subtils et
les
plus profonds à tous les autres membres de la Nature, choses, bêtes e
3920
iens les plus subtils et les plus profonds à tous
les
autres membres de la Nature, choses, bêtes et anges, — le voici deven
3921
et les plus profonds à tous les autres membres de
la
Nature, choses, bêtes et anges, — le voici devenu sourd à cette harmo
3922
s membres de la Nature, choses, bêtes et anges, —
le
voici devenu sourd à cette harmonie universelle, incapable d’en compr
3923
e harmonie universelle, incapable d’en comprendre
les
correspondances divines et humaines, insensible même à sa déchéance,
3924
ines, insensible même à sa déchéance, abandonné à
la
lutte tragique et absurde des lois économiques et des exigences les p
3925
et absurde des lois économiques et des exigences
les
plus rudimentaires de son corps. Il a perdu le contact avec les chose
3926
s les plus rudimentaires de son corps. Il a perdu
le
contact avec les choses naturelles, et par là même, avec les surnatur
3927
entaires de son corps. Il a perdu le contact avec
les
choses naturelles, et par là même, avec les surnaturelles. Il en ress
3928
avec les choses naturelles, et par là même, avec
les
surnaturelles. Il en ressent une vague et intermittente détresse, — q
3929
ntermittente détresse, — qu’il met d’ailleurs sur
le
compte de sa fatigue. Neurasthénie. La conquête du confort matériel l
3930
lleurs sur le compte de sa fatigue. Neurasthénie.
La
conquête du confort matériel l’a laissé oublier les valeurs de l’espr
3931
ue. Neurasthénie. La conquête du confort matériel
l’
a laissé oublier les valeurs de l’esprit au point qu’il n’éprouve plus
3932
a conquête du confort matériel l’a laissé oublier
les
valeurs de l’esprit au point qu’il n’éprouve plus même cette carence
3933
onfort matériel l’a laissé oublier les valeurs de
l’
esprit au point qu’il n’éprouve plus même cette carence ; seulement, p
3934
térielles, il a laissé se détendre, ou il a cassé
les
ressorts de sa joie : l’effort libre et généreux, le sentiment d’avoi
3935
détendre, ou il a cassé les ressorts de sa joie :
l’
effort libre et généreux, le sentiment d’avoir inventé ou compris par
3936
ressorts de sa joie : l’effort libre et généreux,
le
sentiment d’avoir inventé ou compris par soi-même, la liberté et une
3937
entiment d’avoir inventé ou compris par soi-même,
la
liberté et une certaine durée normale et capricieuse dans le plaisir,
3938
et une certaine durée normale et capricieuse dans
le
plaisir, la conscience de ses besoins et de ses buts propres, humains
3939
ine durée normale et capricieuse dans le plaisir,
la
conscience de ses besoins et de ses buts propres, humains et divins.
3940
s loisirs. Ford lui a donné une auto pour admirer
la
nature entre 17 et 19 heures : vraiment, il ne lui manque plus rien —
3941
ures : vraiment, il ne lui manque plus rien — que
l’
envie. Mauvais travail. Il a perdu le sens religieux, cosmique, de l’e
3942
s rien — que l’envie. Mauvais travail. Il a perdu
le
sens religieux, cosmique, de l’effort humain. Il ne peut plus situer
3943
avail. Il a perdu le sens religieux, cosmique, de
l’
effort humain. Il ne peut plus situer son effort individuel dans le mo
3944
Il ne peut plus situer son effort individuel dans
le
monde, lui attribuer sa véritable valeur. Il sent obscurément que son
3945
t obscurément que son travail est antinaturel. Il
le
méprise ou le subit, mais, jusque dans son repos, il en est l’esclave
3946
que son travail est antinaturel. Il le méprise ou
le
subit, mais, jusque dans son repos, il en est l’esclave. Pour s’être
3947
le subit, mais, jusque dans son repos, il en est
l’
esclave. Pour s’être exclu lui-même de l’ordre de la nature, il est co
3948
l en est l’esclave. Pour s’être exclu lui-même de
l’
ordre de la nature, il est condamné à ne plus saisir que des rapports
3949
esclave. Pour s’être exclu lui-même de l’ordre de
la
nature, il est condamné à ne plus saisir que des rapports abstraits e
3950
à ne plus saisir que des rapports abstraits entre
les
choses. Il ne comprend presque plus rien à l’Univers. Par la techniqu
3951
re les choses. Il ne comprend presque plus rien à
l’
Univers. Par la technique, l’Occidental a prétendu maîtriser la matièr
3952
Il ne comprend presque plus rien à l’Univers. Par
la
technique, l’Occidental a prétendu maîtriser la matière et parvenir à
3953
presque plus rien à l’Univers. Par la technique,
l’
Occidental a prétendu maîtriser la matière et parvenir à une liberté p
3954
r la technique, l’Occidental a prétendu maîtriser
la
matière et parvenir à une liberté plus haute. Or, la technique a révé
3955
matière et parvenir à une liberté plus haute. Or,
la
technique a révélé des exigences telles que l’Esprit ne peut les supp
3956
r, la technique a révélé des exigences telles que
l’
Esprit ne peut les supporter. Il abandonne donc la place, mais c’est p
3957
révélé des exigences telles que l’Esprit ne peut
les
supporter. Il abandonne donc la place, mais c’est pourtant lui seul q
3958
l’Esprit ne peut les supporter. Il abandonne donc
la
place, mais c’est pourtant lui seul qui nous permettrait de jouir de
3959
l qui nous permettrait de jouir de notre liberté.
La
victoire mécanicienne est une victoire à la Pyrrhus. Elle nous donne
3960
erté. La victoire mécanicienne est une victoire à
la
Pyrrhus. Elle nous donne une liberté dont nous ne sommes plus dignes.
3961
dont nous ne sommes plus dignes. Nous perdons, en
l’
acquérant, par l’effort de l’acquérir, les forces mêmes qui nous la fi
3962
es plus dignes. Nous perdons, en l’acquérant, par
l’
effort de l’acquérir, les forces mêmes qui nous la firent désirer. 2°
3963
es. Nous perdons, en l’acquérant, par l’effort de
l’
acquérir, les forces mêmes qui nous la firent désirer. 2° Accepter l’
3964
dons, en l’acquérant, par l’effort de l’acquérir,
les
forces mêmes qui nous la firent désirer. 2° Accepter l’esprit, et se
3965
l’effort de l’acquérir, les forces mêmes qui nous
la
firent désirer. 2° Accepter l’esprit, et ses conditions. Je dis que
3966
es mêmes qui nous la firent désirer. 2° Accepter
l’
esprit, et ses conditions. Je dis que les êtres encore doués de quelqu
3967
Accepter l’esprit, et ses conditions. Je dis que
les
êtres encore doués de quelque sensibilité spirituelle deviennent par
3968
de quelque sensibilité spirituelle deviennent par
le
seul fait de rester eux-mêmes dans un monde fordisé, des anarchistes.
3969
mêmes dans un monde fordisé, des anarchistes. Car
l’
Esprit n’est pas un luxe, n’est pas une faculté destinée à amuser nos
3970
s exigences sont en contradiction avec celles que
le
développement de la technique impose au monde moderne. Ces êtres, d’u
3971
contradiction avec celles que le développement de
la
technique impose au monde moderne. Ces êtres, d’une espèce de plus en
3972
en plus rare, qui savent encore quelque chose de
la
vie profonde, qui voient encore des vérités invisibles, qui gardent,
3973
t considèrent comme un « cas » très spécial, — on
les
écarte des engrenages où ils risqueraient de faire grain de sable. Il
3974
. Ils se réfugient dans ce qu’on pourrait appeler
les
classes privilégiées de l’esprit : fortunes oisives ou misères sans e
3975
u’on pourrait appeler les classes privilégiées de
l’
esprit : fortunes oisives ou misères sans espoir. On en rencontre enco
3976
misères sans espoir. On en rencontre encore parmi
les
jeunes gens, jusqu’au jour où, comme on dit, sans doute par ironie, «
3977
u jour où, comme on dit, sans doute par ironie, «
la
vie les prend ». Irréguliers aux yeux du monde ; la proie d’on ne sai
3978
où, comme on dit, sans doute par ironie, « la vie
les
prend ». Irréguliers aux yeux du monde ; la proie d’on ne sait quelle
3979
vie les prend ». Irréguliers aux yeux du monde ;
la
proie d’on ne sait quelles forces occultes sans doute dangereuses, pu
3980
ces occultes sans doute dangereuses, puisqu’elles
les
rendent inutilisables dans les rouages de la vie moderne. Le triomphe
3981
uses, puisqu’elles les rendent inutilisables dans
les
rouages de la vie moderne. Le triomphe de Ford réduira l’Esprit à dev
3982
les les rendent inutilisables dans les rouages de
la
vie moderne. Le triomphe de Ford réduira l’Esprit à devenir l’apanage
3983
inutilisables dans les rouages de la vie moderne.
Le
triomphe de Ford réduira l’Esprit à devenir l’apanage d’une sorte de
3984
es de la vie moderne. Le triomphe de Ford réduira
l’
Esprit à devenir l’apanage d’une sorte de franc-maçonnerie de quelques
3985
e. Le triomphe de Ford réduira l’Esprit à devenir
l’
apanage d’une sorte de franc-maçonnerie de quelques centaines d’indivi
3986
a bientôt traquée avec la dernière rigueur : avec
la
rigueur de la nécessité — puisqu’elle est inutile au grand dessein ma
3987
uée avec la dernière rigueur : avec la rigueur de
la
nécessité — puisqu’elle est inutile au grand dessein matérialiste de
3988
elle est inutile au grand dessein matérialiste de
l’
Occident. La logique, parlant par la bouche de Ford : « Inutile, donc
3989
tile au grand dessein matérialiste de l’Occident.
La
logique, parlant par la bouche de Ford : « Inutile, donc à détruire.
3990
térialiste de l’Occident. La logique, parlant par
la
bouche de Ford : « Inutile, donc à détruire. » Ford a raison, une foi
3991
e ? « Vous ne pouvez servir Dieu et Mammon », dit
l’
Écriture. ⁂ Je ne pense pas qu’une attitude réactionnaire qui consist
3992
tionnaire qui consisterait à vouloir en revenir à
la
période préindustrielle soit autre chose qu’une échappatoire utopique
3993
uts — si bas soient-ils — d’une civilisation sous
le
poids de laquelle nous risquons de périr. Il se prépare déjà des révo
3994
isme exaspéré, devenu presque fou dans sa prison.
Les
intellectuels d’aujourd’hui ont une tâche pressante : chercher s’il e
3995
le d’échapper au fatal dilemme. Premiers pas vers
la
solution : l’existence du dilemme. Second pas : en poser les termes a
3996
au fatal dilemme. Premiers pas vers la solution :
l’
existence du dilemme. Second pas : en poser les termes avec netteté et
3997
n : l’existence du dilemme. Second pas : en poser
les
termes avec netteté et courage. Pour le reste, je pense que c’est une
3998
en poser les termes avec netteté et courage. Pour
le
reste, je pense que c’est une question de foi. 1. Une enquête fait
3999
oi. 1. Une enquête faite à Genève a révélé que
les
livres les plus lus du grand public sont Ma vie et mon œuvre, de Ford
4000
ne enquête faite à Genève a révélé que les livres
les
plus lus du grand public sont Ma vie et mon œuvre, de Ford et Mon cur
4001
ont Ma vie et mon œuvre, de Ford et Mon curé chez
les
riches, de Clément Vautel. Dans les pays de langue allemande, son suc
4002
Mon curé chez les riches, de Clément Vautel. Dans
les
pays de langue allemande, son succès est encore plus grand, et de mei
4003
rand, et de meilleure qualité. Je ne parle pas de
l’
Amérique. 2. Victor Cambon, préface à Henry Ford, Ma vie et mon œuvre
4004
rd, Ma vie et mon œuvre, Paris, Payot, 1925. 3.
L’
Illustration, 20 novembre 1926. 4. Ici et là, la révolte perce : « Ju
4005
L’Illustration, 20 novembre 1926. 4. Ici et là,
la
révolte perce : « Jugendbewegung » en Allemagne ; surréalisme en Fran
4006
, en Amérique ; poussée mystique en Russie. a. «
Le
péril Ford », Foi et Vie, Paris, n° 4, février 1928, p. 189-202.
4007
n étoile nervalienne. Je vins à Vienne pour fuir
l’
Amérique. Mais les Viennois avaient fui dans les opérettes de Strauss,
4008
nne. Je vins à Vienne pour fuir l’Amérique. Mais
les
Viennois avaient fui dans les opérettes de Strauss, qu’on ne trouve p
4009
ir l’Amérique. Mais les Viennois avaient fui dans
les
opérettes de Strauss, qu’on ne trouve plus nulle part. Dans les danci
4010
de Strauss, qu’on ne trouve plus nulle part. Dans
les
dancings, un peuple de fêtards modérés, Juifs et ressortissants de la
4011
le de fêtards modérés, Juifs et ressortissants de
la
Petite-Entente, applaudissait chaque soir entre deux airs anglais Le
4012
applaudissait chaque soir entre deux airs anglais
Le
Beau Danube bleu, en commémoration polie d’un passé imaginaire, ou pe
4013
ntissait cette Vienne tout occupée à ressembler à
l’
idée qu’on s’en fait. Le Ring, trop large, ouvert au vent glacial, cré
4014
ut occupée à ressembler à l’idée qu’on s’en fait.
Le
Ring, trop large, ouvert au vent glacial, crée autour du centre de la
4015
ouvert au vent glacial, crée autour du centre de
la
ville une insécurité qui fait songer à la Russie et au sifflement des
4016
ntre de la ville une insécurité qui fait songer à
la
Russie et au sifflement des balles perdues d’une révolution. Sept heu
4017
s perdues d’une révolution. Sept heures du soir :
le
moment était venu d’arrêter le plan de la soirée, et cette promenade
4018
t heures du soir : le moment était venu d’arrêter
le
plan de la soirée, et cette promenade où il y avait juste assez de pa
4019
soir : le moment était venu d’arrêter le plan de
la
soirée, et cette promenade où il y avait juste assez de passants pour
4020
où il y avait juste assez de passants pour qu’on
la
sentît déserte ne me proposait qu’une frileuse nostalgie. Mais qui fa
4021
d’intensité, un état d’âme crée une situation qui
l’
exprime — bien qu’on pense généralement le contraire. Il est très vrai
4022
ion qui l’exprime — bien qu’on pense généralement
le
contraire. Il est très vrai que les notions réaliste et idéaliste du
4023
e généralement le contraire. Il est très vrai que
les
notions réaliste et idéaliste du monde ne sont séparées que par un lé
4024
e ne sont séparées que par un léger décalage dans
la
chronologie de nos sentiments et de nos actes. Donc, n’ayant pas reno
4025
onduit, par une sorte de compromis sentimental, à
l’
Opéra où l’on donnait les Contes d’Hoffmann. Je comprends aujourd’hui
4026
une sorte de compromis sentimental, à l’Opéra où
l’
on donnait les Contes d’Hoffmann. Je comprends aujourd’hui le lien qui
4027
compromis sentimental, à l’Opéra où l’on donnait
les
Contes d’Hoffmann. Je comprends aujourd’hui le lien qui unissait dans
4028
t les Contes d’Hoffmann. Je comprends aujourd’hui
le
lien qui unissait dans mon esprit Vienne et Hoffmann : c’était le sou
4029
sait dans mon esprit Vienne et Hoffmann : c’était
le
souvenir de Gérard de Nerval. Mais je pense que je n’avais même pas p
4030
ncé intérieurement ce nom lorsque je m’assis dans
l’
ombre du théâtre, en retard, un peu ennuyé de me trouver à côté d’une
4031
eu ennuyé de me trouver à côté d’une place vide :
la
jolie femme qu’on attend dans ces circonstances, une fois de plus man
4032
dans ces circonstances, une fois de plus manquait
le
rendez-vous que j’avais demandé au hasard d’arranger. Mais le thème d
4033
us que j’avais demandé au hasard d’arranger. Mais
le
thème de la Barcarolle s’empare de tout mon être — ainsi d’autres dev
4034
is demandé au hasard d’arranger. Mais le thème de
la
Barcarolle s’empare de tout mon être — ainsi d’autres deviennent patr
4035
eul peut-être cette plainte heureuse des violons.
Le
diable sort des parois, noir et blanc, la ravissante héroïne est à so
4036
iolons. Le diable sort des parois, noir et blanc,
la
ravissante héroïne est à son piano, c’est un duo des ténèbres et de l
4037
est à son piano, c’est un duo des ténèbres et de
la
pureté où vibrent par instants les accords d’une harmonie surnaturell
4038
ténèbres et de la pureté où vibrent par instants
les
accords d’une harmonie surnaturelle. Et tout cela chanté dans une lan
4039
p plus loin que moi, il n’entend pas ma question.
L’
envie me prend d’aller le rejoindre. Me voici tout abandonné à l’évoca
4040
’entend pas ma question. L’envie me prend d’aller
le
rejoindre. Me voici tout abandonné à l’évocation d’un amour tragiquem
4041
d d’aller le rejoindre. Me voici tout abandonné à
l’
évocation d’un amour tragiquement mêlé à des forces inconnues et menaç
4042
t mêlé à des forces inconnues et menaçantes. Mais
la
musique est si légère, la voix de la jeune fille si transparente : la
4043
ues et menaçantes. Mais la musique est si légère,
la
voix de la jeune fille si transparente : la mort même en devient moin
4044
çantes. Mais la musique est si légère, la voix de
la
jeune fille si transparente : la mort même en devient moins brutale.
4045
gère, la voix de la jeune fille si transparente :
la
mort même en devient moins brutale. Elle rôde ici comme une tristesse
4046
omme une tristesse amoureuse. Elle n’est plus que
l’
approche d’une grandeur où se perdraient nos amours terrestres dans d’
4047
rrestres dans d’imprévisibles transfigurations, —
l’
heure anxieuse et mélancolique où l’on quitte ce visage aimé pour d’au
4048
igurations, — l’heure anxieuse et mélancolique où
l’
on quitte ce visage aimé pour d’autres plus beaux peut-être, mais inco
4049
es plus beaux peut-être, mais inconnus. Voilà que
la
forme blanche, sous un brusque faisceau de lumière m’apparaît avec le
4050
us un brusque faisceau de lumière m’apparaît avec
le
visage même de mon amour. Je me sens voluptueusement perdre pied. Ver
4051
ix, à côté de moi, c’est une chose singulière que
le
pouvoir de cette musique. Voici que vous êtes tout près de comprendre
4052
ourtant ne se détournait. Comment pouvais-je être
le
seul à l’avoir entendu ? — C’est, me répondit-il, que seul vous venez
4053
se détournait. Comment pouvais-je être le seul à
l’
avoir entendu ? — C’est, me répondit-il, que seul vous venez d’atteind
4054
renez certaines choses par votre souffrance… Mais
le
temps approche où vous n’aurez plus besoin de souffrir pour comprendr
4055
n’aurez plus besoin de souffrir pour comprendre.
Le
faisceau de lumière quitta la scène, un reflet balaya le parterre, le
4056
ir pour comprendre. Le faisceau de lumière quitta
la
scène, un reflet balaya le parterre, le visage de mon voisin m’apparu
4057
ceau de lumière quitta la scène, un reflet balaya
le
parterre, le visage de mon voisin m’apparut, pâle dans son collier de
4058
re quitta la scène, un reflet balaya le parterre,
le
visage de mon voisin m’apparut, pâle dans son collier de barbe noire.
4059
dans son collier de barbe noire. Je sentis que je
l’
avais déjà reconnu. Il portait une cape bleu sombre, à la mode de 1830
4060
déjà reconnu. Il portait une cape bleu sombre, à
la
mode de 1830, qui, à la rigueur, pouvait passer pour une élégance trè
4061
t une cape bleu sombre, à la mode de 1830, qui, à
la
rigueur, pouvait passer pour une élégance très moderne. Il n’y avait
4062
e rien de positivement démodé ; je n’eus même pas
le
sentiment de quoi que ce soit d’immatériel. D’ailleurs le trouble où
4063
ment de quoi que ce soit d’immatériel. D’ailleurs
le
trouble où m’avait jeté la première reconnaissance empêcha ma raison
4064
connaissance empêcha ma raison d’intervenir entre
la
réalité de ma vision et mon cerveau pris au défaut de sa carapace de
4065
rincipes et d’évidences opaques. Nous sortîmes de
l’
Opéra, Gérard de Nerval et moi, sans nous être rien dit d’autre, comme
4066
un échange tacite suffit aux petites décisions de
la
vie quotidienne. Gérard tenait en laisse le fameux homard enrubanné.
4067
ns de la vie quotidienne. Gérard tenait en laisse
le
fameux homard enrubanné. « Cela vexe les Viennois, me dit-il, parce q
4068
en laisse le fameux homard enrubanné. « Cela vexe
les
Viennois, me dit-il, parce qu’ils y voient une façon de me moquer de
4069
n suis pas fâché. » Il y avait peu de monde dans
les
rues. Des jeunes gens avec une femme à chaque bras, l’air de ne pas t
4070
es. Des jeunes gens avec une femme à chaque bras,
l’
air de ne pas trop s’amuser. — Ceci du moins n’a guère changé, dis-je,
4071
ours de Vienne. — Certes, répondit Gérard, malgré
les
apparences, cette vie sentimentale est une des seules réalités qui co
4072
ne des seules réalités qui correspondent encore à
l’
image classique de Vienne. Sentimentalisme capricieux d’ailleurs, dépo
4073
t. Cette ville, qui est toute caresses, a peur de
l’
étreinte… C’est d’ailleurs une chose que je comprends assez bien, ajou
4074
s traversions une rue sillonnée de taxis rapides,
le
homard refusa obstinément de progresser. Gérard dut le prendre sous l
4075
mard refusa obstinément de progresser. Gérard dut
le
prendre sous le bras, et les paires de pinces s’accrochèrent désespér
4076
inément de progresser. Gérard dut le prendre sous
le
bras, et les paires de pinces s’accrochèrent désespérément à ses manc
4077
rogresser. Gérard dut le prendre sous le bras, et
les
paires de pinces s’accrochèrent désespérément à ses manches. De terre
4078
ochèrent désespérément à ses manches. De terreur,
le
homard avait rougi : il conserva toute la nuit une magnifique couleur
4079
erreur, le homard avait rougi : il conserva toute
la
nuit une magnifique couleur orangée. Gérard semblait habitué à ces so
4080
ait habitué à ces sortes de scènes. On reparla de
l’
inconstance viennoise. Gérard l’attribuait à une certaine anémie des s
4081
es. On reparla de l’inconstance viennoise. Gérard
l’
attribuait à une certaine anémie des sentiments, à un manque de caract
4082
e des sentiments, à un manque de caractère aussi.
La
fidélité véritable est une œuvre d’art qui demande un long effort, et
4083
st une œuvre d’art qui demande un long effort, et
les
Viennois sont, par nature et par attitude, des gens fatigués. — Pour
4084
s gens fatigués. — Pour moi, dit Gérard, je situe
l’
amour dans un monde où la question fidélité ou inconstance ne se pose
4085
oi, dit Gérard, je situe l’amour dans un monde où
la
question fidélité ou inconstance ne se pose plus. Vous le savez, je n
4086
ion fidélité ou inconstance ne se pose plus. Vous
le
savez, je n’ai aimé qu’une femme — au plus deux, en y réfléchissant b
4087
en y réfléchissant bien, mais peut-être était-ce
la
même sous deux attributs différents. Toutes les femmes qui m’ont rete
4088
ce la même sous deux attributs différents. Toutes
les
femmes qui m’ont retenu un instant, c’était parce qu’elles évoquaient
4089
raissaient purement mystiques… Mais vous savez, «
les
autres » n’y comprennent jamais rien, dès qu’on aime… Oh ! cette femm
4090
ard, un certain regard, mais j’ai su en retrouver
la
sensation jusque dans les choses — et c’est cela seul qui donna un se
4091
ais j’ai su en retrouver la sensation jusque dans
les
choses — et c’est cela seul qui donna un sens au monde. — Mais je bav
4092
mps. Livrons-nous plutôt à une petite malice dont
l’
idée me vient à la vue de cette vendeuse de fleurs. C’était la petite
4093
ent à la vue de cette vendeuse de fleurs. C’était
la
petite bossue qui vend des roses et des œillets dans la rue de Carint
4094
ite bossue qui vend des roses et des œillets dans
la
rue de Carinthie. Gérard lui paya quelques œillets rouges en lui expl
4095
s œillets rouges en lui expliquant qu’elle devait
les
donner à la première jolie femme qui passerait seule. Nous nous arrêt
4096
vanture de robes de soie, nous amusant à imaginer
les
corps précieux qui les revêtiraient. Vint à pas pressés une jeune fem
4097
e, nous amusant à imaginer les corps précieux qui
les
revêtiraient. Vint à pas pressés une jeune femme, chapeau rouge et ma
4098
e qui se passa fut, hélas, non moins inévitable :
la
jeune femme refusa d’abord les fleurs pour se donner le temps de rega
4099
moins inévitable : la jeune femme refusa d’abord
les
fleurs pour se donner le temps de regarder autour d’elle ; l’intérêt
4100
ne femme refusa d’abord les fleurs pour se donner
le
temps de regarder autour d’elle ; l’intérêt que nous ne sûmes pas dis
4101
ur se donner le temps de regarder autour d’elle ;
l’
intérêt que nous ne sûmes pas dissimuler nous trahit ; elle finit donc
4102
r accepter et vint à nous avec un sourire du type
le
plus courant : « Vous êtes bien gentils, messieurs ! » Il n’y avait p
4103
ard attendait évidemment quelque chose d’imprévu,
la
seule chose contraire à la coutume viennoise. L’enfant était charmant
4104
elque chose d’imprévu, la seule chose contraire à
la
coutume viennoise. L’enfant était charmante, comme elles le sont pres
4105
la seule chose contraire à la coutume viennoise.
L’
enfant était charmante, comme elles le sont presque toutes dans cette
4106
viennoise. L’enfant était charmante, comme elles
le
sont presque toutes dans cette ville, — du type que Gérard et Théo no
4107
and bruit de saxophones et de cors anglais jouant
la
Marche de Tannhäuser en tango, un Balkanique très lisse nous délivra
4108
ue très lisse nous délivra de notre conquête pour
la
durée des danses. Gérard bâillait : « Voilà ce que c’est que de prend
4109
leure qualité : car c’est une pauvre illusion que
le
plaisir qu’on vient chercher ici avec le premier être venu. — Certes,
4110
le premier être venu. — Certes, je comprends que
l’
Europe est en décadence quand je la regarde s’amuser. Je vois se perdr
4111
comprends que l’Europe est en décadence quand je
la
regarde s’amuser. Je vois se perdre ce sens des correspondances secrè
4112
ules faisaient sa dignité humaine, parce qu’elles
le
rattachaient aux buts les plus hauts de notre vie. Ces citadins blasé
4113
humaine, parce qu’elles le rattachaient aux buts
les
plus hauts de notre vie. Ces citadins blasés s’amusent plus grossière
4114
é, avec des femmes qui élargissent des sourires à
la
mesure de votre générosité. Vos boîtes de nuit sont des sortes de dis
4115
automatiques de plaisir. Autant dire que ceux qui
les
fréquentent ne savent plus ce que c’est que le plaisir. Ils prennent
4116
i les fréquentent ne savent plus ce que c’est que
le
plaisir. Ils prennent au hasard des liqueurs qui n’ont pas été prépar
4117
été préparées pour leur soif. Ils ne savent plus
les
signes ni les ressemblances. Aussi l’ennui règne-t-il bruyamment dans
4118
pour leur soif. Ils ne savent plus les signes ni
les
ressemblances. Aussi l’ennui règne-t-il bruyamment dans ces lieux : c
4119
avent plus les signes ni les ressemblances. Aussi
l’
ennui règne-t-il bruyamment dans ces lieux : cet orchestre triomphant
4120
élémentaires : Ce sont vos contemporains livrés à
la
démocratie des plaisirs achetés au détail dans une foire éclatante de
4121
au détail dans une foire éclatante de faux luxe.
La
misère est de voir ici des femmes aussi ravissantes que celle-là qui
4122
nt de gravité et de détachement. Je viens souvent
la
regarder, à cause de la noblesse de sa danse. Je la nomme Clarissa, p
4123
chement. Je viens souvent la regarder, à cause de
la
noblesse de sa danse. Je la nomme Clarissa, parce que cela lui va. Ma
4124
regarder, à cause de la noblesse de sa danse. Je
la
nomme Clarissa, parce que cela lui va. Mais comme c’est odieux qu’une
4125
x qu’une créature aussi parfaite soit touchée par
les
mains outrageusement baguées de ces courtiers alourdis de “Knödl”. En
4126
n’approcherait qu’avec un sentiment religieux de
la
beauté. Mais je crois que l’Orient est devenu fou. Il ne comprend plu
4127
ntiment religieux de la beauté. Mais je crois que
l’
Orient est devenu fou. Il ne comprend plus rien. » Des bugles agonisai
4128
scandalisée par cette atteinte aux lois du genre
le
plus conventionnel qui soit. Gérard la regarda avec une certaine piti
4129
s du genre le plus conventionnel qui soit. Gérard
la
regarda avec une certaine pitié : « Chère enfant, dit-il doucement, p
4130
s de ressemblance, et c’est ce qui vous perdra. »
La
pauvre fille ne comprenant pas, il y eut un moment pénible, comme tou
4131
pre une comédie aux attitudes convenues et donner
l’
air bête aux acteurs. Puis Gérard embrassa paternellement la belle eff
4132
aux acteurs. Puis Gérard embrassa paternellement
la
belle effarée, et nous sortîmes, après avoir délivré le homard qui, l
4133
le effarée, et nous sortîmes, après avoir délivré
le
homard qui, laissé au vestiaire, y était l’objet de vexations diverse
4134
livré le homard qui, laissé au vestiaire, y était
l’
objet de vexations diverses et de curiosités grossières de la part des
4135
s garçons. « Encore une proie inutile lâchée pour
l’
ombre, dit Gérard d’un ton rêveur et malicieux. Mais l’ombre de cette
4136
re, dit Gérard d’un ton rêveur et malicieux. Mais
l’
ombre de cette ville illusoire est la plus douce à mes vagabondages sa
4137
icieux. Mais l’ombre de cette ville illusoire est
la
plus douce à mes vagabondages sans but. Vous savez, je lance mes file
4138
es sans but. Vous savez, je lance mes filets dans
l’
eau des nuits, et quelquefois j’en ramène des animaux aux yeux bizarre
4139
ène des animaux aux yeux bizarres où je sais lire
les
signes. » Comme je ne répondais rien : « Avez-vous sommeil ? demanda-
4140
’endormir. » Se penchant vers moi il prononça : «
La
nuit sera noire et blanche. » Je ressentis quelque émotion à l’ouïe d
4141
oire et blanche. » Je ressentis quelque émotion à
l’
ouïe de cette phrase célèbre. Ensuite, je pensai qu’il arrive aux meil
4142
de se répéter, et que c’était la première fois de
la
soirée que Gérard « faisait du Gérard ». Les cocktails du Moulin-Roug
4143
is de la soirée que Gérard « faisait du Gérard ».
Les
cocktails du Moulin-Rouge avaient peu à peu envahi notre sang. Nos pe
4144
Nos pensées devenaient légères comme des ballons.
La
rumeur de Vienne baignait nos corps fatigués jusqu’à l’insensibilité
4145
eur de Vienne baignait nos corps fatigués jusqu’à
l’
insensibilité et l’Illusion étendait sur toutes choses une aile d’ombr
4146
ait nos corps fatigués jusqu’à l’insensibilité et
l’
Illusion étendait sur toutes choses une aile d’ombre flatteuse aux cap
4147
des oiseaux nous parlèrent, bientôt dissous dans
le
vent. Tout était reflet, passages, allusions. Plus tard, dans un peti
4148
mi-hauteur, puis couvert de glaces qui, reflétant
le
plafond à caissons dorés, l’étendent indéfiniment — c’est un ciel sus
4149
laces qui, reflétant le plafond à caissons dorés,
l’
étendent indéfiniment — c’est un ciel suspendu assez bas sur nos têtes
4150
ché sur cet aquarium de rêves, discourt et décrit
les
images qu’il y découvre. Il y a les ailes du Moulin-Rouge, qui sont l
4151
urt et décrit les images qu’il y découvre. Il y a
les
ailes du Moulin-Rouge, qui sont les bras de Clarissa dans sa danse, e
4152
ouvre. Il y a les ailes du Moulin-Rouge, qui sont
les
bras de Clarissa dans sa danse, et Clarissa c’est aussi l’Anglaise au
4153
e Clarissa dans sa danse, et Clarissa c’est aussi
l’
Anglaise aux citrons de Pompéi, l’Octavie du golfe de Marseille, ou bi
4154
ssa c’est aussi l’Anglaise aux citrons de Pompéi,
l’
Octavie du golfe de Marseille, ou bien plutôt, par je ne sais quelle e
4155
ar je ne sais quelle erreur d’images, — ce serait
la
gravité énigmatique d’Adrienne, mais dans le lointain, Aurélia lui ré
4156
rait la gravité énigmatique d’Adrienne, mais dans
le
lointain, Aurélia lui répond d’un regard pareil. Des visages naissent
4157
es naissent comme des étoiles dans un halo, comme
les
couleurs sous les paupières, s’élargissent, se fondent, se superposen
4158
des étoiles dans un halo, comme les couleurs sous
les
paupières, s’élargissent, se fondent, se superposent. Cinéma des sent
4159
t. Cinéma des sentiments qui montre vivantes dans
la
même minute toutes les incarnations d’un amour dont l’être éternel ap
4160
ts qui montre vivantes dans la même minute toutes
les
incarnations d’un amour dont l’être éternel apparaît peu à peu, à tra
4161
me minute toutes les incarnations d’un amour dont
l’
être éternel apparaît peu à peu, à travers la simultanéité de ses mani
4162
dont l’être éternel apparaît peu à peu, à travers
la
simultanéité de ses manifestations. Gérard parle avec une liberté mag
4163
erté magnifique et angoissante. Il mêle tout dans
le
temps et l’espace. Cent années et tous les visages aimés revivent dan
4164
que et angoissante. Il mêle tout dans le temps et
l’
espace. Cent années et tous les visages aimés revivent dans cette coup
4165
ut dans le temps et l’espace. Cent années et tous
les
visages aimés revivent dans cette coupe de songes avec toutes leurs i
4166
réelles, illusions des reflets qui ne livrent que
le
côté terrestre des choses dont l’autre moitié sera toujours cachée, a
4167
s dont l’autre moitié sera toujours cachée, ainsi
la
Lune et sa moitié d’ombre. Et parce que tout revit en un instant dans
4168
en un instant dans cette vision, il connaît enfin
la
substance véritable et unique de toutes ses amours, il communie avec
4169
s, il communie avec quelque chose d’éternel. Tous
les
drames du monde ne sont que décors mouvants dans la lueur bariolée de
4170
drames du monde ne sont que décors mouvants dans
la
lueur bariolée des sentiments, ils ne sont que reflets, épisodes, sym
4171
ts, ils ne sont que reflets, épisodes, symboles :
le
vrai drame de son destin est ailleurs. Il se met à m’expliquer des si
4172
sent aux pierres précieuses en passant par toutes
les
formes animales. Pour lui, les choses n’ont d’intérêt que par les rap
4173
passant par toutes les formes animales. Pour lui,
les
choses n’ont d’intérêt que par les rapports qu’il leur devine avec la
4174
les. Pour lui, les choses n’ont d’intérêt que par
les
rapports qu’il leur devine avec la réalité extra-terrestre. Il m’ense
4175
térêt que par les rapports qu’il leur devine avec
la
réalité extra-terrestre. Il m’enseigne que la passion seule, par la s
4176
vec la réalité extra-terrestre. Il m’enseigne que
la
passion seule, par la souffrance qu’elle entraîne, nous révèle le sen
4177
errestre. Il m’enseigne que la passion seule, par
la
souffrance qu’elle entraîne, nous révèle le sens réel de nos vies, et
4178
, par la souffrance qu’elle entraîne, nous révèle
le
sens réel de nos vies, et peu à peu, de leurs moindres coïncidences.
4179
es, et peu à peu, de leurs moindres coïncidences.
La
fatigue calme son lyrisme et son exaltation. Il semble se rapprocher
4180
ne barbarie spirituelle. Il plaisante. Il dit que
la
vie ressemble surtout à un film où les épisodes s’appellent par le si
4181
Il dit que la vie ressemble surtout à un film où
les
épisodes s’appellent par le simple jeu des images, se voient par tran
4182
surtout à un film où les épisodes s’appellent par
le
simple jeu des images, se voient par transparence au travers de l’aut
4183
vers de l’autre. Il dit : « Pour celui qui saisit
les
correspondances, chaque geste, chaque minute d’une vie résume cette v
4184
entière et fait allusion à tout ce qu’il y a sous
le
soleil, et même ailleurs. Croyez-moi, ce qu’il faudrait écrire, c’est
4185
mes. Seules des trompes d’autos s’appelaient dans
la
nuit froide. Gérard ne disait presque plus rien ; à peine, de temps e
4186
, qui semblait d’ailleurs endormi. En passant par
la
Freyung, nous vîmes un palais aux fenêtres illuminées. Des autos atte
4187
fenêtres illuminées. Des autos attendaient devant
le
porche grand ouvert. Les chauffeurs faisaient les cent pas dans la ne
4188
autos attendaient devant le porche grand ouvert.
Les
chauffeurs faisaient les cent pas dans la neige fraîche ou s’accoudai
4189
le porche grand ouvert. Les chauffeurs faisaient
les
cent pas dans la neige fraîche ou s’accoudaient à la banquette d’une
4190
uvert. Les chauffeurs faisaient les cent pas dans
la
neige fraîche ou s’accoudaient à la banquette d’une boutique à « Würs
4191
cent pas dans la neige fraîche ou s’accoudaient à
la
banquette d’une boutique à « Würstel » où nous nous arrêtâmes. Au lég
4192
fflement du bec de gaz sans manchon qui éclairait
la
boutique, et que le vent menaçait d’éteindre à chaque instant, le hom
4193
az sans manchon qui éclairait la boutique, et que
le
vent menaçait d’éteindre à chaque instant, le homard se réveilla. Gér
4194
que le vent menaçait d’éteindre à chaque instant,
le
homard se réveilla. Gérard m’expliqua qu’il en était ainsi chaque nui
4195
m’expliqua qu’il en était ainsi chaque nuit, que
l’
animal devenait nerveux et que depuis quelques semaines, il avait dû l
4196
veux et que depuis quelques semaines, il avait dû
le
mettre au caviar. Il en demanda donc une petite portion et la fit pre
4197
caviar. Il en demanda donc une petite portion et
la
fit prendre au homard avec toutes sortes de soins. Les chauffeurs reg
4198
it prendre au homard avec toutes sortes de soins.
Les
chauffeurs regardaient d’un œil las, trop las pour s’étonner. Transi,
4199
si, je me balançais d’un pied sur l’autre dans de
la
neige fondante, tout en croquant une de ces saucisses à la moutarde q
4200
fondante, tout en croquant une de ces saucisses à
la
moutarde qu’on appelle ici « Frankfurter » et ailleurs « Wienerli ».
4201
« Frankfurter » et ailleurs « Wienerli ». Soudain
les
autos se mirent à ronfler. Par le grand escalier, au fond de la cour
4202
rli ». Soudain les autos se mirent à ronfler. Par
le
grand escalier, au fond de la cour du palais, descendaient les invité
4203
rent à ronfler. Par le grand escalier, au fond de
la
cour du palais, descendaient les invités du bal. Des femmes sans chap
4204
alier, au fond de la cour du palais, descendaient
les
invités du bal. Des femmes sans chapeau couraient vers les voitures,
4205
és du bal. Des femmes sans chapeau couraient vers
les
voitures, les hommes s’inclinaient pour des baise-mains silencieux et
4206
femmes sans chapeau couraient vers les voitures,
les
hommes s’inclinaient pour des baise-mains silencieux et mécaniques. J
4207
à d’anciens Habsbourg, des comtes athlétiques et
la
silhouette échassière de la jeune duchesse de Clam-Clamannsfeld dont
4208
comtes athlétiques et la silhouette échassière de
la
jeune duchesse de Clam-Clamannsfeld dont le manteau de velours rose l
4209
re de la jeune duchesse de Clam-Clamannsfeld dont
le
manteau de velours rose laissait découvertes des jambes extrêmement h
4210
ndis que sa tête frisée jetait des insolences sur
les
chapeaux noirs de ses cavaliers. Tout cela s’empila dans des autos ;
4211
autos ; en dix minutes, il n’y eut plus personne,
la
place s’éteignit. Mais Gérard ? Ses yeux s’étaient fixés intensément,
4212
Gérard ? Ses yeux s’étaient fixés intensément, à
la
sortie des invités, sur une femme qui s’en allait toute seule vers un
4213
femme qui s’en allait toute seule vers une auto à
l’
écart des autres. Une femme aux cheveux noirs en bandeaux, au teint pâ
4214
mme aux cheveux noirs en bandeaux, au teint pâle,
l’
air d’autrefois. Il avait murmuré : Marie Pleyel. Quand la place se fu
4215
autrefois. Il avait murmuré : Marie Pleyel. Quand
la
place se fut apaisée, je m’aperçus que j’étais seul. Une dernière aut
4216
olument silencieuse fila devant moi ; je reconnus
la
voiture de la femme aux bandeaux noirs. Mais les rideaux étaient bais
4217
ieuse fila devant moi ; je reconnus la voiture de
la
femme aux bandeaux noirs. Mais les rideaux étaient baissés. Déjà on c
4218
s la voiture de la femme aux bandeaux noirs. Mais
les
rideaux étaient baissés. Déjà on criait les journaux du matin, des tr
4219
Mais les rideaux étaient baissés. Déjà on criait
les
journaux du matin, des triporteurs passèrent à toute vitesse, m’éclab
4220
fouettée ». l. « Un soir à Vienne avec Gérard »,
La
Nouvelle Semaine artistique et littéraire, Neuchâtel, n° 7, 24 mars 1
4221
nt pour tous ceux que Jules Verne passionne. Pour
les
autres, divertissant et spirituel. Pourquoi ne veut-on voir en Jules
4222
un précurseur ? Jules Verne est un créateur, dont
les
inventions se suffisent et suffisent à notre joie. Ce ne sont pas les
4223
ffisent et suffisent à notre joie. Ce ne sont pas
les
savants qui sont prophètes, mais les poètes. Or Jules Verne fut poète
4224
ne sont pas les savants qui sont prophètes, mais
les
poètes. Or Jules Verne fut poète avant tout — et ce livre le fera bie
4225
Or Jules Verne fut poète avant tout — et ce livre
le
fera bien voir aux sceptiques. Il a aimé la science parce qu’elle ouv
4226
livre le fera bien voir aux sceptiques. Il a aimé
la
science parce qu’elle ouvre des perspectives d’évasion — où seuls les
4227
’elle ouvre des perspectives d’évasion — où seuls
les
poètes savent se perdre. Et c’est bien sa plus grande ruse que d’avoi
4228
est bien sa plus grande ruse que d’avoir emprunté
le
véhicule à la mode pour conduire des millions de lecteurs dans un mon
4229
us grande ruse que d’avoir emprunté le véhicule à
la
mode pour conduire des millions de lecteurs dans un monde purement fa
4230
de lecteurs dans un monde purement fantaisiste où
les
équations tyranniques deviennent de merveilleux calembours, où les sa
4231
anniques deviennent de merveilleux calembours, où
les
savants sont réellement dans la lune, ou bien descendent au fond des
4232
x calembours, où les savants sont réellement dans
la
lune, ou bien descendent au fond des mers adorer la Liberté et jouer
4233
lune, ou bien descendent au fond des mers adorer
la
Liberté et jouer de l’orgue sous les yeux de poulpes géants. Jules Ve
4234
nt au fond des mers adorer la Liberté et jouer de
l’
orgue sous les yeux de poulpes géants. Jules Verne a véritablement sou
4235
oulpes géants. Jules Verne a véritablement soumis
la
science à la poésie. Et l’on ne veut voir que jolis livres d’étrennes
4236
. Jules Verne a véritablement soumis la science à
la
poésie. Et l’on ne veut voir que jolis livres d’étrennes dans les œuv
4237
a véritablement soumis la science à la poésie. Et
l’
on ne veut voir que jolis livres d’étrennes dans les œuvres du plus gr
4238
’on ne veut voir que jolis livres d’étrennes dans
les
œuvres du plus grand créateur de mythes modernes, du seul écrivain do
4239
réateur de mythes modernes, du seul écrivain dont
l’
influence soit comparable à celle du cinéma ! Claretie raconte que les
4240
mparable à celle du cinéma ! Claretie raconte que
les
détenus des maisons de correction se jetaient sur ces volumes « au tr
4241
ces volumes « au travers desquels ils respiraient
l’
air du monde ». N’en ferons-nous pas autant, emprisonnés que nous somm
4242
que nous sommes dans une civilisation qui, selon
l’
expression de Jules Verne désabusé « emprunte l’aspect d’une nécessité
4243
n l’expression de Jules Verne désabusé « emprunte
l’
aspect d’une nécessité » (et dans la bouche de ce libertaire, cela con
4244
sé « emprunte l’aspect d’une nécessité » (et dans
la
bouche de ce libertaire, cela constituait un jugement !) Serons-nous
4245
s-nous longtemps encore dupes d’une conception de
la
littérature si pédante qu’elle exclut un de nos plus grands conteurs
4246
us Jules Verne aux enfants ? J’allais oublier que
la
littérature enfantine est le dernier bateau. Pour ce coup, voilà qui
4247
bord, je soupçonne que ce bateau n’est autre que
La
Liberté. ar. « M. Allotte De La Fuye : Jules Verne, sa vie, son œuv
4248
on, Traité du style (août 1928)as Ce n’est pas
le
seul talent de M. Aragon qui le rendrait digne à mes yeux, de considé
4249
s Ce n’est pas le seul talent de M. Aragon qui
le
rendrait digne à mes yeux, de considération. J’admire autant le talen
4250
gne à mes yeux, de considération. J’admire autant
le
talent de celui qui mène 60 parties d’échecs simultanément, et c’est
4251
x écrivains que des révélations, ou mieux, qu’ils
les
favorisent par leurs écrits. Aragon, qui a le sens de l’amour, a dit
4252
ls les favorisent par leurs écrits. Aragon, qui a
le
sens de l’amour, a dit conséquemment beaucoup de choses vraies (belle
4253
risent par leurs écrits. Aragon, qui a le sens de
l’
amour, a dit conséquemment beaucoup de choses vraies (belles). Il est
4254
ies (belles). Il est même un des très rares parmi
les
jeunes qui ait vraiment donné quelque chose. C’est pourquoi j’ai lu c
4255
quelconques. Mais la seconde partie du livre est
admirable
; il suffit. Le titre ne ment pas ; ce livre traite du style, à coups
4256
econde partie du livre est admirable ; il suffit.
Le
titre ne ment pas ; ce livre traite du style, à coups d’exemples qui
4257
aite du style, à coups d’exemples qui méritent de
l’
être. Et l’on voit bien ici qu’Aragon dépasse ces surréalistes, ces or
4258
le, à coups d’exemples qui méritent de l’être. Et
l’
on voit bien ici qu’Aragon dépasse ces surréalistes, ces orthodoxes de
4259
ragon dépasse ces surréalistes, ces orthodoxes de
l’
absurde confondu avec le poétique, ou ces disciples de Rimbaud, ou enf
4260
listes, ces orthodoxes de l’absurde confondu avec
le
poétique, ou ces disciples de Rimbaud, ou enfin ces littérateurs anti
4261
ces littérateurs antilittéraires, ces « Messieurs
les
Nymphes ». Mais donner l’air bête à ceux qui le sont en créant une be
4262
aires, ces « Messieurs les Nymphes ». Mais donner
l’
air bête à ceux qui le sont en créant une belle œuvre serait, par exem
4263
les Nymphes ». Mais donner l’air bête à ceux qui
le
sont en créant une belle œuvre serait, par exemple, plus efficace. Ar
4264
e voix du troupeau. C’est sans doute son rôle. Il
le
tient magnifiquement. Mais qu’on nous laisse chercher plus loin, dans
4265
ous laisse chercher plus loin, dans ce silence où
l’
on accède à des objets qui enfin valent le respect. as. « Aragon : T
4266
ence où l’on accède à des objets qui enfin valent
le
respect. as. « Aragon : Traité du style (NRF) », Bibliothèque unive
4267
Pierre Naville,
La
Révolution et les intellectuels (novembre 1928)at Les derniers écr
4268
Pierre Naville, La Révolution et
les
intellectuels (novembre 1928)at Les derniers écrits des surréalist
4269
olution et les intellectuels (novembre 1928)at
Les
derniers écrits des surréalistes débattent la question de savoir s’il
4270
Les derniers écrits des surréalistes débattent
la
question de savoir s’ils vont se taire ou non. Mais leur silence ne d
4271
ux-mêmes. Ils se tournent donc naturellement vers
l’
action, c’est-à-dire — nous sommes en France — vers la politique. Or c
4272
tion, c’est-à-dire — nous sommes en France — vers
la
politique. Or ces ennemis de toute littérature voient leurs avances d
4273
e littérature voient leurs avances dédaignées par
les
communistes, gens d’action à jugements simples, qui les trouvent trop
4274
mmunistes, gens d’action à jugements simples, qui
les
trouvent trop littérateurs. Rien d’étonnant à cela dans une époque où
4275
ateurs. Rien d’étonnant à cela dans une époque où
les
valeurs de l’esprit sont en pratique universellement méprisées. Mais
4276
étonnant à cela dans une époque où les valeurs de
l’
esprit sont en pratique universellement méprisées. Mais les surréalist
4277
sont en pratique universellement méprisées. Mais
les
surréalistes ont leur responsabilité là-dedans ; leur défense de l’es
4278
t leur responsabilité là-dedans ; leur défense de
l’
esprit s’est bornée jusqu’ici à une rhétorique très brillante contre u
4279
détesté, mais dont ils participent plus qu’ils ne
le
croient. Certes il était urgent de faire la critique de « cette réali
4280
ls ne le croient. Certes il était urgent de faire
la
critique de « cette réalité de premier plan qui nous empêche de bouge
4281
s cette réalité. Il est certain que s’ils avaient
le
courage de se soumettre au concret de l’esprit, ils comprendraient qu
4282
avaient le courage de se soumettre au concret de
l’
esprit, ils comprendraient que le « service dans le temple » s’accommo
4283
re au concret de l’esprit, ils comprendraient que
le
« service dans le temple » s’accommode mal de tant de gesticulations,
4284
’esprit, ils comprendraient que le « service dans
le
temple » s’accommode mal de tant de gesticulations, de gros mots et d
4285
d dont ils n’ont pas encore renoncé à chatouiller
le
snobisme. at. « Pierre Naville : La Révolution et les intellectuels
4286
chatouiller le snobisme. at. « Pierre Naville :
La
Révolution et les intellectuels (NRF) », Bibliothèque universelle et
4287
obisme. at. « Pierre Naville : La Révolution et
les
intellectuels (NRF) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, G
4288
André Malraux,
Les
Conquérants (décembre 1928)au Ce récit de la révolution cantonaise
4289
Les Conquérants (décembre 1928)au Ce récit de
la
révolution cantonaise en 1925 nous place au nœud du monde moderne : o
4290
on y voit s’affronter en quelques hommes d’action
les
forces caractéristiques du temps — argent, races — et ses rares passi
4291
— argent, races — et ses rares passions, qui sont
la
domination et la démolition, l’organisation et le sabotage. On y déco
4292
et ses rares passions, qui sont la domination et
la
démolition, l’organisation et le sabotage. On y découvre le jeu des t
4293
assions, qui sont la domination et la démolition,
l’
organisation et le sabotage. On y découvre le jeu des tempéraments qui
4294
la domination et la démolition, l’organisation et
le
sabotage. On y découvre le jeu des tempéraments qui fait opter ces ch
4295
ion, l’organisation et le sabotage. On y découvre
le
jeu des tempéraments qui fait opter ces chefs pour l’une ou l’autre d
4296
ires : elles représentent deux manières de sentir
l’
unité d’une époque obsédée d’action.) Autour de ces individus — Chinoi
4297
mentateurs, Juifs russes méthodiques — s’émeuvent
les
masses de coolies, d’ouvriers armés, toute cette Chine qui s’éveille
4298
, toute cette Chine qui s’éveille au sein même de
la
lutte qui met aux prises l’Europe et le monde du Pacifique. On retrou
4299
eille au sein même de la lutte qui met aux prises
l’
Europe et le monde du Pacifique. On retrouvera ici beaucoup des idées
4300
n même de la lutte qui met aux prises l’Europe et
le
monde du Pacifique. On retrouvera ici beaucoup des idées que la Tenta
4301
cifique. On retrouvera ici beaucoup des idées que
la
Tentation de l’Occident exprimait sous une forme abstraite et poétiqu
4302
ouvera ici beaucoup des idées que la Tentation de
l’
Occident exprimait sous une forme abstraite et poétique. Mais cette fo
4303
en hommes, en meurtres, en décrets. Qu’il décrive
la
vie intense et instable des acteurs du drame, l’aspect quotidien et m
4304
la vie intense et instable des acteurs du drame,
l’
aspect quotidien et mystérieux d’une révolution de rues, ou la palpita
4305
tidien et mystérieux d’une révolution de rues, ou
la
palpitation inquiétante des villes chinoises, Malraux fait preuve d’u
4306
lraux fait preuve d’un art du détail où se révèle
le
vrai romancier. On serait parfois tenté de le rapprocher de Morand, m
4307
èle le vrai romancier. On serait parfois tenté de
le
rapprocher de Morand, mais il est plus nerveux, sans doute aussi plus
4308
de faits, une discussion d’idées. Il est surtout
la
description d’une angoisse que le nihilisme de M. Malraux veut sans i
4309
Il est surtout la description d’une angoisse que
le
nihilisme de M. Malraux veut sans issues : l’angoisse que fait naître
4310
que le nihilisme de M. Malraux veut sans issues :
l’
angoisse que fait naître au cœur du monde contemporain l’absurdité de
4311
sse que fait naître au cœur du monde contemporain
l’
absurdité de ses ambitions. Écoutons Garine, l’un de ces chefs (c’est
4312
l’un de ces chefs (c’est lui qui parle au nom de
l’
auteur, je pense) : « Il me semble que je lutte contre l’absurde humai
4313
r, je pense) : « Il me semble que je lutte contre
l’
absurde humain, en faisant ce que je fais ici… » L’évasion dans l’acti
4314
’absurde humain, en faisant ce que je fais ici… »
L’
évasion dans l’action — révolutionnaire ou autre — rêvée par tant de j
4315
, en faisant ce que je fais ici… » L’évasion dans
l’
action — révolutionnaire ou autre — rêvée par tant de jeunes hommes de
4316
ire ou autre — rêvée par tant de jeunes hommes de
l’
après-guerre, Malraux l’a vécue, avant de la décrire ; et cet aveu de
4317
tant de jeunes hommes de l’après-guerre, Malraux
l’
a vécue, avant de la décrire ; et cet aveu de Garine est décisif : « L
4318
es de l’après-guerre, Malraux l’a vécue, avant de
la
décrire ; et cet aveu de Garine est décisif : « La Révolution… tout c
4319
a décrire ; et cet aveu de Garine est décisif : «
La
Révolution… tout ce qui n’est pas elle est pire qu’elle… » Expérience
4320
st pas elle est pire qu’elle… » Expérience faite,
l’
absurde retrouve ses droits. C’est ainsi que, masqué par l’enchaînemen
4321
retrouve ses droits. C’est ainsi que, masqué par
l’
enchaînement passionnant de l’action, il se dégage de ce roman un dése
4322
nsi que, masqué par l’enchaînement passionnant de
l’
action, il se dégage de ce roman un désespoir sec, sans grimace. Cette
4323
angereux. Mais qu’elles s’appliquent à distinguer
les
forces déterminantes de l’heure, à les exprimer en un tel drame, et v
4324
pliquent à distinguer les forces déterminantes de
l’
heure, à les exprimer en un tel drame, et voici André Malraux au premi
4325
distinguer les forces déterminantes de l’heure, à
les
exprimer en un tel drame, et voici André Malraux au premier rang des
4326
romanciers contemporains. au. « André Malraux :
Les
Conquérants (Grasset) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
4327
II de Bavière ou Hamlet-Roi (décembre 1928)av
L’
histoire de Louis II exalte et déçoit l’imagination. On comprend que c
4328
928)av L’histoire de Louis II exalte et déçoit
l’
imagination. On comprend que ce doux-amer ait séduit Barrès, mais ne l
4329
prend que ce doux-amer ait séduit Barrès, mais ne
l’
ait point trompé : « Avec son beau regard de rêve, — lit-on dans l’Enn
4330
é : « Avec son beau regard de rêve, — lit-on dans
l’
Ennemi des Lois — son expression amoureuse du silence et cet ensemble
4331
s ses châteaux en Espagne lamentablement réalisés
les
témoignages de l’éthique de cet « illustre réfractaire ». N’est-ce po
4332
spagne lamentablement réalisés les témoignages de
l’
éthique de cet « illustre réfractaire ». N’est-ce point trop demander
4333
lès n’hésite pas à baptiser son héros « prince de
l’
illusion et de la solitude ». Mais un prince rêveur n’est pas forcémen
4334
à baptiser son héros « prince de l’illusion et de
la
solitude ». Mais un prince rêveur n’est pas forcément prince du rêve
4335
ince du rêve ; et par ailleurs ce livre sait bien
le
laisser voir. La qualité de l’illusion dont se nourrit Louis II n’est
4336
par ailleurs ce livre sait bien le laisser voir.
La
qualité de l’illusion dont se nourrit Louis II n’est ni aussi pure ni
4337
ce livre sait bien le laisser voir. La qualité de
l’
illusion dont se nourrit Louis II n’est ni aussi pure ni aussi rare qu
4338
n’est ni aussi pure ni aussi rare qu’on voudrait
l’
imaginer. Il reste qu’il a voulu la vivre et qu’il l’a pu, étant roi.
4339
qu’on voudrait l’imaginer. Il reste qu’il a voulu
la
vivre et qu’il l’a pu, étant roi. Il offre ainsi l’image d’un romanti
4340
maginer. Il reste qu’il a voulu la vivre et qu’il
l’
a pu, étant roi. Il offre ainsi l’image d’un romantisme assez morose ;
4341
vivre et qu’il l’a pu, étant roi. Il offre ainsi
l’
image d’un romantisme assez morose ; mais à grande échelle. M. de Pour
4342
à grande échelle. M. de Pourtalès a su rehausser
le
tableau avec beaucoup d’adresse et de charme : Wagner et Nietzsche lu
4343
t Nietzsche lui fournissent deux tons fermes dont
le
jeu donne aux nuances assez troubles du personnage central une résona
4344
it par hasard de moyens d’action puissants : s’il
les
a gâchés, c’est qu’il a eu peur, et s’il a eu peur c’est qu’il n’a pa
4345
, et s’il a eu peur c’est qu’il n’a pas su aimer.
Le
sujet de Liszt et de Chopin, c’était l’amour, donc la douleur ; ici,
4346
su aimer. Le sujet de Liszt et de Chopin, c’était
l’
amour, donc la douleur ; ici, c’est l’absence d’amour, par refus de so
4347
ujet de Liszt et de Chopin, c’était l’amour, donc
la
douleur ; ici, c’est l’absence d’amour, par refus de souffrir. Mais c
4348
in, c’était l’amour, donc la douleur ; ici, c’est
l’
absence d’amour, par refus de souffrir. Mais chez un être raffiné, la
4349
par refus de souffrir. Mais chez un être raffiné,
la
peur d’étreindre aboutit à l’amour de soi dans « l’illusion ». Sachon
4350
ez un être raffiné, la peur d’étreindre aboutit à
l’
amour de soi dans « l’illusion ». Sachons gré à M. de Pourtalès de ce
4351
peur d’étreindre aboutit à l’amour de soi dans «
l’
illusion ». Sachons gré à M. de Pourtalès de ce qu’il préfère parler d
4352
oseraient de moins jolis mots ; mais ce n’est pas
la
moindre habileté du biographe. D’ailleurs, réussir un livre attrayant
4353
e n’était pas un problème aisé : Guy de Pourtalès
l’
a résolu d’une façon fort adroite mais non moins franche. av. « Guy
4354
Daniel-Rops,
Le
Prince menteur (décembre 1928)aw Au hasard d’une rencontre, l’aute
4355
r (décembre 1928)aw Au hasard d’une rencontre,
l’
auteur de ce récit se lie avec un inconnu qui se dit prince russe et e
4356
e dit prince russe et entretient autour de sa vie
le
plus grand mystère. Cependant il aime à raconter certaines scènes ter
4357
aime à raconter certaines scènes terrifiantes de
la
révolution : il a été condamné à mort, il s’est évadé, on le traque à
4358
on : il a été condamné à mort, il s’est évadé, on
le
traque à Paris même… Il subjugue le jeune Français par ces évocations
4359
est évadé, on le traque à Paris même… Il subjugue
le
jeune Français par ces évocations et l’espèce de fièvre qu’il y appor
4360
subjugue le jeune Français par ces évocations et
l’
espèce de fièvre qu’il y apporte. Mais plusieurs incidents éveillent l
4361
’il y apporte. Mais plusieurs incidents éveillent
les
soupçons du « petit-bourgeois » qu’il a choisi comme public, et brusq
4362
ois » qu’il a choisi comme public, et brusquement
le
mot éclate : menteur. Feintes et esquives adroites du « prince » qui
4363
es du « prince » qui disparaît, néanmoins. Enfin,
le
Français reçoit une lettre trouvée sur le corps de son ami suicidé, p
4364
Enfin, le Français reçoit une lettre trouvée sur
le
corps de son ami suicidé, pathétique confession qui doit expliquer sa
4365
oit expliquer sa mort et qui est aussi fausse que
le
reste. Ce mensonge qui va jusqu’à la mort, inclusivement, n’étonnera
4366
i fausse que le reste. Ce mensonge qui va jusqu’à
la
mort, inclusivement, n’étonnera pas ceux qui ont connu de semblables
4367
pas ceux qui ont connu de semblables mythomanes.
Le
cas méritait d’être exposé. Je regrette seulement que Daniel-Rops se
4368
courte nouvelle, d’ailleurs assez dense, et dont
le
mérite est d’être simple et précise dans l’exposé, sans rien simplifi
4369
dont le mérite est d’être simple et précise dans
l’
exposé, sans rien simplifier ni préciser à l’excès dans le caractère.
4370
dans l’exposé, sans rien simplifier ni préciser à
l’
excès dans le caractère. Daniel-Rops voit bien que l’épithète de mytho
4371
, sans rien simplifier ni préciser à l’excès dans
le
caractère. Daniel-Rops voit bien que l’épithète de mythomane n’épuise
4372
xcès dans le caractère. Daniel-Rops voit bien que
l’
épithète de mythomane n’épuise pas une question dont l’importance dépa
4373
thète de mythomane n’épuise pas une question dont
l’
importance dépasse celle du cas pathologique. Il y a dans ce culte de
4374
elle du cas pathologique. Il y a dans ce culte de
la
mythomanie qu’on a vu sévir parmi certains milieux d’avant-garde une
4375
, parce qu’elle constitue une tentation pour tous
les
poètes. Le désir de « plus vrai que le vrai » surexcité par l’insolen
4376
lle constitue une tentation pour tous les poètes.
Le
désir de « plus vrai que le vrai » surexcité par l’insolence d’une ps
4377
pour tous les poètes. Le désir de « plus vrai que
le
vrai » surexcité par l’insolence d’une psychologie qui rabaisse tout,
4378
désir de « plus vrai que le vrai » surexcité par
l’
insolence d’une psychologie qui rabaisse tout, peut conduire à préfére
4379
as, qu’une déformation de cette réalité détestée.
Le
mythomane brouille les cartes mais reste dans le jeu. Jusque dans la
4380
de cette réalité détestée. Le mythomane brouille
les
cartes mais reste dans le jeu. Jusque dans la ruse que ses mensonges
4381
Le mythomane brouille les cartes mais reste dans
le
jeu. Jusque dans la ruse que ses mensonges exigent, il se reconnaît t
4382
le les cartes mais reste dans le jeu. Jusque dans
la
ruse que ses mensonges exigent, il se reconnaît tributaire de la « vé
4383
mensonges exigent, il se reconnaît tributaire de
la
« vérité trop évidente » ; alors qu’il la faudrait, sans rien fausser
4384
aire de la « vérité trop évidente » ; alors qu’il
la
faudrait, sans rien fausser, transcender… aw. « Daniel-Rops : Le Pr
4385
rien fausser, transcender… aw. « Daniel-Rops :
Le
Prince menteur (dessins de Jacques Ernotte) (Éditions “Le Rouge et le
4386
e menteur (dessins de Jacques Ernotte) (Éditions “
Le
Rouge et le Noir”) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Ge
4387
essins de Jacques Ernotte) (Éditions “Le Rouge et
le
Noir”) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, décemb
4388
» Paul Valéry. Stéphane est maniaque, comme tous
les
jeunes gens de sa génération. Seulement chez lui, cela ne s’est pas p
4389
. Seulement chez lui, cela ne s’est pas porté sur
les
autos. Il préfère s’intéresser aux divers types humains. Mais on lui
4390
ord ; accepte d’attendre comme un enfant sage que
le
monde lui donne, en son temps, sa petite part. On lui a expliqué qu’i
4391
, sa petite part. On lui a expliqué qu’il fallait
la
mériter et tâcher de devenir quelqu’un. En d’autres termes, on lui co
4392
» comme parle un de nos classiques. Repoussé par
le
monde parce qu’il n’est pas encore quelqu’un, Stéphane cherche à savo
4393
r un moi qui feint toujours de se cacher derrière
le
feuillet suivant, entraîne le lecteur par ruse jusqu’à la dernière pa
4394
se cacher derrière le feuillet suivant, entraîne
le
lecteur par ruse jusqu’à la dernière page, et là déclare froidement n
4395
roidement ne pas exister. Non : il a remarqué que
l’
époque peut être définie par l’abondance des autobiographies, mais aus
4396
il a remarqué que l’époque peut être définie par
l’
abondance des autobiographies, mais aussi bien par celle des miroirs.
4397
hane passe des heures entières à se regarder dans
les
yeux. Il varie sur son visage les jeux de lumière et de sentiments. I
4398
e regarder dans les yeux. Il varie sur son visage
les
jeux de lumière et de sentiments. Il découvre une sorte de rire au co
4399
ouvre une sorte de rire au coin de sa bouche dans
les
moments de pire découragement ; et beaucoup d’autres hiatus de ce gen
4400
nt ; et beaucoup d’autres hiatus de ce genre, qui
l’
intriguent à n’en pas finir. Quand il est très fatigué, il veut voir e
4401
é sur lui-même il se perd en méditations éléates.
Le
sommeil l’en délivre. Au matin il court se voir : il est laid. Lâchem
4402
ême il se perd en méditations éléates. Le sommeil
l’
en délivre. Au matin il court se voir : il est laid. Lâchement il se p
4403
l se prend en pitié. Ces séances lui font du mal,
l’
énervent, mais l’aveu qu’il en consent l’attache plus secrètement à so
4404
ié. Ces séances lui font du mal, l’énervent, mais
l’
aveu qu’il en consent l’attache plus secrètement à son aventure. Nous
4405
du mal, l’énervent, mais l’aveu qu’il en consent
l’
attache plus secrètement à son aventure. Nous vivons dans un décor fl
4406
ne sa tête, son portrait en pied. Il se voit dans
l’
acte de se raser, de se baigner ; son image descend en face de lui par
4407
se baigner ; son image descend en face de lui par
l’
ascenseur, elle le suit au long des trottoirs, il l’aperçoit entre des
4408
mage descend en face de lui par l’ascenseur, elle
le
suit au long des trottoirs, il l’aperçoit entre des souliers, des éti
4409
ascenseur, elle le suit au long des trottoirs, il
l’
aperçoit entre des souliers, des étiquettes, des poupées ; elle le pré
4410
des souliers, des étiquettes, des poupées ; elle
le
précède au restaurant, le nargue brièvement au passage des autos, le
4411
tes, des poupées ; elle le précède au restaurant,
le
nargue brièvement au passage des autos, le ridiculise chez le coiffeu
4412
urant, le nargue brièvement au passage des autos,
le
ridiculise chez le coiffeur. Déjà, c’est avec une sorte d’angoisse qu
4413
ièvement au passage des autos, le ridiculise chez
le
coiffeur. Déjà, c’est avec une sorte d’angoisse qu’il la recherche. I
4414
feur. Déjà, c’est avec une sorte d’angoisse qu’il
la
recherche. Il veut se voir tel qu’il est parmi les autres. Mais s’il
4415
la recherche. Il veut se voir tel qu’il est parmi
les
autres. Mais s’il lui arrive de prendre son image pour celle de n’imp
4416
t de cette apparence, qu’il doute de sa réalité.
Le
mystère de voir ses yeux l’épouvante. Il y cherche une révélation et
4417
doute de sa réalité. Le mystère de voir ses yeux
l’
épouvante. Il y cherche une révélation et n’y trouve que le désir d’un
4418
te. Il y cherche une révélation et n’y trouve que
le
désir d’une révélation. Peut-on s’hypnotiser avec son propre regard ?
4419
te incantation à soi-même qui pourrait lui rendre
la
certitude d’être. Mais il s’épuise dans une perspective de reflets qu
4420
reflets qui vont en diminuant vertigineusement et
l’
égarent dans sa nuit. Je saute quelques délires et pas mal de supersti
4421
al de superstitions. Enfin cette expérience folle
le
mène à une découverte sur les sept sens de laquelle il convient de mé
4422
tte expérience folle le mène à une découverte sur
les
sept sens de laquelle il convient de méditer : la personne se dissout
4423
es sept sens de laquelle il convient de méditer :
la
personne se dissout dans l’eau des miroirs. Stéphane est en train de
4424
convient de méditer : la personne se dissout dans
l’
eau des miroirs. Stéphane est en train de se perdre pour avoir voulu
4425
il faut sortir de soi pour se voir ? Il y a dans
l’
homme moderne un besoin de vérifier qui n’est plus légitime dès l’inst
4426
un besoin de vérifier qui n’est plus légitime dès
l’
instant qu’il se traduit par la négation de l’invérifiable. Stéphane n
4427
plus légitime dès l’instant qu’il se traduit par
la
négation de l’invérifiable. Stéphane n’a pas eu confiance. Or la pers
4428
dès l’instant qu’il se traduit par la négation de
l’
invérifiable. Stéphane n’a pas eu confiance. Or la personnalité est un
4429
l’invérifiable. Stéphane n’a pas eu confiance. Or
la
personnalité est un acte de foi : Stéphane ne sait plus ce qu’il est.
4430
oire idiote, d’ailleurs vraie, se borne à décrire
l’
aspect psychologique d’une aventure qui en a bien d’autres, d’aspects.
4431
qui en a bien d’autres, d’aspects. Il est bon que
le
lecteur dérisoirement troublé par la crainte de n’avoir pas saisi le
4432
est bon que le lecteur dérisoirement troublé par
la
crainte de n’avoir pas saisi le sens véritable d’un texte, trouve par
4433
ement troublé par la crainte de n’avoir pas saisi
le
sens véritable d’un texte, trouve parfois de cette incompréhension de
4434
e cette incompréhension des marques certaines. Si
le
rapport intime qui unit la phrase suivante aux considérations précéde
4435
marques certaines. Si le rapport intime qui unit
la
phrase suivante aux considérations précédentes lui échappe, qu’il y v
4436
dique, par besoin de définir, par défiance envers
les
dieux. À chaque regard dans notre miroir, nous perdons une Eurydice.
4437
ard dans notre miroir, nous perdons une Eurydice.
Les
miroirs sont peut-être la mort. La mort absolue, celle qui n’est pas
4438
perdons une Eurydice. Les miroirs sont peut-être
la
mort. La mort absolue, celle qui n’est pas une vie nouvelle. La mort
4439
une Eurydice. Les miroirs sont peut-être la mort.
La
mort absolue, celle qui n’est pas une vie nouvelle. La mort dans la t
4440
rt absolue, celle qui n’est pas une vie nouvelle.
La
mort dans la transparence glaciale de l’évidence. Un jour, à propos
4441
elle qui n’est pas une vie nouvelle. La mort dans
la
transparence glaciale de l’évidence. Un jour, à propos de rien, Stép
4442
ouvelle. La mort dans la transparence glaciale de
l’
évidence. Un jour, à propos de rien, Stéphane pense avec fièvre : « I
4443
ane pense avec fièvre : « Il faudrait briser tous
les
miroirs. Alors tu te verrais en vérité. Peut-être te reconnaîtrais-tu
4444
t ? » C’est un premier filet d’eau vive qui perce
le
sol aride : mais Stéphane n’entend pas encore gronder les eaux profon
4445
aride : mais Stéphane n’entend pas encore gronder
les
eaux profondes. Le désir de s’hypnotiser l’irrite toujours vaguement.
4446
e n’entend pas encore gronder les eaux profondes.
Le
désir de s’hypnotiser l’irrite toujours vaguement. Mais il fuit son p
4447
nder les eaux profondes. Le désir de s’hypnotiser
l’
irrite toujours vaguement. Mais il fuit son propre regard, il se cherc
4448
te, il croit saisir dans un regard de cette femme
l’
écho de ce qui serait lui. Déjà il se perd dans ces yeux, mais comme o
4449
omme on meurt dans une naissance. Stéphane naît à
l’
amour et à lui-même conjointement. Plusieurs ivresses l’ont envahi bru
4450
r et à lui-même conjointement. Plusieurs ivresses
l’
ont envahi bruyamment, bâillonnent sa raison, l’empêchent de protester
4451
s l’ont envahi bruyamment, bâillonnent sa raison,
l’
empêchent de protester contre le miracle. Parmi tous ses mots fous, no
4452
onnent sa raison, l’empêchent de protester contre
le
miracle. Parmi tous ses mots fous, noms, baisers, appels qui reçoiven
4453
s tard, ce fut un jour de grand soleil sur toutes
les
verreries de la capitale. Les fenêtres battaient. Le soleil et « la m
4454
jour de grand soleil sur toutes les verreries de
la
capitale. Les fenêtres battaient. Le soleil et « la mort » se conjura
4455
d soleil sur toutes les verreries de la capitale.
Les
fenêtres battaient. Le soleil et « la mort » se conjuraient pour abai
4456
verreries de la capitale. Les fenêtres battaient.
Le
soleil et « la mort » se conjuraient pour abaisser tous les regards.
4457
capitale. Les fenêtres battaient. Le soleil et «
la
mort » se conjuraient pour abaisser tous les regards. Stéphane rendu
4458
et « la mort » se conjuraient pour abaisser tous
les
regards. Stéphane rendu à la santé écrivait : « Ton visage me cache t
4459
pour abaisser tous les regards. Stéphane rendu à
la
santé écrivait : « Ton visage me cache tous les miroirs » — à une fem
4460
à la santé écrivait : « Ton visage me cache tous
les
miroirs » — à une femme qu’il aimait. m. « Miroirs, ou Comment on p
4461
omment on perd Eurydice et soi-même », Cahiers de
l’
Anglore, Genève, n° 1, décembre 1928, p. 37-42.
4462
re et moi et Je suis un homme (janvier 1929)ax
Le
critique se sent désarmé et légèrement absurde en face d’un récit com
4463
vec une émouvante simplicité et il faudrait avoir
la
grossièreté de lui répondre d’un air connaisseur que c’est bien compo
4464
bien étonné du passage où il rappelle qu’il écrit
la
vie d’un homme de lettres. En réalité, on ne le voit pas encore appar
4465
t la vie d’un homme de lettres. En réalité, on ne
le
voit pas encore apparaître sous cet aspect dans ces deux premiers tom
4466
s de son enfance et de sa jeunesse comme ouvrier.
L’
art d’Anderson est étonnant d’apparente simplicité. Le récit s’avance
4467
t d’Anderson est étonnant d’apparente simplicité.
Le
récit s’avance à une allure libre et tranquille, anglo-saxonne et peu
4468
et là s’ouvrent des perspectives saisissantes sur
l’
époque. Anderson est avant tout un poète, un homme qui aime inventer e
4469
es nécessités modernes, dégradantes. Cet amour de
l’
invention romanesque considérée comme une revanche de la poésie — mais
4470
ntion romanesque considérée comme une revanche de
la
poésie — mais à Chicago on doit appeler ça du bluff — fait de lui san
4471
doit appeler ça du bluff — fait de lui sans doute
le
plus méridional des conteurs américains. Avec cela, un réalisme, plei
4472
uvent d’amertume. Mais là où d’autres placeraient
le
couplet humanitariste, lui s’en va dans un rêve, ou dans un autre sou
4473
est un Américain qui viennent nous rapprendre que
les
sources de la poésie sont dans notre maison. Voici un de ces passages
4474
n qui viennent nous rapprendre que les sources de
la
poésie sont dans notre maison. Voici un de ces passages où il sait êt
4475
ouvant : « À cette époque je croyais fortement en
l’
existence d’une espèce de secrète et à peu près universelle conspirati
4476
u près universelle conspiration pour insister sur
la
laideur. “C’est une frasque de gosses à laquelle nous nous livrons, v
4477
à laquelle nous nous livrons, voilà tout, moi et
les
autres”, me disais-je parfois, et il y avait des moments où j’arrivai
4478
s, bras dessous en riant de nous-mêmes et de tout
le
reste, nous amusant comme des fous ». Mais non, on ne le secouera pas
4479
e, nous amusant comme des fous ». Mais non, on ne
le
secouera pas, ce cauchemar, ce monde moderne, ce monde de fous qui n’
4480
fous qui n’ont plus que leur raison, ce monde où
l’
on ne sait plus créer avec joie des formes belles, ce monde qui devien
4481
quer un personnage précis pour lui faire endosser
le
blâme, mais comme l’homme nommé Ford, de Détroit, a contribué davanta
4482
écis pour lui faire endosser le blâme, mais comme
l’
homme nommé Ford, de Détroit, a contribué davantage que n’importe quel
4483
n’importe quel autre de mon temps à faire aboutir
la
standardization à sa fin logique, ne pourrait-il pas être considéré u
4484
, ne pourrait-il pas être considéré un jour comme
le
grand tueur de son époque ? Rendre impuissant c’est à coup sûr tuer.
4485
impuissant c’est à coup sûr tuer. Or on parle de
l’
élever à la présidence de la République. Qu’un tel acte serait adéquat
4486
c’est à coup sûr tuer. Or on parle de l’élever à
la
présidence de la République. Qu’un tel acte serait adéquat ! Tamerlan
4487
tuer. Or on parle de l’élever à la présidence de
la
République. Qu’un tel acte serait adéquat ! Tamerlan, dont la spécial
4488
e. Qu’un tel acte serait adéquat ! Tamerlan, dont
la
spécialité était l’assassinat du corps humain, mais qui raconte dans
4489
rait adéquat ! Tamerlan, dont la spécialité était
l’
assassinat du corps humain, mais qui raconte dans son autobiographie q
4490
obiographie que son désir constant était que tous
les
hommes vivant sous lui conservassent la virilité et le respect de soi
4491
que tous les hommes vivant sous lui conservassent
la
virilité et le respect de soi était de son temps le souverain du mond
4492
mmes vivant sous lui conservassent la virilité et
le
respect de soi était de son temps le souverain du monde. Tamerlan pou
4493
virilité et le respect de soi était de son temps
le
souverain du monde. Tamerlan pour les anciens. Ford pour les modernes
4494
de son temps le souverain du monde. Tamerlan pour
les
anciens. Ford pour les modernes. Quelle décadence ! ax. « Sherwood
4495
in du monde. Tamerlan pour les anciens. Ford pour
les
modernes. Quelle décadence ! ax. « Sherwood Anderson : Mon père et
4496
« Belles-Lettres, c’est
la
clé des champs… » (janvier 1929)r 1. Belles-Lettres, c’est la clef
4497
ps… » (janvier 1929)r 1. Belles-Lettres, c’est
la
clef des champs. 2. L’essence de Belles-Lettres, c’est de l’alcool à
4498
1. Belles-Lettres, c’est la clef des champs. 2.
L’
essence de Belles-Lettres, c’est de l’alcool à brûler les cervelles et
4499
champs. 2. L’essence de Belles-Lettres, c’est de
l’
alcool à brûler les cervelles et les réputations. 3. Belles-Lettres n
4500
nce de Belles-Lettres, c’est de l’alcool à brûler
les
cervelles et les réputations. 3. Belles-Lettres n’est compréhensible
4501
tres, c’est de l’alcool à brûler les cervelles et
les
réputations. 3. Belles-Lettres n’est compréhensible et légitime que
4502
Lettres n’est compréhensible et légitime que dans
la
mesure où la poésie est compréhensible et légitime. 4. Je suis de san
4503
compréhensible et légitime que dans la mesure où
la
poésie est compréhensible et légitime. 4. Je suis de sang-froid, je d
4504
esse ; autrement que par des cris. 5. Avec toutes
les
erreurs et turpitudes que cela comporte, Belles-Lettres est une liber
4505
trer en religion : rond de cuir ou poète (au sens
le
plus large de ces mots.) (Mais je tiens à le leur dire ici : les anci
4506
sens le plus large de ces mots.) (Mais je tiens à
le
leur dire ici : les anciens bellettriens qui ont perdu toute foi ne c
4507
de ces mots.) (Mais je tiens à le leur dire ici :
les
anciens bellettriens qui ont perdu toute foi ne connaîtront pas de pa
4508
sont foncièrement mauvais.) 6. Peu de choses dans
le
monde moderne ont encore une « essence ». Celle de Belles-Lettres est
4509
. Celle de Belles-Lettres est en agréable odeur à
l’
Éternel et à Satan pareillement. Et ceux qu’elle enivre entrent en éta
4510
lement. 7. (Secret). r. « Belles-Lettres, c’est
la
clef des champs… » [Réponse à l’enquête sur l’« Essence de Belles-Let
4511
s-Lettres, c’est la clef des champs… » [Réponse à
l’
enquête sur l’« Essence de Belles-Lettres »], Revue de Belles-Lettres,
4512
st la clef des champs… » [Réponse à l’enquête sur
l’
« Essence de Belles-Lettres »], Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuc
4513
de jour (mars 1929)s Prison Prisonnier de
la
nuit mais plus libre qu’un ange prisonnier dans ta tête mais libre co
4514
me avant cette naissance aux lents vertiges Quand
la
nuit s’effeuille et se fane prisonnier d’une saison morte au tombeau
4515
d’une saison morte au tombeau des fleurs obscures
les
mains de l’absence se ferment sur le vide Tu pleurerais Mais la gr
4516
morte au tombeau des fleurs obscures les mains de
l’
absence se ferment sur le vide Tu pleurerais Mais la grâce est faci
4517
rs obscures les mains de l’absence se ferment sur
le
vide Tu pleurerais Mais la grâce est facile comme un matin d’été l
4518
ence se ferment sur le vide Tu pleurerais Mais
la
grâce est facile comme un matin d’été la grâce tendrement dénouée de
4519
ais Mais la grâce est facile comme un matin d’été
la
grâce tendrement dénouée de ta vie comme de cette nuit le jour d’un g
4520
tendrement dénouée de ta vie comme de cette nuit
le
jour d’un grand été qui consent… Ailleurs Colombes lumineuse
4521
yageuses ah ! que d’aucun retour vous ne laissiez
le
gage aux plaintes de mon cœur il est d’autres rivages où mieux qu’ici
4522
mon cœur il est d’autres rivages où mieux qu’ici
l’
on meurt. Étoile de jour Il naissait à son destin des rayons g
4523
t à son destin des rayons glissent et rient c’est
la
caresse des anges parmi les formes de l’ombre C’était l’aube et le
4524
lissent et rient c’est la caresse des anges parmi
les
formes de l’ombre C’était l’aube et le sourire adorable de savoir l
4525
nt c’est la caresse des anges parmi les formes de
l’
ombre C’était l’aube et le sourire adorable de savoir la dansante li
4526
e des anges parmi les formes de l’ombre C’était
l’
aube et le sourire adorable de savoir la dansante liberté d’un désir à
4527
s parmi les formes de l’ombre C’était l’aube et
le
sourire adorable de savoir la dansante liberté d’un désir à sa naissa
4528
C’était l’aube et le sourire adorable de savoir
la
dansante liberté d’un désir à sa naissance L’étoile qui l’accueille
4529
r la dansante liberté d’un désir à sa naissance
L’
étoile qui l’accueille au sommet ravi d’un silence c’est le miroir d’u
4530
liberté d’un désir à sa naissance L’étoile qui
l’
accueille au sommet ravi d’un silence c’est le miroir d’une absence ma
4531
qui l’accueille au sommet ravi d’un silence c’est
le
miroir d’une absence mais le signe de sa grâce Dans l’or vert évano
4532
i d’un silence c’est le miroir d’une absence mais
le
signe de sa grâce Dans l’or vert évanouie au cœur éclatant du jour
4533
ir d’une absence mais le signe de sa grâce Dans
l’
or vert évanouie au cœur éclatant du jour scintillera l’invisible gage
4534
ert évanouie au cœur éclatant du jour scintillera
l’
invisible gage d’un amour perdu. s. « Prison. Ailleurs. Étoile de
4535
)t Quand avec un air fin mais un ton convaincu
l’
on a répété dans une ballade fameuse « Que voulez-vous, je suis bourge
4536
fameuse « Que voulez-vous, je suis bourgeois ! »,
l’
on peut se permettre quelques malices, quelques jeux d’esprit ou de mé
4537
elques jeux d’esprit ou de méchanceté, assuré que
l’
on est désormais d’être absous avec le sourire par la clientèle des li
4538
assuré que l’on est désormais d’être absous avec
le
sourire par la clientèle des librairies romandes, en mal de cadeaux d
4539
n est désormais d’être absous avec le sourire par
la
clientèle des librairies romandes, en mal de cadeaux de Noël ou de pr
4540
e cadeaux de Noël ou de première communion. Parmi
les
compatriotes d’Amiel, Godet restera l’un des rares qui ont réussi à s
4541
peu complexe et comme réduite à deux dimensions ;
la
conscience ne pouvait y tuer un lyrisme quasi inexistant, mais bien y
4542
xciter un esprit critique fort alerte. Jugez-en à
la
façon dont il parle de « ses quelques succès, si disproportionnés ave
4543
rtionnés avec son mérite ». Il ajoute : « j’ai eu
la
chance de discerner très jeune, avec une clairvoyance singulière, mes
4544
yance singulière, mes propres limites, et j’ai eu
la
sagesse de ne rien tenter au-delà ». C’est le comble de l’économie bo
4545
eu la sagesse de ne rien tenter au-delà ». C’est
le
comble de l’économie bourgeoise que cette administration exacte d’un
4546
e de ne rien tenter au-delà ». C’est le comble de
l’
économie bourgeoise que cette administration exacte d’un petit capital
4547
e cette administration exacte d’un petit capital.
Le
contraire de la poésie, bien sûr. Mais on n’en demande pas tant dans
4548
ration exacte d’un petit capital. Le contraire de
la
poésie, bien sûr. Mais on n’en demande pas tant dans les familles. Et
4549
sie, bien sûr. Mais on n’en demande pas tant dans
les
familles. Et qu’importe si la perspective manque souvent à ces récits
4550
ande pas tant dans les familles. Et qu’importe si
la
perspective manque souvent à ces récits : ce n’est point un paysage d
4551
’est point un paysage d’âme qu’on y cherche, mais
l’
anecdote bien tournée, des noms connus. Tout est sur le même plan ; le
4552
cdote bien tournée, des noms connus. Tout est sur
le
même plan ; le dessin d’ailleurs est élégant. Mais comme tout cela ma
4553
née, des noms connus. Tout est sur le même plan ;
le
dessin d’ailleurs est élégant. Mais comme tout cela manque de chair.
4554
press, changer totalement d’atmosphère, passer de
la
lassitude à la turbulence, d’une propreté joliette à un désordre pitt
4555
totalement d’atmosphère, passer de la lassitude à
la
turbulence, d’une propreté joliette à un désordre pittoresque, d’un s
4556
d’un scepticisme poli à une excitation agressive.
La
simple visite des cafés dans l’une et l’autre de ces capitales suffit
4557
l’autre de ces capitales suffit à vous en donner
la
sensation : ce que vous pourrez voir durant le reste de votre séjour
4558
er la sensation : ce que vous pourrez voir durant
le
reste de votre séjour ne fera que confirmer cette première impression
4559
mer cette première impression. Vienne : assis sur
les
banquettes rembourrées de profondes loges, les clients dégustent des
4560
ur les banquettes rembourrées de profondes loges,
les
clients dégustent des cafés débordants de crème, avec une apathie qu’
4561
troubler, aucune voix haute, aucune couleur vive.
Les
journaux qu’ils lisent annoncent chaque jour quelque catastrophe immi
4562
ur quelque catastrophe imminente, une révolution,
le
transfert de la SDN à la Hofburg… Mais les nouvelles de l’Opéra aussi
4563
trophe imminente, une révolution, le transfert de
la
SDN à la Hofburg… Mais les nouvelles de l’Opéra aussi sont en grosses
4564
minente, une révolution, le transfert de la SDN à
la
Hofburg… Mais les nouvelles de l’Opéra aussi sont en grosses lettres,
4565
lution, le transfert de la SDN à la Hofburg… Mais
les
nouvelles de l’Opéra aussi sont en grosses lettres, et tout cela fini
4566
ert de la SDN à la Hofburg… Mais les nouvelles de
l’
Opéra aussi sont en grosses lettres, et tout cela finira bien par s’ar
4567
uple s’est résigné avec une facilité incroyable à
la
défaite, au marxisme, au chômage, lequel semble d’ailleurs correspond
4568
emble d’ailleurs correspondre à son état d’esprit
le
plus naturel. Mais de quoi vivent ces bourgeois aimables et insipides
4569
ipides, qui passent des après-midi entiers devant
les
deux verres d’eau que le garçon renouvelle de temps à autre, à lire d
4570
rès-midi entiers devant les deux verres d’eau que
le
garçon renouvelle de temps à autre, à lire des potins tout en essuyan
4571
t : une vague de musique tzigane vous emporte dès
l’
entrée. Un violon vient vous siffler à l’oreille les notes les plus ai
4572
orte dès l’entrée. Un violon vient vous siffler à
l’
oreille les notes les plus aiguës d’une chanson populaire, et à l’autr
4573
’entrée. Un violon vient vous siffler à l’oreille
les
notes les plus aiguës d’une chanson populaire, et à l’autre extrémité
4574
n violon vient vous siffler à l’oreille les notes
les
plus aiguës d’une chanson populaire, et à l’autre extrémité de la sal
4575
’une chanson populaire, et à l’autre extrémité de
la
salle, par-dessus la rumeur des clients, le violoncelle répond de sa
4576
e, et à l’autre extrémité de la salle, par-dessus
la
rumeur des clients, le violoncelle répond de sa voix profonde et pass
4577
té de la salle, par-dessus la rumeur des clients,
le
violoncelle répond de sa voix profonde et passionnée, sous les roulad
4578
le répond de sa voix profonde et passionnée, sous
les
roulades d’un cymbalum. Aux parois, la prière pour la résurrection de
4579
née, sous les roulades d’un cymbalum. Aux parois,
la
prière pour la résurrection de la Hongrie, des portraits de lord Roth
4580
oulades d’un cymbalum. Aux parois, la prière pour
la
résurrection de la Hongrie, des portraits de lord Rothermere, et sur
4581
um. Aux parois, la prière pour la résurrection de
la
Hongrie, des portraits de lord Rothermere, et sur toutes les portes l
4582
, des portraits de lord Rothermere, et sur toutes
les
portes le fameux : « Non ! non ! jamais ! » Officiers élégants, tout
4583
aits de lord Rothermere, et sur toutes les portes
le
fameux : « Non ! non ! jamais ! » Officiers élégants, tout de noir vê
4584
x curieux dessins noirs et blancs : il représente
l’
ancienne Hongrie découpée en blanc sur fond noir et portant, en cœur n
4585
en blanc sur fond noir et portant, en cœur noir,
la
nouvelle… « Savez-vous qu’on nous a pris les deux tiers de notre pays
4586
noir, la nouvelle… « Savez-vous qu’on nous a pris
les
deux tiers de notre pays ?… Non, non, jamais ! » La rue est sale à ca
4587
deux tiers de notre pays ?… Non, non, jamais ! »
La
rue est sale à cause de la fonte de la neige (une boue ocre, épaisse,
4588
… Non, non, jamais ! » La rue est sale à cause de
la
fonte de la neige (une boue ocre, épaisse, on envie les bottes que po
4589
jamais ! » La rue est sale à cause de la fonte de
la
neige (une boue ocre, épaisse, on envie les bottes que portent les fe
4590
nte de la neige (une boue ocre, épaisse, on envie
les
bottes que portent les femmes), encombrée de piétons qui traversent e
4591
ue ocre, épaisse, on envie les bottes que portent
les
femmes), encombrée de piétons qui traversent en tous sens, évitant vi
4592
ons qui traversent en tous sens, évitant vivement
les
trams qui sonnent avec frénésie et les petits taxis rouges qui déferl
4593
t vivement les trams qui sonnent avec frénésie et
les
petits taxis rouges qui déferlent sur les boulevards comme une nuée d
4594
ésie et les petits taxis rouges qui déferlent sur
les
boulevards comme une nuée d’insectes affolés. Les maisons sont basses
4595
les boulevards comme une nuée d’insectes affolés.
Les
maisons sont basses, couvertes du haut en bas d’affiches rouges et ja
4596
rouges et jaunes et d’inscriptions cascadantes, à
l’
orientale (on pense au mot bazar, qui sonne rouge et jaune aussi). Sou
4597
unichoises. Puis un palais gothique 1880, qui est
le
Parlement. Et voici la trouée du Danube, Bude solidement amarrée à Pe
4598
ais gothique 1880, qui est le Parlement. Et voici
la
trouée du Danube, Bude solidement amarrée à Pest par quatre énormes p
4599
en hiver, viennent se briser avec un fracas sourd
les
îlots de glace qui descendent lentement le fleuve. Au cœur de Prophèt
4600
sourd les îlots de glace qui descendent lentement
le
fleuve. Au cœur de Prophète chauve s’élève la montagne de pierre de S
4601
ent le fleuve. Au cœur de Prophète chauve s’élève
la
montagne de pierre de St-Gellert. Elle tombe en hautes falaises dans
4602
de St-Gellert. Elle tombe en hautes falaises dans
le
Danube, froide et nue, mais dans son flanc une grotte s’illumine, et
4603
ue, mais dans son flanc une grotte s’illumine, et
la
Vierge y sourit. Le château royal avec son amiral régent et ses garde
4604
anc une grotte s’illumine, et la Vierge y sourit.
Le
château royal avec son amiral régent et ses gardes blancs aux casques
4605
des crémeries aux idylles démodées… Rentrons dans
la
ville un soir qu’elle s’amuse. Vous avez dîné au paprika chez des gen
4606
usion de liqueurs légères facilite singulièrement
les
rapports sociaux. On vous mène au Théâtre, vous n’y comprenez rien, m
4607
us mène au Théâtre, vous n’y comprenez rien, mais
le
charme des voix hongroises féminines suffit à votre bonheur et vous v
4608
iste. Vous vous êtes levé, comme tout le monde, à
l’
entrée d’un des archiducs. Car ce peuple, seul en Europe, attend le re
4609
archiducs. Car ce peuple, seul en Europe, attend
le
retour d’un roi. Et vous voici transporté dans un bal costumé, parmi
4610
ient et s’enivrent comme plus un Européen ne sait
le
faire, et dansent à tout propos de folles « czardas » qui deviennent
4611
ussins Rothermere et Grande Hongrie… Ivresse dans
le
malheur, passion et pauvreté, espoirs presque puérils et nostalgie de
4612
cela compose un visage romantique et ardent dont
le
voyageur s’éprend malgré lui, malgré tout, comme d’une passion poétiq
4613
faut s’en approcher avec une douceur patiente, et
le
laisser créer en nous son silence particulier avant d’entendre les si
4614
en nous son silence particulier avant d’entendre
les
signes qu’il nous propose. Une telle poésie n’offre aux sens que peu
4615
e quelques « motifs », objets usuels et usés, sur
la
nuance mate d’un paravent chinois). Ce qu’elle décrit, ce sont des pe
4616
s). Ce qu’elle décrit, ce sont des perceptions de
l’
âme plus que de l’esprit ou des sens. « Reste immobile et sache attend
4617
rit, ce sont des perceptions de l’âme plus que de
l’
esprit ou des sens. « Reste immobile et sache attendre que ton cœur se
4618
cœur se détache de toi comme une lourde pierre. »
Le
corps, que l’âme quitte, redevient minéral, statue dans le silence «
4619
e de toi comme une lourde pierre. » Le corps, que
l’
âme quitte, redevient minéral, statue dans le silence « aux yeux gelés
4620
que l’âme quitte, redevient minéral, statue dans
le
silence « aux yeux gelés de rêverie », il se confond avec l’ombre du
4621
« aux yeux gelés de rêverie », il se confond avec
l’
ombre du monde. Et l’âme peut enfin « saisir » dans leur réalité les c
4622
êverie », il se confond avec l’ombre du monde. Et
l’
âme peut enfin « saisir » dans leur réalité les choses dont elle s’est
4623
Et l’âme peut enfin « saisir » dans leur réalité
les
choses dont elle s’est dégagée et qu’elle voit dans une autre lumière
4624
t semblait vivre au fond d’un insistant regard. »
Le
poète des Gravitations est ici descendu plus profond en soi-même ; so
4625
; et quel beau titre ! « Saisir » n’est-ce point
l’
acte essentiel de la poésie ? Toute poésie véritable n’est-elle pas pr
4626
e ! « Saisir » n’est-ce point l’acte essentiel de
la
poésie ? Toute poésie véritable n’est-elle pas proprement « saisissan
4627
n’est-elle pas proprement « saisissante » ? Mais
le
plus émouvant, c’est ici l’approche d’un silence partout pressenti, q
4628
saisissante » ? Mais le plus émouvant, c’est ici
l’
approche d’un silence partout pressenti, qui s’impose, qui apaise le v
4629
lence partout pressenti, qui s’impose, qui apaise
le
vain débat de notre esprit : « Car l’on pense beaucoup trop haut, et
4630
qui apaise le vain débat de notre esprit : « Car
l’
on pense beaucoup trop haut, et cela fait un vacarme terrible. » ay.
4631
La
tour de Hölderlin (15 juillet 1929)n « Je lui ai raconté qu’il hab
4632
e une chaumière au bord d’un ruisseau, qu’il dort
les
portes ouvertes, et pendant des heures récite des odes grecques au mu
4633
des heures récite des odes grecques au murmure de
l’
eau ; la Princesse de Homburg lui a fait cadeau d’un piano dont il a c
4634
es récite des odes grecques au murmure de l’eau ;
la
Princesse de Homburg lui a fait cadeau d’un piano dont il a coupé les
4635
burg lui a fait cadeau d’un piano dont il a coupé
les
cordes, mais pas toutes, en sorte que plusieurs touches sonnent encor
4636
lettre sur Hölderlin : « Ce piano dont il a cassé
les
cordes, c’est vraiment l’image de son âme ; j’ai voulu attirer là-des
4637
piano dont il a cassé les cordes, c’est vraiment
l’
image de son âme ; j’ai voulu attirer là-dessus l’attention du médecin
4638
l’image de son âme ; j’ai voulu attirer là-dessus
l’
attention du médecin, mais il est plus difficile de se faire comprendr
4639
se faire comprendre par un sot que par un fou. »
L’
hiver dernier, m’occupant assez longuement d’un des poètes auxquels no
4640
t d’un des poètes auxquels notre temps doit vouer
l’
attention la plus grave — car il vécut dans ces marches de l’esprit hu
4641
oètes auxquels notre temps doit vouer l’attention
la
plus grave — car il vécut dans ces marches de l’esprit humain qui con
4642
la plus grave — car il vécut dans ces marches de
l’
esprit humain qui confinent peut-être à l’Esprit et dont certains des
4643
ches de l’esprit humain qui confinent peut-être à
l’
Esprit et dont certains des plus purs d’entre nous se préparent à tent
4644
des plus purs d’entre nous se préparent à tenter
le
climat, — j’avais rêvé sur ce passage de l’émouvante Bettina, rêvé sa
4645
enter le climat, — j’avais rêvé sur ce passage de
l’
émouvante Bettina, rêvé sans doute assez profondément pour qu’aujourd’
4646
sans doute assez profondément pour qu’aujourd’hui
le
hasard qui m’amène à Tubingue ne soit pas seulement un hasard… Hier,
4647
ue ne soit pas seulement un hasard… Hier, c’était
la
Pentecôte. La fête de la plus haute poésie. Mais dans ce siècle, où t
4648
seulement un hasard… Hier, c’était la Pentecôte.
La
fête de la plus haute poésie. Mais dans ce siècle, où tant de voix l’
4649
un hasard… Hier, c’était la Pentecôte. La fête de
la
plus haute poésie. Mais dans ce siècle, où tant de voix l’appellent,
4650
aute poésie. Mais dans ce siècle, où tant de voix
l’
appellent, combien sont dignes de s’attendre au don du langage sacré ?
4651
angue de feu qui s’est posée sur Hölderlin et qui
l’
a consumé… Digne ? — Un adolescent au visage de jeune fille qui rimait
4652
age de jeune fille qui rimait sagement des odes à
la
liberté… Et voici dans sa vie cette double venue de l’amour et du cha
4653
berté… Et voici dans sa vie cette double venue de
l’
amour et du chant prophétique, confondant leurs flammes. Dix années da
4654
étique, confondant leurs flammes. Dix années dans
le
Grand Jeu. Dix années où le génie tourmente cet être faible, humilié
4655
mmes. Dix années dans le Grand Jeu. Dix années où
le
génie tourmente cet être faible, humilié par le monde. L’amour s’éloi
4656
ù le génie tourmente cet être faible, humilié par
le
monde. L’amour s’éloigne le premier, quand Hölderlin doit quitter la
4657
tourmente cet être faible, humilié par le monde.
L’
amour s’éloigne le premier, quand Hölderlin doit quitter la maison de
4658
’éloigne le premier, quand Hölderlin doit quitter
la
maison de Madame Gontard12, déchirement à peine sensible dans son œuv
4659
dans son œuvre. Car ce poète n’est peut-être que
le
lieu de sa poésie, — d’une poésie, l’on dirait, qui ne connaît pas so
4660
ut-être que le lieu de sa poésie, — d’une poésie,
l’
on dirait, qui ne connaît pas son auteur. Qui parle par sa bouche ? Il
4661
ses Hymnes une sérénité presque effrayante. Vient
le
temps où le sens de son monologue entre terre et ciel lui échappe. Il
4662
ne sérénité presque effrayante. Vient le temps où
le
sens de son monologue entre terre et ciel lui échappe. Il jette encor
4663
rappelle — Ou bien envoie — un héros — Ou bien —
la
sagesse. » Mais le feu s’éteint — l’esprit souffle où il veut. Juin 1
4664
envoie — un héros — Ou bien — la sagesse. » Mais
le
feu s’éteint — l’esprit souffle où il veut. Juin 1802 : au moment où
4665
— Ou bien — la sagesse. » Mais le feu s’éteint —
l’
esprit souffle où il veut. Juin 1802 : au moment où meurt Diotima, Höl
4666
meurt Diotima, Hölderlin errant loin d’elle (dans
la
région de Bordeaux croit-on), est frappé d’insolation ; sa folie d’un
4667
on), est frappé d’insolation ; sa folie d’un coup
l’
envahit. C’est une sorte de vieillard qui reparaît en Allemagne. Et du
4668
ente années, ce pauvre corps abandonné vivra dans
la
petite tour de Tubingue, chez un charpentier — vivra très doucement,
4669
plicablement, une vie monotone de vieux maniaque.
Le
buisson ardent quitté par le feu se dessèche. Ce qui fut Hölderlin si
4670
e de vieux maniaque. Le buisson ardent quitté par
le
feu se dessèche. Ce qui fut Hölderlin signe maintenant Scardanelli de
4671
s qu’il donne aux visiteurs venus pour contempler
la
victime d’un miracle. — C’était l’époque des amateurs de ruines. Je s
4672
our contempler la victime d’un miracle. — C’était
l’
époque des amateurs de ruines. Je suis descendu au bord de l’eau, un p
4673
s amateurs de ruines. Je suis descendu au bord de
l’
eau, un peu au-dessous de la maison, en attendant l’heure d’ouverture.
4674
s descendu au bord de l’eau, un peu au-dessous de
la
maison, en attendant l’heure d’ouverture. Il y a là une station de ca
4675
eau, un peu au-dessous de la maison, en attendant
l’
heure d’ouverture. Il y a là une station de canots de louage où j’ai v
4676
tzsche » à fond plat. Des saules se penchent vers
l’
eau lente. Sur l’autre rive qui est celle d’une longue île, des étudia
4677
iants au crâne rasé se promènent un roman jaune à
la
main. L’un après l’autre, dans cette paresse de jour férié, les cloch
4678
après l’autre, dans cette paresse de jour férié,
les
clochers de la ville sonnent deux heures. Allons. Un de ces corridors
4679
dans cette paresse de jour férié, les clochers de
la
ville sonnent deux heures. Allons. Un de ces corridors de vieille mai
4680
’étaient à demi encombrés d’armoires. Un couloir,
la
chambre. L’homme qui me conduit est le propriétaire actuel. « Monsieu
4681
emi encombrés d’armoires. Un couloir, la chambre.
L’
homme qui me conduit est le propriétaire actuel. « Monsieur connaît Hö
4682
n couloir, la chambre. L’homme qui me conduit est
le
propriétaire actuel. « Monsieur connaît Hölderlin ? — questionne-t-il
4683
, ici à Francfort, écrivait Bettina, car aussitôt
l’
on se met à raconter les choses les plus affreuses sur son compte, sim
4684
vait Bettina, car aussitôt l’on se met à raconter
les
choses les plus affreuses sur son compte, simplement parce qu’il a ai
4685
a, car aussitôt l’on se met à raconter les choses
les
plus affreuses sur son compte, simplement parce qu’il a aimé une femm
4686
l a aimé une femme, pour écrire Hypérion, et pour
les
gens d’ici, aimer, c’est seulement vouloir se marier… » — Et puis plu
4687
uloir se marier… » — Et puis plus tard on encadre
les
lettres des amants, on propose le couple à l’admiration des écoliers
4688
ard on encadre les lettres des amants, on propose
le
couple à l’admiration des écoliers en promenade, et le guide désigne
4689
re les lettres des amants, on propose le couple à
l’
admiration des écoliers en promenade, et le guide désigne familièremen
4690
uple à l’admiration des écoliers en promenade, et
le
guide désigne familièrement l’image d’une femme par le nom qu’elle po
4691
s en promenade, et le guide désigne familièrement
l’
image d’une femme par le nom qu’elle portait au mystère de l’amour… Tr
4692
ide désigne familièrement l’image d’une femme par
le
nom qu’elle portait au mystère de l’amour… Trois petites fenêtres orn
4693
ne femme par le nom qu’elle portait au mystère de
l’
amour… Trois petites fenêtres ornées de cactus miséreux, une pipe qui
4694
rnées de cactus miséreux, une pipe qui traîne sur
l’
appui ; le jardinet avec son banc et ses lilas fleuris qui trempent… T
4695
actus miséreux, une pipe qui traîne sur l’appui ;
le
jardinet avec son banc et ses lilas fleuris qui trempent… Tout est fa
4696
armotter. Vingt-sept ans dans cette chambre, avec
le
bruit de l’eau et cette complainte de malade épuisé après un grand ac
4697
ngt-sept ans dans cette chambre, avec le bruit de
l’
eau et cette complainte de malade épuisé après un grand accès de fièvr
4698
de malade épuisé après un grand accès de fièvre…
L’
agrément de ce monde, je l’ai vécu. Les joies de la jeunesse, voilà
4699
rand accès de fièvre… L’agrément de ce monde, je
l’
ai vécu. Les joies de la jeunesse, voilà si longtemps, si longtemp
4700
fièvre… L’agrément de ce monde, je l’ai vécu.
Les
joies de la jeunesse, voilà si longtemps, si longtemps qu’elles ont
4701
grément de ce monde, je l’ai vécu. Les joies de
la
jeunesse, voilà si longtemps, si longtemps qu’elles ont fui. Avri
4702
. Il y avait encore plus de paix que maintenant.
La
grande allée sur l’île n’existait pas, en face, ni les maisons. Il vo
4703
plus de paix que maintenant. La grande allée sur
l’
île n’existait pas, en face, ni les maisons. Il voyait des prairies et
4704
rande allée sur l’île n’existait pas, en face, ni
les
maisons. Il voyait des prairies et des collines basses, de l’autre cô
4705
airies et des collines basses, de l’autre côté de
l’
eau jaune et verte… Quel est donc ce sommeil « dans la nuit de la vie
4706
u jaune et verte… Quel est donc ce sommeil « dans
la
nuit de la vie » — et cet aveu mystérieux : « La perfection n’a pas d
4707
verte… Quel est donc ce sommeil « dans la nuit de
la
vie » — et cet aveu mystérieux : « La perfection n’a pas de plainte »
4708
la nuit de la vie » — et cet aveu mystérieux : «
La
perfection n’a pas de plainte »… Vivait-il encore ? Ce lieu soudain m
4709
vait-il encore ? Ce lieu soudain m’angoisse. Mais
le
gardien : il y est comme chez lui. — Dormez-vous dans ce lit ? — Oh !
4710
— Oh ! répond-il, je pourrais aussi bien habiter
la
chambre. Il ne vient pas tant de visiteurs, et seulement de 2 à 4… Un
4711
4… Une rue étouffée entre des maisons pointues et
les
contreforts de l’Église du Chapitre : je vois s’y engager chaque jour
4712
entre des maisons pointues et les contreforts de
l’
Église du Chapitre : je vois s’y engager chaque jour le fou au profil
4713
ise du Chapitre : je vois s’y engager chaque jour
le
fou au profil de vieille femme qui promène doucement dans cette calme
4714
e qui promène doucement dans cette calme Tubingue
le
secret d’une épouvantable mélancolie. Les étudiants le rencontrent, q
4715
Tubingue le secret d’une épouvantable mélancolie.
Les
étudiants le rencontrent, qui montent au Séminaire protestant : il le
4716
cret d’une épouvantable mélancolie. Les étudiants
le
rencontrent, qui montent au Séminaire protestant : il leur fait de gr
4717
protestant : il leur fait de grandes révérences…
La
rumeur et le cliquetis d’une grande terrasse de café au bord du Necka
4718
il leur fait de grandes révérences… La rumeur et
le
cliquetis d’une grande terrasse de café au bord du Neckar, sous les m
4719
e grande terrasse de café au bord du Neckar, sous
les
marronniers. À quatre heures, l’orchestre s’est mis à jouer des ringu
4720
du Neckar, sous les marronniers. À quatre heures,
l’
orchestre s’est mis à jouer des ringues charmantes, jazz et clarinette
4721
charmantes, jazz et clarinette, chansons de mai.
Les
bateaux qui dérivent dans le voisinage se rapprochent, tournoyent len
4722
e, chansons de mai. Les bateaux qui dérivent dans
le
voisinage se rapprochent, tournoyent lentement dans la musique. Je n’
4723
isinage se rapprochent, tournoyent lentement dans
la
musique. Je n’aime pas les jeunes Doktors à lunettes, en costume de b
4724
urnoyent lentement dans la musique. Je n’aime pas
les
jeunes Doktors à lunettes, en costume de bain, qui pagayent vigoureus
4725
en costume de bain, qui pagayent vigoureusement,
les
dents serrées. (« Weg zur Kraft und Schönheit ! »). J’aime les bateau
4726
rées. (« Weg zur Kraft und Schönheit ! »). J’aime
les
bateaux plats et incertains, avec des Daphnés dedans, qui ne savent p
4727
bien ramer et qui lisent des magazines au fil de
l’
eau, ce qui est le comble des vacances. À une table voisine, des adole
4728
lisent des magazines au fil de l’eau, ce qui est
le
comble des vacances. À une table voisine, des adolescents balafrés fo
4729
ues à une compagnie de cavaliers qui passe devant
la
statue d’Eberhard le Barbu. Des bourgeois se rient contre par-dessus
4730
sus leurs chopes. « Gemütlichkeit ». Évidemment :
la
vie normale. Il y a pourtant cette petite chambre… Est-ce que tout ce
4731
petite chambre… Est-ce que tout cela existe dans
le
même monde ? (Il est bon de poser parfois de ces grandes questions na
4732
a ne peut que mal finir. Ceux du bon sens hochent
la
tête et citent la phrase la plus malencontreuse de Pascal : le « Qui
4733
finir. Ceux du bon sens hochent la tête et citent
la
phrase la plus malencontreuse de Pascal : le « Qui veut faire l’ange…
4734
x du bon sens hochent la tête et citent la phrase
la
plus malencontreuse de Pascal : le « Qui veut faire l’ange… » a autor
4735
tent la phrase la plus malencontreuse de Pascal :
le
« Qui veut faire l’ange… » a autorisé des générations de « bourgeois
4736
us malencontreuse de Pascal : le « Qui veut faire
l’
ange… » a autorisé des générations de « bourgeois cultivés » à faire l
4737
des générations de « bourgeois cultivés » à faire
la
bête dès qu’il s’agit de l’âme. Dans la bouche de certains, cela pren
4738
is cultivés » à faire la bête dès qu’il s’agit de
l’
âme. Dans la bouche de certains, cela prend l’air de je ne sais quelle
4739
» à faire la bête dès qu’il s’agit de l’âme. Dans
la
bouche de certains, cela prend l’air de je ne sais quelle revanche du
4740
dont ils se sentent bénéficiaires. Ah ! vraiment
les
malins ! qui ont préféré faire tout de suite la bête : comme cela on
4741
les malins ! qui ont préféré faire tout de suite
la
bête : comme cela on est mieux pour donner le coup de pied de l’âne…
4742
ite la bête : comme cela on est mieux pour donner
le
coup de pied de l’âne… Écoutons plutôt Bettina — la vérité est plus h
4743
cela on est mieux pour donner le coup de pied de
l’
âne… Écoutons plutôt Bettina — la vérité est plus humaine, est plus di
4744
coup de pied de l’âne… Écoutons plutôt Bettina —
la
vérité est plus humaine, est plus divine, quand c’est une telle femme
4745
est plus divine, quand c’est une telle femme qui
la
confesse : « Celui qui entre en commerce trop étroit avec le ciel, le
4746
: « Celui qui entre en commerce trop étroit avec
le
ciel, les dieux le vouent au malheur. » Ô cette chambre, où pénètre l
4747
i qui entre en commerce trop étroit avec le ciel,
les
dieux le vouent au malheur. » Ô cette chambre, où pénètre la facilité
4748
e en commerce trop étroit avec le ciel, les dieux
le
vouent au malheur. » Ô cette chambre, où pénètre la facilité atroce d
4749
vouent au malheur. » Ô cette chambre, où pénètre
la
facilité atroce de cette fin d’après-midi, ces musiquettes et ces par
4750
, de ces mondes à mes yeux soudain simultanés ?…
Le
tragique de la facilité, c’est qu’elle n’est qu’un oubli. Et pourtant
4751
à mes yeux soudain simultanés ?… Le tragique de
la
facilité, c’est qu’elle n’est qu’un oubli. Et pourtant, comme elle pa
4752
blie, triomphante, à beau fixe. Pourquoi troubler
le
miroir innocent de ces eaux, ces âmes indulgentes à leur banalité ? E
4753
amais rien ? Ou bien, peut-être, seulement, quand
l’
amour leur donne une petite fièvre, — cette semaine de leur jeunesse o
4754
choses généreuses autour d’eux… Cela s’oublie. Et
l’
amour, tout justement, nous fait comprendre, dans le temps même qu’il
4755
amour, tout justement, nous fait comprendre, dans
le
temps même qu’il nous entr’ouvre le ciel, qu’il est bon qu’il y ait l
4756
prendre, dans le temps même qu’il nous entr’ouvre
le
ciel, qu’il est bon qu’il y ait le monde… Mais que cette musique vulg
4757
ous entr’ouvre le ciel, qu’il est bon qu’il y ait
le
monde… Mais que cette musique vulgaire, par quel hasard, donne l’acco
4758
ue cette musique vulgaire, par quel hasard, donne
l’
accord qui m’ouvre un vrai silence : déjà je leur échappe — je t’échap
4759
, transitoire, allusif. Tout se remet à signifier
l’
absence. 11. Bettina von Arnim-Brentano : Die Günderode. 12. Où il
4760
. 12. Où il était précepteur. Madame Gontard est
la
Diotima de l’Hypérion et des poèmes. n. « La tour de Hölderlin », La
4761
est la Diotima de l’Hypérion et des poèmes. n. «
La
tour de Hölderlin », La Quinzaine artistique et littéraire, Neuchâtel
4762
rion et des poèmes. n. « La tour de Hölderlin »,
La
Quinzaine artistique et littéraire, Neuchâtel, n° 18, 15 juillet 1929
4763
Jean Cassou,
La
Clef des songes (août 1929)az Après cet austère Pays qui n’est à p
4764
Après cet austère Pays qui n’est à personne paru
l’
année dernière — un livre assez troublant et qu’on a trop peu remarqué
4765
evient à son romantisme, à notre cher romantisme.
La
Clef des songes est de nouveau une dérive fantaisiste dans ce monde u
4766
monde un peu plus léger, un peu plus profond que
le
vrai, où l’Éloge de la folie nous entraînait naguère. Jean Cassou vag
4767
u plus léger, un peu plus profond que le vrai, où
l’
Éloge de la folie nous entraînait naguère. Jean Cassou vagabonde à tra
4768
r, un peu plus profond que le vrai, où l’Éloge de
la
folie nous entraînait naguère. Jean Cassou vagabonde à travers ses hi
4769
à travers ses histoires comme son Pierangelo dans
la
vie. Le hasard, complice des poètes, lui fait rencontrer des êtres bi
4770
s ses histoires comme son Pierangelo dans la vie.
Le
hasard, complice des poètes, lui fait rencontrer des êtres bizarres a
4771
s il n’hésite pas à faire un bout de chemin, Hans
le
gardeur d’oies, le gueux Joseph qui parle à son chien en mourant, une
4772
faire un bout de chemin, Hans le gardeur d’oies,
le
gueux Joseph qui parle à son chien en mourant, une fille qui chante e
4773
une fille qui chante et des enfants surtout, dès
le
début, puis plus tard encore, dans les songes des grandes personnes,
4774
urtout, dès le début, puis plus tard encore, dans
les
songes des grandes personnes, — puis tous se perdent, comme des souve
4775
, — puis tous se perdent, comme des souvenirs, et
l’
on retrouve un peu plus loin d’autres souvenirs attristés par le temps
4776
un peu plus loin d’autres souvenirs attristés par
le
temps, des visages qui ne sont plus tout à fait les mêmes, des bonheu
4777
e temps, des visages qui ne sont plus tout à fait
les
mêmes, des bonheurs qui signifient plus de désespoir qu’ils ne s’en d
4778
pleurer. Quel dommage qu’il s’égare parfois dans
les
maisons des grands bourgeois, où tout, soudain, devient plus terne. M
4779
oésie nous replonge dans une atmosphère autre, où
les
personnages ont cet air un peu ivre et capable de n’importe quoi, cet
4780
te quoi, cet air dangereux et tendre que prennent
les
hommes en liberté. Mais ils ne sont jamais méchants, et seulement aux
4781
de liberté dont nous avons besoin pour croire que
le
monde actuel n’est pas un cas désespéré. Mais voici déjà dans l’œuvre
4782
n’est pas un cas désespéré. Mais voici déjà dans
l’
œuvre de Jean Cassou, et singulièrement dans ce livre, beaucoup de ces
4783
rs assez de vérité dans une histoire où il y a de
la
poésie. az. « Jean Cassou : La Clef des songes (Émile-Paul, Paris)
4784
ire où il y a de la poésie. az. « Jean Cassou :
La
Clef des songes (Émile-Paul, Paris) », Bibliothèque universelle et Re
4785
André Rolland de Renéville, Rimbaud
le
voyant (août 1929)ba À lire ce petit livre et le parallèle qu’il é
4786
voyant (août 1929)ba À lire ce petit livre et
le
parallèle qu’il établit entre le yogabb telle que l’enseignaient les
4787
e petit livre et le parallèle qu’il établit entre
le
yogabb telle que l’enseignaient les upanishads et la tentative poétiq
4788
parallèle qu’il établit entre le yogabb telle que
l’
enseignaient les upanishads et la tentative poétique de Rimbaud, l’on
4789
établit entre le yogabb telle que l’enseignaient
les
upanishads et la tentative poétique de Rimbaud, l’on s’étonne qu’il a
4790
yogabb telle que l’enseignaient les upanishads et
la
tentative poétique de Rimbaud, l’on s’étonne qu’il ait fallu plus d’u
4791
s upanishads et la tentative poétique de Rimbaud,
l’
on s’étonne qu’il ait fallu plus d’un demi-siècle pour qu’une telle in
4792
demi-siècle pour qu’une telle interprétation voie
le
jour. Cela pourrait donner lieu à de mélancoliques réflexions sur le
4793
ait donner lieu à de mélancoliques réflexions sur
le
génie « poétique » français… Mais non, nous préférons voir ici l’un d
4794
gnes qui de toutes parts annoncent une rentrée de
l’
âme dans la littérature la plus spirituelle du monde. La thèse que déf
4795
toutes parts annoncent une rentrée de l’âme dans
la
littérature la plus spirituelle du monde. La thèse que défend l’auteu
4796
nnoncent une rentrée de l’âme dans la littérature
la
plus spirituelle du monde. La thèse que défend l’auteur de cet essai
4797
dans la littérature la plus spirituelle du monde.
La
thèse que défend l’auteur de cet essai — la voyance de Rimbaud — est
4798
la plus spirituelle du monde. La thèse que défend
l’
auteur de cet essai — la voyance de Rimbaud — est une de ces évidences
4799
onde. La thèse que défend l’auteur de cet essai —
la
voyance de Rimbaud — est une de ces évidences qu’il est bon de propos
4800
une de ces évidences qu’il est bon de proposer à
la
réflexion de notre temps, ne fût-ce que pour faite honte à ceux qui s
4801
telle honte, de leur indifférence à l’endroit de
l’
être le plus monstrueusement pur qui se soit révélé par le truchement
4802
honte, de leur indifférence à l’endroit de l’être
le
plus monstrueusement pur qui se soit révélé par le truchement de la p
4803
e plus monstrueusement pur qui se soit révélé par
le
truchement de la poésie française. — Livre un peu didactique, trop at
4804
ement pur qui se soit révélé par le truchement de
la
poésie française. — Livre un peu didactique, trop attentif à sa propr
4805
s inspiré par cet enthousiasme sacré que requiert
l’
œuvre de Rimbaud. Regrettons seulement qu’il n’élargisse pas plus une
4806
as plus une question aussi centrale — qui est, si
l’
on veut, la question d’Orient-Occident. Et pourquoi cette hostilité de
4807
question aussi centrale — qui est, si l’on veut,
la
question d’Orient-Occident. Et pourquoi cette hostilité de sectaire c
4808
t. Et pourquoi cette hostilité de sectaire contre
l’
interprétation proposée par Claudel et Isabelle Rimbaud ? Si Claudel s
4809
ontré partial en faisant de Rimbaud, « mystique à
l’
état sauvage », un catholique qui s’ignore, il n’est pas plus admissib
4810
us admissible d’inférer du mépris de Rimbaud pour
le
catholicisme à son mépris pour la révélation évangélique. Je ne vois
4811
de Rimbaud pour le catholicisme à son mépris pour
la
révélation évangélique. Je ne vois là que l’indice d’une confusion bi
4812
pour la révélation évangélique. Je ne vois là que
l’
indice d’une confusion bien française, hélas. ba. « André Rolland de
4813
ue de Genève, Genève, août 1929, p. 250-251. bb.
Le
féminin est ici conservé, conformément au texte original.
4814
Julien Benda,
La
Fin de l’Éternel (novembre 1929)bc Ce n’est plus l’heure de venir
4815
Julien Benda, La Fin de
l’
Éternel (novembre 1929)bc Ce n’est plus l’heure de venir prendre po
4816
n de l’Éternel (novembre 1929)bc Ce n’est plus
l’
heure de venir prendre position dans un débat où les voix les mieux éc
4817
’heure de venir prendre position dans un débat où
les
voix les mieux écoutées ont dit ce qu’elles avaient à dire. Et d’autr
4818
venir prendre position dans un débat où les voix
les
mieux écoutées ont dit ce qu’elles avaient à dire. Et d’autre part, l
4819
dit ce qu’elles avaient à dire. Et d’autre part,
les
lecteurs de cette revue connaissent la thèse de la Trahison des Clerc
4820
tre part, les lecteurs de cette revue connaissent
la
thèse de la Trahison des Clercs 11, thèse dont la Fin de l’Éternel ne
4821
s lecteurs de cette revue connaissent la thèse de
la
Trahison des Clercs 11, thèse dont la Fin de l’Éternel ne fait que re
4822
la thèse de la Trahison des Clercs 11, thèse dont
la
Fin de l’Éternel ne fait que reprendre la défense contre ses adversai
4823
e la Trahison des Clercs 11, thèse dont la Fin de
l’
Éternel ne fait que reprendre la défense contre ses adversaires de tou
4824
se dont la Fin de l’Éternel ne fait que reprendre
la
défense contre ses adversaires de tous bords. Je voudrais souligner s
4825
es de tous bords. Je voudrais souligner seulement
la
beauté de l’effort désintéressé de Julien Benda, et l’obligation où n
4826
rds. Je voudrais souligner seulement la beauté de
l’
effort désintéressé de Julien Benda, et l’obligation où nous sommes to
4827
auté de l’effort désintéressé de Julien Benda, et
l’
obligation où nous sommes tous désormais de répondre pour nous-mêmes à
4828
mise en demeure. Je suis loin de partager toutes
les
idées de M. Benda, sur le plan philosophique en particulier, où je me
4829
hèse de M. Marcel de ce qu’elle « mène loin… dans
l’
ordre moral ». Et quand cela serait ! dirons-nous, — avec le Benda qui
4830
ral ». Et quand cela serait ! dirons-nous, — avec
le
Benda qui ne trahit pas.) D’autre part, de plus impertinents que moi
4831
s que moi ne manqueront pas de faire observer que
la
« fin de l’éternel », la chute de l’idée dans la matière, est un phén
4832
manqueront pas de faire observer que la « fin de
l’
éternel », la chute de l’idée dans la matière, est un phénomène exacte
4833
as de faire observer que la « fin de l’éternel »,
la
chute de l’idée dans la matière, est un phénomène exactement aussi vi
4834
observer que la « fin de l’éternel », la chute de
l’
idée dans la matière, est un phénomène exactement aussi vieux que le m
4835
la « fin de l’éternel », la chute de l’idée dans
la
matière, est un phénomène exactement aussi vieux que le monde. Mais M
4836
ière, est un phénomène exactement aussi vieux que
le
monde. Mais M. Benda distinguera, et ils seront confondus. Car il y a
4837
un sophiste en M. Benda, un polémiste qui joue de
la
raison ratiocinante tout comme si elle n’était pas le contraire de la
4838
aison ratiocinante tout comme si elle n’était pas
le
contraire de la Raison de Spinoza. Nul mieux que lui ne s’entend défi
4839
te tout comme si elle n’était pas le contraire de
la
Raison de Spinoza. Nul mieux que lui ne s’entend définir et classer c
4840
lui permettent de triompher syllogistiquement de
l’
adversaire, sinon de la difficulté elle-même. Mais pour gênante que so
4841
mpher syllogistiquement de l’adversaire, sinon de
la
difficulté elle-même. Mais pour gênante que soit souvent son adresse
4842
dresse de logicien, elle ne doit pas nous masquer
l’
audace tranquille et admirable de son point de vue radicalement antimo
4843
e ne doit pas nous masquer l’audace tranquille et
admirable
de son point de vue radicalement antimoderne, parce que désintéressé.
4844
n pic trop élevé pour qu’on y puisse vivre, c’est
l’
impossible. Mais justement, la gloire de M. Benda sera d’avoir soutenu
4845
puisse vivre, c’est l’impossible. Mais justement,
la
gloire de M. Benda sera d’avoir soutenu que l’humanité a besoin qu’on
4846
t, la gloire de M. Benda sera d’avoir soutenu que
l’
humanité a besoin qu’on lui demande l’impossible. Et quand bien même e
4847
soutenu que l’humanité a besoin qu’on lui demande
l’
impossible. Et quand bien même elle croirait n’en avoir plus besoin. C
4848
roirait n’en avoir plus besoin. Cet extrémisme de
la
pensée intemporelle, en butte aux sarcasmes des extrémistes de droite
4849
ît que plus pur. « Noms de clowns qui me viennent
l’
esprit : Julien Benda… », écrit Aragon. Et Daudet nous apprend que « l
4850
da… », écrit Aragon. Et Daudet nous apprend que «
le
petit Benda est un fameux serin ». Mais ces affirmations sont exactem
4851
a pas disputer à M. Benda, c’est son dur amour de
la
vérité tout court. Celle-là même qui paraît anarchique dans un monde
4852
i que relativement à un rendement. Rien, pas même
la
religion. 11. Cf. l’article de M. Daniel Halévy (décembre 1927) et
4853
rendement. Rien, pas même la religion. 11. Cf.
l’
article de M. Daniel Halévy (décembre 1927) et la réponse de M. Benda
4854
l’article de M. Daniel Halévy (décembre 1927) et
la
réponse de M. Benda (janvier 1928). bc. « Julien Benda : La Fin de l
4855
de M. Benda (janvier 1928). bc. « Julien Benda :
La
Fin de l’Éternel (NRF) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève
4856
a (janvier 1928). bc. « Julien Benda : La Fin de
l’
Éternel (NRF) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève,
4857
L’
ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929)u L’or
4858
L’ordre social.
Le
Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929)u L’ordre social Il
4859
L’ordre social. Le Libéralisme.
L’
inspiration (novembre 1929)u L’ordre social Il y avait une foi
4860
Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929)u
L’
ordre social Il y avait une fois un jeune homme comme les autres. S
4861
ocial Il y avait une fois un jeune homme comme
les
autres. Soudain il lui pousse des ailes, une grande paire d’ailes. Al
4862
ait-on s’émerveiller ? Mais déjà Freud expliquait
le
monstre, les chaires le dénonçaient, et les précieuses trouvaient cel
4863
rveiller ? Mais déjà Freud expliquait le monstre,
les
chaires le dénonçaient, et les précieuses trouvaient cela d’un romant
4864
ais déjà Freud expliquait le monstre, les chaires
le
dénonçaient, et les précieuses trouvaient cela d’un romantisme ! ma c
4865
iquait le monstre, les chaires le dénonçaient, et
les
précieuses trouvaient cela d’un romantisme ! ma chère, d’un mauvais g
4866
antisme ! ma chère, d’un mauvais goût ! Cependant
le
jeune homme agitait ses ailes non sans une ingénue fierté. Mais au co
4867
e ingénue fierté. Mais au courant d’air s’enrhuma
le
grand-papa. On craignit de le perdre. — « Eh ! quoi, — vinrent lui di
4868
ant d’air s’enrhuma le grand-papa. On craignit de
le
perdre. — « Eh ! quoi, — vinrent lui dire ses amis, — l’orgueil t’ave
4869
re. — « Eh ! quoi, — vinrent lui dire ses amis, —
l’
orgueil t’aveugle-t-il ? Veux-tu conserver, ô cruel, des ailes qui don
4870
ur, ô pervers, ô disciple de Nietzsche ! » — Sous
le
poids de cette accusation, comment ne point céder : il fit couper ses
4871
ment ne point céder : il fit couper ses ailes. On
le
félicita de son retour à l’état normal, qui est pédestre. Mais à part
4872
couper ses ailes. On le félicita de son retour à
l’
état normal, qui est pédestre. Mais à partir de ce jour, on lui fit se
4873
’en a pas sera méprisé parce qu’il n’en a pas.
Le
libéralisme Seigneur ! clamaient-ils, combien complexes sont les p
4874
Seigneur ! clamaient-ils, combien complexes sont
les
problèmes que vous proposez à notre bonne volonté gémissante ! Dieu,
4875
r d’une solution fort simple qui d’ailleurs était
la
bonne, car le grand Remède, c’est un Simple. Des hurlements de rage n
4876
on fort simple qui d’ailleurs était la bonne, car
le
grand Remède, c’est un Simple. Des hurlements de rage ne tardèrent po
4877
ge ne tardèrent point à s’élever de toutes parts.
Les
uns défendaient la Démocratie outragée, les autres disaient qu’il n’y
4878
t à s’élever de toutes parts. Les uns défendaient
la
Démocratie outragée, les autres disaient qu’il n’y a plus de morale,
4879
arts. Les uns défendaient la Démocratie outragée,
les
autres disaient qu’il n’y a plus de morale, et ces jeunes gens ont un
4880
ale, et ces jeunes gens ont une façon de trancher
les
questions qui vous désarme. Craignant qu’on ne lui fît un mauvais par
4881
rme. Craignant qu’on ne lui fît un mauvais parti,
l’
ange trouva son salut dans un subterfuge : il insinua qu’il parlait au
4882
il parlait au nom d’une secte orientale. Aussitôt
la
discussion de reprendre, et l’on parla défense de l’Occident. L’ange
4883
rientale. Aussitôt la discussion de reprendre, et
l’
on parla défense de l’Occident. L’ange s’enfuit par l’un des nombreux
4884
discussion de reprendre, et l’on parla défense de
l’
Occident. L’ange s’enfuit par l’un des nombreux trous de leurs raisonn
4885
e reprendre, et l’on parla défense de l’Occident.
L’
ange s’enfuit par l’un des nombreux trous de leurs raisonnements. L
4886
’un des nombreux trous de leurs raisonnements.
L’
inspiration Comme le poète terminait sa théorie sur la nature de l’
4887
de leurs raisonnements. L’inspiration Comme
le
poète terminait sa théorie sur la nature de l’inspiration, un doute l
4888
ration Comme le poète terminait sa théorie sur
la
nature de l’inspiration, un doute lui vint. Il alla au cinéma. On don
4889
me le poète terminait sa théorie sur la nature de
l’
inspiration, un doute lui vint. Il alla au cinéma. On donnait un film
4890
au cinéma. On donnait un film voluptueux. Il aima
l’
héroïne, mais sans espoir. Il lui écrivit, en sortant de là, dans une
4891
tant de là, dans une crèmerie pleine de couples à
la
mode. Mais en écrivant il pensait à une femme blonde assise près de l
4892
près de lui. Ayant demandé un timbre pour attirer
l’
attention de la femme blonde — sans résultat —, il écrivit une adresse
4893
ant demandé un timbre pour attirer l’attention de
la
femme blonde — sans résultat —, il écrivit une adresse réelle, et mit
4894
résultat —, il écrivit une adresse réelle, et mit
la
lettre dans la première boîte venue. Le lendemain, il reçut une répon
4895
e, et mit la lettre dans la première boîte venue.
Le
lendemain, il reçut une réponse : « Vous avez commis une erreur, cher
4896
ma bénédiction, je suis votre amie Joséphine. » —
Le
poète reprit son manuscrit et conclut : « L’inspiration est le nom qu
4897
» — Le poète reprit son manuscrit et conclut : «
L’
inspiration est le nom qu’on donne en poésie à une suite de malentendu
4898
it son manuscrit et conclut : « L’inspiration est
le
nom qu’on donne en poésie à une suite de malentendus heureusement enc
4899
e histoire, en effet, lui valut une Muse. u. «
L’
ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration », Revue de Belles-Lettres
4900
ffet, lui valut une Muse. u. « L’ordre social.
Le
Libéralisme. L’inspiration », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuch
4901
une Muse. u. « L’ordre social. Le Libéralisme.
L’
inspiration », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Frib
4902
Avant-propos
Le
dire une bonne fois. Il ne faut pas songer à décrire en quarante peti
4903
s songer à décrire en quarante petites pages tous
les
méfaits de l’instruction publique. C’est à peine assez pour indiquer
4904
ire en quarante petites pages tous les méfaits de
l’
instruction publique. C’est à peine assez pour indiquer leur ordre de
4905
e grandeur ; à quoi je me bornerai. Il a paru sur
le
sujet de l’instruction publique deux petits livres1 excellents dont j
4906
à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de
l’
instruction publique deux petits livres1 excellents dont je considère
4907
deux petits livres1 excellents dont je considère
les
thèses comme acquises : L’Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, e
4908
nts dont je considère les thèses comme acquises :
L’
Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas l
4909
considère les thèses comme acquises : L’Éloge de
l’
ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas les enfants,
4910
: L’Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, et
Le
Pédagogue n’aime pas les enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre q
4911
e, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas
les
enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre que la science apprise à l
4912
es enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre que
la
science apprise à l’école appauvrit l’homme de tout ce que son ignora
4913
oorda. Le premier montre que la science apprise à
l’
école appauvrit l’homme de tout ce que son ignorance respectait, et ne
4914
montre que la science apprise à l’école appauvrit
l’
homme de tout ce que son ignorance respectait, et ne lui donne à la pl
4915
e que son ignorance respectait, et ne lui donne à
la
place que des laideurs et de la prétention. L’autre, avec l’ironie tr
4916
et ne lui donne à la place que des laideurs et de
la
prétention. L’autre, avec l’ironie tranquille du bon sens bafoué et q
4917
e des laideurs et de la prétention. L’autre, avec
l’
ironie tranquille du bon sens bafoué et qui s’en moque, décrit la stup
4918
ille du bon sens bafoué et qui s’en moque, décrit
la
stupidité de l’enseignement tel qu’il est pratiqué dans nos collèges.
4919
bafoué et qui s’en moque, décrit la stupidité de
l’
enseignement tel qu’il est pratiqué dans nos collèges. Mon dessein est
4920
e réaction de tempérament. Je marque d’autre part
la
nécessité de tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec la démoc
4921
tre part la nécessité de tout cela qui me blesse,
la
liaison fatale avec la démocratie, de tout ce qui moleste ma liberté
4922
e tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec
la
démocratie, de tout ce qui moleste ma liberté et sans doute celle de
4923
ocialiste qui a été établi par coup de force, que
les
libéraux ont admis, conformément à leurs maximes, et toléré malgré le
4924
humeur. Ce régime de punaises jaunâtres aboutit à
l’
instruction publique et grâce à elle prolonge abusivement sa terne exi
4925
elle prolonge abusivement sa terne existence. Je
l’
ai subi ; l’on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment toutes
4926
ge abusivement sa terne existence. Je l’ai subi ;
l’
on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment toutes les haines.
4927
r comment. De pareils souvenirs légitiment toutes
les
haines. Je serai méchant, parce que j’en ai gros sur le cœur. D’aill
4928
nes. Je serai méchant, parce que j’en ai gros sur
le
cœur. D’ailleurs, ce petit écrit ne peut servir à rien. — Alors ? —
4929
apper : celui de naïveté. Définition du naïf dans
le
monde moderne : individu qui soutient des idées qui ne rapportent rie
4930
r au nom de ma génération, ne m’étant pas livré à
l’
enquête préalable qui seule eût pu, à la rigueur, me donner ce droit b
4931
s livré à l’enquête préalable qui seule eût pu, à
la
rigueur, me donner ce droit bien inutile. Pourtant je sais qu’à droi
4932
e comme à gauche, ils sont plus nombreux qu’on ne
le
pense, ceux qui refusent d’être complices dans cet attentat à l’intég
4933
qui refusent d’être complices dans cet attentat à
l’
intégrité humaine qu’est en fait l’esprit démocratique. Là-dessus, ces
4934
cet attentat à l’intégrité humaine qu’est en fait
l’
esprit démocratique. Là-dessus, ces messieurs se lamentent, la jeuness
4935
ocratique. Là-dessus, ces messieurs se lamentent,
la
jeunesse d’aujourd’hui, etc. Évidemment. Mais il y a les jérémiades e
4936
nesse d’aujourd’hui, etc. Évidemment. Mais il y a
les
jérémiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout
4937
Évidemment. Mais il y a les jérémiades et il y a
les
raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout se confond miraculeuseme
4938
il y a les jérémiades et il y a les raisons. Hors
le
domaine de l’amour, où tout se confond miraculeusement, gémir n’est p
4939
émiades et il y a les raisons. Hors le domaine de
l’
amour, où tout se confond miraculeusement, gémir n’est pas un argument
4940
eusement, gémir n’est pas un argument. Je demande
le
droit de démolir. Et me l’accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle
4941
n argument. Je demande le droit de démolir. Et me
l’
accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle n’est pas de proposer une
4942
de vitupérer ce que je vois, qui est laid. Quand
la
soupe est brûlée, on la renvoie, même si l’on n’est pas capable d’en
4943
vois, qui est laid. Quand la soupe est brûlée, on
la
renvoie, même si l’on n’est pas capable d’en faire soi-même une meill
4944
Quand la soupe est brûlée, on la renvoie, même si
l’
on n’est pas capable d’en faire soi-même une meilleure. Mais j’aperçoi
4945
Mais j’aperçois là-bas, vautré derrière son bock,
le
Citoyen conscient et organisé pour la discussion. Il retrousse ses ma
4946
e son bock, le Citoyen conscient et organisé pour
la
discussion. Il retrousse ses manches. Il s’apprête à cracher sur ce q
4947
Oh ! oh ! oh ! il va parler, de grâce mettez-lui
les
mains sur la bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans le dos
4948
! il va parler, de grâce mettez-lui les mains sur
la
bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans le dos, amenez-lui
4949
bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans
le
dos, amenez-lui le Guguss, des bretzels, sa petite amie, au secours !
4950
sa choucroute, tapez-lui dans le dos, amenez-lui
le
Guguss, des bretzels, sa petite amie, au secours ! Car j’ai encore de
4951
ire. Dès qu’une voix s’élève pour mettre en doute
l’
excellence du principe de l’instruction publique, on crie sur tous les
4952
pour mettre en doute l’excellence du principe de
l’
instruction publique, on crie sur tous les bancs : « Alors, vous êtes
4953
ncipe de l’instruction publique, on crie sur tous
les
bancs : « Alors, vous êtes pour un retour à la barbarie ? » Si ce réf
4954
s les bancs : « Alors, vous êtes pour un retour à
la
barbarie ? » Si ce réflexe indique un mépris vraiment exagéré pour la
4955
e réflexe indique un mépris vraiment exagéré pour
la
jugeote de l’adversaire ou s’il traduit simplement cette mauvaise foi
4956
que un mépris vraiment exagéré pour la jugeote de
l’
adversaire ou s’il traduit simplement cette mauvaise foi pas même cons
4957
ise foi pas même consciente, cette lâcheté devant
la
discussion précise de leurs principes par quoi se signalent bien souv
4958
à cent « réponses » de cette sorte. Et je tiens à
les
classer par avance en deux catégories dont je vais régler le compte s
4959
par avance en deux catégories dont je vais régler
le
compte sommairement. Cela n’empêchera personne de me resservir ces ar
4960
A. Réponses du type : on ne peut pas aller contre
l’
époque, vous êtes un pauvre utopiste, etc. Ce sont les positivistes qu
4961
poque, vous êtes un pauvre utopiste, etc. Ce sont
les
positivistes qui parlent ainsi, ceux qui croient aux faits. Je leur r
4962
Je leur réponds : 1° qu’ils ne peuvent me dénier
le
droit de juger ces faits ; 2° qu’ils ne peuvent, en vertu même de leu
4963
euvent, en vertu même de leur scepticisme quant à
la
valeur réformatrice des idées, m’accuser de faire une critique danger
4964
critique dangereuse. 3° que néanmoins je crois à
l’
efficace de certaines utopies. (Les religions, la découverte de l’Amér
4965
oins je crois à l’efficace de certaines utopies. (
Les
religions, la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’Europ
4966
l’efficace de certaines utopies. (Les religions,
la
découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienn
4967
rtaines utopies. (Les religions, la découverte de
l’
Amérique par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienne, la Russie d’ap
4968
a découverte de l’Amérique par Christophe Colomb,
l’
Europe napoléonienne, la Russie d’après Karl Marx, le vol des frères W
4969
ue par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienne,
la
Russie d’après Karl Marx, le vol des frères Wright, et tout bêtement,
4970
urope napoléonienne, la Russie d’après Karl Marx,
le
vol des frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’
4971
le vol des frères Wright, et tout bêtement, c’est
le
cas de le dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d
4972
frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de
le
dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller con
4973
ight, et tout bêtement, c’est le cas de le dire :
l’
instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre l’époq
4974
dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a
le
droit d’aller contre l’époque, et on le peut efficacement. 2° Rira bi
4975
blique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre
l’
époque, et on le peut efficacement. 2° Rira bien qui rira le dernier.
4976
: 1° On a le droit d’aller contre l’époque, et on
le
peut efficacement. 2° Rira bien qui rira le dernier. B. Réponses du t
4977
rétrograde, un infâme réactionnaire, etc. Ce sont
les
partisans d’une démocratie progressiste et tolérante qui se livrent à
4978
lérante qui se livrent à ces excès de langage, je
les
renvoie en corps au chapitre 5 où je traiterai de cet aspect du probl
4979
e 5 où je traiterai de cet aspect du problème que
l’
on peut appeler la question de droit. Certains, en effet, tirent toute
4980
i de cet aspect du problème que l’on peut appeler
la
question de droit. Certains, en effet, tirent toute leur force dans l
4981
Certains, en effet, tirent toute leur force dans
les
discussions de la tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits
4982
, tirent toute leur force dans les discussions de
la
tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits et les principes.
4983
s de la tranquillité avec laquelle ils brouillent
les
faits et les principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscien
4984
uillité avec laquelle ils brouillent les faits et
les
principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscience libérale,
4985
illent les faits et les principes. Tourmentés par
les
scrupules de leur conscience libérale, ils fuient la rigueur jusque d
4986
scrupules de leur conscience libérale, ils fuient
la
rigueur jusque dans leurs raisonnements. Pour moi qui cherche à démêl
4987
urs raisonnements. Pour moi qui cherche à démêler
la
vérité sans égard aux dérangements, même violents, que cela ne manque
4988
jamais de provoquer, je me propose de marquer ici
la
distinction classique du fait et du droit ; et c’est pourquoi je cons
4989
droit ; et c’est pourquoi je considérerai d’abord
l’
instruction publique dans ses réalisations actuelles, puis au terme de
4990
d’outrages au bon sens peuvent être légitimés par
le
but final de notre institution-tabou. 1. Je ne puis naturellement p
4991
1. Je ne puis naturellement pas mentionner tous
les
ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de l’Institut Rousseau.
4992
t pas mentionner tous les ouvrages scientifiques.
Les
meilleurs sortent de l’Institut Rousseau.
4993
ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de
l’
Institut Rousseau.
4994
ssent sur leurs souvenirs de classe. C’est qu’ils
les
confondent avec ceux de leur enfance et les font indûment participer
4995
u’ils les confondent avec ceux de leur enfance et
les
font indûment participer de la même grâce. Voyez Péguy, quand il essa
4996
e leur enfance et les font indûment participer de
la
même grâce. Voyez Péguy, quand il essaie de nous faire croire qu’« il
4997
us faire croire qu’« il n’y a rien au-dessus » de
la
tâche des instituteurs : Faire de ces belles analyses logiques, et g
4998
ithmétique où il fallait si soigneusement séparer
les
calculs du raisonnement, par une barre verticale, et où il y avait to
4999
t pour emplir ou pour vider un bassin (et souvent
les
deux), (pour emplir et vider ensemble), (drôle d’occupation), (après
5000
urs des appartements à meubler. Et on multipliait
le
tapissier par le prix du mètre courant. Encore que je prenne les sen
5001
nts à meubler. Et on multipliait le tapissier par
le
prix du mètre courant. Encore que je prenne les sentiments trop au s
5002
r le prix du mètre courant. Encore que je prenne
les
sentiments trop au sérieux pour faire ici du sentiment, je suis sensi
5003
sie. Mais ce qui fait très bien dans un Cahier de
la
quinzaine, ça faisait de mauvaises notes dans nos carnets hebdomadair
5004
ournée d’enfance gâtée. Et d’ailleurs, multiplier
le
tapissier par le prix du mètre courant n’est pas une fantaisie pour c
5005
gâtée. Et d’ailleurs, multiplier le tapissier par
le
prix du mètre courant n’est pas une fantaisie pour ce petit être qui
5006
e pour ce petit être qui s’énerve, qui embrouille
les
règles, qui a sommeil, qui a peur de faire faux, parce que les autres
5007
ui a sommeil, qui a peur de faire faux, parce que
les
autres auront fait juste, et qui voudrait bien pleurer, et qui recomm
5008
rdoise où sèchent des traînées de craie grise, où
les
chiffres trop gros s’emmêlent… Et c’est cela l’enfance insouciante ?
5009
les chiffres trop gros s’emmêlent… Et c’est cela
l’
enfance insouciante ? Qu’est-ce qui ressemble plus au souci quotidien
5010
s au souci quotidien des grandes personnes ? Mais
l’
enfance est ailleurs. Je revois ce fond de jardin où l’on trouve des c
5011
ance est ailleurs. Je revois ce fond de jardin où
l’
on trouve des cloportes dans la toile mouillée d’une tente d’Indiens,
5012
fond de jardin où l’on trouve des cloportes dans
la
toile mouillée d’une tente d’Indiens, des petites guerres mystérieuse
5013
, des matins de dimanche sonores et tout propres,
la
cuiller d’huile de foie de morue avant le repas, et le monsieur qui r
5014
ropres, la cuiller d’huile de foie de morue avant
le
repas, et le monsieur qui racontait gravement des choses qu’on ne com
5015
iller d’huile de foie de morue avant le repas, et
le
monsieur qui racontait gravement des choses qu’on ne comprend pas, la
5016
ntait gravement des choses qu’on ne comprend pas,
la
prière du soir pour qu’il fasse beau demain, Michel Strogoff et Rémy
5017
main, Michel Strogoff et Rémy un fils de vaincus,
les
tours de carrousel, les chemins dans la forêt en automne, des jeux, d
5018
Rémy un fils de vaincus, les tours de carrousel,
les
chemins dans la forêt en automne, des jeux, des feuillages, des rêver
5019
vaincus, les tours de carrousel, les chemins dans
la
forêt en automne, des jeux, des feuillages, des rêveries, des recoins
5020
peu divine, baignée d’une très vague angoisse que
l’
on fuyait avec des bonheurs fous dans les bras maternels, ou bien ces
5021
oisse que l’on fuyait avec des bonheurs fous dans
les
bras maternels, ou bien ces promenades en tenant la forte main du pèr
5022
bras maternels, ou bien ces promenades en tenant
la
forte main du père qui fait de longs pas réguliers… L’École, dans ce
5023
rte main du père qui fait de longs pas réguliers…
L’
École, dans ce concert de souvenirs, n’est qu’une dissonance douloureu
5024
uloureuse2. Deux angoisses dominent mon enfance :
les
séances chez le dentiste et l’horaire des leçons. Ce malaise inavouab
5025
angoisses dominent mon enfance : les séances chez
le
dentiste et l’horaire des leçons. Ce malaise inavouable, cette règle
5026
ent mon enfance : les séances chez le dentiste et
l’
horaire des leçons. Ce malaise inavouable, cette règle méchante, ce so
5027
appris à lire, en cachette, avec une sœur aînée.
L’
année suivante, on me mit à l’école, parce que c’est la loi. La premiè
5028
vec une sœur aînée. L’année suivante, on me mit à
l’
école, parce que c’est la loi. La première classe fut agréable : j’ali
5029
ée suivante, on me mit à l’école, parce que c’est
la
loi. La première classe fut agréable : j’alignais des bâtons en rêvan
5030
e pensais pas devoir suivre syllabe après syllabe
les
ânonnements des élèves qui déchiffraient les premières phrases exempl
5031
hrases exemplaires. (J’aimais pourtant Zoé lave à
la
fontaine, à cause du nom.) Quand venait mon tour, je savais rarement
5032
om.) Quand venait mon tour, je savais rarement où
l’
on en était. Cela m’attira des reproches acides, et naturellement, la
5033
m’attira des reproches acides, et naturellement,
la
phrase sacrée : « Il faut que tous fassent la même chose, ici ! » Dan
5034
nt, la phrase sacrée : « Il faut que tous fassent
la
même chose, ici ! » Dans la suite, on se chargea d’illustrer par d’in
5035
faut que tous fassent la même chose, ici ! » Dans
la
suite, on se chargea d’illustrer par d’innombrables exemples cet axio
5036
par d’innombrables exemples cet axiome qui devint
la
formule de mes premières douleurs morales. Après six ans de ce régime
5037
rentrée, ma colère n’en fut que plus malfaisante.
L’
école me rendit au monde, vers l’âge de 18 ans, crispé et méfiant, san
5038
lus malfaisante. L’école me rendit au monde, vers
l’
âge de 18 ans, crispé et méfiant, sans cesse en garde contre moi-même
5039
ait pas différer, profondément hypocrite donc, et
le
cerveau saturé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous les homme
5040
turé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous
les
hommes doivent être égaux en tout. Deux fois deux quatre, c’est stéri
5041
s de citer, je découvris un jour qu’elle contient
la
cause déterminante de notre malaise. Il me fallut un certain temps po
5042
ue je me posai la question : est-ce vrai que tous
les
hommes doivent être égaux en tout ? Et la première réponse fut : Il f
5043
réponse fut : Il faut que ce soit vrai, pour que
la
démocratie prospère et étende ses conquêtes. C’était découvrir notre
5044
dignations de nos maîtres quand ils dénonçaient «
la
marque indélébile de l’éducation jésuite ». Nous étions marqués par N
5045
s quand ils dénonçaient « la marque indélébile de
l’
éducation jésuite ». Nous étions marqués par Numa Droz et les manuels
5046
n jésuite ». Nous étions marqués par Numa Droz et
les
manuels des Frères ∴, par l’esprit petit-bourgeois, qui est une génér
5047
és par Numa Droz et les manuels des Frères ∴, par
l’
esprit petit-bourgeois, qui est une généralisation de l’avarice, et pa
5048
it petit-bourgeois, qui est une généralisation de
l’
avarice, et par les dogmes démocratiques, qui sont une généralisation
5049
, qui est une généralisation de l’avarice, et par
les
dogmes démocratiques, qui sont une généralisation de la règle de troi
5050
mes démocratiques, qui sont une généralisation de
la
règle de trois, aussi profondément certes qu’un Voltaire le fut par l
5051
e trois, aussi profondément certes qu’un Voltaire
le
fut par les jésuites : du moins ceux-ci lui laissèrent-ils assez de v
5052
ssi profondément certes qu’un Voltaire le fut par
les
jésuites : du moins ceux-ci lui laissèrent-ils assez de verdeur d’esp
5053
pire. Mais on avait brisé en nous ces ressorts de
la
révolte et de la libération d’une personnalité : l’imagination, le se
5054
it brisé en nous ces ressorts de la révolte et de
la
libération d’une personnalité : l’imagination, le sens de l’arbitrair
5055
révolte et de la libération d’une personnalité :
l’
imagination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des d
5056
la libération d’une personnalité : l’imagination,
le
sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains.
5057
on d’une personnalité : l’imagination, le sens de
l’
arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de
5058
alité : l’imagination, le sens de l’arbitraire et
le
sens de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances
5059
magination, le sens de l’arbitraire et le sens de
la
relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances était donc
5060
et le sens de la relativité des décrets humains.
Le
prix de mes souffrances était donc ce conformisme indispensable aux «
5061
principes ». Je n’allai pas tout de suite jusqu’à
les
mettre en doute : mais un jour je compris que ce n’étaient que des pr
5062
les d’une arithmétique élémentaire, ce monde dont
la
Démocratie apparaissait comme l’achèvement idéal et nécessaire — et q
5063
e, ce monde dont la Démocratie apparaissait comme
l’
achèvement idéal et nécessaire — et qui était le seul pour lequel on n
5064
e l’achèvement idéal et nécessaire — et qui était
le
seul pour lequel on nous préparait —, c’était un système d’abstractio
5065
tait un système d’abstractions primaires, c’était
le
rêve raisonnablement organisé des esprits moyens, prosaïques et rassi
5066
s, prosaïques et rassis3 qui tiennent aujourd’hui
les
charges de l’État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’ac
5067
t rassis3 qui tiennent aujourd’hui les charges de
l’
État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’accommoder parce
5068
rges de l’État, piliers d’un régime dont ils sont
les
seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ont établi à la mesure exacte de
5069
nt ils sont les seuls à s’accommoder parce qu’ils
l’
ont établi à la mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions plus
5070
seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ont établi à
la
mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions plus aux démons, mai
5071
besoins. Nous ne croyions plus aux démons, mais à
la
Commission scolaire. Nous n’avions plus de « superstitions grossières
5072
stitions grossières » comme celles qui touchent à
l’
action des étoiles par exemple. Mais nous avions acquis le respect des
5073
des étoiles par exemple. Mais nous avions acquis
le
respect des statistiques. Nous savions que les miracles ne trompent q
5074
uis le respect des statistiques. Nous savions que
les
miracles ne trompent que les illettrés, mais qu’il convient de s’incl
5075
es. Nous savions que les miracles ne trompent que
les
illettrés, mais qu’il convient de s’incliner devant les miracles de l
5076
lettrés, mais qu’il convient de s’incliner devant
les
miracles de la science appliquée. On nous faisait voir tout au long d
5077
’il convient de s’incliner devant les miracles de
la
science appliquée. On nous faisait voir tout au long de notre histoir
5078
nous faisait voir tout au long de notre histoire
le
Progrès constant de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et le
5079
au long de notre histoire le Progrès constant de
l’
humanité vers les lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel. No
5080
e histoire le Progrès constant de l’humanité vers
les
lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel. Nous savions qu’un
5081
Progrès constant de l’humanité vers les lumières,
l’
incrédulité et le bien-être matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrie
5082
de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et
le
bien-être matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrier est l’égal d’un
5083
e matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrier est
l’
égal d’un petit Dauphin — et même nous ne pouvions nous empêcher de cr
5084
même nous ne pouvions nous empêcher de croire que
le
petit ouvrier est bien plus malin. Nous savions un tas de choses doul
5085
e choses douloureusement ennuyeuses qui sont dans
les
livres — et nulle part ailleurs. Maigre nourriture pour nos rêves. No
5086
re nourriture pour nos rêves. Nous arrivions dans
la
vie avec des mentions honorables et une inconcevable gaucherie, c’est
5087
et une honte secrète qui exaspérait ce mépris et
le
rendait agressif. Mais moi, j’avais trop souffert de cette compressio
5088
riellement délivré, en supporter longtemps encore
l’
action. Je n’eus pas plus tôt découvert et nommé cet asservissement de
5089
plus tôt découvert et nommé cet asservissement de
l’
esprit et ces mythes stériles, que je les rendis responsables de ma pe
5090
sement de l’esprit et ces mythes stériles, que je
les
rendis responsables de ma perte de contact avec les réalités les plus
5091
s rendis responsables de ma perte de contact avec
les
réalités les plus élémentaires de la vie. 2. Dans le cas le plus fa
5092
onsables de ma perte de contact avec les réalités
les
plus élémentaires de la vie. 2. Dans le cas le plus favorable, c’es
5093
ontact avec les réalités les plus élémentaires de
la
vie. 2. Dans le cas le plus favorable, c’est un silence, un vide. C
5094
alités les plus élémentaires de la vie. 2. Dans
le
cas le plus favorable, c’est un silence, un vide. C’était en dehors d
5095
les plus élémentaires de la vie. 2. Dans le cas
le
plus favorable, c’est un silence, un vide. C’était en dehors de la vi
5096
, c’est un silence, un vide. C’était en dehors de
la
vie. 3. du pain rassis.
5097
2. Description du monstre
Le
service militaire me permit de retrouver quelques-unes de ces réalité
5098
Car ces différences sont les premières marques de
la
vie vécue et l’on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. M
5099
ces sont les premières marques de la vie vécue et
l’
on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. Mais c’est en cas
5100
arques de la vie vécue et l’on aime à y découvrir
la
seule fraternité véritable. Mais c’est en caserne aussi que je devais
5101
is c’est en caserne aussi que je devais retrouver
les
instituteurs. Ceux-là n’avaient pas bougé. Et pour cause : ils n’étai
5102
é. Et pour cause : ils n’étaient jamais sortis de
l’
école. Rien ne ressemble plus à un bon élève qu’un instituteur : de l’
5103
à l’autre il n’y a pas de solution de continuité,
la
différence n’étant qu’une question d’âge, non d’expérience vécue. Ce
5104
grand nombre de cas, mais pourquoi ai-je envie de
le
dire ? L’instituteur sous l’uniforme peut être défini par son incompr
5105
re de cas, mais pourquoi ai-je envie de le dire ?
L’
instituteur sous l’uniforme peut être défini par son incompréhension m
5106
rquoi ai-je envie de le dire ? L’instituteur sous
l’
uniforme peut être défini par son incompréhension méthodique des homme
5107
éhension méthodique des hommes et son mépris pour
les
paysans. Qu’il soit officier ou troupier, on le reconnaît à une façon
5108
les paysans. Qu’il soit officier ou troupier, on
le
reconnaît à une façon pédante d’être consciencieux, à une façon bless
5109
être supérieur, à une façon livresque d’expliquer
les
choses, à une façon théorique de juger les êtres. Ces distributeurs a
5110
liquer les choses, à une façon théorique de juger
les
êtres. Ces distributeurs automatiques (brevetés par le gouvernement)
5111
res. Ces distributeurs automatiques (brevetés par
le
gouvernement) de la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la
5112
rs automatiques (brevetés par le gouvernement) de
la
manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la petite bière. Ils on
5113
la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de
la
petite bière. Ils ont conscience d’appartenir à une élite responsable
5114
ce ridicule n’échappe pas à ceux qu’ils méprisent
le
plus, et ils auraient souvent l’occasion de s’en douter s’ils étaient
5115
qu’ils méprisent le plus, et ils auraient souvent
l’
occasion de s’en douter s’ils étaient sensibles aux finesses de l’iron
5116
en douter s’ils étaient sensibles aux finesses de
l’
ironie paysanne. Mais je n’en dirai pas plus, de peur de m’échauffer
5117
pas plus, de peur de m’échauffer inutilement. Si
l’
on me poussait un peu, je crois que je m’oublierais au point d’insinue
5118
crois que je m’oublierais au point d’insinuer que
les
instituteurs galonnés causent autant de tort à l’armée que les instit
5119
es instituteurs galonnés causent autant de tort à
l’
armée que les instituteurs antimilitaristes qui signent des manifestes
5120
urs galonnés causent autant de tort à l’armée que
les
instituteurs antimilitaristes qui signent des manifestes en mauvais f
5121
manifestes en mauvais français — et je ferais de
la
peine à d’excellents garçons. Revenons au civil. Au village, quand on
5122
es farces où ils sont drôles, mais non point dans
la
vie courante où ils le sont beaucoup moins. Le Messieu fait sans dout
5123
rôles, mais non point dans la vie courante où ils
le
sont beaucoup moins. Le Messieu fait sans doute des vers sur la viole
5124
ns la vie courante où ils le sont beaucoup moins.
Le
Messieu fait sans doute des vers sur la violette, périodiquement, com
5125
up moins. Le Messieu fait sans doute des vers sur
la
violette, périodiquement, comme on fait… un rhume de cerveau. Il joue
5126
lque instrument. Il a des idées modernes sur tous
les
sujets, espécialement sur la pédagogie. Ce mot revient souvent dans s
5127
s modernes sur tous les sujets, espécialement sur
la
pédagogie. Ce mot revient souvent dans sa conversation ; il le pronon
5128
Ce mot revient souvent dans sa conversation ; il
le
prononce avec un inimitable sérieux, avec un P majuscule. On sent que
5129
st là son affaire : Monsieur en un mot est M’sieu
l’
Instituteur. Signes particuliers : cheveux longs, regard profond voilé
5130
eveux longs, regard profond voilé de douceur. Car
le
type populaire du poète romantique s’est dégradé en deux sous-types p
5131
ique s’est dégradé en deux sous-types posthumes :
l’
artiste photographe et le régent. J’ai fait allusion au lieutenant-ins
5132
x sous-types posthumes : l’artiste photographe et
le
régent. J’ai fait allusion au lieutenant-instituteur qui veut faire d
5133
usion au lieutenant-instituteur qui veut faire de
la
pédagogie avec sa section. L’instituteur-lieutenant qui veut traiter
5134
r qui veut faire de la pédagogie avec sa section.
L’
instituteur-lieutenant qui veut traiter militairement ses élèves témoi
5135
veut traiter militairement ses élèves témoigne de
la
même maladresse professionnelle. J’en connaissais un qui avait coutum
5136
de garçons de 10 à 11 ans : « J’ai bien su mater
les
quarante hommes de ma section, je saurai aussi vous mater. » On imagi
5137
aussi vous mater. » On imagine à quoi peut mener
l’
enseignement donné par des êtres qui brouillent à ce point les méthode
5138
ent donné par des êtres qui brouillent à ce point
les
méthodes. Simple remarque pendant que nous en sommes aux instituteurs
5139
en sommes aux instituteurs : ils sortent tous de
la
même classe sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que l’esprit pe
5140
: ils sortent tous de la même classe sociale, de
la
petite bourgeoisie. Est-ce que l’esprit petit-bourgeois qui imprègne
5141
sse sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que
l’
esprit petit-bourgeois qui imprègne l’enseignement primaire constitue
5142
Est-ce que l’esprit petit-bourgeois qui imprègne
l’
enseignement primaire constitue l’apport des instituteurs, ou bien pré
5143
is qui imprègne l’enseignement primaire constitue
l’
apport des instituteurs, ou bien préexiste-t-il dans les principes mêm
5144
ort des instituteurs, ou bien préexiste-t-il dans
les
principes mêmes de l’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme
5145
u bien préexiste-t-il dans les principes mêmes de
l’
École, et attire-t-il les petits bourgeois comme le portrait de Numa D
5146
ns les principes mêmes de l’École, et attire-t-il
les
petits bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait les mouches
5147
’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme
le
portrait de Numa Droz attirait les mouches ? (Le verre en était toujo
5148
bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait
les
mouches ? (Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni
5149
le portrait de Numa Droz attirait les mouches ? (
Le
verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni l’envie de dir
5150
? (Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni
le
droit ni l’envie de dire du mal des petits bourgeois. Ils sont au moi
5151
en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni
l’
envie de dire du mal des petits bourgeois. Ils sont au moins aussi sym
5152
sympathiques que n’importe quelle autre classe de
la
société. Mais l’esprit petit-bourgeois pris abstraitement et tel qu’i
5153
n’importe quelle autre classe de la société. Mais
l’
esprit petit-bourgeois pris abstraitement et tel qu’il se manifeste da
5154
pris abstraitement et tel qu’il se manifeste dans
l’
école primaire est un véritable virus de mesquinerie, et devrait être
5155
les ». Je reviendrai peut-être sur ce point. Pour
l’
instant je ne veux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après les
5156
r ce point. Pour l’instant je ne veux que décrire
l’
école telle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur d
5157
nstant je ne veux que décrire l’école telle qu’on
la
voit. Après les personnes, le décor. La laideur des collèges n’est pa
5158
ux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après
les
personnes, le décor. La laideur des collèges n’est pas accidentelle.
5159
l’école telle qu’on la voit. Après les personnes,
le
décor. La laideur des collèges n’est pas accidentelle. C’est celle mê
5160
lle qu’on la voit. Après les personnes, le décor.
La
laideur des collèges n’est pas accidentelle. C’est celle même du régi
5161
est pas accidentelle. C’est celle même du régime.
l’
architecture de nos « palais scolaires ». symbolise d’une façon frappa
5162
e ce qu’il y a de schématique et de monotone dans
la
conception démocratique du monde. Entrons, c’est pire encore. Beaucou
5163
ants ont un frisson de dégoût au moment de passer
la
porte, au son de la cloche : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imp
5164
de dégoût au moment de passer la porte, au son de
la
cloche : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors
5165
moment de passer la porte, au son de la cloche :
l’
odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et les habit
5166
e : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne
les
corridors et les habits des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et
5167
udron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et
les
habits des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et la poussière dan
5168
its des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et
la
poussière dans l’air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un re
5169
mpeste encore mes souvenirs. Et la poussière dans
l’
air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagin
5170
encore mes souvenirs. Et la poussière dans l’air,
l’
encre sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagination q
5171
ouvenirs. Et la poussière dans l’air, l’encre sur
les
tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagination que ces initia
5172
sur les tables — c’était pourtant un refuge pour
l’
imagination que ces initiales, ces signes, ces devises… —, les estampe
5173
on que ces initiales, ces signes, ces devises… —,
les
estampes piquées, Numa Droz et ses crottes de mouches… Dans ce décor
5174
s ! Et vous pensez que c’est un grand progrès sur
la
Nature. Quelle peut bien être la vertu éducatrice d’un tel milieu, mo
5175
rand progrès sur la Nature. Quelle peut bien être
la
vertu éducatrice d’un tel milieu, moral et matériel ? L’école publiqu
5176
u éducatrice d’un tel milieu, moral et matériel ?
L’
école publique, telle que nous la voyons est semblable à tous ces monu
5177
al et matériel ? L’école publique, telle que nous
la
voyons est semblable à tous ces monuments « de la mauvaise époque » q
5178
la voyons est semblable à tous ces monuments « de
la
mauvaise époque » qui sont dans nos villes l’apport du xixe siècle.
5179
de la mauvaise époque » qui sont dans nos villes
l’
apport du xixe siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à l’utili
5180
l’apport du xixe siècle. Ils ne parviennent ni à
la
beauté ni à l’utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style
5181
e siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à
l’
utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style 1880 n’en est p
5182
à l’utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que
le
style 1880 n’en est pas un : mais l’absence de style est encore un st
5183
. On dit que le style 1880 n’en est pas un : mais
l’
absence de style est encore un style ; c’est même le pire.
5184
absence de style est encore un style ; c’est même
le
pire.
5185
pour quelles raisons j’ai entrepris de combattre
l’
instruction publique — on ne me contestera pas ces raisons puisqu’elle
5186
s me sont absolument personnelles et qu’elles ont
la
valeur d’un témoignage, ni plus ni moins — il est temps que je fasse
5187
cœur non compris ». Aux yeux de beaucoup de gens,
la
passion est aveuglante : cela tient pour une bonne part à ce que ces
5188
nt pour une bonne part à ce que ces personnes ont
les
yeux faibles. Il serait plus juste de dire que la passion n’a qu’une
5189
es yeux faibles. Il serait plus juste de dire que
la
passion n’a qu’une clairvoyance intéressée : mais celles-là sont les
5190
une clairvoyance intéressée : mais celles-là sont
les
plus vives. Enfin, je tiens à reconnaître qu’ici je ne cherche point
5191
je tiens à reconnaître qu’ici je ne cherche point
l’
équité. Pas plus que vous qui défendez de parti pris ce que j’attaque.
5192
vous qui défendez de parti pris ce que j’attaque.
L’
esprit d’équité, avec son préjugé pacifiste n’est pas toujours l’espri
5193
té, avec son préjugé pacifiste n’est pas toujours
l’
esprit de vérité, il s’en faut. Or je ne suis pas de ceux qui subordon
5194
faut. Or je ne suis pas de ceux qui subordonnent
la
vérité à la tranquillité bourgeoise. Je tiens le « gain de paix » pou
5195
ne suis pas de ceux qui subordonnent la vérité à
la
tranquillité bourgeoise. Je tiens le « gain de paix » pour illusoire
5196
la vérité à la tranquillité bourgeoise. Je tiens
le
« gain de paix » pour illusoire : il consiste à repousser la difficul
5197
e paix » pour illusoire : il consiste à repousser
la
difficulté dans l’avenir, d’une ou deux générations. Pendant ce temps
5198
oire : il consiste à repousser la difficulté dans
l’
avenir, d’une ou deux générations. Pendant ce temps elle s’aggrave, et
5199
ndant ce temps elle s’aggrave, et nous voici avec
l’
héritage de cinquante ans de radicalisme sur les bras. L’écheveau est
5200
ec l’héritage de cinquante ans de radicalisme sur
les
bras. L’écheveau est tellement embrouillé que déjà plusieurs proposen
5201
age de cinquante ans de radicalisme sur les bras.
L’
écheveau est tellement embrouillé que déjà plusieurs proposent de tran
5202
brouillé que déjà plusieurs proposent de trancher
le
nœud. Je me bornerai à l’examen des caractères les plus généraux de l
5203
s proposent de trancher le nœud. Je me bornerai à
l’
examen des caractères les plus généraux de l’instruction publique, ceu
5204
le nœud. Je me bornerai à l’examen des caractères
les
plus généraux de l’instruction publique, ceux que n’atteignent dans l
5205
ai à l’examen des caractères les plus généraux de
l’
instruction publique, ceux que n’atteignent dans leur principe ni les
5206
ique, ceux que n’atteignent dans leur principe ni
les
réformes de détail ni les modalités locales de réalisations pratiques
5207
t dans leur principe ni les réformes de détail ni
les
modalités locales de réalisations pratiques. Le programme a) l’h
5208
es modalités locales de réalisations pratiques.
Le
programme a) l’horaire : c’est un cadre, ou plutôt un moule, dans
5209
s de réalisations pratiques. Le programme a)
l’
horaire : c’est un cadre, ou plutôt un moule, dans lequel on verse les
5210
n cadre, ou plutôt un moule, dans lequel on verse
les
matières les plus hétéroclites, sans égard à leurs qualités propres.
5211
lutôt un moule, dans lequel on verse les matières
les
plus hétéroclites, sans égard à leurs qualités propres. De 8 à 9 arit
5212
uit, de manière à prévenir toute concentration de
l’
esprit. b) plan d’études. On a divisé l’enseignement en branches bien
5213
ration de l’esprit. b) plan d’études. On a divisé
l’
enseignement en branches bien distinctes. On attribue à chacune un cer
5214
s’arrange à faire tenir dans cette classification
le
plus possible de « connaissances » qui dès lors deviennent obligatoir
5215
aissances » qui dès lors deviennent obligatoires.
La
somme et l’arrangement des parties doivent être identiques pour tous
5216
qui dès lors deviennent obligatoires. La somme et
l’
arrangement des parties doivent être identiques pour tous les écoliers
5217
ent des parties doivent être identiques pour tous
les
écoliers. Ce plan régit les huit années réglementaires de la scolarit
5218
identiques pour tous les écoliers. Ce plan régit
les
huit années réglementaires de la scolarité, et englobe la totalité de
5219
. Ce plan régit les huit années réglementaires de
la
scolarité, et englobe la totalité de la science nécessaire à tout cit
5220
années réglementaires de la scolarité, et englobe
la
totalité de la science nécessaire à tout citoyen, dans une vue aussi
5221
taires de la scolarité, et englobe la totalité de
la
science nécessaire à tout citoyen, dans une vue aussi large que simpl
5222
papier, d’un crayon et d’une règle (pour diviser
la
page en casiers rectangulaires, bien proprement.) Évidemment, il est
5223
t.) Évidemment, il est préférable de savoir aussi
les
noms des sciences élémentaires. Mais il n’est en aucune façon nécessa
5224
il n’est en aucune façon nécessaire de connaître
la
psychologie des enfants, ni même le contenu des sciences dont on écri
5225
de connaître la psychologie des enfants, ni même
le
contenu des sciences dont on écrit les noms dans les casiers. Est-ce
5226
ts, ni même le contenu des sciences dont on écrit
les
noms dans les casiers. Est-ce que l’étude du trapézoïde est particuli
5227
contenu des sciences dont on écrit les noms dans
les
casiers. Est-ce que l’étude du trapézoïde est particulièrement indiqu
5228
nt on écrit les noms dans les casiers. Est-ce que
l’
étude du trapézoïde est particulièrement indiquée pour préparer les él
5229
zoïde est particulièrement indiquée pour préparer
les
élèves à une composition française ? Question oiseuse et saugrenue, —
5230
ançaise ? Question oiseuse et saugrenue, — naïve.
Le
bon sens voudrait que l’on tînt compte des possibilités d’adaptation
5231
e et saugrenue, — naïve. Le bon sens voudrait que
l’
on tînt compte des possibilités d’adaptation de l’enfant ; de la valeu
5232
l’on tînt compte des possibilités d’adaptation de
l’
enfant ; de la valeur fort inégale de ces disciplines ; de la diversit
5233
te des possibilités d’adaptation de l’enfant ; de
la
valeur fort inégale de ces disciplines ; de la diversité des besoins
5234
de la valeur fort inégale de ces disciplines ; de
la
diversité des besoins ; enfin des rythmes naturels de l’esprit humain
5235
rsité des besoins ; enfin des rythmes naturels de
l’
esprit humain, qu’il se trouve que le Créateur n’a point accordés à l’
5236
naturels de l’esprit humain, qu’il se trouve que
le
Créateur n’a point accordés à l’actuelle division horaire des journée
5237
il se trouve que le Créateur n’a point accordés à
l’
actuelle division horaire des journées… Monsieur, répondent les foncti
5238
ivision horaire des journées… Monsieur, répondent
les
fonctionnaires responsables, vous savez par expérience que nous ne co
5239
s savez par expérience que nous ne comprenons pas
la
plaisanterie et que notre temps est précieux. D’ailleurs, les enfants
5240
erie et que notre temps est précieux. D’ailleurs,
les
enfants ne se plaignent pas, de quoi vous plaignez-vous, vous ? — Mai
5241
quoi vous plaignez-vous, vous ? — Mais on fausse
l’
esprit de ces enfants… — Mais on nous paye, et ils n’en meurent pas.
5242
— Mais on nous paye, et ils n’en meurent pas.
Les
examens Ce sont en principe des « contrôles » comparables à ceux q
5243
principe des « contrôles » comparables à ceux que
l’
on établit lors des grandes épreuves cyclistes. Les participants du To
5244
l’on établit lors des grandes épreuves cyclistes.
Les
participants du Tour de Science doivent s’inscrire au terme de chaque
5245
erme de chaque trimestre. Ceux qui arrivent après
la
clôture ont à refaire l’étape. On obtient par ce moyen un peloton hom
5246
Ceux qui arrivent après la clôture ont à refaire
l’
étape. On obtient par ce moyen un peloton homogène, facile à surveille
5247
e, facile à surveiller. Mais en matière de sport,
la
tricherie est difficile, tandis qu’à l’école elle est de règle. Car l
5248
de sport, la tricherie est difficile, tandis qu’à
l’
école elle est de règle. Car la qualité et la quantité des réponses «
5249
icile, tandis qu’à l’école elle est de règle. Car
la
qualité et la quantité des réponses « fournies » par le prévenu (l’él
5250
qu’à l’école elle est de règle. Car la qualité et
la
quantité des réponses « fournies » par le prévenu (l’élève examiné) n
5251
lité et la quantité des réponses « fournies » par
le
prévenu (l’élève examiné) n’a qu’un lointain rapport avec la qualité
5252
uantité des réponses « fournies » par le prévenu (
l’
élève examiné) n’a qu’un lointain rapport avec la qualité et la quanti
5253
(l’élève examiné) n’a qu’un lointain rapport avec
la
qualité et la quantité des efforts « fournis » au cours du trimestre.
5254
né) n’a qu’un lointain rapport avec la qualité et
la
quantité des efforts « fournis » au cours du trimestre. Ce phénomène
5255
ant s’explique justement par cette psychologie de
l’
enfant dont je disais tout à l’heure que la connaissance n’est pas exi
5256
tte psychologie de l’enfant dont je disais tout à
l’
heure que la connaissance n’est pas exigée de ceux qui établissent les
5257
gie de l’enfant dont je disais tout à l’heure que
la
connaissance n’est pas exigée de ceux qui établissent les programmes
5258
aissance n’est pas exigée de ceux qui établissent
les
programmes et les examens. « Les examens faussent complètement l’espr
5259
exigée de ceux qui établissent les programmes et
les
examens. « Les examens faussent complètement l’esprit de l’enseigneme
5260
qui établissent les programmes et les examens. «
Les
examens faussent complètement l’esprit de l’enseignement », lit-on ju
5261
les examens. « Les examens faussent complètement
l’
esprit de l’enseignement », lit-on jusque sous la plume de divers maît
5262
. « Les examens faussent complètement l’esprit de
l’
enseignement », lit-on jusque sous la plume de divers maîtres primaire
5263
s et secondaires. Ils n’en sont pas moins devenus
le
but même de l’instruction ; la fin qui justifie les moyens et à quoi
5264
s. Ils n’en sont pas moins devenus le but même de
l’
instruction ; la fin qui justifie les moyens et à quoi l’on subordonne
5265
pas moins devenus le but même de l’instruction ;
la
fin qui justifie les moyens et à quoi l’on subordonne tout, plaisir,
5266
e but même de l’instruction ; la fin qui justifie
les
moyens et à quoi l’on subordonne tout, plaisir, goût au travail, qual
5267
uction ; la fin qui justifie les moyens et à quoi
l’
on subordonne tout, plaisir, goût au travail, qualité du travail, sant
5268
vail, qualité du travail, santé, liberté, sens de
la
justice et autres balivernes, instruction véritable et autres plaisan
5269
le et autres plaisanteries de gros calibre, car à
la
vérité ce n’est pas d’enseigner qu’il s’agit, mais de soumettre les e
5270
t pas d’enseigner qu’il s’agit, mais de soumettre
les
esprits au contrôle de l’État, voyons donc, — n’avez-vous pas honte d
5271
git, mais de soumettre les esprits au contrôle de
l’
État, voyons donc, — n’avez-vous pas honte de vous faire rappeler sans
5272
ler sans cesse des vérités aussi élémentaires.
L’
égalitarisme des connaissances De l’existence des programmes, qui e
5273
taires. L’égalitarisme des connaissances De
l’
existence des programmes, qui est un fait, et de l’existence de la Dém
5274
’existence des programmes, qui est un fait, et de
l’
existence de la Démocratie, qui est une prétention (réservons le mot d
5275
programmes, qui est un fait, et de l’existence de
la
Démocratie, qui est une prétention (réservons le mot d’idéal), découl
5276
la Démocratie, qui est une prétention (réservons
le
mot d’idéal), découle cette exigence théorique : tous les enfants doi
5277
d’idéal), découle cette exigence théorique : tous
les
enfants doivent à tout instant être en mesure 1° d’ingurgiter la même
5278
ent à tout instant être en mesure 1° d’ingurgiter
la
même quantité de « matière » ; 2° d’en rendre compte de la même façon
5279
uantité de « matière » ; 2° d’en rendre compte de
la
même façon, dans le même temps. Contentons-nous de remarquer que ce p
5280
» ; 2° d’en rendre compte de la même façon, dans
le
même temps. Contentons-nous de remarquer que ce principe est à la bas
5281
ontentons-nous de remarquer que ce principe est à
la
base du système ; qui repose donc sur une tranquille méconnaissance d
5282
repose donc sur une tranquille méconnaissance de
la
nature humaine. L’histoire enregistre bien une ou deux autres bêtises
5283
e tranquille méconnaissance de la nature humaine.
L’
histoire enregistre bien une ou deux autres bêtises de cette épaisseur
5284
xtension universelle et un caractère obligatoire.
L’
école exige donc que les meilleurs ralentissent et que les plus faible
5285
un caractère obligatoire. L’école exige donc que
les
meilleurs ralentissent et que les plus faibles se forcent. Elle ne co
5286
exige donc que les meilleurs ralentissent et que
les
plus faibles se forcent. Elle ne convient qu’aux médiocres, dont elle
5287
le ne convient qu’aux médiocres, dont elle assure
le
triomphe. L’école s’attaque impitoyablement aux natures d’exception,
5288
t qu’aux médiocres, dont elle assure le triomphe.
L’
école s’attaque impitoyablement aux natures d’exception, et les réduit
5289
taque impitoyablement aux natures d’exception, et
les
réduit avec acharnement à son commun dénominateur4. Nos bourgeois ass
5290
s ils se fâchent tout rouge quand on leur dit que
la
Suisse est caractérisée, aux yeux de l’étranger impartial, par sa cul
5291
r dit que la Suisse est caractérisée, aux yeux de
l’
étranger impartial, par sa culture intensive et extensive des veaux et
5292
nsive et extensive des veaux et des médiocres.
Le
gavage Moyen de réaliser les précédents. Plus ou moins rationalisé
5293
des médiocres. Le gavage Moyen de réaliser
les
précédents. Plus ou moins rationalisé. Son instrument le plus parfait
5294
édents. Plus ou moins rationalisé. Son instrument
le
plus parfait s’appelle le manuel. Un bon manuel est un résumé clair e
5295
onalisé. Son instrument le plus parfait s’appelle
le
manuel. Un bon manuel est un résumé clair et portatif des résultats a
5296
et portatif des résultats actuels d’une science.
Le
bon sens voudrait qu’on étudie d’abord la science dans sa réalité, pu
5297
cience. Le bon sens voudrait qu’on étudie d’abord
la
science dans sa réalité, puis qu’on se réfère au résumé comme à un ai
5298
se réfère au résumé comme à un aide-mémoire. Mais
l’
école veut qu’on commence par apprendre le résumé. D’ailleurs elle s’a
5299
e. Mais l’école veut qu’on commence par apprendre
le
résumé. D’ailleurs elle s’arrête là. Les manuels ne correspondent à a
5300
apprendre le résumé. D’ailleurs elle s’arrête là.
Les
manuels ne correspondent à aucune réalité. Ils ne renferment rien qui
5301
, rien qui soit authentique. Ils négligent toutes
les
particularités, toutes les « prises » où pourrait s’accrocher l’intér
5302
. Ils négligent toutes les particularités, toutes
les
« prises » où pourrait s’accrocher l’intérêt. Ils dispensent de tout
5303
és, toutes les « prises » où pourrait s’accrocher
l’
intérêt. Ils dispensent de tout contact direct avec ce dont ils traite
5304
tout contact direct avec ce dont ils traitent. Or
la
valeur éducative des choses n’apparaît qu’à celui qui entre en commer
5305
e de mille, dit un sage oriental dont j’ai oublié
le
nom. Une autre conséquence du gavage, c’est qu’on ne peut laisser aux
5306
du gavage, c’est qu’on ne peut laisser aux élèves
le
temps qu’il faut pour assimiler ce qu’ils apprennent. Ils sont forcés
5307
n’est pas modèle, il est absurde. Mais où sont à
l’
école les modèles de ce qu’on nommait autrefois la belle ouvrage ? On
5308
as modèle, il est absurde. Mais où sont à l’école
les
modèles de ce qu’on nommait autrefois la belle ouvrage ? On va suppri
5309
l’école les modèles de ce qu’on nommait autrefois
la
belle ouvrage ? On va supprimer les leçons de calligraphie. La dis
5310
mait autrefois la belle ouvrage ? On va supprimer
les
leçons de calligraphie. La discipline On conçoit que la réalisa
5311
? On va supprimer les leçons de calligraphie.
La
discipline On conçoit que la réalisation d’un programme entièremen
5312
calligraphie. La discipline On conçoit que
la
réalisation d’un programme entièrement contre nature exige une discip
5313
ne sévère. D’où notre conception pénitentiaire de
l’
école. Mais, s’il est des disciplines qui renforcent, il en est d’aut
5314
renforcent, il en est d’autres qui amoindrissent.
La
discipline scolaire consiste à faire tenir les enfants immobiles et m
5315
nt. La discipline scolaire consiste à faire tenir
les
enfants immobiles et muets 6 heures par jour durant 8 ans. Il paraît
5316
ar jour durant 8 ans. Il paraît que cela facilite
le
travail du maître. Il se peut. Tout dépend de ce qu’on attend de ce t
5317
ravail. Je doute qu’il soit de nature à légitimer
l’
énormité de l’effort qu’on demande à ces petits. Là encore il y a une
5318
te qu’il soit de nature à légitimer l’énormité de
l’
effort qu’on demande à ces petits. Là encore il y a une exagération ab
5319
énéralisation si schématique et superficielle que
la
discipline perd tout son sens éducatif et n’est plus qu’une entrave é
5320
chez un peuple qui vraiment ne péchait point par
l’
excès de cette vertu. La discipline primaire forme des gobeurs et des
5321
ment ne péchait point par l’excès de cette vertu.
La
discipline primaire forme des gobeurs et des inertes, fournit des mou
5322
tes, fournit des moutons aux partis et prédispose
les
citoyens suisses à prendre au sérieux les innombrables défense de, pe
5323
dispose les citoyens suisses à prendre au sérieux
les
innombrables défense de, petites crottes noires et blanches qui marqu
5324
es noires et blanches qui marquent un peu partout
le
passage de l’État, et dont la vue permet à ceux qui tombent du ciel s
5325
lanches qui marquent un peu partout le passage de
l’
État, et dont la vue permet à ceux qui tombent du ciel sur notre sol d
5326
uent un peu partout le passage de l’État, et dont
la
vue permet à ceux qui tombent du ciel sur notre sol de s’écrier sans
5327
berté, liberté chérie, voilà bien ta patrie. »
La
préparation civique Tous les pontifes de l’instruction publique so
5328
en ta patrie. » La préparation civique Tous
les
pontifes de l’instruction publique sont d’accord sur ce point : l’éco
5329
La préparation civique Tous les pontifes de
l’
instruction publique sont d’accord sur ce point : l’école primaire doi
5330
instruction publique sont d’accord sur ce point :
l’
école primaire doit être une école de Démocratie. Ils insistent sur le
5331
t être une école de Démocratie. Ils insistent sur
le
fait que les leçons d’instruction civique sont insuffisantes pour for
5332
cole de Démocratie. Ils insistent sur le fait que
les
leçons d’instruction civique sont insuffisantes pour former le petit
5333
nstruction civique sont insuffisantes pour former
le
petit citoyen : il faut que l’enseignement tout entier soit occasion
5334
santes pour former le petit citoyen : il faut que
l’
enseignement tout entier soit occasion de développer les vertus social
5335
eignement tout entier soit occasion de développer
les
vertus sociales de l’élève. « Une classe est une société en miniature
5336
oit occasion de développer les vertus sociales de
l’
élève. « Une classe est une société en miniature. » Ceci est une énorm
5337
une énorme bourde. Juxtaposez trente enfants sur
les
bancs d’une salle d’école, vous n’aurez rien qui ressemble en quoi qu
5338
état social existant. Ce qui est vrai, c’est que
le
fait, absolument nouveau dans l’Histoire, que l’on oblige les enfants
5339
vrai, c’est que le fait, absolument nouveau dans
l’
Histoire, que l’on oblige les enfants à vivre ensemble dès l’âge de 6
5340
le fait, absolument nouveau dans l’Histoire, que
l’
on oblige les enfants à vivre ensemble dès l’âge de 6 ans, favorise le
5341
solument nouveau dans l’Histoire, que l’on oblige
les
enfants à vivre ensemble dès l’âge de 6 ans, favorise le développemen
5342
que l’on oblige les enfants à vivre ensemble dès
l’
âge de 6 ans, favorise le développement de leurs penchants les plus «
5343
nts à vivre ensemble dès l’âge de 6 ans, favorise
le
développement de leurs penchants les plus « communs » : jalousie, van
5344
ans, favorise le développement de leurs penchants
les
plus « communs » : jalousie, vanité, panurgisme, concurrence sournois
5345
e, esprit de parti, arrivisme et parlementarisme.
La
culture de l’esprit démocratique telle qu’elle est comprise par les i
5346
arti, arrivisme et parlementarisme. La culture de
l’
esprit démocratique telle qu’elle est comprise par les instituteurs —
5347
sprit démocratique telle qu’elle est comprise par
les
instituteurs — et elle ne peut être comprise autrement — est essentie
5348
nière que ce soit, voudraient « se distinguer ». (
Le
mépris que notre peuple met dans cette expression !) Pour moi ce que
5349
expérience scolaire, c’est une grosse vérité que
le
bon sens m’eût par ailleurs fait voir : il n’y a pas d’égalité réelle
5350
: il n’y a pas d’égalité réelle possible tant que
la
loi est la même pour tous. Je ne parle pas des manuels d’histoire, do
5351
pas d’égalité réelle possible tant que la loi est
la
même pour tous. Je ne parle pas des manuels d’histoire, dont il est a
5352
i démontré qu’ils donnent une image mensongère de
l’
ancienne Suisse, à l’usage du peuple souverain qui ne manque pas d’en
5353
nent une image mensongère de l’ancienne Suisse, à
l’
usage du peuple souverain qui ne manque pas d’en être flatté. Et puis,
5354
e flatté. Et puis, quelle est cette préparation à
la
vie qui commence par nous soustraire à l’influence de la vie ? Quelle
5355
ation à la vie qui commence par nous soustraire à
l’
influence de la vie ? Quelle est cette éducation sociale qui enlève l’
5356
qui commence par nous soustraire à l’influence de
la
vie ? Quelle est cette éducation sociale qui enlève l’enfant à la fam
5357
e ? Quelle est cette éducation sociale qui enlève
l’
enfant à la famille ?5 Quel est cet instrument de perfectionnement civ
5358
est cette éducation sociale qui enlève l’enfant à
la
famille ?5 Quel est cet instrument de perfectionnement civique qui as
5359
instrument de perfectionnement civique qui assure
l’
écrasement des plus délicats par les plus vulgaires ? L’idéal du bo
5360
que qui assure l’écrasement des plus délicats par
les
plus vulgaires ? L’idéal du bon élève Le bon sens voudrait que
5361
ent des plus délicats par les plus vulgaires ?
L’
idéal du bon élève Le bon sens voudrait que le bon élève soit celui
5362
r les plus vulgaires ? L’idéal du bon élève
Le
bon sens voudrait que le bon élève soit celui qui sait utiliser pour
5363
L’idéal du bon élève Le bon sens voudrait que
le
bon élève soit celui qui sait utiliser pour son profit humain la peti
5364
it celui qui sait utiliser pour son profit humain
la
petite somme de connaissances indispensables qu’on lui donne à l’écol
5365
de connaissances indispensables qu’on lui donne à
l’
école. (Cet argent de poche, ni plus ni moins.) Ou encore : que le bon
5366
gent de poche, ni plus ni moins.) Ou encore : que
le
bon élève soit celui qui supporte le mieux le traitement scolaire ; c
5367
encore : que le bon élève soit celui qui supporte
le
mieux le traitement scolaire ; celui dont la valeur humaine subsiste
5368
que le bon élève soit celui qui supporte le mieux
le
traitement scolaire ; celui dont la valeur humaine subsiste intacte a
5369
orte le mieux le traitement scolaire ; celui dont
la
valeur humaine subsiste intacte au milieu des conditions anormales cr
5370
cte au milieu des conditions anormales créées par
l’
école publique. Mais l’idéal de l’école est autre ; il est même tout c
5371
tions anormales créées par l’école publique. Mais
l’
idéal de l’école est autre ; il est même tout contraire. On ne peut pa
5372
ales créées par l’école publique. Mais l’idéal de
l’
école est autre ; il est même tout contraire. On ne peut pas exiger qu
5373
té que je ne puis m’empêcher de trouver suspecte.
Le
bon élève est celui qui a de bons points. Or les bons points vont aux
5374
. Le bon élève est celui qui a de bons points. Or
les
bons points vont aux parfaits imitateurs. Oyez-moi tous ces petits ph
5375
phonographes…ographes…graphes…graphes… Enfoncés,
les
perroquets. Dans une composition sur La Neige, Victoria X, 10 ans, éc
5376
nfoncés, les perroquets. Dans une composition sur
La
Neige, Victoria X, 10 ans, écrit : « C’est l’hiver. Déjà la terre a r
5377
sur La Neige, Victoria X, 10 ans, écrit : « C’est
l’
hiver. Déjà la terre a revêtu son blanc manteau. » Elle aura 10 sur 10
5378
Victoria X, 10 ans, écrit : « C’est l’hiver. Déjà
la
terre a revêtu son blanc manteau. » Elle aura 10 sur 10. Mais on donn
5379
évident que Sylvie est supérieure à Victoria dans
la
mesure où l’invention est supérieure à l’imitation. Mais Victoria mon
5380
ylvie est supérieure à Victoria dans la mesure où
l’
invention est supérieure à l’imitation. Mais Victoria montre une âme d
5381
ia dans la mesure où l’invention est supérieure à
l’
imitation. Mais Victoria montre une âme docile, un rassurant défaut d’
5382
que, tandis que Sylvie appartient manifestement à
la
race dangereuse de ceux qui voient avec leurs yeux. Le bon élève est
5383
ce dangereuse de ceux qui voient avec leurs yeux.
Le
bon élève est aussi l’élève discipliné. L’école veut que partout la v
5384
ui voient avec leurs yeux. Le bon élève est aussi
l’
élève discipliné. L’école veut que partout la valeur cède le pas à la
5385
yeux. Le bon élève est aussi l’élève discipliné.
L’
école veut que partout la valeur cède le pas à la règle. Elle cherche
5386
ussi l’élève discipliné. L’école veut que partout
la
valeur cède le pas à la règle. Elle cherche à développer chez nos pet
5387
scipliné. L’école veut que partout la valeur cède
le
pas à la règle. Elle cherche à développer chez nos petits Helvètes un
5388
L’école veut que partout la valeur cède le pas à
la
règle. Elle cherche à développer chez nos petits Helvètes un légalism
5389
u d’impuissants, qui d’ailleurs ne peut être qu’à
l’
avantage des gens en place, vieille histoire. On m’objectera sans dout
5390
ex-forts-en-thème, voire par d’ex-instituteurs. À
la
vérité, il s’agit de réussites qui, pour avoir enivré l’espoir et enf
5391
té, il s’agit de réussites qui, pour avoir enivré
l’
espoir et enflammé l’ambition d’un grand nombre de régents, ne laissen
5392
sites qui, pour avoir enivré l’espoir et enflammé
l’
ambition d’un grand nombre de régents, ne laissent pas que d’être asse
5393
ires » (témoignage suffisant de leurs aptitudes à
la
compromission sociale établie) et cueilli au passage un grade univers
5394
nombreux banquets de cercles locaux où se fondent
les
réputations, où se « baptisent » les hommes d’avenir. Un jour on voit
5395
ù se fondent les réputations, où se « baptisent »
les
hommes d’avenir. Un jour on voit s’étaler en première page des illust
5396
r on voit s’étaler en première page des illustrés
la
face épanouie quoique énergique d’un de ces coqs de village qu’on vie
5397
de ces coqs de village qu’on vient de jucher sur
la
flèche de l’édifice administratif. Et c’est ce qui s’appelle une bell
5398
de village qu’on vient de jucher sur la flèche de
l’
édifice administratif. Et c’est ce qui s’appelle une belle carrière. M
5399
n, par ailleurs fort grande. Tous ceux qui ont eu
l’
occasion de comparer les bons élèves de diverses classes d’un collège
5400
ande. Tous ceux qui ont eu l’occasion de comparer
les
bons élèves de diverses classes d’un collège ont été frappés de const
5401
ses d’un collège ont été frappés de constater que
la
force et l’originalité de leur jugement sont en raison inverse du nom
5402
lège ont été frappés de constater que la force et
l’
originalité de leur jugement sont en raison inverse du nombre d’années
5403
nées d’instruction publique qu’ils ont subies.
Le
dilemme J’ai indiqué que les principes de l’instruction publique n
5404
ils ont subies. Le dilemme J’ai indiqué que
les
principes de l’instruction publique ne coïncident qu’accidentellement
5405
Le dilemme J’ai indiqué que les principes de
l’
instruction publique ne coïncident qu’accidentellement avec ceux du bo
5406
ls constituent une inversion méthodique de toutes
les
lois divines et humaines. C’est-à-dire : une méthode d’abâtardissemen
5407
. C’est-à-dire : une méthode d’abâtardissement de
la
race. D’autre part, il est aisé de voir que tous ces principes dérive
5408
ces principes dérivent nécessairement du fait que
l’
école est publique, obligatoire, et soumise au contrôle de l’État. Al
5409
publique, obligatoire, et soumise au contrôle de
l’
État. Alors ? Ou bien vous acceptez le régime — mais aussi ses conséq
5410
ontrôle de l’État. Alors ? Ou bien vous acceptez
le
régime — mais aussi ses conséquences absurdes et fatales, par exemple
5411
ses conséquences absurdes et fatales, par exemple
l’
instruction publique. Ou bien vous combattez l’instruction publique —
5412
le l’instruction publique. Ou bien vous combattez
l’
instruction publique — mais vous êtes, de ce fait, contre le régime. I
5413
ion publique — mais vous êtes, de ce fait, contre
le
régime. Il y a là, dirait M. Prudhomme, un bien grave dilemme. 4.
5414
ien grave dilemme. 4. Ce ne sont pas seulement
les
meilleurs qui sont sacrifiés. Voici ce que M. E. Duvillard dit des en
5415
ue M. E. Duvillard dit des enfants peu doués pour
les
disciplines scolaires : « Les épaves scolaires, faute d’un traitement
5416
ants peu doués pour les disciplines scolaires : «
Les
épaves scolaires, faute d’un traitement pédagogique approprié, tomben
5417
prié, tombent dans une apathie intellectuelle qui
les
conduit souvent à l’imbécillité et au vice. » Emmanuel Duvillard, L’É
5418
apathie intellectuelle qui les conduit souvent à
l’
imbécillité et au vice. » Emmanuel Duvillard, L’École de demain, Genèv
5419
à l’imbécillité et au vice. » Emmanuel Duvillard,
L’
École de demain, Genève, Kündig, 1918, p. 12. 5. Il est peut-être ava
5420
t-être avantageux dans certains cas de soustraire
l’
enfant à l’influence d’une famille anormale. Mais d’abord c’est sancti
5421
tageux dans certains cas de soustraire l’enfant à
l’
influence d’une famille anormale. Mais d’abord c’est sanctionner cet é
5422
(il y aurait sans doute d’autres moyens de sauver
l’
enfant dans sa famille). Ensuite, pourquoi fait-on en réalité, comme s
5423
ite, pourquoi fait-on en réalité, comme si toutes
les
familles constituaient un milieu délétère ? 6. Justice démocratique,
5424
6. Justice démocratique, égalité, légalité, sont
les
meilleures armes de la bassesse contre toute valeur réelle, absolue.
5425
, égalité, légalité, sont les meilleures armes de
la
bassesse contre toute valeur réelle, absolue.
5426
4.
L’
illusion réformiste Bien entendu, tout cela a été dit. (Un peu autre
5427
tion. Il suffit pour s’en convaincre de parcourir
l’
abondante littérature publiée sur le « problème de l’école nouvelle ».
5428
de parcourir l’abondante littérature publiée sur
le
« problème de l’école nouvelle ». On appelle école nouvelle tout étab
5429
bondante littérature publiée sur le « problème de
l’
école nouvelle ». On appelle école nouvelle tout établissement où l’on
5430
. On appelle école nouvelle tout établissement où
l’
on s’efforce d’enseigner selon des principes tirés de l’observation de
5431
’efforce d’enseigner selon des principes tirés de
l’
observation des enfants, c’est-à-dire : en contradiction sur toute la
5432
nfants, c’est-à-dire : en contradiction sur toute
la
ligne avec l’enseignement officiel. Les promoteurs de ces mouvements
5433
à-dire : en contradiction sur toute la ligne avec
l’
enseignement officiel. Les promoteurs de ces mouvements tentent la gag
5434
sur toute la ligne avec l’enseignement officiel.
Les
promoteurs de ces mouvements tentent la gageure de réformer l’école p
5435
fficiel. Les promoteurs de ces mouvements tentent
la
gageure de réformer l’école primaire sans toucher au principe de l’in
5436
de ces mouvements tentent la gageure de réformer
l’
école primaire sans toucher au principe de l’instruction publique. Les
5437
rmer l’école primaire sans toucher au principe de
l’
instruction publique. Les réformes qu’ils ont proposées jusqu’ici sont
5438
ns toucher au principe de l’instruction publique.
Les
réformes qu’ils ont proposées jusqu’ici sont en général judicieuses,
5439
usqu’ici sont en général judicieuses, dictées par
le
bon sens7 et retouchées par le pédantisme inhérent à toute science. O
5440
euses, dictées par le bon sens7 et retouchées par
le
pédantisme inhérent à toute science. On a constaté que l’école actuel
5441
tisme inhérent à toute science. On a constaté que
l’
école actuelle est fondée sur une remarquable ignorance de la psycholo
5442
uelle est fondée sur une remarquable ignorance de
la
psychologie infantile. Où il y avait non-science, on a voulu apporter
5443
Où il y avait non-science, on a voulu apporter de
la
science. Mais c’est un art qu’il faudrait. Sinon l’on retombera dans
5444
science. Mais c’est un art qu’il faudrait. Sinon
l’
on retombera dans des absurdités. On a créé par exemple des « jardins
5445
n a créé par exemple des « jardins d’enfants » où
l’
on apprend à des élèves âgés de 3 à 4 ans à lacer leurs souliers ; et
5446
ans à lacer leurs souliers ; et cela s’appelle de
l’
école pratique. Plus tard on fait apprendre à ces mêmes enfants, et ré
5447
mêmes enfants, et réciter par cœur et à rebours,
les
noms des rues et places de leur ville, comme s’ils étaient tous desti
5448
e leur ville, comme s’ils étaient tous destinés à
la
profession de chauffeurs de taxi. Si cette conception du pratique pré
5449
eption du pratique prévaut, il est à craindre que
l’
école nouvelle n’apporte bientôt sa méthode rationnelle pour apprendre
5450
ur apprendre aux bambins à marcher en décomposant
les
mouvements avec l’aide d’un métronome pédagogique. De même, sous le l
5451
bins à marcher en décomposant les mouvements avec
l’
aide d’un métronome pédagogique. De même, sous le louable prétexte d’é
5452
l’aide d’un métronome pédagogique. De même, sous
le
louable prétexte d’école active, on prétend faire apprendre la gramma
5453
étexte d’école active, on prétend faire apprendre
la
grammaire par le moyen de gesticulations appropriées : foin de ces an
5454
tive, on prétend faire apprendre la grammaire par
le
moyen de gesticulations appropriées : foin de ces analyses de textes
5455
iées : foin de ces analyses de textes absurdes où
l’
on soulignait en rouge tous les mots en « al », tous les verbes dépone
5456
textes absurdes où l’on soulignait en rouge tous
les
mots en « al », tous les verbes déponents ; désormais l’étude des ver
5457
soulignait en rouge tous les mots en « al », tous
les
verbes déponents ; désormais l’étude des verbes actifs sera aussi act
5458
en « al », tous les verbes déponents ; désormais
l’
étude des verbes actifs sera aussi active, un élève se mettra à marche
5459
a aussi active, un élève se mettra à marcher dans
le
couloir en s’écriant : je marche, ou : j’arpente ; un autre restera a
5460
is, en affirmant : je siège ; un troisième lèvera
la
main, et dira : je lève la main, — au lieu de demander ce qu’on croit
5461
; un troisième lèvera la main, et dira : je lève
la
main, — au lieu de demander ce qu’on croit. Tout porte à craindre qu’
5462
mander ce qu’on croit. Tout porte à craindre qu’à
la
faveur du tumulte l’un ou l’autre proclamant : je sors ! ne traduise
5463
be en action et ne disparaisse à tout jamais dans
les
campagnes, tirant le meilleur parti possible de l’exercice ; car il n
5464
paraisse à tout jamais dans les campagnes, tirant
le
meilleur parti possible de l’exercice ; car il ne manque à ce système
5465
s campagnes, tirant le meilleur parti possible de
l’
exercice ; car il ne manque à ce système, avouez-le, que juste la spon
5466
’exercice ; car il ne manque à ce système, avouez-
le
, que juste la spontanéité nécessaire pour que ça ne soit pas une lour
5467
r il ne manque à ce système, avouez-le, que juste
la
spontanéité nécessaire pour que ça ne soit pas une lourde farce. Ces
5468
ce qu’elles sont comiques précisément. Je ferai à
l’
école nouvelle un reproche d’une autre nature. Elle prétend donner plu
5469
onner plus de liberté aux enfants en leur rendant
le
travail amusant, en leur laissant la possibilité de trouver par eux-m
5470
leur rendant le travail amusant, en leur laissant
la
possibilité de trouver par eux-mêmes ce qu’ils doivent apprendre. Mai
5471
té, cet amusement a pour seul but de faire avaler
la
pilule amère des connaissances. On songe à M. Ford, qui donne à ses o
5472
ment deux fois plus de machines. Jeu du chat avec
la
souris. On n’impose plus des résultats, on les fait trouver. Notez qu
5473
vec la souris. On n’impose plus des résultats, on
les
fait trouver. Notez que cela revient au même, sauf que par la méthode
5474
ver. Notez que cela revient au même, sauf que par
la
méthode nouvelle on atteint l’enfant plus profondément, on se glisse
5475
même, sauf que par la méthode nouvelle on atteint
l’
enfant plus profondément, on se glisse à l’intérieur de son esprit, là
5476
élabore son invention ; on capte scientifiquement
les
sources mêmes de sa liberté. « Instruire en amusant » peut être la fo
5477
de sa liberté. « Instruire en amusant » peut être
la
formule d’une tromperie subtile et plus grave que la brutalité primai
5478
formule d’une tromperie subtile et plus grave que
la
brutalité primaire, parce qu’elle n’excite pas de réaction vive de la
5479
t des écoliers. Enfin, je n’aime pas qu’on traite
le
gosse comme un organisme dont il s’agit d’obtenir le rendement le plu
5480
gosse comme un organisme dont il s’agit d’obtenir
le
rendement le plus élevé. On cultive les petits d’hommes comme des pla
5481
n organisme dont il s’agit d’obtenir le rendement
le
plus élevé. On cultive les petits d’hommes comme des plantes de serre
5482
d’obtenir le rendement le plus élevé. On cultive
les
petits d’hommes comme des plantes de serre dans ces jardins d’enfants
5483
serre dans ces jardins d’enfants. On y parle de «
l’
enfant » comme on parle d’un produit chimique : On remarque chez l’enf
5484
on parle d’un produit chimique : On remarque chez
l’
enfant… Dans ce milieu l’enfant ne tarde pas à se développer… Prenez u
5485
mique : On remarque chez l’enfant… Dans ce milieu
l’
enfant ne tarde pas à se développer… Prenez un enfant de 6 ans… Mettez
5486
… Mettez ensemble trois enfants… Je reconnais que
les
buts de l’école nouvelle sont honnêtement scientifiques, et désintére
5487
emble trois enfants… Je reconnais que les buts de
l’
école nouvelle sont honnêtement scientifiques, et désintéressés. Mais
5488
honnêtement scientifiques, et désintéressés. Mais
l’
enfant-cobaye vaut l’enfant-citoyen. Moi je voudrais l’enfant tout cou
5489
ques, et désintéressés. Mais l’enfant-cobaye vaut
l’
enfant-citoyen. Moi je voudrais l’enfant tout court. Or il paraît que
5490
ant-cobaye vaut l’enfant-citoyen. Moi je voudrais
l’
enfant tout court. Or il paraît que c’est très dangereux. Néanmoins je
5491
ent du système officiel qui pourrait bien un jour
l’
atteindre au cœur, et je vois tout ce que cela entraînerait, dans une
5492
înerait, dans une ruine d’où renaîtrait peut-être
l’
humanité… Je songe à un enseignement sans école. Je songe au maître an
5493
ans école. Je songe au maître antique, dont toute
la
personne était un enseignement, et qui n’avait pas des élèves, mais d
5494
lèves, mais des disciples. Celui-là seul favorise
le
développement des individus, qui ne cherche pas un rendement mais qui
5495
salue ces jeunes gens qui appliquent avec ferveur
les
principes de l’école libre, qui se moquent des programmes, et dont le
5496
gens qui appliquent avec ferveur les principes de
l’
école libre, qui se moquent des programmes, et dont les classes joyeus
5497
ole libre, qui se moquent des programmes, et dont
les
classes joyeuses sont de vraies foires : ils ont toute mon amitié. Ce
5498
marquer d’autant plus librement qu’ils trahissent
le
dessein profond de l’instruction publique, qu’ils trahissent leur mis
5499
librement qu’ils trahissent le dessein profond de
l’
instruction publique, qu’ils trahissent leur mission officielle. Ils é
5500
bravo ! Mais ce qu’on leur avait confié, c’était
la
fabrication en série de petits démocrates conscients et organisés. Je
5501
ment trop gros pour échapper plus longtemps à MM.
les
Inspecteurs des Écoles. Je le crains, dis-je ; car le monde ne progre
5502
us longtemps à MM. les Inspecteurs des Écoles. Je
le
crains, dis-je ; car le monde ne progresse qu’à la faveur de malenten
5503
nspecteurs des Écoles. Je le crains, dis-je ; car
le
monde ne progresse qu’à la faveur de malentendus (si tant est qu’il p
5504
e crains, dis-je ; car le monde ne progresse qu’à
la
faveur de malentendus (si tant est qu’il progresse). L’école nouvelle
5505
eur de malentendus (si tant est qu’il progresse).
L’
école nouvelle n’échappe à l’absurdité primaire qu’à la faveur d’une é
5506
st qu’il progresse). L’école nouvelle n’échappe à
l’
absurdité primaire qu’à la faveur d’une équivoque. Cette équivoque fra
5507
le nouvelle n’échappe à l’absurdité primaire qu’à
la
faveur d’une équivoque. Cette équivoque frappe tout essai de réforme.
5508
ndant une possibilité pratique d’en sortir, je ne
le
nie pas. Mais du point de vue de la vérité, force nous est de reconna
5509
sortir, je ne le nie pas. Mais du point de vue de
la
vérité, force nous est de reconnaître que notre dilemme subsiste dans
5510
Ou des appareils qui en tiennent lieu. 8. Voir à
l’
appendice le sens que je donne à ce mot.
5511
eils qui en tiennent lieu. 8. Voir à l’appendice
le
sens que je donne à ce mot.
5512
5.
La
machine à fabriquer des électeurs Je crois à l’absurdité de fait de
5513
La machine à fabriquer des électeurs Je crois à
l’
absurdité de fait de l’instruction publique. Je crois aussi qu’on ne p
5514
des électeurs Je crois à l’absurdité de fait de
l’
instruction publique. Je crois aussi qu’on ne peut réformer l’absurde.
5515
n publique. Je crois aussi qu’on ne peut réformer
l’
absurde. Je demande seulement qu’on m’explique pourquoi il triomphe et
5516
he et se perpétue ; de quel droit il nous écrase.
La
réponse est simple, terriblement simple : du droit de la Démocratie.
5517
nse est simple, terriblement simple : du droit de
la
Démocratie. L’instruction publique et la Démocratie sont sœurs siamoi
5518
terriblement simple : du droit de la Démocratie.
L’
instruction publique et la Démocratie sont sœurs siamoises. Elles sont
5519
droit de la Démocratie. L’instruction publique et
la
Démocratie sont sœurs siamoises. Elles sont nées en même temps. Elles
5520
ste pas cette thèse. Elle est glorifiée dans tous
les
banquets officiels par des orateurs émus et il y aurait une insigne h
5521
urait une insigne hypocrisie à feindre de ne plus
la
reconnaître, une fois dissipée la fumée des civets, des cigares et de
5522
ndre de ne plus la reconnaître, une fois dissipée
la
fumée des civets, des cigares et des idéologies enivrées. D’ailleurs,
5523
ologies enivrées. D’ailleurs, cette idée que j’ai
l’
honneur de partager avec mes adversaires se trouve correspondre à des
5524
x si rare. Un fait simple, par exemple, c’est que
la
Démocratie sans l’instruction publique est pratiquement irréalisable.
5525
simple, par exemple, c’est que la Démocratie sans
l’
instruction publique est pratiquement irréalisable. Ici, je demanderai
5526
nt au lecteur de vouloir bien ne point trop faire
la
bête, sinon je me verrai contraint de lui expliquer un certain nombre
5527
faut pouvoir lire, écrire et compter pour suivre
la
campagne électorale, voter et truquer légalement les votes. Ensuite,
5528
campagne électorale, voter et truquer légalement
les
votes. Ensuite, il faut de l’histoire, et de l’instruction civique, p
5529
truquer légalement les votes. Ensuite, il faut de
l’
histoire, et de l’instruction civique, pour qu’on sache à quoi cela ri
5530
les votes. Ensuite, il faut de l’histoire, et de
l’
instruction civique, pour qu’on sache à quoi cela rime. Ensuite, il fa
5531
rime. Ensuite, il faut une discipline sévère dès
l’
enfance pour façonner des contribuables inoffensifs. Enfin, il faut un
5532
fin, il faut un nombre considérable de leçons, et
le
plus longtemps possible, pour qu’on n’ait pas le temps de se rendre c
5533
le plus longtemps possible, pour qu’on n’ait pas
le
temps de se rendre compte que tout cela est absurde. Pour qu’on n’ait
5534
e que tout cela est absurde. Pour qu’on n’ait pas
le
temps d’écouter la nature qui répète par toutes ses voix, d’un millia
5535
absurde. Pour qu’on n’ait pas le temps d’écouter
la
nature qui répète par toutes ses voix, d’un milliard de façons, que c
5536
e façons, que c’est absurde. Pour qu’on n’ait pas
le
temps de découvrir la Liberté9, parce que celui qui l’a embrassée une
5537
surde. Pour qu’on n’ait pas le temps de découvrir
la
Liberté9, parce que celui qui l’a embrassée une fois, une seule fois,
5538
mps de découvrir la Liberté9, parce que celui qui
l’
a embrassée une fois, une seule fois, sait bien que tout le reste est
5539
ssée une fois, une seule fois, sait bien que tout
le
reste est absurde. Et voilà pour les sœurs siamoises. Continuons. La
5540
bien que tout le reste est absurde. Et voilà pour
les
sœurs siamoises. Continuons. La démocratie doit à l’École de vivre en
5541
e. Et voilà pour les sœurs siamoises. Continuons.
La
démocratie doit à l’École de vivre encore. Mais ce n’est de la part d
5542
sœurs siamoises. Continuons. La démocratie doit à
l’
École de vivre encore. Mais ce n’est de la part de notre Institutrice
5543
et mal dissimulée. Certes, je ne prétends pas que
les
créateurs de l’instruction publique aient eu pleine conscience de ce
5544
. Certes, je ne prétends pas que les créateurs de
l’
instruction publique aient eu pleine conscience de ce qu’ils faisaient
5545
pleine conscience de ce qu’ils faisaient — et je
les
excuse pour autant10. Je dis simplement ceci : leur œuvre n’a été pos
5546
ible que parce qu’elle était liée aux intérêts de
la
démocratie. Car il faut bien se représenter qu’elle n’était encore au
5547
qu’on répande universellement et obligatoirement
l’
art du saxophone ou de la balalaïka. Soyez certains qu’il ne manque à
5548
ement et obligatoirement l’art du saxophone ou de
la
balalaïka. Soyez certains qu’il ne manque à cette plaisanterie, pour
5549
que à cette plaisanterie, pour prendre corps, que
l’
appui intéressé d’un groupement politico-financier. Et il y aurait bie
5550
t il y aurait bien vite des députés pour célébrer
les
bienfaits sociaux, que dis-je, la valeur hautement moralisatrice de c
5551
pour célébrer les bienfaits sociaux, que dis-je,
la
valeur hautement moralisatrice de ces glapissants entonnoirs. D’aill
5552
oirs. D’ailleurs cette complicité, si évidente à
l’
origine de l’institution, se manifeste encore de nos jours, et d’une f
5553
eurs cette complicité, si évidente à l’origine de
l’
institution, se manifeste encore de nos jours, et d’une façon non moin
5554
tes normales. Je n’en veux pas d’autre preuve que
l’
état grotesquement arriéré de notre instrument de progrès par excellen
5555
’une explication vraisemblable de cette incurie :
l’
école, sous sa forme actuelle, remplit suffisamment son rôle politique
5556
dessin humoristique publié en 1914, représentant
l’
œuvre de Kitchener : une machine qui absorbait des gentlemen et rendai
5557
i absorbait des gentlemen et rendait des tommies.
La
machine scolaire, elle, dévore des enfants tout vifs et rend des cito
5558
vore des enfants tout vifs et rend des citoyens à
l’
œil torve. Durant l’opération, tous les crânes ont été décervelés et d
5559
t vifs et rend des citoyens à l’œil torve. Durant
l’
opération, tous les crânes ont été décervelés et dotés d’une petite mé
5560
citoyens à l’œil torve. Durant l’opération, tous
les
crânes ont été décervelés et dotés d’une petite mécanique à quatre so
5561
nique à quatre sous qui suffit à régler désormais
l’
automatisme de la vie civique. Le cerveau standard du type fédéral ne
5562
us qui suffit à régler désormais l’automatisme de
la
vie civique. Le cerveau standard du type fédéral ne laisse craindre a
5563
régler désormais l’automatisme de la vie civique.
Le
cerveau standard du type fédéral ne laisse craindre aucun imprévu dan
5564
on fonctionnement. Cet avantage inappréciable sur
le
cerveau naturel explique que les autorités compétentes n’aient point
5565
inappréciable sur le cerveau naturel explique que
les
autorités compétentes n’aient point hésité à l’adopter, malgré ses ra
5566
les autorités compétentes n’aient point hésité à
l’
adopter, malgré ses ratés assez fréquents. Maintenant je vous demande
5567
e un peu quel intérêt il y aurait à perfectionner
l’
instrument, à l’adapter aux particularités psychologiques, voire aux b
5568
térêt il y aurait à perfectionner l’instrument, à
l’
adapter aux particularités psychologiques, voire aux besoins purement
5569
purement sentimentaux qui peuvent apparaître chez
les
enfants ? Ce serait de l’art pour l’art. On ne peut pas en demander t
5570
euvent apparaître chez les enfants ? Ce serait de
l’
art pour l’art. On ne peut pas en demander tant aux gouvernements. La
5571
raître chez les enfants ? Ce serait de l’art pour
l’
art. On ne peut pas en demander tant aux gouvernements. La réforme sco
5572
n ne peut pas en demander tant aux gouvernements.
La
réforme scolaire, politiquement, n’est pas rentable. Il est clair que
5573
iquement, n’est pas rentable. Il est clair que si
le
but principal de l’instruction publique était d’éduquer le peuple d’u
5574
rentable. Il est clair que si le but principal de
l’
instruction publique était d’éduquer le peuple d’une façon désintéress
5575
incipal de l’instruction publique était d’éduquer
le
peuple d’une façon désintéressée, les gouvernements seraient un peu p
5576
it d’éduquer le peuple d’une façon désintéressée,
les
gouvernements seraient un peu plus fous qu’on n’ose les imaginer de n
5577
uvernements seraient un peu plus fous qu’on n’ose
les
imaginer de ne pas entreprendre sur l’heure une véritable révolution
5578
’on n’ose les imaginer de ne pas entreprendre sur
l’
heure une véritable révolution scolaire ; car il ne faudrait pas moins
5579
scolaire ; car il ne faudrait pas moins pour que
l’
école rattrape l’époque… Mais les gouvernements savent ce qu’ils font.
5580
l ne faudrait pas moins pour que l’école rattrape
l’
époque… Mais les gouvernements savent ce qu’ils font. Tout se tient, c
5581
as moins pour que l’école rattrape l’époque… Mais
les
gouvernements savent ce qu’ils font. Tout se tient, comme vous dites,
5582
e tient, comme vous dites, sans doute pour m’ôter
l’
envie de bousculer quoi que ce soit. J’aime les tremblements de terre,
5583
ter l’envie de bousculer quoi que ce soit. J’aime
les
tremblements de terre, vous tombez mal. J’appartiens à cette espèce d
5584
ne révolte de ma sensibilité qui me dresse contre
l’
École. Mes arguments ne se mettent en branle qu’après coup. Et quand v
5585
se mettent en branle qu’après coup. Et quand vous
les
démoliriez tous, ma rage n’en serait pas moins légitime. Je lui donne
5586
aison par définition. Après tout, peu m’importent
les
idéologies politiques, et peu m’importerait que l’École soit une mach
5587
s idéologies politiques, et peu m’importerait que
l’
École soit une machine à fabriquer de la démocratie — si je ne sentais
5588
erait que l’École soit une machine à fabriquer de
la
démocratie — si je ne sentais menacées dans cette aventure des valeur
5589
e auxquelles je tiens plus qu’à tout. Ma haine de
la
démocratie est l’aboutissement de l’évolution dont je viens de décrir
5590
ens plus qu’à tout. Ma haine de la démocratie est
l’
aboutissement de l’évolution dont je viens de décrire la marche nécess
5591
Ma haine de la démocratie est l’aboutissement de
l’
évolution dont je viens de décrire la marche nécessaire11. On ne manqu
5592
tissement de l’évolution dont je viens de décrire
la
marche nécessaire11. On ne manquera pas d’insinuer qu’à l’origine de
5593
nécessaire11. On ne manquera pas d’insinuer qu’à
l’
origine de tout ceci il y a surtout de la nervosité, de petites douleu
5594
uer qu’à l’origine de tout ceci il y a surtout de
la
nervosité, de petites douleurs de jeunes bourgeois. Essayer de venir
5595
, n’est-ce pas, mes agneaux. C’est justement dans
la
mesure où je participais de l’écœurant optimisme bourgeois que je m’a
5596
est justement dans la mesure où je participais de
l’
écœurant optimisme bourgeois que je m’accommodais d’un régime nocif po
5597
l y a d’authentiquement noble en chaque homme. Si
les
fils du peuple souffrent moins d’un tel régime, c’est qu’ils n’ont pa
5598
ussi sensible. Ils ignorent ce qu’étiolent en eux
les
droits de l’homme. Mais attendez, si quelques-uns allaient se réveill
5599
Il suffit d’un peu de chaleur d’âme pour amorcer
le
dégel de ces principes, et ce peut être le signal de la grande débâcl
5600
morcer le dégel de ces principes, et ce peut être
le
signal de la grande débâcle printanière. Il n’y a de révolution vérit
5601
el de ces principes, et ce peut être le signal de
la
grande débâcle printanière. Il n’y a de révolution véritable que de l
5602
ntanière. Il n’y a de révolution véritable que de
la
sensibilité. (Le jour où l’on culbutera ces Messieurs de leurs sièges
5603
a de révolution véritable que de la sensibilité. (
Le
jour où l’on culbutera ces Messieurs de leurs sièges, ils comprendron
5604
tion véritable que de la sensibilité. (Le jour où
l’
on culbutera ces Messieurs de leurs sièges, ils comprendront le sens d
5605
a ces Messieurs de leurs sièges, ils comprendront
le
sens des images.) 9. J’emploie ce mot au sens fort, au sens enivran
5606
pçonné ce que cela représente. 10. Voir note A à
la
fin du cahier. 11. Est-il besoin de déclarer formellement qu’une tel
5607
elle attitude n’est en aucune façon tributaire de
l’
idéologie réactionnaire à la mode. Mais que deux critiques de la Démoc
5608
e façon tributaire de l’idéologie réactionnaire à
la
mode. Mais que deux critiques de la Démocratie partant de points de v
5609
actionnaire à la mode. Mais que deux critiques de
la
Démocratie partant de points de vue presque opposés coïncident en tan
5610
6.
La
trahison de l’instruction publique (Ici, le procureur prit un ton p
5611
6. La trahison de
l’
instruction publique (Ici, le procureur prit un ton plus grave.) L’é
5612
6. La trahison de l’instruction publique (Ici,
le
procureur prit un ton plus grave.) L’école s’est vendue à des intérêt
5613
que (Ici, le procureur prit un ton plus grave.)
L’
école s’est vendue à des intérêts politiques. C’était là, nous venons
5614
s intérêts politiques. C’était là, nous venons de
le
voir, son unique moyen de parvenir. Elle participe donc sur une vaste
5615
n Benda. Notre époque paiera cher ce crime contre
la
civilisation. Elle ne croit plus qu’au péché contre les lois sociales
5616
vilisation. Elle ne croit plus qu’au péché contre
les
lois sociales, eh bien ! elle apprendra que le seul péché qui n’a pas
5617
e les lois sociales, eh bien ! elle apprendra que
le
seul péché qui n’a pas de pardon c’est le péché contre l’Esprit. Aujo
5618
dra que le seul péché qui n’a pas de pardon c’est
le
péché contre l’Esprit. Aujourd’hui qu’il suffit d’un peu de bon sens
5619
péché qui n’a pas de pardon c’est le péché contre
l’
Esprit. Aujourd’hui qu’il suffit d’un peu de bon sens et d’information
5620
trop laid ».) À peine capable de nous instruire,
l’
École prétend ouvertement nous éduquer. D’ailleurs elle y est obligée
5621
nous éduquer. D’ailleurs elle y est obligée dans
la
mesure où elle réalise son ambition : soustraire les enfants à l’Égli
5622
mesure où elle réalise son ambition : soustraire
les
enfants à l’Église et à la famille. L’Église donnait des valeurs idéa
5623
e réalise son ambition : soustraire les enfants à
l’
Église et à la famille. L’Église donnait des valeurs idéalistes, la fa
5624
ambition : soustraire les enfants à l’Église et à
la
famille. L’Église donnait des valeurs idéalistes, la famille des vale
5625
oustraire les enfants à l’Église et à la famille.
L’
Église donnait des valeurs idéalistes, la famille des valeurs réaliste
5626
famille. L’Église donnait des valeurs idéalistes,
la
famille des valeurs réalistes, sans lesquelles le monde s’enfonce de
5627
la famille des valeurs réalistes, sans lesquelles
le
monde s’enfonce de son propre poids dans l’abrutissement ou se laisse
5628
elles le monde s’enfonce de son propre poids dans
l’
abrutissement ou se laisse prendre à des théories non point fumeuses c
5629
e prendre à des théories non point fumeuses comme
le
veut le cliché, mais schématiques. Or l’École radicale ne peut pas êt
5630
e à des théories non point fumeuses comme le veut
le
cliché, mais schématiques. Or l’École radicale ne peut pas être idéal
5631
es comme le veut le cliché, mais schématiques. Or
l’
École radicale ne peut pas être idéaliste : car elle deviendrait un da
5632
e idéaliste : car elle deviendrait un danger pour
le
désordre établi. L’idéalisme est forcément révolutionnaire dans un mo
5633
le deviendrait un danger pour le désordre établi.
L’
idéalisme est forcément révolutionnaire dans un monde organisé pour la
5634
ément révolutionnaire dans un monde organisé pour
la
production. Le culte des valeurs désintéressées ne peut que diminuer
5635
nnaire dans un monde organisé pour la production.
Le
culte des valeurs désintéressées ne peut que diminuer le « rendement
5636
e des valeurs désintéressées ne peut que diminuer
le
« rendement » quantitatif de ceux qui s’y livrent. Je ne veux pas me
5637
« lumières », et qui pourtant s’indignent de voir
la
morale actuelle s’attaquer, voyez-vous ça, à la famille, « cette cell
5638
r la morale actuelle s’attaquer, voyez-vous ça, à
la
famille, « cette cellule sociale ». Et je les traite de mauvais plais
5639
a, à la famille, « cette cellule sociale ». Et je
les
traite de mauvais plaisants. Admirez mon extrême modération. Ceci fai
5640
ême modération. Ceci fait, constatez avec moi que
la
famille était encore un milieu naturel, donc normatif. Le collège au
5641
le était encore un milieu naturel, donc normatif.
Le
collège au contraire est un milieu antinaturel, et les normes sociale
5642
ollège au contraire est un milieu antinaturel, et
les
normes sociales qu’on prétend y substituer à celles de la famille son
5643
s sociales qu’on prétend y substituer à celles de
la
famille sont falsifiées. Non seulement l’École ne constitue pas le pô
5644
lles de la famille sont falsifiées. Non seulement
l’
École ne constitue pas le pôle idéaliste nécessaire à l’équilibre d’un
5645
alsifiées. Non seulement l’École ne constitue pas
le
pôle idéaliste nécessaire à l’équilibre d’une civilisation — et c’est
5646
e ne constitue pas le pôle idéaliste nécessaire à
l’
équilibre d’une civilisation — et c’est l’aspect négatif de sa trahiso
5647
saire à l’équilibre d’une civilisation — et c’est
l’
aspect négatif de sa trahison —, mais encore elle tend à développer to
5648
ut ce qu’il y a de spécifiquement malfaisant dans
l’
esprit moderne. C’est sa façon à elle de répondre aux besoins de l’épo
5649
C’est sa façon à elle de répondre aux besoins de
l’
époque. Pauvre époque ! On parle sans cesse de ses besoins. Il est vra
5650
du matérialisme. Et quand on m’aura démontré que
les
besoins de l’époque exigent une organisation à outrance du monde, je
5651
e. Et quand on m’aura démontré que les besoins de
l’
époque exigent une organisation à outrance du monde, je répondrai que
5652
sation à outrance du monde, je répondrai que dans
la
mesure où cette exigence est satisfaite naît un nouveau besoin qui es
5653
e bien que nous en soyons-là, s’il faut en croire
les
signes de révolte qui apparaissent de toutes parts. Mais l’école empo
5654
de révolte qui apparaissent de toutes parts. Mais
l’
école empoisonne les germes d’une renaissance de l’esprit dont elle de
5655
raissent de toutes parts. Mais l’école empoisonne
les
germes d’une renaissance de l’esprit dont elle devrait être la mère.
5656
’école empoisonne les germes d’une renaissance de
l’
esprit dont elle devrait être la mère. Elle favorise le culte exclusif
5657
ne renaissance de l’esprit dont elle devrait être
la
mère. Elle favorise le culte exclusif de l’utile, l’incompréhension b
5658
rit dont elle devrait être la mère. Elle favorise
le
culte exclusif de l’utile, l’incompréhension brutale de la nature, la
5659
être la mère. Elle favorise le culte exclusif de
l’
utile, l’incompréhension brutale de la nature, la haine des supériorit
5660
mère. Elle favorise le culte exclusif de l’utile,
l’
incompréhension brutale de la nature, la haine des supériorités nature
5661
exclusif de l’utile, l’incompréhension brutale de
la
nature, la haine des supériorités naturelles, l’habitude de l’ersatz
5662
l’utile, l’incompréhension brutale de la nature,
la
haine des supériorités naturelles, l’habitude de l’ersatz et du trava
5663
la nature, la haine des supériorités naturelles,
l’
habitude de l’ersatz et du travail bâclé. Elle apprend à lire les jour
5664
haine des supériorités naturelles, l’habitude de
l’
ersatz et du travail bâclé. Elle apprend à lire les journaux, mais en
5665
l’ersatz et du travail bâclé. Elle apprend à lire
les
journaux, mais en même temps que cette drogue, elle devrait fournir s
5666
ves du mot. Il est clair, par exemple, que seules
les
victimes de l’instruction helvétique sont capables d’absorber sans fo
5667
st clair, par exemple, que seules les victimes de
l’
instruction helvétique sont capables d’absorber sans fou rire les disc
5668
helvétique sont capables d’absorber sans fou rire
les
discours de tirs fédéraux. On a comparé le monde moderne à un vaste é
5669
rire les discours de tirs fédéraux. On a comparé
le
monde moderne à un vaste établissement de travaux forcés. L’école don
5670
derne à un vaste établissement de travaux forcés.
L’
école donne à l’enfant ce qu’il faut pour se résigner à l’état de cito
5671
établissement de travaux forcés. L’école donne à
l’
enfant ce qu’il faut pour se résigner à l’état de citoyen bagnard auqu
5672
donne à l’enfant ce qu’il faut pour se résigner à
l’
état de citoyen bagnard auquel il est promis. Mais elle tue tout ce qu
5673
t promis. Mais elle tue tout ce qui lui donnerait
l’
envie de se libérer — et peut-être les moyens. Vaste distillerie d’enn
5674
ui donnerait l’envie de se libérer — et peut-être
les
moyens. Vaste distillerie d’ennui, c’est-à-dire de démoralisation — q
5675
’ennui, c’est-à-dire de démoralisation — qu’on se
le
dise ! —, puissance de crétinisation lente, standardisation de toutes
5676
de crétinisation lente, standardisation de toutes
les
mesquineries naturelles (je ne fais le procès de la bêtise humaine qu
5677
de toutes les mesquineries naturelles (je ne fais
le
procès de la bêtise humaine qu’en tant qu’elle est cultivée par l’Éta
5678
mesquineries naturelles (je ne fais le procès de
la
bêtise humaine qu’en tant qu’elle est cultivée par l’État), l’École,
5679
êtise humaine qu’en tant qu’elle est cultivée par
l’
État), l’École, après avoir entraîné l’âme moderne dans ses collèges,
5680
aine qu’en tant qu’elle est cultivée par l’État),
l’
École, après avoir entraîné l’âme moderne dans ses collèges, l’y enfer
5681
ltivée par l’État), l’École, après avoir entraîné
l’
âme moderne dans ses collèges, l’y enferme et l’y laisse crever de fai
5682
s avoir entraîné l’âme moderne dans ses collèges,
l’
y enferme et l’y laisse crever de faim. Par ce qu’elle enseigne à igno
5683
é l’âme moderne dans ses collèges, l’y enferme et
l’
y laisse crever de faim. Par ce qu’elle enseigne à ignorer bien plus q
5684
r ce qu’elle enseigne à connaître, elle constitue
la
plus grande force antireligieuse de ce temps. L’instruction religieus
5685
la plus grande force antireligieuse de ce temps.
L’
instruction religieuse qui prend les enfants au sortir de l’école prim
5686
e de ce temps. L’instruction religieuse qui prend
les
enfants au sortir de l’école primaire, arrive trop tard. Le pasteur s
5687
ion religieuse qui prend les enfants au sortir de
l’
école primaire, arrive trop tard. Le pasteur sème dans un terrain que
5688
au sortir de l’école primaire, arrive trop tard.
Le
pasteur sème dans un terrain que l’instituteur a méthodiquement dessé
5689
ve trop tard. Le pasteur sème dans un terrain que
l’
instituteur a méthodiquement desséché.
5690
7.
L’
Instruction publique contre le progrès Un beau titre. Et qui a meill
5691
7. L’Instruction publique contre
le
progrès Un beau titre. Et qui a meilleure façon que le reste, pense
5692
rès Un beau titre. Et qui a meilleure façon que
le
reste, pensez-vous. Il faut avouer qu’avec ce je ne sais quoi de décl
5693
démocratique, hé ! hé !… et d’ailleurs vous aimez
les
idées généreuses, n’est-ce pas ? J’en étais sûr. Cependant j’ai peur
5694
ès ne soit pas le vôtre, et même que sa nature ne
l’
entraîne dans une direction tout opposée. C’est très malin d’avoir inv
5695
inventé un instrument de progrès : encore faut-il
le
mettre en marche. Et où le conduire ? Il y a beaucoup de routes, mais
5696
ogrès : encore faut-il le mettre en marche. Et où
le
conduire ? Il y a beaucoup de routes, mais vous n’aimez pas le risque
5697
Il y a beaucoup de routes, mais vous n’aimez pas
le
risque, vous préférez le sur-place. Ainsi l’instruction publique s’es
5698
s, mais vous n’aimez pas le risque, vous préférez
le
sur-place. Ainsi l’instruction publique s’est arrêtée aux environs de
5699
pas le risque, vous préférez le sur-place. Ainsi
l’
instruction publique s’est arrêtée aux environs de 1880 et depuis lors
5700
environs de 1880 et depuis lors n’a guère bougé.
Le
moteur n’en continue pas moins de consommer, de ronfler et de tout em
5701
mer, de ronfler et de tout empester. Et peu à peu
le
public s’aperçoit que « l’instrument de progrès » n’est qu’un camoufl
5702
empester. Et peu à peu le public s’aperçoit que «
l’
instrument de progrès » n’est qu’un camouflage à l’abri duquel on dist
5703
’instrument de progrès » n’est qu’un camouflage à
l’
abri duquel on distille du radicalisme intégral. On me fera observer q
5704
On me fera observer que beaucoup des servants de
la
machine sont socialistes : voilà qui ne change pas le rendement, j’im
5705
achine sont socialistes : voilà qui ne change pas
le
rendement, j’imagine, ni la nature des produits excrétés. On forme no
5706
ilà qui ne change pas le rendement, j’imagine, ni
la
nature des produits excrétés. On forme nos gosses, dès l’âge de 6 ans
5707
e des produits excrétés. On forme nos gosses, dès
l’
âge de 6 ans, à ne se point poser de questions dont ils n’aient appris
5708
ser de questions dont ils n’aient appris par cœur
la
réponse. Regardez un écolier préparer ses devoirs, c’est frappant : i
5709
préparer ses devoirs, c’est frappant : il apprend
les
questions aussi bien que les réponses. J’avoue que je trouve ça très
5710
rappant : il apprend les questions aussi bien que
les
réponses. J’avoue que je trouve ça très fort : avoir obtenu un confor
5711
uve ça très fort : avoir obtenu un conformisme de
la
curiosité. Il est vrai qu’il ne fallait pas moins pour assurer la séc
5712
est vrai qu’il ne fallait pas moins pour assurer
la
sécurité d’un régime établi dans des fauteuils ; car un peuple d’élec
5713
de trouver bien bonne celle-ci : je prétends que
l’
instruction publique est une puissance conservatrice. — Pas moins ! El
5714
. — Pas moins ! Elle est destinée à légitimer par
la
force de l’inertie et à perpétuer mécaniquement tout ce qui est depui
5715
s ! Elle est destinée à légitimer par la force de
l’
inertie et à perpétuer mécaniquement tout ce qui est depuis Numa Droz.
5716
ice, et non pas réactionnaire, non, même pas. Car
les
forces de réaction collaborent à leur manière au progrès, elles corri
5717
u progrès, elles corrigent, stimulent, vivifient.
L’
École se contente d’être figée. Est-ce un frein ? Même pas. C’est plut
5718
t une vase où s’enlise notre civilisation ; et où
la
Démocratie peut se conserver des siècles encore… Or si je dis que l’É
5719
se conserver des siècles encore… Or si je dis que
l’
École est contre le progrès, c’est que le progrès consiste à dépasser
5720
ècles encore… Or si je dis que l’École est contre
le
progrès, c’est que le progrès consiste à dépasser la Démocratie. Et c
5721
dis que l’École est contre le progrès, c’est que
le
progrès consiste à dépasser la Démocratie. Et cette thèse ne va pas à
5722
progrès, c’est que le progrès consiste à dépasser
la
Démocratie. Et cette thèse ne va pas à l’encontre de l’évolution norm
5723
ocratie. Et cette thèse ne va pas à l’encontre de
l’
évolution normale de l’humanité, comme vous ne manquerez cependant poi
5724
ne va pas à l’encontre de l’évolution normale de
l’
humanité, comme vous ne manquerez cependant point de le dire, avec ce
5725
anité, comme vous ne manquerez cependant point de
le
dire, avec ce sens exquis du cliché qui est un hommage à vos maîtres
5726
liché qui est un hommage à vos maîtres respectés.
La
Démocratie, par le moyen de l’instruction publique, limite l’homme au
5727
mmage à vos maîtres respectés. La Démocratie, par
le
moyen de l’instruction publique, limite l’homme au citoyen. Il s’agit
5728
maîtres respectés. La Démocratie, par le moyen de
l’
instruction publique, limite l’homme au citoyen. Il s’agit donc de dép
5729
e, par le moyen de l’instruction publique, limite
l’
homme au citoyen. Il s’agit donc de dépasser le citoyen, de retrouver
5730
te l’homme au citoyen. Il s’agit donc de dépasser
le
citoyen, de retrouver l’homme tout entier. Je distingue dans cette op
5731
s’agit donc de dépasser le citoyen, de retrouver
l’
homme tout entier. Je distingue dans cette opération deux temps : d’ab
5732
n deux temps : d’abord critiquer ce qui est — par
la
comparaison avec ce qui fut, ou ce qui devrait être ; ensuite, prépar
5733
i fut, ou ce qui devrait être ; ensuite, préparer
le
terrain pour les jeux nouveaux que l’humanité de demain ne peut manqu
5734
devrait être ; ensuite, préparer le terrain pour
les
jeux nouveaux que l’humanité de demain ne peut manquer d’inventer. Je
5735
e, préparer le terrain pour les jeux nouveaux que
l’
humanité de demain ne peut manquer d’inventer. Je ne puis m’empêcher d
5736
ir une intention providentielle dans cet amour de
la
destruction et de l’anarchie que les génies directeurs de ce temps on
5737
identielle dans cet amour de la destruction et de
l’
anarchie que les génies directeurs de ce temps ont inspiré à beaucoup
5738
cet amour de la destruction et de l’anarchie que
les
génies directeurs de ce temps ont inspiré à beaucoup d’entre nous — e
5739
inspiré à beaucoup d’entre nous — encore que peu
l’
avouent. Car détruire, déblayer, et faire des signes dans le vide à de
5740
Car détruire, déblayer, et faire des signes dans
le
vide à des hasards gros de dangers, c’est peut-être à quoi notre géné
5741
t peut-être à quoi notre génération devra limiter
l’
efficacité de ses efforts. Critiquer le présent au nom du passé ne sig
5742
ra limiter l’efficacité de ses efforts. Critiquer
le
présent au nom du passé ne signifie pas que l’on désire un retour au
5743
er le présent au nom du passé ne signifie pas que
l’
on désire un retour au passé. Mais la considération de régimes anciens
5744
ifie pas que l’on désire un retour au passé. Mais
la
considération de régimes anciens peut nous amener à constater, sans p
5745
r exemple, est-ce un progrès que d’avoir remplacé
les
hiérarchies de tradition, avec tout le vaste arrière-fond de poésie e
5746
remplacé les hiérarchies de tradition, avec tout
le
vaste arrière-fond de poésie et de grandeur que ce mot comporte — que
5747
ce mot comporte — quelles qu’en soient d’ailleurs
les
réalisations —, par des hiérarchies rond-de-cuiresques dont l’origine
5748
ns —, par des hiérarchies rond-de-cuiresques dont
l’
origine est un pis-aller, dont la méthode est le tirage au flanc lucra
5749
-cuiresques dont l’origine est un pis-aller, dont
la
méthode est le tirage au flanc lucratif, dont l’esprit est la jalousi
5750
t l’origine est un pis-aller, dont la méthode est
le
tirage au flanc lucratif, dont l’esprit est la jalousie rancie armée
5751
la méthode est le tirage au flanc lucratif, dont
l’
esprit est la jalousie rancie armée de pédantisme, et je ne parle pas
5752
st le tirage au flanc lucratif, dont l’esprit est
la
jalousie rancie armée de pédantisme, et je ne parle pas du décor, des
5753
isme, et je ne parle pas du décor, des odeurs, de
la
poussière, des petites habitudes sordides et de cette matière raremen
5754
arement « hygiénique » et qui définit notre âge :
la
paperasse ? Réponse ? Petits étourdis. Réponse non, c’est un recul. C
5755
l. Cette critique du fonctionnarisme, vous alliez
le
dire, est un ramassis de lieux communs. Mais il s’en faut, hélas, de
5756
ommuns. Mais il s’en faut, hélas, de beaucoup que
la
majorité des électeurs les considèrent comme tels. Et je ne me tiendr
5757
hélas, de beaucoup que la majorité des électeurs
les
considèrent comme tels. Et je ne me tiendrai pas pour battu quand on
5758
nt, maintenant, je vais m’y prendre pour préparer
les
temps nouveaux. Énorme question. Aurai-je la naïveté non moins énorme
5759
rer les temps nouveaux. Énorme question. Aurai-je
la
naïveté non moins énorme d’esquisser ici la réponse que je lui réserv
5760
ai-je la naïveté non moins énorme d’esquisser ici
la
réponse que je lui réserve ? L’instruction publique est la forme la
5761
d’esquisser ici la réponse que je lui réserve ?
L’
instruction publique est la forme la plus commune de la peste rational
5762
que je lui réserve ? L’instruction publique est
la
forme la plus commune de la peste rationaliste qui sévit dans le mond
5763
ui réserve ? L’instruction publique est la forme
la
plus commune de la peste rationaliste qui sévit dans le monde depuis
5764
truction publique est la forme la plus commune de
la
peste rationaliste qui sévit dans le monde depuis le xviiie (depuis
5765
s commune de la peste rationaliste qui sévit dans
le
monde depuis le xviiie (depuis les dernières pestes noires). Si vous
5766
peste rationaliste qui sévit dans le monde depuis
le
xviiie (depuis les dernières pestes noires). Si vous creusez un peu
5767
qui sévit dans le monde depuis le xviiie (depuis
les
dernières pestes noires). Si vous creusez un peu la notion de démocra
5768
dernières pestes noires). Si vous creusez un peu
la
notion de démocratie, vous trouvez bien vite qu’elle repose sur des p
5769
mentalité. Elle s’est développée au xviiie dans
l’
aristocratie qui n’y voyait qu’un jeu. Durant tout le xixe elle est d
5770
ristocratie qui n’y voyait qu’un jeu. Durant tout
le
xixe elle est descendue dans la bourgeoisie et dans le peuple ; elle
5771
jeu. Durant tout le xixe elle est descendue dans
la
bourgeoisie et dans le peuple ; elle y est devenue une tyrannie. Avan
5772
e elle est descendue dans la bourgeoisie et dans
le
peuple ; elle y est devenue une tyrannie. Avant il y avait la Raison
5773
elle y est devenue une tyrannie. Avant il y avait
la
Raison et les sentiments. Maintenant il y a le rationalisme12 et la s
5774
venue une tyrannie. Avant il y avait la Raison et
les
sentiments. Maintenant il y a le rationalisme12 et la sentimentalité.
5775
it la Raison et les sentiments. Maintenant il y a
le
rationalisme12 et la sentimentalité. Ce rationalisme-là triomphe non
5776
entiments. Maintenant il y a le rationalisme12 et
la
sentimentalité. Ce rationalisme-là triomphe non seulement dans les pr
5777
é. Ce rationalisme-là triomphe non seulement dans
les
principes démocratiques, et dans ceux de l’École, mais encore dans to
5778
dans les principes démocratiques, et dans ceux de
l’
École, mais encore dans toute la conduite moderne de la vie. C’est not
5779
, et dans ceux de l’École, mais encore dans toute
la
conduite moderne de la vie. C’est notre américanisme et c’est notre s
5780
le, mais encore dans toute la conduite moderne de
la
vie. C’est notre américanisme et c’est notre sécheresse sentimentale.
5781
et c’est notre sécheresse sentimentale. Et c’est
le
grand empêchement intérieur dont souffre notre imagination créatrice
5782
réatrice ; c’est lui qui stérilise nos utopies et
les
empêche de devenir autre chose que des utopies. Il s’agit donc en pre
5783
ue des utopies. Il s’agit donc en premier lieu de
le
démasquer et de le pourchasser dans toutes les démarches de notre vie
5784
s’agit donc en premier lieu de le démasquer et de
le
pourchasser dans toutes les démarches de notre vie. Mais cette premiè
5785
de le démasquer et de le pourchasser dans toutes
les
démarches de notre vie. Mais cette première tâche constitue un progra
5786
nce négative qui aura duré deux siècles au moins.
L’
évolution de l’humanité paraît conforme à la dialectique hégélienne ;
5787
i aura duré deux siècles au moins. L’évolution de
l’
humanité paraît conforme à la dialectique hégélienne ; on y retrouve f
5788
oins. L’évolution de l’humanité paraît conforme à
la
dialectique hégélienne ; on y retrouve facilement les triades : être
5789
dialectique hégélienne ; on y retrouve facilement
les
triades : être —négation de l’être — nouvel être. Notre époque serait
5790
trouve facilement les triades : être —négation de
l’
être — nouvel être. Notre époque serait le deuxième temps d’une de ces
5791
temps d’une de ces triades. Son rationalisme nie
l’
être sous toutes ses formes, traduit tout en relations et veut rendre
5792
-à-dire, pour lui, calculables, chiffrables. Dans
la
mesure où il y parvient, il tue les existences particulières, ou bien
5793
ffrables. Dans la mesure où il y parvient, il tue
les
existences particulières, ou bien c’est qu’elles sont déjà mortes. Ma
5794
es, ou bien c’est qu’elles sont déjà mortes. Mais
le
temps vient où elles renaîtront à une vie nouvelle et plus complète,
5795
cience, si je puis dire. Alors ce sera au tour de
l’
instinct d’intégrer la raison. Je crois que nous approchons de ce temp
5796
e. Alors ce sera au tour de l’instinct d’intégrer
la
raison. Je crois que nous approchons de ce temps. Et que le véritable
5797
Je crois que nous approchons de ce temps. Et que
le
véritable progrès veut qu’on s’attaque à tout ce qui entrave cet avèn
5798
entrave cet avènement. C’est pourquoi je réclame
l’
expulsion de la congrégation radicale des instituteurs. On me demande
5799
ènement. C’est pourquoi je réclame l’expulsion de
la
congrégation radicale des instituteurs. On me demande encore ce que j
5800
uteurs. On me demande encore ce que je mettrais à
la
place. Et parce que je ne propose rien de bien précis, on triomphe gr
5801
jet de Louis XIV ce qu’il concevait à la place de
la
royauté absolue. Il eût fallu certes une imagination prodigieuse au d
5802
e civilisation. Et même Diderot, même Rousseau, à
la
veille de la Révolution, soupçonnaient-ils que la république qu’ils a
5803
n. Et même Diderot, même Rousseau, à la veille de
la
Révolution, soupçonnaient-ils que la république qu’ils appelaient ser
5804
la veille de la Révolution, soupçonnaient-ils que
la
république qu’ils appelaient serait livrée cent ans plus tard à peine
5805
laient serait livrée cent ans plus tard à peine à
la
folie démocratique, à cette danse de Saint-Guy politique dont rien de
5806
litique dont rien de leur temps ne pouvait offrir
la
moindre préfiguration ? Eh bien ! induisez de cette similitude les po
5807
guration ? Eh bien ! induisez de cette similitude
les
possibilités formidables que nous réserve le siècle à venir, et vous
5808
ude les possibilités formidables que nous réserve
le
siècle à venir, et vous commencerez à comprendre que votre scepticism
5809
à comprendre que votre scepticisme à l’endroit de
la
forme sociale que nous appelons sans la connaître et qui s’élabore dé
5810
ndroit de la forme sociale que nous appelons sans
la
connaître et qui s’élabore déjà secrètement, que ce mépris et ce scep
5811
, sous lequel vous ne tarderez pas à périr. 12.
La
Raison de Spinoza ou de Descartes n’a que de lointains rapports de pa
5812
ommé Rationalisme, produit d’une mésalliance avec
l’
Avarice bourgeoise — et qui sans cesse déroge.
5813
Appendice. Utopie Un os à
la
meute. (Et figurez-vous que j’ai la ferme intention de vous faire rig
5814
pie Un os à la meute. (Et figurez-vous que j’ai
la
ferme intention de vous faire rigoler, si cela peut vous rassurer qua
5815
ela peut vous rassurer quant à ma santé mentale.)
La
question est de savoir si nous serons des hommes de chair et d’esprit
5816
d’esprit, ou des pantins articulés. (Qui tiendra
les
ficelles, peu importe.) Les économistes (mot stupide) et les philosop
5817
ticulés. (Qui tiendra les ficelles, peu importe.)
Les
économistes (mot stupide) et les philosophes13 les mieux informés de
5818
s, peu importe.) Les économistes (mot stupide) et
les
philosophes13 les mieux informés de ce temps s’accordent sur un point
5819
es économistes (mot stupide) et les philosophes13
les
mieux informés de ce temps s’accordent sur un point : le salut de l’E
5820
x informés de ce temps s’accordent sur un point :
le
salut de l’Europe est lié à la naissance d’une nouvelle attitude de l
5821
e ce temps s’accordent sur un point : le salut de
l’
Europe est lié à la naissance d’une nouvelle attitude de l’âme. Ceci r
5822
ent sur un point : le salut de l’Europe est lié à
la
naissance d’une nouvelle attitude de l’âme. Ceci revient à dire que s
5823
est lié à la naissance d’une nouvelle attitude de
l’
âme. Ceci revient à dire que seule une grande vague de l’imagination c
5824
Ceci revient à dire que seule une grande vague de
l’
imagination collective peut désensabler le vieux bateau occidental. Un
5825
ague de l’imagination collective peut désensabler
le
vieux bateau occidental. Un nouvel état d’esprit : voilà bien ce que
5826
ntal. Un nouvel état d’esprit : voilà bien ce que
l’
École empêche même de concevoir Elle cultive ce qu’il y a d’anti-irrat
5827
Elle cultive ce qu’il y a d’anti-irrationnel dans
la
nature de l’homme. Elle punit froidement la spontanéité et l’inventio
5828
ce qu’il y a d’anti-irrationnel dans la nature de
l’
homme. Elle punit froidement la spontanéité et l’invention. Elle dénat
5829
dans la nature de l’homme. Elle punit froidement
la
spontanéité et l’invention. Elle dénature le sens de la liberté. Elle
5830
l’homme. Elle punit froidement la spontanéité et
l’
invention. Elle dénature le sens de la liberté. Elle détruit tout ce q
5831
ment la spontanéité et l’invention. Elle dénature
le
sens de la liberté. Elle détruit tout ce qui permettrait d’échapper à
5832
ntanéité et l’invention. Elle dénature le sens de
la
liberté. Elle détruit tout ce qui permettrait d’échapper à la mécaniq
5833
Elle détruit tout ce qui permettrait d’échapper à
la
mécanique. Bref, elle perpétue ce manque d’imagination dont les consé
5834
Bref, elle perpétue ce manque d’imagination dont
les
conséquences seront matériellement catastrophiques pour peu que cela
5835
peu que cela continue. Qu’on ne s’y trompe pas :
le
sens technique qui tient lieu d’imagination à l’homme moderne n’est p
5836
le sens technique qui tient lieu d’imagination à
l’
homme moderne n’est pas créateur d’êtres spirituellement vivants, ni d
5837
lement vivants, ni d’aucune grandeur supérieure à
la
somme de ses éléments. Il n’engendre pas, il ajuste. Quand nous auron
5838
e pas, il ajuste. Quand nous aurons épuisé toutes
les
combinaisons de vitesse et d’ennui à quoi présentement nous usons le
5839
vitesse et d’ennui à quoi présentement nous usons
le
plus clair de nos forces, — le Poète dira un mot, ou bien fera un act
5840
ntement nous usons le plus clair de nos forces, —
le
Poète dira un mot, ou bien fera un acte, et ces peuples de somnambule
5841
ples de somnambules s’éveilleront du cauchemar où
les
plongent toutes vos drogues : presse, ciné, faux-luxe, suffrage unive
5842
e équipe d’idéalistes pratiques d’en faire sortir
le
beau miracle d’une civilisation aux ordres de l’Esprit. Mais il faudr
5843
le beau miracle d’une civilisation aux ordres de
l’
Esprit. Mais il faudrait que dès maintenant se constituent ces élites,
5844
constituent ces élites, et cela ne se peut que si
les
tenants de l’ordre spirituel retrouvent le courage d’être, malgré les
5845
élites, et cela ne se peut que si les tenants de
l’
ordre spirituel retrouvent le courage d’être, malgré les mots14, des a
5846
ue si les tenants de l’ordre spirituel retrouvent
le
courage d’être, malgré les mots14, des anarchistes et des utopistes.
5847
re spirituel retrouvent le courage d’être, malgré
les
mots14, des anarchistes et des utopistes. J’appelle anarchiste, tout
5848
ut ce qui est violemment et intégralement humain.
L’
anarchie est un degré d’intensité dans la vie, non pas un parti. Tout
5849
humain. L’anarchie est un degré d’intensité dans
la
vie, non pas un parti. Tout extrémiste, de droite comme de gauche, se
5850
de toutes ses forces. Mais c’est un anarchiste de
la
mauvaise espèce, un anarchiste embrigadé. L’anarchiste que j’aime est
5851
e de la mauvaise espèce, un anarchiste embrigadé.
L’
anarchiste que j’aime est simplement un homme libre qui a une foi (ou
5852
e savez pas ce que c’est que libre, ou consacré.)
L’
utopiste, c’est l’inventeur. Les sots vont répétant que c’est un être
5853
c’est que libre, ou consacré.) L’utopiste, c’est
l’
inventeur. Les sots vont répétant que c’est un être qui ignore le réel
5854
bre, ou consacré.) L’utopiste, c’est l’inventeur.
Les
sots vont répétant que c’est un être qui ignore le réel. C’est justem
5855
s sots vont répétant que c’est un être qui ignore
le
réel. C’est justement parce qu’il le connaît mieux qu’eux qu’il y a v
5856
e qui ignore le réel. C’est justement parce qu’il
le
connaît mieux qu’eux qu’il y a vu des fissures et des possibilités no
5857
u réel ne signifie pas s’y soumettre sans combat.
L’
utopiste est celui qui ne se résigne à aucun état de choses. Il est po
5858
ne se résigne à aucun état de choses. Il est pour
le
« mieux » contre le « bien ». Sans lui l’humanité s’avachirait totale
5859
n état de choses. Il est pour le « mieux » contre
le
« bien ». Sans lui l’humanité s’avachirait totalement. Mais il est da
5860
st pour le « mieux » contre le « bien ». Sans lui
l’
humanité s’avachirait totalement. Mais il est dans l’ordre qu’elle beu
5861
umanité s’avachirait totalement. Mais il est dans
l’
ordre qu’elle beugle longuement tout en le suivant. Que faire, diront
5862
st dans l’ordre qu’elle beugle longuement tout en
le
suivant. Que faire, diront les gens de bonne volonté dont mon imagina
5863
longuement tout en le suivant. Que faire, diront
les
gens de bonne volonté dont mon imagination romantique suppose l’exist
5864
e volonté dont mon imagination romantique suppose
l’
existence. Que faire ? Voir et penser juste d’abord. Simplement. Ensui
5865
rd. Simplement. Ensuite, soutenir cette opinion :
les
effets suivront infailliblement. Par exemple, je vous demande une foi
5866
els d’histoire et de géographie bien connus, pour
l’
esprit le plus dangereusement plat qui soit. (Il est plus que plat : i
5867
toire et de géographie bien connus, pour l’esprit
le
plus dangereusement plat qui soit. (Il est plus que plat : il est cre
5868
i, cela finira par créer un courant d’opinion. Et
l’
opinion publique mène le monde, paraît-il. À ce propos : que les journ
5869
un courant d’opinion. Et l’opinion publique mène
le
monde, paraît-il. À ce propos : que les journalistes s’engagent désor
5870
lique mène le monde, paraît-il. À ce propos : que
les
journalistes s’engagent désormais à ne publier plus un seul article d
5871
seul article de fond où ne perce leur mépris pour
l’
instruction publique. Ils peuvent dire ce qu’ils veulent à propos de n
5872
n’importe quoi, comme on sait, et ils auraient là
l’
occasion de racheter bien des choses. Ce n’est rien de moins qu’une ré
5873
dit pour éviter ce malentendu : je ne crois pas à
la
possibilité d’une réforme suffisante. C’est une révolution qu’il faut
5874
C’est une révolution qu’il faut. Alors, supprimer
les
écoles, raser les collèges, renvoyer les instituteurs aux pommes de t
5875
on qu’il faut. Alors, supprimer les écoles, raser
les
collèges, renvoyer les instituteurs aux pommes de terre ? Impossible.
5876
upprimer les écoles, raser les collèges, renvoyer
les
instituteurs aux pommes de terre ? Impossible. Le peuple qui déteste
5877
es instituteurs aux pommes de terre ? Impossible.
Le
peuple qui déteste l’école a pourtant faim d’instruction15, et se cro
5878
mmes de terre ? Impossible. Le peuple qui déteste
l’
école a pourtant faim d’instruction15, et se croirait lésé dans un de
5879
croirait lésé dans un de ses droits fondamentaux.
Le
peuple veut s’instruire et on lui bourre le crâne pour l’en empêcher.
5880
taux. Le peuple veut s’instruire et on lui bourre
le
crâne pour l’en empêcher. Il s’agit de lui faire comprendre que l’éco
5881
e veut s’instruire et on lui bourre le crâne pour
l’
en empêcher. Il s’agit de lui faire comprendre que l’école est le plus
5882
n empêcher. Il s’agit de lui faire comprendre que
l’
école est le plus gros obstacle à sa culture. Et c’est cela, préparer
5883
Il s’agit de lui faire comprendre que l’école est
le
plus gros obstacle à sa culture. Et c’est cela, préparer le terrain.
5884
os obstacle à sa culture. Et c’est cela, préparer
le
terrain. D’autre part, il faut partir de ce qui est. Mais comment ret
5885
rtir de ce qui est. Mais comment retourner contre
l’
ennemi ses propres batteries ? Autrement dit : quel emploi utopique de
5886
tteries ? Autrement dit : quel emploi utopique de
l’
organisation existante peut-on imaginer ? L’école devrait donner à l’e
5887
ue de l’organisation existante peut-on imaginer ?
L’
école devrait donner à l’enfant ce que son entourage ne peut plus lui
5888
tante peut-on imaginer ? L’école devrait donner à
l’
enfant ce que son entourage ne peut plus lui donner : des modèles de p
5889
onner : des modèles de pensée. Un entraînement de
l’
esprit, au lieu d’une somme de connaissances mortes. Une technique spi
5890
ituelle. Et puis, qu’il en fasse ce qu’il voudra.
Les
Orientaux appellent yoga cette culture des facultés physiques, intell
5891
ystiques. Toute leur force vient du yoga. Et tout
le
yoga repose sur la concentration. En vérité, toute force résulte d’un
5892
r force vient du yoga. Et tout le yoga repose sur
la
concentration. En vérité, toute force résulte d’une concentration, da
5893
ncentration, dans quelque domaine que ce soit. Si
l’
Occident comprenait cette vérité élémentaire et en tirait des conclusi
5894
il serait sauvé du désastre, mais il recouvrerait
la
domination du monde16 et non plus en barbare cette fois-ci. Ce qui l’
5895
de16 et non plus en barbare cette fois-ci. Ce qui
l’
empêche de comprendre, ici encore, c’est la peur scolaire des mots. Ce
5896
Ce qui l’empêche de comprendre, ici encore, c’est
la
peur scolaire des mots. Ce terme hindou agace, trouble ou fait sourir
5897
s. Ce terme hindou agace, trouble ou fait sourire
les
étriqués. On croit devoir se défendre : on se moque. On me dit : vous
5898
ez tout de même pas une classe de gamins répétant
la
syllabe sacrée Aûm ou se livrant à des exercices de contrôle de la re
5899
Aûm ou se livrant à des exercices de contrôle de
la
respiration. Il ne s’agit nullement de cela. Nous ne sommes pas aux I
5900
s aux Indes, je vous jure que je m’en doute. Mais
l’
Occidental aussi pratique son yoga à lui : toutes les fois qu’il veut
5901
n minimum de moyens. J’en citerai deux exemples :
la
discipline jésuite et le drill militaire. Le drill correspond remarqu
5902
citerai deux exemples : la discipline jésuite et
le
drill militaire. Le drill correspond remarquablement dans le plan phy
5903
es : la discipline jésuite et le drill militaire.
Le
drill correspond remarquablement dans le plan physique, aux exercices
5904
litaire. Le drill correspond remarquablement dans
le
plan physique, aux exercices élémentaires que l’on exige d’un initié.
5905
le plan physique, aux exercices élémentaires que
l’
on exige d’un initié. Le fameux arrêt de la pensée dont on sait l’impo
5906
xercices élémentaires que l’on exige d’un initié.
Le
fameux arrêt de la pensée dont on sait l’importance primordiale dans
5907
es que l’on exige d’un initié. Le fameux arrêt de
la
pensée dont on sait l’importance primordiale dans le yoga correspond
5908
initié. Le fameux arrêt de la pensée dont on sait
l’
importance primordiale dans le yoga correspond au garde-à-vous ! par q
5909
pensée dont on sait l’importance primordiale dans
le
yoga correspond au garde-à-vous ! par quoi l’on impose au corps une i
5910
ans le yoga correspond au garde-à-vous ! par quoi
l’
on impose au corps une immobilité absolue. L’un et l’autre de ces exer
5911
ue. L’un et l’autre de ces exercices montrent que
le
candidat possède une énergie suffisante pour aller plus loin, — et en
5912
temps constituent des sources d’énergie nouvelle.
Le
parallèle peut être poussé dans les détails. Il s’agit bien d’un gest
5913
rgie nouvelle. Le parallèle peut être poussé dans
les
détails. Il s’agit bien d’un geste identique, exécuté dans deux plans
5914
te identique, exécuté dans deux plans différents.
Le
drill est un yoga corporel, le yoga est un drill de l’esprit. Je sais
5915
plans différents. Le drill est un yoga corporel,
le
yoga est un drill de l’esprit. Je sais que ces deux mots sont bien da
5916
ill est un yoga corporel, le yoga est un drill de
l’
esprit. Je sais que ces deux mots sont bien dangereux et impopulaires.
5917
nt pas séparer une méthode des fins auxquelles on
l’
applique généralement. Ces gens-là diront que je veux militariser l’en
5918
ement. Ces gens-là diront que je veux militariser
l’
enseignement ou transformer les collèges en couvents. Tant pis. Le dri
5919
je veux militariser l’enseignement ou transformer
les
collèges en couvents. Tant pis. Le drill offre un exemple d’éducation
5920
u transformer les collèges en couvents. Tant pis.
Le
drill offre un exemple d’éducation efficace. L’armée de milices suiss
5921
. Le drill offre un exemple d’éducation efficace.
L’
armée de milices suisses fait des soldats en moins de trois mois. Si l
5922
isses fait des soldats en moins de trois mois. Si
l’
école appliquait en les transposant des méthodes de concentration anal
5923
en moins de trois mois. Si l’école appliquait en
les
transposant des méthodes de concentration analogues, même dans la mes
5924
es méthodes de concentration analogues, même dans
la
mesure sans doute faible où la nature des enfants le supporte, on éco
5925
alogues, même dans la mesure sans doute faible où
la
nature des enfants le supporte, on économiserait plusieurs semestres
5926
mesure sans doute faible où la nature des enfants
le
supporte, on économiserait plusieurs semestres de travail. Si chaque
5927
t plusieurs semestres de travail. Si chaque matin
l’
enfant parvenait à mettre sa pensée au garde-à-vous durant quelques in
5928
aucoup de choses qui restent cachées aux agités ;
la
nature par exemple. Je ne demande pas qu’on nous enseigne le goût de
5929
ar exemple. Je ne demande pas qu’on nous enseigne
le
goût de la nature. Mais qu’on nous laisse le temps de la regarder. De
5930
Je ne demande pas qu’on nous enseigne le goût de
la
nature. Mais qu’on nous laisse le temps de la regarder. De faire conn
5931
igne le goût de la nature. Mais qu’on nous laisse
le
temps de la regarder. De faire connaissance. Je ne sais s’il est très
5932
de la nature. Mais qu’on nous laisse le temps de
la
regarder. De faire connaissance. Je ne sais s’il est très exagéré de
5933
er ces facultés atrophiées que devrait s’employer
l’
école. Nous avons vu qu’elle préfère les étouffer. Cependant, je ne cr
5934
s’employer l’école. Nous avons vu qu’elle préfère
les
étouffer. Cependant, je ne crois pas qu’il soit bon que tous progress
5935
crois pas qu’il soit bon que tous progressent de
la
même manière. Dans un système de culture spirituelle, les différences
5936
manière. Dans un système de culture spirituelle,
les
différences s’accuseraient, mais se légitimeraient du même coup ; car
5937
coup ; car sur ce plan elles ne font que traduire
la
diversité des besoins individuels. Méditez un peu ces truismes : On a
5938
. Une minute de concentration intense dégage dans
l’
individu plus d’énergie que des heures d’exercices gémissants. De même
5939
e que des heures d’exercices gémissants. De même,
le
bien supérieur de quelques-uns est plus utile à tous que le bien médi
5940
périeur de quelques-uns est plus utile à tous que
le
bien médiocre de beaucoup. La valeur vaut mieux que le nombre parce q
5941
us utile à tous que le bien médiocre de beaucoup.
La
valeur vaut mieux que le nombre parce qu’elle le contient en puissanc
5942
en médiocre de beaucoup. La valeur vaut mieux que
le
nombre parce qu’elle le contient en puissance. Et c’est pourquoi l’ar
5943
La valeur vaut mieux que le nombre parce qu’elle
le
contient en puissance. Et c’est pourquoi l’aristocratie de l’esprit e
5944
’elle le contient en puissance. Et c’est pourquoi
l’
aristocratie de l’esprit est nécessaire au bien public. Certains propo
5945
en puissance. Et c’est pourquoi l’aristocratie de
l’
esprit est nécessaire au bien public. Certains proposent en rougissant
5946
rougissant de leur hardiesse quelque chose comme
l’
instruction privée : et moi je la voudrais secrète. Vous verrez bien.
5947
lque chose comme l’instruction privée : et moi je
la
voudrais secrète. Vous verrez bien. Cela se fera sans vous. Déjà revi
5948
verrez bien. Cela se fera sans vous. Déjà revient
le
temps des mages : ils comprennent les théories d’Einstein, ils compos
5949
Déjà revient le temps des mages : ils comprennent
les
théories d’Einstein, ils composent de la poésie pure, ils mesurent de
5950
rennent les théories d’Einstein, ils composent de
la
poésie pure, ils mesurent des sensibilités secondes et tout un arc-en
5951
econdes et tout un arc-en-ciel de sentiments dont
les
accords imitent la blancheur éclatante de l’amour… Que dirons-nous ?…
5952
rc-en-ciel de sentiments dont les accords imitent
la
blancheur éclatante de l’amour… Que dirons-nous ?… Par la force des c
5953
ont les accords imitent la blancheur éclatante de
l’
amour… Que dirons-nous ?… Par la force des choses et de l’Esprit, l’ho
5954
heur éclatante de l’amour… Que dirons-nous ?… Par
la
force des choses et de l’Esprit, l’homme sera-t-il sauvé de sa folie
5955
Que dirons-nous ?… Par la force des choses et de
l’
Esprit, l’homme sera-t-il sauvé de sa folie démocratique ? Areuse,
5956
s-nous ?… Par la force des choses et de l’Esprit,
l’
homme sera-t-il sauvé de sa folie démocratique ? Areuse, 26 décembr
5957
Ce travers a été développé jusqu’au ridicule par
la
démocratie. Les journaux, les cercles, les coulisses de parlements et
5958
té développé jusqu’au ridicule par la démocratie.
Les
journaux, les cercles, les coulisses de parlements et autres potinièr
5959
usqu’au ridicule par la démocratie. Les journaux,
les
cercles, les coulisses de parlements et autres potinières ne vivent q
5960
ule par la démocratie. Les journaux, les cercles,
les
coulisses de parlements et autres potinières ne vivent que de semblab
5961
er quelque saveur à ses jugements. C’est pourquoi
l’
on ne peut plus attaquer un fonctionnaire dans son activité publique s
5962
un très brave homme, il fait partie du conseil de
la
paroisse, etc. » — Il semble qu’en attaquant ses idées et leurs réali
5963
es et leurs réalisations ont ait porté atteinte à
la
dignité morale de ce M. Machin, membre du conseil de paroisse. Je pré
5964
onseil de paroisse. Je préciserai donc : je tiens
l’
École pour criminelle. Mais je ne tiens pas tous les instituteurs pour
5965
’École pour criminelle. Mais je ne tiens pas tous
les
instituteurs pour gibier de potence. Ils font beaucoup de mal, mais i
5966
mières victimes du système qu’il propagent et qui
les
fait vivre. La question se complique dès que l’instituteur prend cons
5967
du système qu’il propagent et qui les fait vivre.
La
question se complique dès que l’instituteur prend conscience de la no
5968
les fait vivre. La question se complique dès que
l’
instituteur prend conscience de la nocivité de son action… Ils sont co
5969
mplique dès que l’instituteur prend conscience de
la
nocivité de son action… Ils sont consciencieux, certes, mais sont-ils
5970
ls sont consciencieux, certes, mais sont-ils dans
la
même mesure conscients des fins qu’on assigne à leur activité ? Un pe
5971
assigne à leur activité ? Un peu de rigueur dans
la
pensée empêcherait souvent des catastrophes que beaucoup de rigueur m
5972
igueur morale ne saurait même pas prévoir. NOTE B
La
culture de notre sensibilité nous aiderait à retrouver l’accord avec
5973
re de notre sensibilité nous aiderait à retrouver
l’
accord avec l’ordre naturel. La culture de notre force de pensée nous
5974
nsibilité nous aiderait à retrouver l’accord avec
l’
ordre naturel. La culture de notre force de pensée nous rendrait une l
5975
derait à retrouver l’accord avec l’ordre naturel.
La
culture de notre force de pensée nous rendrait une liberté sans laque
5976
t vains pour instaurer cette nouvelle attitude de
l’
âme. Mais ces méthodes ne prendraient tout leur sens et toute leur eff
5977
un système religieux. Pour quiconque a une foi et
la
conscience de cette foi, il n’est d’enseignement véritable que religi
5978
’est d’enseignement véritable que religieux. Mais
les
questions confessionnelles enrayent et faussent tout. Imaginez une cu
5979
ltères et rester pacifiste. NOTE C Vous parlez de
la
grande vulgarité de mes attaques. Ce qui est vulgaire, au plein sens
5980
Ce qui est vulgaire, au plein sens du mot, c’est
le
genre distingué de la bourgeoisie qui se monte le cou. 13. Économis
5981
au plein sens du mot, c’est le genre distingué de
la
bourgeoisie qui se monte le cou. 13. Économistes et philosophes : c
5982
le genre distingué de la bourgeoisie qui se monte
le
cou. 13. Économistes et philosophes : ces Messieurs n’apparaissent
5983
ssieurs n’apparaissent ici que pour impressionner
le
public. Je n’ai pas besoin de leurs attendus pour juger. 14. Ces deu
5984
. Ces deux mots en effet, terrorisent à tel point
les
bourgeois qu’ils n’en distinguent plus même le sens. Ils les lancent
5985
t les bourgeois qu’ils n’en distinguent plus même
le
sens. Ils les lancent à la tête de tous ceux qui les dérangent, comme
5986
is qu’ils n’en distinguent plus même le sens. Ils
les
lancent à la tête de tous ceux qui les dérangent, comme des pavés, ou
5987
distinguent plus même le sens. Ils les lancent à
la
tête de tous ceux qui les dérangent, comme des pavés, ou plutôt des g
5988
sens. Ils les lancent à la tête de tous ceux qui
les
dérangent, comme des pavés, ou plutôt des grenades, avec la frousse q
5989
nt, comme des pavés, ou plutôt des grenades, avec
la
frousse que ça ne leur éclate dans la main. 15. Cf. ce que dit Tolst
5990
nades, avec la frousse que ça ne leur éclate dans
la
main. 15. Cf. ce que dit Tolstoï sur cette haine et sur ce besoin da
5991
les pédagogiques encore très actuels, du fait que
l’
école n’a pas bougé depuis. 16. On promet des confitures à l’enfant,
5992
pas bougé depuis. 16. On promet des confitures à
l’
enfant, s’il est sage. Moi je m’en moque. Je n’aime que la liberté.
5993
, s’il est sage. Moi je m’en moque. Je n’aime que
la
liberté.
5994
Avant-propos
Le
dire une bonne fois. Il ne faut pas songer à décrire en 50 petites
5995
aut pas songer à décrire en 50 petites pages tous
les
méfaits de l’instruction publique. C’est à peine assez pour indiquer
5996
à décrire en 50 petites pages tous les méfaits de
l’
instruction publique. C’est à peine assez pour indiquer leur ordre de
5997
e grandeur ; à quoi je me bornerai. Il a paru sur
le
sujet de l’instruction publique deux petits livres1 excellents dont j
5998
à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de
l’
instruction publique deux petits livres1 excellents dont je considère
5999
deux petits livres1 excellents dont je considère
les
thèses comme acquises : L’Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, e
6000
nts dont je considère les thèses comme acquises :
L’
Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas l
6001
considère les thèses comme acquises : L’Éloge de
l’
ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas les enfants,
6002
: L’Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, et
Le
Pédagogue n’aime pas les enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre q
6003
e, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas
les
enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre que la science apprise à l
6004
es enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre que
la
science apprise à l’école appauvrit l’homme de tout ce que son ignora
6005
oorda. Le premier montre que la science apprise à
l’
école appauvrit l’homme de tout ce que son ignorance respectait, et ne
6006
montre que la science apprise à l’école appauvrit
l’
homme de tout ce que son ignorance respectait, et ne lui donne à la pl
6007
e que son ignorance respectait, et ne lui donne à
la
place que des laideurs et de la prétention. L’autre, avec l’ironie tr
6008
et ne lui donne à la place que des laideurs et de
la
prétention. L’autre, avec l’ironie tranquille du bon sens bafoué et q
6009
e des laideurs et de la prétention. L’autre, avec
l’
ironie tranquille du bon sens bafoué et qui s’en moque, décrit la stup
6010
ille du bon sens bafoué et qui s’en moque, décrit
la
stupidité de l’enseignement tel qu’il est pratiqué dans nos collèges.
6011
bafoué et qui s’en moque, décrit la stupidité de
l’
enseignement tel qu’il est pratiqué dans nos collèges. Mon dessein est
6012
e réaction de tempérament. Je marque d’autre part
la
nécessité de tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec la démoc
6013
tre part la nécessité de tout cela qui me blesse,
la
liaison fatale avec la démocratie, de tout ce qui moleste ma liberté
6014
e tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec
la
démocratie, de tout ce qui moleste ma liberté et sans doute celle de
6015
cialiste, qui a été établi par coup de force, que
les
libéraux ont admis, conformément à leurs maximes, et toléré malgré le
6016
humeur. Ce régime de punaises jaunâtres aboutit à
l’
instruction publique et grâce à elle prolonge abusivement sa terne exi
6017
elle prolonge abusivement sa terne existence. Je
l’
ai subi ; l’on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment toutes
6018
ge abusivement sa terne existence. Je l’ai subi ;
l’
on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment toutes les haines.
6019
r comment. De pareils souvenirs légitiment toutes
les
haines. Je serai méchant, parce que j’en ai gros sur le cœur. D’aille
6020
nes. Je serai méchant, parce que j’en ai gros sur
le
cœur. D’ailleurs, ce petit écrit ne peut servir à rien. — Alors ? — J
6021
apper : celui de naïveté. Définition du naïf dans
le
monde moderne : individu qui soutient des idées qui ne rapportent rie
6022
r au nom de ma génération, ne m’étant pas livré à
l’
enquête préalable qui seule eût pu, à la rigueur, me donner ce droit b
6023
s livré à l’enquête préalable qui seule eût pu, à
la
rigueur, me donner ce droit bien inutile. Pourtant je sais qu’à droit
6024
e comme à gauche, ils sont plus nombreux qu’on ne
le
pense, ceux qui refusent d’être complices dans cet attentat à l’intég
6025
qui refusent d’être complices dans cet attentat à
l’
intégrité humaine qu’est en fait l’esprit démocratique. Là-dessus, ces
6026
cet attentat à l’intégrité humaine qu’est en fait
l’
esprit démocratique. Là-dessus, ces messieurs se lamentent, la jeuness
6027
ocratique. Là-dessus, ces messieurs se lamentent,
la
jeunesse d’aujourd’hui, etc. Évidemment. Mais il y a les jérémiades e
6028
nesse d’aujourd’hui, etc. Évidemment. Mais il y a
les
jérémiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout
6029
Évidemment. Mais il y a les jérémiades et il y a
les
raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout se confond miraculeuseme
6030
il y a les jérémiades et il y a les raisons. Hors
le
domaine de l’amour, où tout se confond miraculeusement, gémir n’est p
6031
émiades et il y a les raisons. Hors le domaine de
l’
amour, où tout se confond miraculeusement, gémir n’est pas un argument
6032
eusement, gémir n’est pas un argument. Je demande
le
droit de démolir. Et me l’accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle
6033
n argument. Je demande le droit de démolir. Et me
l’
accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle n’est pas de proposer une
6034
de vitupérer ce que je vois, qui est laid. Quand
la
soupe est brûlée, on la renvoie, même si l’on n’est pas capable d’en
6035
vois, qui est laid. Quand la soupe est brûlée, on
la
renvoie, même si l’on n’est pas capable d’en faire soi-même une meill
6036
Quand la soupe est brûlée, on la renvoie, même si
l’
on n’est pas capable d’en faire soi-même une meilleure. Mais j’aperçoi
6037
Mais j’aperçois là-bas, vautré derrière son bock,
le
Citoyen conscient et organisé pour la discussion. Il retrousse ses ma
6038
e son bock, le Citoyen conscient et organisé pour
la
discussion. Il retrousse ses manches. Il s’apprête à cracher sur ce q
6039
Oh ! oh ! oh ! il va parler, de grâce mettez-lui
les
mains sur la bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans le dos
6040
! il va parler, de grâce mettez-lui les mains sur
la
bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans le dos, amenez-lui
6041
bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans
le
dos, amenez-lui le Guguss 2, des bretzels, sa petite amie, au secours
6042
sa choucroute, tapez-lui dans le dos, amenez-lui
le
Guguss 2, des bretzels, sa petite amie, au secours ! Car j’ai encore
6043
ire. Dès qu’une voix s’élève pour mettre en doute
l’
excellence du principe de l’instruction publique, on crie sur tous les
6044
pour mettre en doute l’excellence du principe de
l’
instruction publique, on crie sur tous les bancs : « Alors, vous êtes
6045
ncipe de l’instruction publique, on crie sur tous
les
bancs : « Alors, vous êtes pour un retour à la barbarie ? » Si ce réf
6046
s les bancs : « Alors, vous êtes pour un retour à
la
barbarie ? » Si ce réflexe indique un mépris vraiment exagéré pour la
6047
e réflexe indique un mépris vraiment exagéré pour
la
jugeotte de l’adversaire ou s’il traduit simplement cette mauvaise fo
6048
ue un mépris vraiment exagéré pour la jugeotte de
l’
adversaire ou s’il traduit simplement cette mauvaise foi pas même cons
6049
ise foi pas même consciente, cette lâcheté devant
la
discussion précise de leurs principes par quoi se signalent bien souv
6050
à cent « réponses » de cette sorte. Et je tiens à
les
classer par avance en deux catégories dont je vais régler le compte s
6051
par avance en deux catégories dont je vais régler
le
compte sommairement. Cela n’empêchera personne de me resservir ces ar
6052
A. Réponses du type : on ne peut pas aller contre
l’
époque, vous êtes un pauvre utopiste, etc. Ce sont les positivistes qu
6053
poque, vous êtes un pauvre utopiste, etc. Ce sont
les
positivistes qui parlent ainsi, ceux qui croient aux faits. Je leur r
6054
Je leur réponds : 1° qu’ils ne peuvent me dénier
le
droit de juger ces faits ; 2° qu’ils ne peuvent, en vertu même de leu
6055
euvent, en vertu même de leur scepticisme quant à
la
valeur réformatrice des idées, m’accuser de faire une critique danger
6056
critique dangereuse ; 3° que néanmoins je crois à
l’
efficace de certaines utopies. (Les religions, la découverte de l’Amér
6057
oins je crois à l’efficace de certaines utopies. (
Les
religions, la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’Europ
6058
l’efficace de certaines utopies. (Les religions,
la
découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienn
6059
rtaines utopies. (Les religions, la découverte de
l’
Amérique par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienne, la Russie d’ap
6060
a découverte de l’Amérique par Christophe Colomb,
l’
Europe napoléonienne, la Russie d’après Karl Marx, le vol des frères W
6061
ue par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienne,
la
Russie d’après Karl Marx, le vol des frères Wright, et tout bêtement,
6062
urope napoléonienne, la Russie d’après Karl Marx,
le
vol des frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’
6063
le vol des frères Wright, et tout bêtement, c’est
le
cas de le dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d
6064
frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de
le
dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller con
6065
ight, et tout bêtement, c’est le cas de le dire :
l’
instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre l’époq
6066
dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a
le
droit d’aller contre l’époque, et on le peut efficacement. 2° rira bi
6067
blique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre
l’
époque, et on le peut efficacement. 2° rira bien qui rira le dernier.
6068
: 1° On a le droit d’aller contre l’époque, et on
le
peut efficacement. 2° rira bien qui rira le dernier. B. Réponses du
6069
rétrograde, un infâme réactionnaire, etc. Ce sont
les
partisans d’une démocratie progressiste et tolérante qui se livrent à
6070
lérante qui se livrent à ces excès de langage. Je
les
renvoie en corps au chapitre 5 où je traiterai de cet aspect du probl
6071
e 5 où je traiterai de cet aspect du problème que
l’
on peut appeler la question de droit. Certains, en effet, tirent toute
6072
i de cet aspect du problème que l’on peut appeler
la
question de droit. Certains, en effet, tirent toute leur force dans l
6073
Certains, en effet, tirent toute leur force dans
les
discussions de la tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits
6074
, tirent toute leur force dans les discussions de
la
tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits et les principes.
6075
s de la tranquillité avec laquelle ils brouillent
les
faits et les principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscien
6076
uillité avec laquelle ils brouillent les faits et
les
principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscience libérale,
6077
illent les faits et les principes. Tourmentés par
les
scrupules de leur conscience libérale, ils fuient la rigueur jusque d
6078
scrupules de leur conscience libérale, ils fuient
la
rigueur jusque dans leurs raisonnements. Pour moi qui cherche à démêl
6079
urs raisonnements. Pour moi qui cherche à démêler
la
vérité sans égards aux dérangements, même violents, que cela ne manqu
6080
jamais de provoquer, je me propose de marquer ici
la
distinction classique du fait et du droit ; et c’est pourquoi je cons
6081
droit ; et c’est pourquoi je considérerai d’abord
l’
instruction publique dans ses réalisations actuelles, puis au terme de
6082
d’outrages au bon sens peuvent être légitimés par
le
but final de notre institution-tabou. 1. Je ne puis naturellement
6083
1. Je ne puis naturellement pas mentionner tous
les
ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de l’Institut Rousseau.
6084
t pas mentionner tous les ouvrages scientifiques.
Les
meilleurs sortent de l’Institut Rousseau. 2. Guguss, journal comiqu
6085
ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de
l’
Institut Rousseau. 2. Guguss, journal comique d’une grande vulgarité
6086
l comique d’une grande vulgarité qui jouait alors
le
rôle de nos bandes dessinées.
6087
ssent sur leurs souvenirs de classe. C’est qu’ils
les
confondent avec ceux de leur enfance et les font indûment participer
6088
u’ils les confondent avec ceux de leur enfance et
les
font indûment participer de la même grâce. Voyez Péguy, quand il essa
6089
e leur enfance et les font indûment participer de
la
même grâce. Voyez Péguy, quand il essaie de nous faire croire qu’ « i
6090
s faire croire qu’ « il n’y a rien au-dessus » de
la
tâche des instituteurs : Faire de ces belles analyses logiques, et g
6091
ithmétique où il fallait si soigneusement séparer
les
calculs du raisonnement, par une barre verticale, et où il y avait to
6092
t pour emplir ou pour vider un bassin (et souvent
les
deux), (pour emplir et vider ensemble), (drôle d’occupation), (après
6093
urs des appartements à meubler. Et on multipliait
le
tapissier par le prix du mètre courant. Encore que je prenne les sen
6094
nts à meubler. Et on multipliait le tapissier par
le
prix du mètre courant. Encore que je prenne les sentiments trop au s
6095
r le prix du mètre courant. Encore que je prenne
les
sentiments trop au sérieux pour faire ici du sentiment, je suis sensi
6096
sie. Mais ce qui fait très bien dans un Cahier de
la
quinzaine, ça faisait de mauvaises notes dans nos carnets hebdomadair
6097
journée d’enfant gâtée. Et d’ailleurs, multiplier
le
tapissier par le prix du mètre courant n’est pas une fantaisie pour c
6098
gâtée. Et d’ailleurs, multiplier le tapissier par
le
prix du mètre courant n’est pas une fantaisie pour ce petit être qui
6099
e pour ce petit être qui s’énerve, qui embrouille
les
règles, qui a sommeil, qui a peur de faire faux, parce que les autres
6100
ui a sommeil, qui a peur de faire faux, parce que
les
autres auront fait juste, et qui voudrait bien pleurer, et qui recomm
6101
rdoise où sèchent des traînées de craie grise, où
les
chiffres trop gros s’emmêlent… Et c’est cela l’enfance insouciante ?
6102
les chiffres trop gros s’emmêlent… Et c’est cela
l’
enfance insouciante ? Qu’est-ce qui ressemble plus au souci quotidien
6103
s au souci quotidien des grandes personnes ? Mais
l’
enfance est ailleurs. Je revois ce fond de jardin où l’on trouve des c
6104
ance est ailleurs. Je revois ce fond de jardin où
l’
on trouve des cloportes dans la toile mouillée d’une tente d’Indiens,
6105
fond de jardin où l’on trouve des cloportes dans
la
toile mouillée d’une tente d’Indiens, des petites guerres mystérieuse
6106
, des matins de dimanche sonores et tout propres,
la
cuiller d’huile de foie de morue avant le repas, et le monsieur qui r
6107
ropres, la cuiller d’huile de foie de morue avant
le
repas, et le monsieur qui racontait gravement des choses qu’on ne com
6108
iller d’huile de foie de morue avant le repas, et
le
monsieur qui racontait gravement des choses qu’on ne comprend pas, la
6109
ntait gravement des choses qu’on ne comprend pas,
la
prière du soir pour qu’il fasse beau demain, Michel Strogoff et Rémy
6110
main, Michel Strogoff et Rémy un fils de vaincus,
les
tours de carrousel, les chemins dans la forêt en automne, des jeux, d
6111
Rémy un fils de vaincus, les tours de carrousel,
les
chemins dans la forêt en automne, des jeux, des feuillages, des rêver
6112
vaincus, les tours de carrousel, les chemins dans
la
forêt en automne, des jeux, des feuillages, des rêveries, des recoins
6113
peu divine, baignée d’une très vague angoisse que
l’
on fuyait avec des bonheurs fous dans les bras maternels, ou bien dans
6114
oisse que l’on fuyait avec des bonheurs fous dans
les
bras maternels, ou bien dans ces promenades en tenant la forte main d
6115
maternels, ou bien dans ces promenades en tenant
la
forte main du père qui fait de longs pas réguliers… L’École, dans ce
6116
rte main du père qui fait de longs pas réguliers…
L’
École, dans ce concert de souvenirs, n’est qu’une dissonance douloureu
6117
loureuse. 3 Deux angoisses dominent mon enfance :
les
séances chez le dentiste et l’horaire des leçons. Ce malaise inavouab
6118
angoisses dominent mon enfance : les séances chez
le
dentiste et l’horaire des leçons. Ce malaise inavouable, cette règle
6119
ent mon enfance : les séances chez le dentiste et
l’
horaire des leçons. Ce malaise inavouable, cette règle méchante, ce so
6120
is appris à lire, en cachette avec ma sœur aînée.
L’
année suivante, on me mit à l’école, parce que c’est la loi. La premiè
6121
avec ma sœur aînée. L’année suivante, on me mit à
l’
école, parce que c’est la loi. La première classe fut agréable : j’ali
6122
ée suivante, on me mit à l’école, parce que c’est
la
loi. La première classe fut agréable : j’alignais des bâtons en rêvan
6123
e pensais pas devoir suivre syllabe après syllabe
les
ânonnements des élèves qui déchiffraient les premières phrases exempl
6124
hrases exemplaires. (J’aimais pourtant Zoé lave à
la
fontaine, à cause du nom.) Quand venait mon tour, je savais rarement
6125
om.) Quand venait mon tour, je savais rarement où
l’
on en était. Cela m’attira des reproches acides, et naturellement, la
6126
m’attira des reproches acides, et naturellement,
la
phrase sacrée : « Il faut que tous fassent la même chose ici ! » Dans
6127
nt, la phrase sacrée : « Il faut que tous fassent
la
même chose ici ! » Dans la suite, on se chargea d’illustrer par d’inn
6128
faut que tous fassent la même chose ici ! » Dans
la
suite, on se chargea d’illustrer par d’innombrables exemples cet axio
6129
par d’innombrables exemples cet axiome qui devint
la
formule de mes premières douleurs morales. Après six ans de ce régime
6130
rentrée, ma colère n’en fut que plus malfaisante.
L’
école me rendit au monde, vers l’âge de 18 ans, crispé et méfiant, san
6131
lus malfaisante. L’école me rendit au monde, vers
l’
âge de 18 ans, crispé et méfiant, sans cesse en garde contre moi-même
6132
ait pas différer, profondément hypocrite donc, et
le
cerveau saturé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous les homme
6133
turé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous
les
hommes doivent être égaux en tout. Deux fois deux quatre, c’est stéri
6134
s de citer, je découvris un jour qu’elle contient
la
cause déterminante de notre malaise. Il me fallut un certain temps po
6135
e je me posais la question : est-ce vrai que tous
les
hommes doivent être égaux en tout ? Et la première réponse fut : Il f
6136
réponse fut : Il faut que ce soit vrai, pour que
la
démocratie prospère et étende ses conquêtes. C’était découvrir notre
6137
dignations de nos maîtres quand ils dénonçaient «
la
marque indélébile de l’éducation jésuite ». Nous étions marqués par N
6138
s quand ils dénonçaient « la marque indélébile de
l’
éducation jésuite ». Nous étions marqués par Numa Droz, par l’esprit p
6139
jésuite ». Nous étions marqués par Numa Droz, par
l’
esprit petit-bourgeois, qui est une généralisation de l’avarice, et pa
6140
it petit-bourgeois, qui est une généralisation de
l’
avarice, et par les dogmes démocratiques, qui sont une généralisation
6141
, qui est une généralisation de l’avarice, et par
les
dogmes démocratiques, qui sont une généralisation de la règle de troi
6142
mes démocratiques, qui sont une généralisation de
la
règle de trois, aussi profondément certes qu’un Voltaire le fut par l
6143
e trois, aussi profondément certes qu’un Voltaire
le
fut par les jésuites : du moins ceux-ci lui laissèrent-ils assez de v
6144
ssi profondément certes qu’un Voltaire le fut par
les
jésuites : du moins ceux-ci lui laissèrent-ils assez de verdeur d’esp
6145
pire. Mais on avait brisé en nous ces ressorts de
la
révolte et de la libération d’une personnalité : l’imagination, le se
6146
it brisé en nous ces ressorts de la révolte et de
la
libération d’une personnalité : l’imagination, le sens de l’arbitrair
6147
révolte et de la libération d’une personnalité :
l’
imagination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des d
6148
la libération d’une personnalité : l’imagination,
le
sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains.
6149
on d’une personnalité : l’imagination, le sens de
l’
arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de
6150
alité : l’imagination, le sens de l’arbitraire et
le
sens de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances
6151
magination, le sens de l’arbitraire et le sens de
la
relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances était donc
6152
et le sens de la relativité des décrets humains.
Le
prix de mes souffrances était donc ce conformisme indispensable aux «
6153
principes ». Je n’allai pas tout de suite jusqu’à
les
mettre en doute : mais un jour je compris que ce n’étaient que des pr
6154
les d’une arithmétique élémentaire, ce monde dont
la
Démocratie apparaissait comme l’achèvement idéal et nécessaire — et q
6155
e, ce monde dont la Démocratie apparaissait comme
l’
achèvement idéal et nécessaire — et qui était le seul pour lequel on n
6156
e l’achèvement idéal et nécessaire — et qui était
le
seul pour lequel on nous préparait — c’était un système d’abstraction
6157
tait un système d’abstractions primaires, c’était
le
rêve raisonnablement organisé des esprits moyens, prosaïques et rassi
6158
ns, prosaïques et rassis qui tiennent aujourd’hui
les
charges de l’État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’ac
6159
et rassis qui tiennent aujourd’hui les charges de
l’
État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’accommoder parce
6160
rges de l’État, piliers d’un régime dont ils sont
les
seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ont établi à la mesure exacte de
6161
nt ils sont les seuls à s’accommoder parce qu’ils
l’
ont établi à la mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions plus
6162
seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ont établi à
la
mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions plus aux démons, mai
6163
besoins. Nous ne croyions plus aux démons, mais à
la
Commission scolaire. Nous n’avions plus de « superstitions grossières
6164
stitions grossières » comme celles qui touchent à
l’
action des étoiles par exemple. Mais nous avions acquis le respect des
6165
des étoiles par exemple. Mais nous avions acquis
le
respect des statistiques. Nous savions que les miracles ne trompent q
6166
uis le respect des statistiques. Nous savions que
les
miracles ne trompent que les illettrés, mais qu’il convient de s’incl
6167
es. Nous savions que les miracles ne trompent que
les
illettrés, mais qu’il convient de s’incliner devant les miracles de l
6168
lettrés, mais qu’il convient de s’incliner devant
les
miracles de la science appliquée. On nous faisait voir tout au long d
6169
’il convient de s’incliner devant les miracles de
la
science appliquée. On nous faisait voir tout au long de notre histoir
6170
nous faisait voir tout au long de notre histoire
le
Progrès constant de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et le
6171
au long de notre histoire le Progrès constant de
l’
humanité vers les lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel. No
6172
e histoire le Progrès constant de l’humanité vers
les
lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel. Nous savions qu’un
6173
Progrès constant de l’humanité vers les lumières,
l’
incrédulité et le bien-être matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrie
6174
de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et
le
bien-être matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrier est l’égal d’un
6175
e matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrier est
l’
égal d’un petit Dauphin — et même nous ne pouvions nous empêcher de cr
6176
même nous ne pouvions nous empêcher de croire que
le
petit ouvrier est bien plus malin. Nous savions un tas de choses doul
6177
e choses douloureusement ennuyeuses qui sont dans
les
livres — et nulle part ailleurs. Nous arrivions dans la vie avec des
6178
res — et nulle part ailleurs. Nous arrivions dans
la
vie avec des mentions honorables et une inconcevable gaucherie, c’est
6179
et une honte secrète qui exaspérait ce mépris et
le
rendait agressif. Mais moi, j’avais trop souffert de cette compressio
6180
riellement délivré, en supporter longtemps encore
l’
action. Je n’eus pas plus tôt découvert et nommé cet asservissement de
6181
plus tôt découvert et nommé cet asservissement de
l’
esprit et ces mythes stériles, que je les rendis responsables de ma pe
6182
sement de l’esprit et ces mythes stériles, que je
les
rendis responsables de ma perte de contact avec les réalités les plus
6183
s rendis responsables de ma perte de contact avec
les
réalités les plus élémentaires de la vie. 3. Dans le cas le plus
6184
onsables de ma perte de contact avec les réalités
les
plus élémentaires de la vie. 3. Dans le cas le plus favorable, c’
6185
ontact avec les réalités les plus élémentaires de
la
vie. 3. Dans le cas le plus favorable, c’est un silence, un vide.
6186
ités les plus élémentaires de la vie. 3. Dans
le
cas le plus favorable, c’est un silence, un vide. C’était en dehors d
6187
s plus élémentaires de la vie. 3. Dans le cas
le
plus favorable, c’est un silence, un vide. C’était en dehors de la vi
6188
, c’est un silence, un vide. C’était en dehors de
la
vie.
6189
2. Description du monstre
Le
service militaire me permit de retrouver quelques-unes de ces réalité
6190
Car ces différences sont les premières marques de
la
vie vécue et l’on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. M
6191
ces sont les premières marques de la vie vécue et
l’
on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. Mais c’est en cas
6192
arques de la vie vécue et l’on aime à y découvrir
la
seule fraternité véritable. Mais c’est en caserne aussi que je devais
6193
is c’est en caserne aussi que je devais retrouver
les
instituteurs. Ceux-là n’avaient pas bougé. Et pour cause : ils n’étai
6194
é. Et pour cause : ils n’étaient jamais sortis de
l’
école. Rien ne ressemble plus à un bon élève qu’un instituteur : de l’
6195
l’autre, il n’y a pas de solution de continuité,
la
différence n’était qu’une question d’âge, non d’expérience vécue. Ce
6196
grand nombre de cas, mais pourquoi ai-je envie de
le
dire ? L’instituteur sous l’uniforme peut être défini par son incompr
6197
re de cas, mais pourquoi ai-je envie de le dire ?
L’
instituteur sous l’uniforme peut être défini par son incompréhension m
6198
rquoi ai-je envie de le dire ? L’instituteur sous
l’
uniforme peut être défini par son incompréhension méthodique des homme
6199
éhension méthodique des hommes et son mépris pour
les
paysans. Qu’il soit officier ou troupier, on le reconnaît à une façon
6200
les paysans. Qu’il soit officier ou troupier, on
le
reconnaît à une façon pédante d’être consciencieux, à une façon bless
6201
être supérieur, à une façon livresque d’expliquer
les
choses, à une façon théorique de juger les êtres. Ces distributeurs a
6202
liquer les choses, à une façon théorique de juger
les
êtres. Ces distributeurs automatiques (brevetés par le gouvernement)
6203
res. Ces distributeurs automatiques (brevetés par
le
gouvernement) de la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la
6204
rs automatiques (brevetés par le gouvernement) de
la
manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la petite bière. Ils on
6205
la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de
la
petite bière. Ils ont conscience d’appartenir à une élite responsable
6206
ce ridicule n’échappe pas à ceux qu’ils méprisent
le
plus, et ils auraient souvent l’occasion de s’en douter s’ils étaient
6207
qu’ils méprisent le plus, et ils auraient souvent
l’
occasion de s’en douter s’ils étaient sensibles aux finesses de l’iron
6208
en douter s’ils étaient sensibles aux finesses de
l’
ironie paysanne. Mais je n’en dirai pas plus, de peur de m’échauffer i
6209
pas plus, de peur de m’échauffer inutilement. Si
l’
on me poussait un peu, je crois que je m’oublierais au point d’insinue
6210
crois que je m’oublierais au point d’insinuer que
les
instituteurs galonnés causent autant de tort à l’armée que les instit
6211
es instituteurs galonnés causent autant de tort à
l’
armée que les instituteurs antimilitaristes qui signent des manifestes
6212
urs galonnés causent autant de tort à l’armée que
les
instituteurs antimilitaristes qui signent des manifestes en mauvais f
6213
manifestes en mauvais français — et je ferais de
la
peine à d’excellents garçons. Revenons au civil. J’ai fait allusion a
6214
usion au lieutenant-instituteur qui veut faire de
la
pédagogie avec sa section. L’instituteur-lieutenant qui veut traiter
6215
r qui veut faire de la pédagogie avec sa section.
L’
instituteur-lieutenant qui veut traiter militairement ses élèves témoi
6216
veut traiter militairement ses élèves témoigne de
la
même maladresse professionnelle. J’en connais un qui avait coutume de
6217
de garçons de 10 à 11 ans : « J’ai bien su mater
les
quarante hommes de ma section, je saurai aussi vous mater. » On imagi
6218
aussi vous mater. » On imagine à quoi peut mener
l’
enseignement donné par des êtres qui brouillent à ce point les méthode
6219
ent donné par des êtres qui brouillent à ce point
les
méthodes. Simple remarque, pendant que nous en sommes aux instituteur
6220
en sommes aux instituteurs : ils sortent tous de
la
même classe sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que l’esprit pe
6221
: ils sortent tous de la même classe sociale, de
la
petite bourgeoisie. Est-ce que l’esprit petit-bourgeois qui imprègne
6222
sse sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que
l’
esprit petit-bourgeois qui imprègne l’enseignement primaire constitue
6223
Est-ce que l’esprit petit-bourgeois qui imprègne
l’
enseignement primaire constitue l’apport des instituteurs, ou bien pré
6224
is qui imprègne l’enseignement primaire constitue
l’
apport des instituteurs, ou bien préexiste-t-il dans les principes mêm
6225
ort des instituteurs, ou bien préexiste-t-il dans
les
principes mêmes de l’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme
6226
u bien préexiste-t-il dans les principes mêmes de
l’
École, et attire-t-il les petits bourgeois comme le portrait de Numa D
6227
ns les principes mêmes de l’École, et attire-t-il
les
petits bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait les mouches
6228
’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme
le
portrait de Numa Droz attirait les mouches ? (Le verre en était toujo
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bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait
les
mouches ? (Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni
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le portrait de Numa Droz attirait les mouches ? (
Le
verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni l’envie de dir
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? (Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni
le
droit ni l’envie de dire du mal des petits-bourgeois. Ils sont au moi
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en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni
l’
envie de dire du mal des petits-bourgeois. Ils sont au moins aussi sym
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sympathiques que n’importe quelle autre classe de
la
société. Mais l’esprit petit-bourgeois pris abstraitement et tel qu’i
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n’importe quelle autre classe de la société. Mais
l’
esprit petit-bourgeois pris abstraitement et tel qu’il se manifeste da
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pris abstraitement et tel qu’il se manifeste dans
l’
école primaire est un véritable virus de mesquinerie, et devrait être
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les ». Je reviendrai peut-être sur ce point. Pour
l’
instant je ne veux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après les
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r ce point. Pour l’instant je ne veux que décrire
l’
école telle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur d
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nstant je ne veux que décrire l’école telle qu’on
la
voit. Après les personnes, le décor. La laideur des « collèges » n’es
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ux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après
les
personnes, le décor. La laideur des « collèges » n’est pas accidentel
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l’école telle qu’on la voit. Après les personnes,
le
décor. La laideur des « collèges » n’est pas accidentelle. C’est cell
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lle qu’on la voit. Après les personnes, le décor.
La
laideur des « collèges » n’est pas accidentelle. C’est celle même du
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est pas accidentelle. C’est celle même du régime.
L’
architecture de nos « palais scolaires » symbolise d’une façon frappan
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e ce qu’il y a de schématique et de monotone dans
la
conception démocratique du monde. Entrons, c’est pire encore. Beaucou
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ants ont un frisson de dégoût au moment de passer
la
porte, au son de la cloche : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imp
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de dégoût au moment de passer la porte, au son de
la
cloche : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors
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moment de passer la porte, au son de la cloche :
l’
odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et les habit
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e : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne
les
corridors et les habits des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et
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udron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et
les
habits des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et la poussière dan
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its des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et
la
poussière dans l’air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un re
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mpeste encore mes souvenirs. Et la poussière dans
l’
air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagin
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encore mes souvenirs. Et la poussière dans l’air,
l’
encre sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagination q
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ouvenirs. Et la poussière dans l’air, l’encre sur
les
tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagination que ces initia
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sur les tables — c’était pourtant un refuge pour
l’
imagination que ces initiales, ces signes, ces devises… —, les estampe
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on que ces initiales, ces signes, ces devises… —,
les
estampes piquées, Numa Droz et ses crottes de mouches… Dans ce décor
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s ! Et vous pensez que c’est un grand progrès sur
la
Nature. Quelle peut bien être la vertu éducatrice d’un tel milieu, mo
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rand progrès sur la Nature. Quelle peut bien être
la
vertu éducatrice d’un tel milieu, moral et matériel ? L’école publiqu
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u éducatrice d’un tel milieu, moral et matériel ?
L’
école publique, telle que nous la voyons est semblable à tous ces monu
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al et matériel ? L’école publique, telle que nous
la
voyons est semblable à tous ces monuments « de la mauvaise époque » q
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la voyons est semblable à tous ces monuments « de
la
mauvaise époque » qui sont dans nos villes l’apport du xixe siècle.
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de la mauvaise époque » qui sont dans nos villes
l’
apport du xixe siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à l’utili
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l’apport du xixe siècle. Ils ne parviennent ni à
la
beauté ni à l’utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style
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e siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à
l’
utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style 1880 n’en est p
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à l’utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que
le
style 1880 n’en est pas un : mais l’absence de style est encore un st
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. On dit que le style 1880 n’en est pas un : mais
l’
absence de style est encore un style : c’est même le pire.
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absence de style est encore un style : c’est même
le
pire.